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Cour fédérale

 

 

 

 

 

 

 

 

Federal Court


Date : 20090730

Dossier : IMM-4911-08

Référence : 2009 CF 788

Ottawa (Ontario), le 30 juillet 2009

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

MOJTABA KARAMI

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA

CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande fondée sur le par. 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) en vue d’obtenir le contrôle judiciaire de la décision datée du 29 octobre 2008 (la décision) par laquelle une agente de Citoyenneté et Immigration Canada (l’agente) a refusé la demande du demandeur au motif qu’il a produit de fausses déclarations au sujet de sa preuve d’emploi ou a fait preuve de réticence à ce sujet, le rendant interdit de territoire suivant les alinéas 40(1)a) et 40(2)a) de la Loi.

 

 

 

LE CONTEXTE

 

[2]               Le demandeur est né le 11 août 1980 à Kazeroom, en Iran. Il habite présentement à Téhéran, n’est pas marié et n’a pas d’enfant.

 

[3]               La demandeur affirme qu’il travaille actuellement comme soudeur à Téhéran pour la société Yamgan, un entrepreneur important. Il a travaillé pour la société Yamgan de 2001 à 2005, et ensuite de 2006 à aujourd’hui.

 

[4]               En 2004, le demandeur travaillait pour la société Yamgan à Kerman. Le bureau de poste à Kerman a embauché la société Yamgan pour agrandir ses bureaux. Le demandeur allègue qu’il n’a jamais travaillé, et n’a jamais prétendu travailler pour le bureau de poste de l’Iran. Au moment des faits, il était employé de la société Yamgan.

 

[5]               Saskatoon Metal Manufacturing a fait passer une entrevue au demandeur et lui a offert un emploi permanent à titre de soudeur à Saskatoon, au Canada. Le demandeur a présenté une demande à titre de travailleur qualifié dans le cadre du Programme Candidats immigrants pour la Saskatchewan et a été accepté.

 

[6]               Le demandeur a alors fait une demande d’autorisation d’emploi à l’ambassade du Canada à Téhéran en vue de venir au Canada pour travailler pour Saskatoon Metal Manufacturing à Saskatoon. Le 29 octobre 2008, le demandeur a été avisé qu’il n’avait pas été autorisé à entrer au Canada au motif qu’il avait produit de fausses déclarations au sujet de sa preuve d’emploi ou avait fait preuve de réticence à ce sujet.

 

[7]               Le demandeur fait valoir que, après avoir procédé à une enquête approfondie, il a découvert qu’au moment où l’agente confirmait son emploi pour la période où il travaillait à Kerman, un représentant de l’ambassade du Canada en Iran avait en fait communiqué avec le bureau de poste afin de vérifier son emploi. Le demandeur n’était pas un employé du bureau de poste, mais bien de la société Yamgan, laquelle avait obtenu un contrat de travail avec le bureau de poste. Le demandeur prétend qu’on ne lui a jamais donné la chance de fournir des renseignements à ce sujet et que, par conséquent, sa situation d’emploi n’a pas été pleinement appréciée.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

 

[8]               L’agente a conclu que le demandeur n’avait pas droit à un visa au Canada.

 

[9]               L’agente a cité l’alinéa 40(1)a) de la Loi affirmant qu’emporte interdiction de territoire pour fausses déclarations le fait d’avoir directement ou indirectement fait une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente Loi. L’agente a également signalé l’alinéa 40(2)a) de la Loi, lequel précise que l’interdiction de territoire court pour les deux ans suivant la décision la constatant.

 

[10]           L’agente a fait remarquer que le 1er septembre 2008, le demandeur a fait une fausse déclaration concernant sa preuve d’emploi à l’ambassade du Canada à Téhéran. L’agente en est arrivée à cette conclusion à la suite de vérifications effectuées relativement à la demande du demandeur. L’agente a également affirmé qu’elle a donné la chance au demandeur de fournir des renseignements à ce sujet. Elle a conclu que les fausses déclarations concernant son emploi ou la réticence dont il a fait preuve à ce sujet ont entraîné, ou auraient pu entraîner, des erreurs dans l’application de la Loi, puisque le demandeur aurait été considéré comme ayant des liens avec la région, alors qu’il n’en avait pas.

 

[11]           L’agente a conclu que le demandeur était interdit de territoire au Canada pour une période de deux ans à compter du 29 octobre 2008, date à laquelle il a reçu la lettre de refus.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[12]           Le demandeur soulève les questions suivantes dans le cadre de la présente demande :

a.                   L’agente a‑t‑elle confirmé l’historique d’emploi du demandeur sans communiquer avec le personnel compétent, ou a‑t‑elle fondé sa décision sur des renseignements qui risquaient d’être erronés?

b.                   L’agente a‑t‑elle pris sa décision sans permettre au demandeur d’expliquer toute contradiction apparente?

c.                   L’agente a‑t‑elle pris une décision manifestement déraisonnable en accusant le demandeur d’avoir produit de fausses déclarations et en lui interdisant d’entrer au Canada pour une période de deux ans?

d.                   La décision est‑elle fondée sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire?

