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Cour fédérale

 

 

 

 

 

 

 

 

Federal Court


Date : 20090527

Dossier : DES-4-08

Référence : 2009 CF 546

Ottawa (Ontario), le 27 Mai 2009

En présence de madame le juge Tremblay-Lamer

 

ENTRE :

DANS L’AFFAIRE CONCERNANT un

certificat en vertu du paragraphe 77(1) de la Loi

sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR);

 

DANS L’AFFAIRE CONCERNANT le dépôt

de ce certificat à la Cour fédérale en

vertu du paragraphe 77(1) de la LIPR;

 

ET DANS L’AFFAIRE CONCERNANT Adil

Charkaoui;

                                 

ET LE BARREAU DU QUÉBEC, intervenant

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

Introduction

 

[1]               Le 16 février 2009, les ministres déposaient la documentation additionnelle (Phase II) imposée par l’arrêt Charkaoui c. Canada, 2008 A.C.S. no 39, 2008 CSC 38. Ce faisant, ils remettaient aux avocats spéciaux des documents caviardés plutôt que des documents intégraux en invoquant l’existence et l’application de certains privilèges.

 

[2]               Dans sa communication du 27 février 2009, la cour informait l’intéressé et ses procureures des différents motifs pour lesquels les ministres ont procédé au caviardage des renseignements faisant partie de la divulgation additionnelle suivant l’arrêt Charkaoui II, [2008] 2 R.C.S. 326, voir Annexe « A »:

a.       enquêtes, en cours ou non, qui ne concernent pas l’intéressé;

b.      identification des sources humaines;

c.       identification d’employés du Service;

d.      questions/sujets/individus/groupes d’intérêts d’agences étrangères qui ne concernent pas l’intéressé;

e.       identification d’employés d’agences étrangères;

f.        secret professionnel de l’avocat;

g.       caractère confidentiel des documents du Cabinet.

 

[3]               Par la suite, dans sa directive du 18 mars 2009, la cour a demandé aux ministres de procéder au réexamen du caviardage au bénéfice des avocats spéciaux, notant que les motifs pour lesquels l’information pourrait être caviardée seraient l’identité des sources humaines, le secret professionnel de l’avocat et le caractère confidentiel des documents au Cabinet., voir Annexe « B ».

 

[4]               La cour invitait tous les procureurs à faire valoir par écrit leur argumentaire juridique sur les règles applicables pour le caviardage des documents. Une audition orale fut tenue le 5 mai 2009 sur cette question.

 

Position des parties

 

i)                    Les procureurs de l’intéressé et les avocats spéciaux

 

[5]               Les procureures de l’intéressé ainsi que les avocats spéciaux soumettent essentiellement que le caviardage de l’information que les ministres ont fournie aux avocats spéciaux est illégal en raison du paragraphe 85.4(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, 2001, ch. 27 (LIPR) et du fait qu’ils ont déposé à la cour l’information complète non caviardée.

 

[6]               Le fait d’invoquer les privilèges en cause n’est donc pas opposable aux avocats spéciaux qui, à cause de la loi, doivent recevoir les renseignements divulgués judiciairement à la cour.

 

[7]               De plus, soulignent les procureures de l’intéressé, la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) L.R., 1985, ch. C-23, comporte une autorisation de communication d’informations acquises par la SCRS dans les circonstances, spécifiée relativement aux paragraphes 19(2) et 18(2) de la dite loi.

 

[8]               Par le paragraphe19(2) de la SCRS, le législateur a spécifiquement prévu que le Service pouvait divulguer de l’information entre autres, « …en conformité avec les exigences d’une autre règle de droit. »

 

[9]               Le législateur a de plus indiqué au paragraphe 18(2) de la loi que les communications même confidentielles acquises par le Service qui permettraient de découvrir l’identité d’une personne qui a fourni au Service des informations ou une aide à titre confidentiel peuvent être divulguées dans les cas couverts par ce paragraphe.

 

[10]           Il s’ensuit que le paragraphe 85.4(1) constitue une règle de droit qui exige la communication des sources humaines en plus du droit à une défense pleine et entière.

