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Date : 20090730

Dossier : IMM-343-09

Référence : 2009 CF 792

Vancouver (Colombie-Britannique), le 30 juillet 2009

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HUGUES

 

ENTRE :

ARSIM SADA

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’un demandeur d’asile du Kosovo. Il a fui au Canada après avoir censément fait l’objet d’actes de persécution au Kosovo.

 

[2]               Le demandeur qui demande l’asile au Canada à titre de réfugié au sens de la Convention a été entendu par l’un des commissaires de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Ce dernier a rendu, le 5 janvier 2009, une décision rejetant la demande en question. C’est cette décision qui fait l’objet d’un contrôle. Au cours de l’audience et des événements l’entourant, le demandeur, qui n’a qu’une capacité limitée à communiquer dans l’une des langues officielles du Canada, soit l’anglais, se représentait lui-même.

 

[3]               Le sort de la demande de contrôle judiciaire repose sur une seule question, soit celle de l’équité procédurale. L'avocat du demandeur a toutefois soulevé d'autres questions mettant en cause le bien-fondé de la décision comme tel. Cela dit, je n’ai pas à commenter ces arguments, puisque la question de l’équité procédurale, ou de son absence, est déterminante. C’est pourquoi il n’est pas nécessaire de se pencher sur des questions telles que la norme de contrôle.

 

[4]               Avant l’audience, le demandeur a reçu une trousse de documents appelés Formulaire d’examen du dossier. Les directives suivantes figurent au bas de l’une des pages des documents :

[traduction]

DIRECTIVES À L’INTENTION DE L’AVOCAT ET DU PLAIGNANT

Veuillez vous assurer de fournir à notre bureau une copie de tous les documents, traduits lorsque c’est nécessaire, au moins 20 jours avant l'audience. Ces documents doivent inclure les pièces d’identité et tous les éléments de preuve qui pourraient appuyer votre demande. Veuillez fournir également les documents traduits liés à votre statut en Allemagne ainsi que les copies traduites de tous les documents MINUK que vous avez.

 

 

[5]               Je présume que l’acronyme MINUK signifie Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo.

 

[6]               Le demandeur n’a pas produit certains de ces documents avant la tenue de l’audience ou au moment de celle-ci, bien qu’il ait été avisé de le faire. Toutefois, à la fin de l’audience, l’échange suivant entre le commissaire et le demandeur a été enregistré à la page 51 de la transcription (p. 53 du dossier du tribunal) : 

[traduction]

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : D’accord, bien, je ne vais pas rendre une décision oralement aujourd'hui. Je tiens à vous remercier, monsieur, d'être venu raconter votre histoire. Vous recevrez une notification écrite au sujet du résultat de l’affaire. Vous devez vous assurer auprès de la Division de la protection des réfugiés que votre adresse est à jour pour que nous puissions vous faire parvenir la décision.

 

Nous vous rendons vos documents originaux et quel que soit le résultat de la décision, je vous souhaite sincèrement le meilleur pour l'avenir. 

 

Cela conclut l’affaire.

 

DEMANDEUR : J’aurais quelque chose à ajouter.

 

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : Oui?

 

DEMANDEUR : Si vous avez besoin du document MINUK, j'ai la possibilité de l’obtenir. Je peux l’apporter sans problème. J’ai ce document, sauf que je ne l’ai pas apporté avec moi aujourd’hui.

 

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : D'accord. Nous vous remercions de cette offre. Si j’en ai besoin, je vous le ferai savoir.

 

--- INSTANCE TERMINÉE

 

 

[7]               Ni le commissaire ni personne d’autre, au nom du commissaire, n’a laissé savoir au demandeur, après cet échange, que ces documents étaient nécessaires. Le commissaire a rendu une décision, en indiquant notamment au paragraphe 21 de cette décision, que les documents étaient [traduction] « importants » et que la Commission avait formulé une [traduction] « demande précise » à cet égard. S’ils étaient importants, la Commission aurait dû faire suite à l’engagement de demander les documents au besoin. En outre, il était erroné de dire dans la décision que les documents avaient été spécifiquement demandés. Aucune demande n’a suivi l’engagement du commissaire envers le demandeur. Voici ce que le commissaire a écrit au paragraphe 21 de la décision : 

 

[traduction]

[21]     Les commissaires saisis de l’affaire ont expliqué au plaignant pourquoi les documents MINUK étaient si importants. Tout d'abord, ces documents établiraient si le plaignant était bien au Kosovo durant la période alléguée. Il est par ailleurs étrange que, lorsqu’il a voyagé à l’intérieur du pays et, plus tard, lorsqu’il a quitté le pays, il n’était pas muni des documents MINUK. Ces documents constituent une source valable et bien connue pour confirmer l’identité d’une personne. Les commissaires saisis de l’affaire se demandent pourquoi il aurait laissé des documents aussi importants au Kosovo. Ils estiment que le plaignant n’a pas été crédible et honnête au sujet de la production de ces documents, surtout que la Commission lui a adressé une demande précise à cet égard. Les commissaires saisis de l’affaire estiment que cette situation soulève d’importantes questions quant à savoir si le plaignant était bien dans le pays pendant la période alléguée. Ces préoccupations sont d’autant exacerbées que la plupart de ses pièces d'identité datent du début des années 2000.

 

 

 

[8]               Le commissaire a peut-être oublié qu’il s’était engagé à demander les documents MINUK [traduction] « si j’en ai besoin ». Il a écrit maintes fois dans la décision que les documents étaient [traduction] « importants », par conséquent, l’engagement de demander les documents ne peut être passé sous silence ou être considéré comme sans importance. L’affaire doit être renvoyée à un autre commissaire afin qu’il puisse procéder à une nouvelle audition et statuer à nouveau sur l’affaire.

 

[9]               Aucune question n’est certifiée. Il n’est pas adjugé de dépens.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

1.         que la demande est accueillie;

2.         que l’affaire est renvoyée à un autre commissaire afin qu’il puisse procéder à une nouvelle audition et statuer à nouveau sur l’affaire;

3.         qu’aucune question n’est certifiée;

4.         qu’il n’est pas adjugé de dépens.

 

 

« Roger T. Hughes »

Juge

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-343-09

 

INTITULÉ :                                      ARSIM SADA c. MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              VANCOUVER (C.-B.)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 30 JUILLET 2009

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE HUGHES

  ET JUGEMENT

 

DATE DES MOTIFS :                     LE 30 JUILLET 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

M. Craig Costantino

 

POUR LE DEMANDEUR

M. Edward Burnet

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Elgin, Cannon & Associates

Vancouver (C.-B.)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, C.R.

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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