 

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

 

[13]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent en l’espèce :

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

 

 

40. (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

 

 

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

 

b) être ou avoir été parrainé par un répondant dont il a été statué qu’il est interdit de territoire pour fausses déclarations;

 

 

c) l’annulation en dernier ressort de la décision ayant accueilli la demande d’asile;

 

 

 

d) la perte de la citoyenneté au titre de l’alinéa 10(1)a) de la Loi sur la citoyenneté dans le cas visé au paragraphe 10(2) de cette loi.

 

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent à la demande d’autorisation :

 

a) l’interdiction de territoire court pour les deux ans suivant la décision la constatant en dernier ressort, si le résident permanent ou l’étranger n’est pas au pays, ou suivant l’exécution de la mesure de renvoi;

 

 

 

 

 

b) l’alinéa (1)b) ne s’applique que si le ministre est convaincu que les faits en cause justifient l’interdiction.

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

40. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

 

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

 

 

 

(b) for being or having been sponsored by a person who is determined to be inadmissible for misrepresentation;

 

 

 

(c) on a final determination to vacate a decision to allow the claim for refugee protection by the permanent resident or the foreign national; or

 

(d) on ceasing to be a citizen under paragraph 10(1)(a) of the Citizenship Act, in the circumstances set out in subsection 10(2) of that Act.

 

(2) The following provisions govern subsection (1):

 

 

(a) the permanent resident or the foreign national continues to be inadmissible for misrepresentation for a period of two years following, in the case of a determination outside Canada, a final determination of inadmissibility under subsection (1) or, in the case of a determination in Canada, the date the removal order is enforced; and

 

(b) paragraph (1)(b) does not apply unless the Minister is satisfied that the facts of the case justify the inadmissibility.

 

 

LA NORME DE CONTRÔLE

 

[14]           La norme de contrôle applicable lorsqu’il convient de déterminer si un agent a fait une erreur susceptible de contrôle en concluant qu’un demandeur a fait des fausses déclarations sur des faits importants suivant l’alinéa 40(1)a) de la Loi est celle de la décision raisonnable : Walia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2008 CF 486, paragraphe 6 (C.F.1re inst.); et Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick 2008 CSC 9 (Dunsmuir), paragraphe 47.

 

[15]           Dans l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada a reconnu que, bien que la norme de la décision raisonnable simpliciter et celle de la décision manifestement déraisonnable se distinguent du point de vue théorique, « les difficultés analytiques soulevées par l’application des différentes normes réduisent à néant toute utilité conceptuelle découlant de la plus grande souplesse propre à l’existence de normes de contrôle multiples » : (Dunsmuir, paragraphe 44). Par conséquent, la Cour suprême du Canada a conclu qu’il y avait lieu de fondre les deux normes de « raisonnabilité » en une seule.

 

[16]           Dans l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada a également conclu qu’il n’est pas toujours nécessaire de se livrer à l’analyse relative à la norme de contrôle. Lorsque la norme de contrôle applicable à la question particulière dont la cour est saisie est bien établie par la jurisprudence, la cour de révision peut adopter cette norme de contrôle. Ce n’est que lorsque cette démarche se révèle infructueuse que la cour de révision entreprend un examen des quatre éléments faisant partie de l’analyse relative à la norme de contrôle.

 

[17]           Par conséquent, à la lumière de l’arrêt Dunsmuir de la Cour suprême du Canada et de la jurisprudence de la Cour, je conclus que la norme de contrôle applicable aux questions en l’espèce est celle de la décision raisonnable, à l’exception des questions relatives à l’équité procédurale. Lorsqu’une cour de révision examine une décision en fonction de cette norme, le caractère raisonnable tient « à la justification de la décision, à la transparence et l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : Dunsmuir, paragraphe 47. Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si la décision était déraisonnable du fait qu’elle n’appartenait pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

[18]           Le demandeur a également soulevé une question relative à l’équité procédurale qui appelle l’application de la norme de la décision correcte : Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1.

 

L’ARGUMENTATION

            L’agente n’a pas communiqué avec le personnel compétent

 

[19]           Le demandeur prétend que l’agente lui a dit, au sujet de son emploi pour la société Yamgan, que [traduction] « plusieurs employés de longue date ont affirmé qu’il ne travaillait pas là ». Le demandeur affirme que cela est faux. Maryam Gholaminejas, secrétaire du bureau central de la société Yamgan, a déclaré dans son affidavit que l’ambassade du Canada avait communiqué avec elle. Madame Gholaminejas l’avait informé qu’elle ne connaissait pas le demandeur; toutefois, elle ne disposait d’aucun renseignement détaillé au sujet de sa description de travail, puisqu’elle n’avait aucun contact direct avec les employés qui travaillaient à l’extérieur du bureau central. Le demandeur souligne dans son affidavit qu’il se présentait au bureau central seulement une ou deux fois par année, lorsqu’il devait rencontrer le directeur exécutif ou le directeur des services financiers.