 

[11]           En conséquence, le caviardage par les ministres est illégal et injustifié. Tout devrait être divulgué aux avocats spéciaux, ce que confirment aussi les règles applicables en matière de privilège.

 

[12]           Pour les procureures de l’intéressé, le fardeau de preuve repose sur les ministres qui devront établir l’application du privilège. La cour devra par la suite examiner les circonstances dans lesquelles le privilège est invoqué, les documents en cause et l’ensemble de l’affaire, A.M. c. Ryan [1997] 1 R.C.S. 157.

 

[13]           En ce qui concerne le privilège des sources humaines, les procureures soulignent qu’il appartient aux ministres d’identifier qui est la personne ayant procuré de l’information à l’État, son statut, ses liens avec l’État, la nature de l’information et d’expliquer en quoi cette personne est visée par un privilège, ce qui permettra à la cour de déterminer si le privilège s’applique comme exception à la divulgation de la preuve.

[14]           Finalement, la cour devra procéder à une évaluation (balancing) afin de déterminer si les raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation l’emportent sur les raisons d’intérêt public déterminées.

 

[15]           Pour ce qui est du secret professionnel de l’avocat, les procureures soutiennent que les ministres doivent démontrer qu’ils cherchent à obtenir la protection d’information qui vise véritablement la relation avocat-client. Lorsque l’information est visée par un privilège, la cour doit s’informer si elle n’est pas visée par une exception, telle l’innocence d’un accusé et son droit à une défense pleine et entière ou la communication avocat-client de nature criminelle.

 

[16]           Quant au caractère confidentiel des confidences du Cabinet, le fardeau de preuve repose sur les ministres de démontrer la justification de priver l’intéressé d’information au motif de l’existence d’un privilège.

 

ii)         Les ministres

[17]           Les ministres prétendent qu’ils sont bien fondés en droit de procéder au caviardage des renseignements privilégiés faisant partie de la divulgation additionnelle suivant l’arrêt Charkaoui II, précité. En modifiant la section 9 de la LIPR, le législateur n’a pas voulu abroger les privilèges reconnus par la Common Law. Les règles de la Common Law subsistent à moins d’une mention législative claire les écartant, (Rawluk c. Rawluk [1990] 1 R.C.S. 70.).

 

[18]           Les privilèges en cause dans cette affaire sont de nature quasi absolue et ne peuvent être levés que dans de très rares cas. On ne peut pas affirmer que le para.85.4(1) de la LIPR indique une intention expresse de la part du législateur de porter atteinte à l’un des privilèges invoqués par les ministres.

 

[19]           Il importe de rappeler que même dans un contexte du droit criminel, l’obligation de divulgation n’est pas absolue et le ministère public n’est nullement tenu de divulguer les éléments qui ne sont manifestement pas pertinents ou assujettis à un privilège reconnu par le droit de la preuve. R. c. Stinchcombe [1991] 3 R.C.S. 326, pages 339 et 340.

 

[20]           Contrairement à ce que plaide l’intéressé, le para. 85.1(4) n’a pas pour effet d’écarter l’application du privilège reconnu par le droit de la preuve et ne permet donc pas la divulgation des renseignements qui sont autrement privilégiés. Ainsi, ses arguments basés sur les articles 18 et 19 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité ne lui sont d’aucun secours. Pour les ministres, le para. 85.1(4) de la LIPR ne constitue pas une « règle de droit » qui requiert en l’espèce la divulgation de renseignements autrement privilégiés.

 

[21]           Pour ce qui est du privilège relatif aux sources humaines confidentielles, le privilège protège tant la relation entre le SCRS et la source que l’identité de cette dernière Re : Harkat, 2009 FC 2004 para. 31).

 

[22]           Dans cette décision, le juge Noël a reconnu l’existence, par analogie avec le privilège de l’indication de police, d’un privilège protégeant la source humaine confidentielle de renseignement (covert human intelligence source) dans le cadre des procédures en vertu de la section 9 de la LIPR.