 

[20]           De plus, le demandeur prétend que les conclusions de l’agente sont également contredites par les renseignements figurant dans l’affidavit de M. Elahi, chargé de projets pour la société Yamgan relativement au projet du bureau de poste. Monsieur Elahi allègue qu’il a affirmé, lors de sa conversation avec un représentant de l’ambassade du Canada, ne connaître aucun des travailleurs sur le projet et ne pas avoir accès à une liste des travailleurs. L’agente a fait les commentaires suivants : [traduction] « J’ai vérifié auprès du chargé de projets responsable de ce projet, qui a affirmé que les renseignements sur ce contrat n’étaient pas exacts – qu’il ne connaissait pas l’intéressé. Il a dit que le projet n’était pas assez gros pour qu’un groupe de soudeurs soit engagé, il a nommé la personne qui avait fait la soudure. » Le demandeur affirme que ces commentaires contredisent directement les déclarations formulées par M. Elahi dans son affidavit, qu’il peut être inféré de la transcription de l’entrevue que l’agente a considéré ce renseignement important et que cette fausseté est donc très importante au regard de la décision.

 

[21]           Le demandeur souligne qu’Ahmad Ahmedyar Lasboo Mahaleh, superviseur pour la société Yamgan, a déclaré dans son affidavit qu’il connaissait bien le demandeur et qu’il travaillait pour la société Yamgan depuis 2001.

 

[22]           Le demandeur affirme que l’agente s’est appuyée sur les renseignements fournis par le personnel de l’ambassade du Canada en Iran. Elle n’aurait pas pu communiquer directement avec les employés elle‑même, car elle ne parle pas leur langue. Le demandeur allègue que l’agente a commis de graves erreurs en s’appuyant sur des faits importants. Le fait que le demandeur n’a pas eu la chance de s’expliquer au regard des conclusions de l’agente a fait en sorte que son évaluation était basée sur de faux renseignements. Ainsi, le demandeur a été accusé de fausses déclarations et l’agente a agi d’une manière arbitraire. Son refus d’entendre le demandeur a donné lieu à une décision déraisonnable.

 

L’agente n’a pas permis au demandeur d’expliquer les contradictions

 

[23]           Le demandeur soutient qu’on lui avait dit que l’ambassade du Canada avait communiqué avec le bureau de poste à Kerman, en Iran, pour confirmer son emploi et que le bureau de poste avait dit qu’il ne possédait aucun dossier au nom du demandeur. Le demandeur affirme que lorsqu’il a tenté d’expliquer à l’agente que la société pour laquelle il travaillait avait été engagée par le bureau de poste pour agrandir ses bureaux, il a été interrompu et n’a pas eu l’autorisation de poursuivre son explication.

 

[24]           Le demandeur affirme que les personnes avec qui l’ambassade a communiqué afin de confirmer son historique d’emploi ont prétendu ne pas le connaître. Il a tenté d’expliquer à l’agente la cause possible du malentendu, mais celle­‑ci s’est levée et a quitté l’entrevue. Le demandeur affirme que la jurisprudence en matière d’expérience de travail établit clairement qu’un demandeur doit être informé des questions importantes pour pouvoir y répondre. De plus, lorsqu’un agent évalue l’expérience et la profession, les éléments principaux de son évaluation doivent être clairement exposés au demandeur, et ce dernier doit pouvoir les remettre en question : Arshi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2003 CFPI 323.

 

[25]           Le demandeur affirme qu’on ne lui a pas donné une chance raisonnable d’expliquer les contradictions sur lesquelles l’agente a fondé sa décision. Par conséquent, on peut raisonnablement présumer que si le demandeur avait pu expliquer qu’il n’avait jamais travaillé pour le bureau de poste, la question aurait été tranchée aisément.

 

[26]           Le demandeur souligne que l’agente a affirmé que les vérifications des documents étayant sa [traduction] « preuve d’emploi pour Yamgan » et son « certificat de formation en soudure » ne permettent pas d’obtenir des résultats concluants. On avait dit au demandeur d’apporter l’original de ces documents à l’entrevue, ce qu’il a fait, mais on ne lui a jamais demandé de les présenter, et l’agente ne lui a jamais rien mentionné au sujet de ces documents durant l’entrevue. Il n’existe également aucun compte rendu attestant une quelconque discussion au sujet de ces documents.

 

[27]           L’agente a ensuite accusé le demandeur d’avoir produit de fausses déclarations au sujet de ces documents; accusation qui entraîne la conséquence la plus grave, soit l’interdiction de territoire au Canada pendant deux ans. Le demandeur affirme qu’en arrivant à une telle conclusion sans même demander à voir les documents en question, l’agente a commis une violation flagrante d’équité procédurale et de justice naturelle.

L’agente a rendu une décision manifestement déraisonnable

 

[28]           Le demandeur souligne que l’agente s’est largement fondée sur son entrevue avec lui pour rendre sa décision. Par conséquent, il était impératif d’établir une procédure équitable pour permettre au demandeur de fournir des renseignements à l’entrevue. Le demandeur cite la décision Mehta c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2003 CF 1073 (Mehta), paragraphe 9 :

9     Il ressort clairement de la lettre de refus que la conversation téléphonique que l’agente des visas avait eue avec le péon était l’un des motifs sur lesquels sa décision était fondée. L’agente n’a pas informé le demandeur du contenu de cette conversation téléphonique et son omission de le faire, selon la jurisprudence précédemment mentionnée, constitue une violation de l’équité procédurale. L’agente aurait peut-être tiré la même conclusion de toute façon, mais il n’est pas évident ou certain que tel était [sic] le cas. Ainsi, on ne peut pas dire qu’il s’agit de l’une de ces affaires rares dans lesquelles la violation n’est pas déterminante. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie. Les avocats n’ont pas proposé une question aux fins de la certification. La présente affaire ne soulève aucune question grave de portée générale.

 

 

[29]           Le demandeur soutient qu’il est bien établi en droit que lorsqu’une décision est fondée principalement sur des éléments de preuve extrinsèques, le demandeur doit avoir l’occasion de répondre à ces éléments. En ne donnant pas au demandeur l’occasion de répondre en l’espèce, l’agente a fondé sa décision sur des informations inexactes, et sa décision est donc erronée. Voir : Sorkhabi c. Canada (Secrétaire d’État), [1994] A.C.F. no 1976 (C.F. 1re inst.); John c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1997] A.C.F. no 52 (C.F. 1re inst.); et Chow c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 996.

 

[30]           Le demandeur affirme que la Cour devrait examiner et admettre en preuve les affidavits de M. Elahi, Mme Maryam Gholaminejas et M. Ahmad Ahmedyar Lasboo Mahaleh dans le dossier du demandeur, puisque c’est le seul moyen pour lui de démontrer à la Cour qu’il y a eu violation de l’équité procédurale et de la justice naturelle. Le demandeur souligne que l’agente a rendu sa décision en se fondant sur des éléments de preuve extrinsèques sans lui donner l’occasion de répondre d’une manière convenable. Par conséquent, la décision est fondée sur une conclusion de fait erronée tirée d’une manière abusive et arbitraire.

 

Le défendeur

            Question préjudicielle

 

[31]           Le défendeur fait valoir que tout au long de son mémoire, le demandeur renvoie aux notes du STIDI comme s’il s’agissait d’une transcription de l’entrevue. Le défendeur précise que le STIDI est un système électronique permettant de rassembler et de mettre à jour les renseignements obtenus des demandeurs et de prendre des notes sur l’état d’une demande en cours. Les notes ne sont pas une transcription réelle de l’entrevue.

 

Première question

 

[32]           Le défendeur soutient que des efforts importants ont été déployés, que l’ambassade a communiqué avec le personnel compétent concernant la demande du demandeur et qu’aucune des vérifications effectuées ne corroborait l’historique d’emploi du demandeur tel qu’il était indiqué dans sa demande.

 

[33]           Le défendeur fait valoir que les personnes avec qui l’ambassade a communiqué à des fins de vérification n’étaient pas des « péons », comme c’était le cas dans Mehta, paragraphe 5. En fait, de multiples vérifications ont été effectuées relativement à l’emploi du demandeur, notamment auprès des employés de longue date de la société Yamgan.

 

[34]           Le défendeur insiste sur le fait que l’agente était disposée à accepter les renseignements fournis par le demandeur. Le certificat de formation du demandeur attestant qu’il a étudié en soudure entre juin et décembre 2006 à Jagrood, en Iran, a initialement été remis en cause. Toutefois, les vérifications effectuées avant l’entrevue du demandeur ont confirmé l’authenticité du certificat de formation.

 

[35]           Le défendeur souligne que l’ambassade a communiqué avec deux employés de longue date de la société Yamgan pour vérifier l’emploi du demandeur. Les employés ont fourni respectivement une description physique du demandeur pour confirmer son identité et ont affirmé qu’il ne travaillait pas pour la société Yamgan. En fait, les employés ont tous deux affirmé spontanément que le demandeur était le neveu du dirigeant de la société.

 

[36]           S’agissant du contrat conclu entre la société Yamgan et le bureau de poste de Kerman relativement au projet de construction, des vérifications supplémentaires ont été effectuées auprès du chargé de projets et de la personne qui était responsable du groupe de travail durant trois ans. Ni l’un ni l’autre ne connaissait le demandeur ou pouvait confirmer qu’il travaillait sur le projet. De plus, le responsable du groupe de travail a fourni des détails concernant les paramètres du projet, y compris les différents électrodes utilisés. Il a affirmé que le projet nécessitait principalement du ciment et non du métal et qu’il n’était pas assez gros pour qu’un groupe de soudeurs soit engagé.  Le responsable du groupe de travail a également fourni le nom du soudeur qui travaillait sur le projet.