 

[23]            Une fois reconnu, le privilège relatif aux sources humaines est de nature absolue et la cour n’a aucune discrétion afin de lever le privilège. La cour doit interdire la divulgation non seulement de la source, mais également de toute information susceptible d’en révéler implicitement l’identité.

[24]           Les ministres reconnaissent par ailleurs une exception limitée lorsque l’avocat spécial démontrera qu’il a le «besoin de savoir» l’identité d’une source humaine afin d’éviter une violation flagrante de l’équité procédurale susceptible de déconsidérer l’administration de la justice (Re Harkat précité paras. 35, 61 et 69).

 

[25]           Quant au secret professionnel de l’avocat, ce privilège est maintenant reconnu non seulement comme une règle de fond en droit, mais aussi comme un « droit civil fondamental », (Solosky c. La Reine [1980] 1 R.C.S. 821).

 

[26]           Le privilège s’applique lorsqu’il y a i) une communication entre un avocat et son client ii) qui comporte une consultation ou un avis juridique iii) que les parties considèrent de nature confidentielle.

 

[27]           De plus, le fait qu’un avocat salarié donne des conseils que l’on qualifierait de privilégiés, n’écarte pas l’application du privilège ni n’en modifie la nature (Pritchard c. Ontario, [2004] 1 R.C.S. 809, 2004 CSC 31)

 

[28]           Le privilège ne peut être levé qu’en cas « d’absolue nécessité » et son application ne nécessite pas une évaluation des intérêts dans chaque cas. Quant aux exceptions invoquées par l’intéressé, soit la règle de « l’innocence de l’accusé » et les communications de nature criminelle, le simple fait que la présente affaire mette en jeu l’application de l’art.7 de la Charte ne fait pas en sorte que cette règle s’applique dans cette affaire qui ne soulève pas « l’innocence » ou la « culpabilité » de l’intéressé mais plutôt le caractère raisonnable d’un certificat selon lequel il y a des motifs raisonnables de croire que l’intéressé soit interdit de territoire au Canada.

 

[29]           La jurisprudence offerte par l’intéressé afin de « percer » le privilège avocat-client en l’espèce est clairement insuffisante.

 

[30]           Quant aux arguments de l’intéressé en matière de renonciation, ceux-ci ne sont pas bien fondés. La remise des documents non caviardés au juge désigné n’a pour but que de permettre au juge désigné d’arbitrer tout différend susceptible d’être soulevé en cette matière.

 

[31]           Pour ce qui est du privilège protégeant les documents confidentiels du Cabinet, ce privilège est codifié et modifié par l’article 39 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, ch. C-5 (La LPC), qui dicte que dans les cas ou un ministre ou le greffier du Conseil privé s’opposent à la divulgation d’un renseignement et attestent par écrit qu’il s’agit d’un renseignement confidentiel du Conseil privé de la Reine pour le Canada, la cour est tenue d’en refuser la divulgation, sans l’examiner au cours d’audition à ce sujet.

 

Question en litige

 

[32]           La section 9 de la LIPR a-t-elle pour effet d’écarter l’application des privilèges reconnus par la Common Law de telle sorte que les ministres ne sont pas bien fondés en droit de procéder au caviardage des renseignements privilégiés faisant partie de la divulgation additionnelle Charkaoui II?

 

[33]           Sinon, quelles sont les règles applicables aux demandes de dé-caviardage des avocats spéciaux?

 

L’analyse

 

1.         Conflit entre la LIPR et les privilèges.

 

[34]           L’intéressé et les avocats spéciaux se basent essentiellement sur le paragraphe 85.4(1) de la LIPR pour affirmer que le caviardage n’est pas fondé en droit.

 

 

[35]           Le paragraphe 85.4(1) de la LIPR se lit comme suit :

Obligation de communication

85.4 (1) Il incombe au ministre de fournir à l’avocat spécial, dans le délai fixé par le juge, copie de tous les renseignements et autres éléments de preuve qui ont été fournis au juge, mais qui n’ont été communiqués ni à l’intéressé ni à son conseil.

 

Obligation to provide information

85.4 (1) The Minister shall, within a period set by the judge, provide the special advocate with a copy of all information and other evidence that is provided to the judge but that is not disclosed to the permanent resident or foreign national and their counsel.