 

[37]           Le défendeur conclut sur cette question en affirmant que l’agente a manifestement compris que le demandeur prétendait être lié par un contrat relativement au projet de construction et n’était pas un employé du bureau de poste de Kerman.

 

Deuxième et troisième questions

 

[38]           Le défendeur soutient que l’objectif de l’alinéa 40(1)a) de la Loi est de veiller à ce que les demandeurs fournissent des renseignements complets, fidèles et véridiques en tout point lorsqu’ils présentent une demande d’entrée au Canada : Bodine c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2008 CF 848, paragraphe 44.

 

[39]           Le défendeur souligne que pour conclure à l’interdiction de territoire en application de l’alinéa 40(1)a) de la Loi, deux facteurs doivent être réunis : (1) le demandeur doit avoir fait de fausses déclarations; et (2) ces fausses déclarations doivent porter sur un fait important et entraîner ou risquer d’entraîner une erreur dans l’application de la Loi. Les renseignements deviennent importants lorsqu’ils ont une incidence sur le processus amorcé ou sur la décision finale : Bellido c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2005 CF 452 (Bellido), paragraphe 27; et Koo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2008 CF 931 (Koo), paragraphe 19.

 

[40]           Le défendeur soutient que l’agente ne doit examiner l’alinéa 40(1)a) de la Loi que si la réfutation des vérifications est crédible et porte sur un fait important de la demande. L’agente a informé le demandeur des contradictions et lui a donné l’occasion de s’expliquer.

 

[41]           Le défendeur affirme qu’il est bien établi en droit que l’agent n’est pas tenu d’informer le demandeur des préoccupations concernant sa demande, ou de lui donner l’occasion de répondre avant de conclure son évaluation, sauf s’il s’appuie sur un élément de preuve extrinsèque pour en arriver à sa décision. Dans un tel cas, il est tenu de donner au demandeur l’occasion de répondre à l’élément de preuve extrinsèque. Voir : Mehta, paragraphes 7-8; et Bellido, paragraphe 36.

 

[42]           Le défendeur signale qu’il incombait au demandeur de fournir à l’agente tous les renseignements et les documents pertinents lui permettant de démontrer qu’il répond aux exigences de la Loi. Afin de vérifier l’expérience de travail du demandeur, l’ambassade du Canada a communiqué avec des employés de la société pour laquelle il prétendait travailler et avec des chargés de projets qui devaient connaître les projets sur lesquels il prétendait travailler. Aucune de ces personnes n’a confirmé les renseignements fournis par le demandeur et, en fait, bon nombre d’entre elles ont fourni des éléments de preuve qui réfutent directement ces renseignements. Voir : Tran c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, [2006] C.F. 1377, paragraphes 4 et 36.

 

[43]           Le défendeur fait remarquer que, durant l’entrevue, l’agente a expliqué au demandeur les vérifications qui avaient été effectuées. Elle lui a expliqué avec qui l’ambassade avait communiqué et les renseignements détaillés que ces personnes avaient fournis pour réfuter ses renseignements. L’agente a clairement indiqué au demandeur les questions que les vérifications avaient soulevées. En outre, elle a invité le demandeur à s’expliquer à plusieurs reprises. À part indiquer qu’il s’agissait d’une erreur, le demandeur n’a fourni aucune explication.

 

[44]           Le défendeur souligne que les notes de l’entrevue inscrites dans le STIDI démontrent que l’agente a donné au demandeur plusieurs occasions de répondre aux éléments de preuve obtenus lors des vérifications. Les passages pertinents des notes sont les suivants :

[traduction]

·                          « J’ai demandé à l’intéressé s’il pouvait expliquer pourquoi plusieurs employés de longue date auraient dit qu’il ne travaillait pas là »;

·                          « J’ai demandé une explication à l’intéressé »;

·                          « J’ai également donné à l’intéressé la chance de fournir des renseignements à ce sujet ».

 

 

[45]           Le défendeur affirme que l’agente a examiné les contrats de travail et les autres documents que le demandeur avait présentés. Les notes qu’elle a prises durant l’entrevue sont rédigées comme suit :

[traduction]

·                          « J’ai expliqué à l’intéressé que nous avions vérifié les divers documents de travail et autres documents à l’appui »;

·                          « J’ai expliqué à l’intéressé que nous avions également vérifié les renseignements concernant les contrats de travail qu’il a présentés comme preuve d’emploi »;

·                          « J’ai interrogé l’intéressé au sujet des détails d’un autre contrat »;

·                          « L’intéressé a fourni de faux documents de travail ».

 

[46]           Le défendeur affirme que l’agente a également examiné les contradictions dans les documents présentés à l’appui de la demande du demandeur. Elle a souligné que le certificat attestant qu’il a réussi sa formation en soudure a été délivré en décembre 2006 et, selon son expérience, elle ne croyait pas qu’il aurait pu être engagé comme soudeur principal de novembre 2003 à novembre 2005 sans formation.

 

[47]           Le défendeur affirme également que l’agente a noté que le demandeur a terminé un cours de formation en lecture de cartes et une évaluation de ses compétences professionnelles le 17 novembre 2007, qui a nécessité 180 heures de formation. Cependant, le demandeur a terminé ce cours au même moment où il prétendait travailler comme soudeur pour la société Yamgan.

 

[48]           Le défendeur fait remarquer que les renseignements que le demandeur a fournis durant son entrevue concernant la période pendant laquelle il a travaillé pour la société Yamgan ne correspondaient pas aux renseignements figurant dans sa demande. Le demandeur a affirmé durant l’entrevue qu’il n’a pas travaillé pendant la dernière année et demie, ce qui contredit les renseignements figurant dans sa demande concernant son emploi, selon lesquels il était employé par la société Yamgan de décembre 2006 jusqu’au moment de l’entrevue.

 

[49]           Le défendeur prétend que les fausses déclarations du demandeur concernant son emploi portent sans aucun doute sur un fait important de sa demande d’autorisation d’emploi et nuiraient à la décision finale de l’agente. Cela est particulièrement vrai puisqu’elles risquent d’entraîner une erreur dans l’application de la Loi. Ces fausses déclarations auraient amené l’agente à conclure que le demandeur a une expérience de travail qu’il n’a pas en réalité.

 

[50]           Le défendeur souligne que, bien que l’agent soit obligé d’examiner la totalité des renseignements dont il dispose, il est évident que l’agente en l’espèce a pondéré et apprécié tous les renseignements dont elle disposait lorsqu’elle a conclu que le demandeur avait produit de fausses déclarations au sujet de son expérience de travail et que cela a entraîné, ou risquait d’entraîner, une erreur dans l’application de la Loi. L’agente disposait des renseignements que le demandeur avait fournis dans sa demande et ses documents à l’appui, des renseignements recueillis à partir des vérifications et des entrevues avec le demandeur durant lesquelles il avait eu l’occasion d’expliquer les renseignements contradictoires. L’agente n’a négligé ou ignoré aucun renseignement.

 

[51]           Le défendeur souligne que durant l’entrevue, l’agente a donné au demandeur de nombreuses occasions d’expliquer les contradictions dans les renseignements dont elle disposait, mais il ne l’a jamais fait. Par conséquent, elle a eu raison de conclure que le demandeur avait produit de fausses déclarations au sujet de son expérience de travail et que ces fausses déclarations portaient sur un fait important à sa demande d’autorisation d’emploi et risquaient d’entraîner une erreur dans l’application de la Loi.

 

[52]           L’agente a estimé que le demandeur n’était pas crédible et a déterminé qu’il avait fait de fausses déclarations au sujet de son expérience de travail et de ses titres de compétences. Cette conclusion était à juste titre étayée par la preuve. L’agente n’a pas ignoré d’élément de preuve. Par conséquent, le défendeur propose que la Cour devrait refuser de modifier l’évaluation de la crédibilité et de la fiabilité du demandeur. Voir : Nsombo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2004 CF 505, paragraphe 12.

 

[53]           Le défendeur conclut en soutenant que le demandeur n’a pas établi que les conclusions tirées par l’agente étaient abusives ou arbitraires ou déraisonnables au point d’annuler la décision. Le défendeur affirme que la décision de l’agente était raisonnable et devrait être confirmée.

 

L’ANALYSE

 

[54]           Les procédures de vérification qui ont été menées afin de déterminer l’exactitude des documents de travail du demandeur et des autres dossiers sont au cœur de la présente décision. Finalement, après avoir établi les contradictions entre les documents de travail présentés par le demandeur et les renseignements recueillis à partir du processus de vérification, l’agente a conclu que le demandeur avait fourni de faux documents de travail.

 

[55]           L’agente affirme qu’elle a donné au demandeur l’occasion d’expliquer les contradictions, mais qu’il n’a fourni aucune explication acceptable.

 

[56]           S’agissant de l’emploi du demandeur au sein de la société Yamgan, les notes que l’agente a inscrites dans le STIDI révèlent ce qui suit :

[traduction]

J’ai expliqué les résultats des vérifications à l’intéressé. Les renseignements figurant dans la lettre d’emploi de « Yamgan » n’ont pas été corroborés par plusieurs personnes travaillant dans ce bureau. J’ai demandé à l’intéressé s’il pouvait expliquer pourquoi plusieurs employés de longue date auraient dit qu’il ne travaillait pas là. L’intéressé a dit qu’ils se sont trompés. L’intéressé a également affirmé qu’il n’avait aucun lien de parenté avec les propriétaires de la société.

 

 

[57]           Nous en savons très peu sur la façon dont les vérifications ont été effectuées. Il est évident que l’agente ne les a pas effectuées elle‑même parce qu’elle ne parle pas la langue, et les éléments de preuve du dossier laissent croire qu’elles ont été effectuées par M. Afkhami, qui travaille à l’ambassade du Canada à Téhéran. Monsieur Afkhami n’a pas fourni d’affidavit concernant les procédures qu’il a suivies ou la façon qu’il a rapporté ses conclusions à l’agente. Durant l’entrevue, l’agente n’a pas non plus dévoilé au demandeur l’identité des employés de la société qui ont affirmé qu’il ne travaillait pas là.