 

 

 

[36]           Bien que cette disposition semble établir une intention du législateur que tous les renseignements et autres éléments de preuve qui ont été fournis au juge soient également fournis à l’avocat spécial, je ne peux y lire une intention expresse du législateur d’écarter les privilèges invoqués par les ministres qui sont de nature quasi absolue pour les motifs suivants.

 

[37]           Je remarque au départ que ces renseignements font partie de la divulgation suivant l’arrêt Charkaoui II (Phase II). Ils ne constituent donc pas les renseignements et éléments de preuve sur lesquels repose le certificat de sécurité. En ce qui concerne le certificat, les ministres ont déposé la preuve au soutien de leur thèse. Une version intégrale, à l’exception de quelques paragraphes d’un document, fut remise aux avocats spéciaux conformément au para. 85.4(1) de la LIPR.

 

[38]           À mon avis, l’intention du législateur en édictant le para. 85.4(1) était de s’assurer que tous les renseignements et autres éléments de preuve sur lesquels reposait la thèse des ministres étaient remis aux avocats spéciaux afin que ceux-ci disposent de l’ensemble de la preuve opposable à l’intéressé pour leur permettre de défendre les intérêts de celui-ci à huis clos.

[39]           Je remarque également que le législateur ne pouvait prévoir à ce moment la décision ultérieure de la Cour suprême dans Charkaoui II, précité, qui allait étendre l’obligation de divulgation. À mon avis, il est peu probable que la décision Charkaoui II ait déterminé que la divulgation dont il était question devait inclure le matériel privilégié.

 

[40]           Quoi qu’il en soit, les ministres ont agi avec prudence en remettant au juge tous les documents (incluant les renseignements privilégiés). Ce faisant, la cour est en mesure de s’assurer qu’un privilège pouvait être invoqué. Je ne peux y voir une renonciation aux privilèges invoqués.

 

[41]           En l’absence d’une disposition claire abrogeant expressément l’application d’un des privilèges invoqués par les ministres, je ne suis pas prête à lire le paragraphe 85.4(1) de la LIPR comme permettant la levée de ces privilèges.

 

[42]           En conséquence, lorsque la cour aura déterminé après vérification du matériel caviardé qu’un privilège s’applique et qu’aucune exception ne puisse être invoquée pour la levée du privilège, les documents en question demeureront caviardés.

 

2.         Règles applicables aux demandes du dé-caviardage des avocats spéciaux

 

i)          Identification des sources humaines

 

[43]            Comme nous l’avons vu précédemment, mon collègue le juge Noël, dans l’affaire Harkat, précitée, a reconnu l’existence, par analogie avec le privilège de l’indicateur de police, d’un privilège protégeant les sources humaines confidentielles de renseignement («covert human intelligence source») dans le cadre des procédures en vertu de l’article 9 de la LIPR. Il a résumé les considérations de principes qui sous-tendent l’existence du privilège relatif aux sources humaines :

 

a.       Les sources humaines confidentielles sont vitales pour assurer le bon fonctionnement des agences de renseignement et la sécurité nationale du Canada; elles fournissent souvent des informations à leur propre risque et celui de leur famille.

 

b.      Les sources humaines reçoivent l’assurance que leur identité demeurera confidentielle; l’accès aux informations les concernant est considérablement restreint et compartimenté à l’intérieur du SCRS.

 

c.       Le recrutement des sources serait compromis si elles n’avaient pas d’assurance que la cour maintiendrait leur identité secrète; le fait de divulguer l’identité d’ne source dans le cadre d’une procédure même à huis clos mettrait presque certainement fin à sa relation avec le SCRS; il faut tenir compte de la nature particulière des enquêtes en matière de sécurité nationale, qui peuvent se continuer dans le temps.

 

d.      La confidentialité des sources assure le maintien à long terme de la relation entre la source et le SCRS et le succès futur des enquêtes en matière de renseignement. Elle est essentielle afin que le SCRS remplisse son mandat législatif de protéger la sécurité nationale du Canada, tout en protégeant la source de représailles.