 

[58]           Nous disposons maintenant des affidavits des personnes travaillant pour la société qui ont affirmé que l’ambassade avait communiqué avec eux pour obtenir des renseignements au sujet du demandeur. Madame Gholaminejas est la secrétaire du bureau central de Yamgan à Téhéran. Elle en sait peu au sujet des employés de la société qui ne travaillent pas au bureau central. Pourtant, elle fait partie des employés qui ont reçu un appel téléphonique de la part de l’ambassade du Canada concernant le demandeur. On lui a demandé si elle connaissait le demandeur et s’il travaillait pour Yamgan. Voici ce qu’elle aurait répondu :

[traduction]

J’ai répondu que oui, il travaille pour la société, mais que je ne connais pas du tout sa description de travail. On m’a demandé s’il était employé à plein temps et j’ai répondu que je ne le savais pas. Je les ai alors informé que tout ce que je savais à son sujet était qu’il venait à l’occasion pour prendre rendez-vous avec l’un des gestionnaires. La conversation s’est terminée à ce moment‑là.

 

 

[59]           En plus de fournir la confirmation que le demandeur a effectivement travaillé pour Yamgan, le témoignage de Mme Gholaminejas démontre qu’au moins un des employés de la société avec qui l’ambassade du Canada a communiqué n’a rien dit qui puisse remettre en cause la documentation du demandeur et le récit de son travail comme soudeur pour la société Yamgan.

 

[60]           Nous disposons également de l’affidavit de M. Mahaleh, qui a travaillé pour Yamgan pendant plus de 10 ans et qui est superviseur et contremaître responsable des équipes de travail sur différents sites. Il affirme connaître parfaitement tous les employés qui travaillent sous sa supervision. Il affirme également qu’il connaît le demandeur depuis qu’il a commencé à travailler pour la société en 2001. Il confirme que le demandeur est soudeur et a travaillé sur le projet du bureau de poste dans la ville de Kerman en 2001.

 

[61]           L’ambassade du Canada à Téhéran avait également communiqué avec M. Mahaleh à des fins de vérification. Voici son récit de la conversation :

[traduction]

Aux alentours de la semaine du 19 au 24 octobre 2008, l’ambassade du Canada à Téhéran a communiqué avec moi. Une personne s’étant présentée comme M. Afkhami m’a posé quelques questions concernant l’expérience de travail de M. Karami. J’ai confirmé que M. Karami travaille comme soudeur pour notre société dans différents projets, y compris le bureau de poste de Kerman. De plus, je l’ai informé que M. Karami travaille actuellement comme soudeur et il supervise d’autres soudeurs en ce moment.

 

 

[62]           Là encore, on constate qu’une autre personne avec qui l’ambassade du Canada a communiqué à des fins de vérification confirme une grande partie du récit du demandeur concernant son expérience de travail.

 

[63]           Puisque l’agente nous en dit si peu au sujet du processus de vérification et de la façon dont il a été effectué en l’espèce, et puisque M. Afkhami, ou quiconque a effectué les vérifications, n’a présenté aucun témoignage, il est impossible de remettre en cause la preuve de ces deux témoins qui affirment que l’ambassade a communiqué avec eux et qui confirment les propres renseignements du demandeur.

 

[64]           Compte tenu de leur témoignage, l’agente aurait commis une faute lorsqu’elle a interrogé le demandeur durant l’entrevue ou elle n’avait pas reçu de rapport complet de la part des personnes ayant interrogé les employés de Yamgan à des fins de vérification. Cela n’est pas une raison valable pour conclure que le demandeur mentait et que ses documents de travail étaient faux.

 

[65]           Dans sa décision, l’agente a accordé une grande importance aux vérifications effectuées concernant le contrat du bureau de poste :

[traduction]

J’ai expliqué à l’intéressé que nous avions également vérifié les renseignements figurant sur les contrats de travail qu’il a présentés comme preuve d’emploi. J’ai demandé si l’intéressé travaillait comme soudeur principal et chef d’équipe des soudeurs de 2003 à 2005 aux termes du contrat. Il a dit oui. J’ai expliqué que nous avions vérifié ces renseignements auprès du chargé de projets responsable de ce projet, qui a affirmé que les renseignements figurant sur ce contrat n’étaient pas exacts – qu’il ne connaissait pas l’intéressé, que le projet n’était pas assez gros pour qu’un groupe de soudeurs soit engagé, il a nommé la personne qui a fait la soudure.

 

 

[66]           Nous disposons maintenant de l’affidavit de M. Mohammad Elahi, ingénieur civil et chargé de projets responsable du projet du bureau de poste. Il s’agit de la seule personne à laquelle l’agente fait référence dans sa décision. C’est en fonction de lui qu’elle a conclu que les documents du demandeur étaient faux et que son récit au sujet de son expérience constituait de fausses déclarations.

 

[67]           Monsieur Elahi confirme que le projet du bureau de poste a été sous-traité à la société Yamgan et qu’il supervisait les détails techniques et la qualité du travail en cours. Toutefois, il n’a jamais eu de contact direct avec les travailleurs sur le site et ne les a pratiquement jamais rencontré.

 

[68]           Monsieur Elahi a également reçu un appel de l’ambassade du Canada à des fins de vérification concernant le demandeur. On lui a demandé s’il connaissait le demandeur :

[traduction]

De plus, on m’a demandé si je connaissais une personne dénommée Mojtaba Karami qui travaillait sur ce projet. J’ai répondu que le projet était achevé depuis quatre ans et que je ne me souviens pas du nom des personnes qui y ont travaillé. En outre, j’ai expliqué que je n’ai pas de contact direct avec les employés qui travaillent sur les projets que je supervise.

 

L’ambassade du Canada m’a demandé de vérifier la liste des employés auprès des services de l’assurance chômage et de voir si le nom de M. Karami y figurait. Notre première conversation téléphonique s’est terminée à ce moment‑là.

 

J’ai communiqué avec les services de l’assurance chômage, mais je n’ai pas eu accès à la liste des employés.

 

J’ai reçu un deuxième appel de la part de l’ambassade du Canada quelques jours plus tard me demandant si j’avais eu l’occasion de vérifier auprès des services de l’assurance chômage. J’ai répondu que je ne pouvais pas avoir accès à la liste des employés.

 

Notre conversation s’est terminée à ce moment‑là concernant l’expérience de travail. Je n’ai jamais dit à l’ambassade du Canada que je savais que M. Karami ne travaillait pas sur le projet du bureau de poste, puisque je ne le connais pas du tout personnellement.

 

 

[69]           Là encore, nous ne disposons pas de l’affidavit de l’agent de l’ambassade qui a communiqué avec M. Elahi. Nous ne savons pas quelles mesures de protection ont été prises. Nous ne savons pas si un compte rendu de la conversation a été rédigé. Nous ne savons pas comment l’agent de l’ambassade a rapporté la conversation à l’agente. Nous ne savons pas comment l’agente a été informée du renseignement suivant : [traduction] « Le projet n’était pas assez gros pour qu’un groupe de soudeurs soit engagé, il a nommé la personne qui avait fait la soudure. »

 

[70]           L’agente ne voulait pas accepter l’explication du demandeur selon laquelle il doit y avoir une erreur, [traduction] « particulièrement compte tenu du nombre de personnes occupant différents postes qui avaient réfuté les renseignements figurant sur les documents de l’intéressé – particulièrement étant donné qu’ils travaillaient dans des bureaux différents et compte tenu des détails qu’ils ont fournis pour réfuter ses documents ».

 

[71]           La Cour n’a aucune idée des personnes auxquelles l’agente fait référence, ce qu’elles ont dit, et quels étaient les détails convaincants. La Cour n’a vu que les affidavits de trois personnes avec qui l’ambassade a communiqué à des fins de vérification et qui n’ont pas étayé les affirmations de l’agente. Elles ont en fait étayé le récit du demandeur.

 

[72]           Sans renseignement me permettant de réfuter ce que le demandeur avait produit selon les personnes qui ont menées les entrevues, et sans une certaine garantie au sujet des personnes avec qui l’ambassade a communiqué, précisément ce qui a été dit et comment ces conversations ont été enregistrées et transmises à l’agente, je dois conclure que l’agente a commis une erreur, que le processus de vérification était déficient et que sa décision ne peut être confirmée, car elle est mal fondée ou déraisonnable. Comme le juge MacKay l’a indiqué dans Arshi, je dois conclure que l’appréciation et les conclusions de l’agente étaient déraisonnables parce qu’elles étaient « fondée[s] sur la compréhension qu’avait l’agent des visas d’un élément clé pour l’appréciation de son expérience et de sa profession, une compréhension qui donne ouverture à des doutes et qui n’a pas été clairement exposée au demandeur au cours de son entrevue ».

 

[73]           Le demandeur soulève d’autres questions, mais ma conclusion selon laquelle la décision est complètement erronée et déraisonnable sur ces questions fondamentales signifie qu’elle ne peut être confirmée. Si le processus de vérification avait été effectué convenablement et correctement, il est impossible de prédire ce que l’agente aurait décidé concernant la documentation du demandeur et sa crédibilité en général. L’affaire doit être renvoyée en vue d’un nouvel examen.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.      La demande est accueillie. La décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

 

2.      Il n’y a aucune question à certifier.

 

 

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Mylène Boudreau


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                            IMM-4911-08

 

INTITULÉ :                           MOJTABA KARAMI

                                                c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 SASKATOON

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 16 JUILLET 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 30 juillet 2009

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Haidah Amirzadeh                                            POUR LE DEMANDEUR

 

Michelle Baldwin                                              POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Haidah Amirzadeh                                            POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Saskatoon (Saskatchewan)

                       

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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