 

 

[44]           Ces principes sont convaincants et s’appliquent en l’espèce. Je reconnais toutefois l’exception de nature limitée, reconnue par le juge Noël, lorsque l’avocat spécial démontrera qu’il a «le besoin de savoir» (need to know) l’identité d’une source humaine confidentielle afin d’éviter une violation flagrante de l’équité procédurale susceptible de déconsidérer l’administration de la justice.

 

[45]           Il suffira à la cour de vérifier si les documents caviardés sont couverts par ce privilège et que l’exception de nature limitée ne s’applique.

 

ii)         Secret professionnel de l’avocat

 

[46]           Il est inutile de rappeler l’importance de ce privilège, lequel est essentiel dans le contexte du système de justice. Une fois établi qu’elles relèvent de cette catégorie, les communications entre avocat et son client jouissent d’une présomption prima facie  d’inadmissibilité R. c. McClure  [2001] 1 R.C.S. 445. Ce privilège s’applique lorsqu’un avocat salarié de l’État donne un avis juridique à son client, l’organisme gouvernemental (Pritchard c. Ontario, précité).

 

[47]           Les conditions d’application sont bien connues. Il est inutile de les relater encore une fois. Il suffira donc à la cour de vérifier si les documents caviardés sont couverts par ce privilège et qu’aucune des exceptions invoquées par l’intéressé ne s’applique en l’espèce.

 

[48]           J’accepte la proposition des ministres à l’effet que la remise des documents non caviardés au juge n’a pour but que de permettre à celui-ci d’arbitrer tout différend susceptible d’être soulevé en cette matière et ne constitue pas une renonciation au privilège.

 

iii)        Documents confidentiels du Cabinet

 

[49]           Je rappelle brièvement que ce privilège, codifié à l’article 39 de la Loi de la preuve au Canada, s’applique lorsque le greffier ou le ministre attestent valablement que des renseignements sont confidentiels. Le juge est tenu de refuser la divulgation sans l’examiner ou tenir d’audition à son sujet, (Balcook c. Canada, 2002 A.C.S. no 58, 2002 CSC 57). Il n’y a aucune mise en balance des intérêts de toutes les parties. Lorsqu’une telle attestation sera déposée à la cour, ces documents seront mis sous scellé sans examen de la cour.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que les documents remis aux avocats spéciaux demeurent caviardés jusqu’à vérification par la cour pour s’assurer qu’ils soient couverts par les privilèges invoqués et qu’aucune exception ne s’applique.

 

« Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE « A »

 

                                                                                                                                        Date : 20090227

Dossier : DES-4-08

Ottawa (Ontario), le 27 février 2009

En présence de madame le juge Tremblay-Lamer 

 

 

DANS L’AFFAIRE INTÉRESSANT un certificat

en vertu du paragraphe 77(1)

            de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR)

 

            DANS L’AFFAIRE CONCERNANT le dépôt de

ce certificat à la Cour fédérale

en vertu du paragraphe 77(1) de la LIPR

 

ET DANS L’AFFAIRE CONCERNANT

 Adil Charkaoui

                                   

ET LE BARREAU DU QUÉBEC, intervenant

 

 

COMMUNICATION À M. ADIL CHARKAOUI

ET À SES PROCUREURES AU DOSSIER

 

            Le 18 février 2009, le greffe de la cour a reçu la copie de la divulgation visée par l’arrêt Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CSC 38 (Charkaoui II). Le support informatique remis comprendrait environ 3000 documents.

 

            La Cour tient à informer l’intéressé et ses procureures du fait qu’il appert de la lettre des ministres jointe à cette divulgation que la copie remise aux avocats spéciaux a été caviardée alors que la version offerte à la Cour mets simplement en relief les passages caviardés dans la version des avocats spéciaux en permettant de quand même lire ces passages.

            Les raisons invoquées par les ministres au soutien du caviardage de la copie remise aux avocats spéciaux sont :

 

a)      enquêtes, en cours ou non, qui ne concernent pas l’intéressé;

b)      identification de sources humaines;

c)      identification d’employés du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS);

d)      questions/sujets/individus/groupes d’intérêts d’agences étrangères qui ne concernent pas l’intéressé;

e)      secret professionnel de l’avocat; et

f)        caractère confidentiel des documents du Cabinet.

 

            La Cour joint à la présente communication une lettre émise par les avocats spéciaux le 25 février 2009. Vous constaterez au deuxième point saillant de la page 2 de cette lettre que les avocats spéciaux entendent faire des demandes de dé-caviardage à leur bénéfice et l’adjudication de telles demandes à huis-clos en cas de refus des ministres.

 

            La Cour tenait à porter ces informations à la connaissance de l’intéressé et de ses procureures pour que ces dernières puissent, elles aussi, faire valoir leur argumentaire juridique sur les règles applicables pour l’adjudication des demandes à venir, à huis-clos, de la part des avocats spéciaux quant aux documents visés par la divulgation de Charkaoui II dans la mesure du possible lors des débats publics sur les questions de droit à être tenues les 10 et 11 mars prochain..

 

            La Cour a également émis une directive écrite aux ministres le 24 février 2009 demandant si ces derniers sont prêts à consentir à la divulgation du contenu de toute interception de communication au cours de laquelle l’intéressé a participé ainsi que de tout rapport de filature le concernant. Une approche similaire a été consentie dans d’autres dossiers.

 

            Enfin, après avoir considéré la première proposition de divulgation des avocats spéciaux ainsi que la réponse des ministres et afin de pouvoir se prononcer sur la divulgation possible vers l’intéressé, la Cour a également émis une ordonnance aux ministres de procéder immédiatement à l’obtention des approbations qui semblent être requises en ce qui concerne l’information en provenance des agences domestiques impliquées et une agence étrangère pour laquelle ceux-ci se sont dits prêts à divulguer sous réserve de l’approbation de l’agence étrangère en question.

 

           

 

         « Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE « B »

 

                                                                                                                                       Date : 20090318

Dossier : DES-4-08

Ottawa (Ontario), le 18 mars, 2009

En présence de madame le juge Tremblay-Lamer 

 

 

DANS L’AFFAIRE INTÉRESSANT un certificat

en vertu du paragraphe 77(1)

            de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR)

 

            DANS L’AFFAIRE CONCERNANT le dépôt de

ce certificat à la Cour fédérale

en vertu du paragraphe 77(1) de la LIPR

 

ET DANS L’AFFAIRE CONCERNANT

 Adil Charkaoui

                                   

ET LE BARREAU DU QUÉBEC, intervenant

 

 

DIRECTIVE

 

D’emblée, afin de faciliter le débat sur la question du caviardage à être débattue lors de l’audience publique le 5 mai 2009 et à huis clos le 7 mai 2009, la Cour tient à préciser que toutes les informations reçues par le greffe de la Cour (Divulgation selon Charkaoui II) qui auraient pu être caviardées pour les motifs suivants :

(a) enquêtes, en cours ou non, qui ne concernent pas l’intéressé;

(d) questions/sujets/individus/groupes d’intérêt d’agences étrangères qui ne concernent pas l’intéressé;

mais qui concernent des gens, groupes ou organisations référés au sommaire du rapport de renseignement de sécurité et/ou du rapport confidentiel de renseignement de sécurité concernant l’intéressé, devraient faire l’objet d’un ré-examen de la part des ministres en vue d’un dé-

caviardage, la Cour étant d’avis que les avocats spéciaux devraient être en mesure d’avoir accès à ces informations puisque la Cour y a accès, et que ces derniers se doivent d’être en mesure de remplir les responsabilités qui leur sont dévolues au paragraphe 85.1 (2) de la LIPR.

De plus, la Cour demande un réexamen du caviardage qui aurait pu être fait en vertu des motifs suivants :

(c) identification d’employés du Service impliqués dans des opérations sensibles;

(e) identification d’employés d’agences étrangères.

La règle devant être le non caviardage de ces informations, puisqu’il est ici question d’une remise de documents aux avocats spéciaux sous le sceau de la confidentialité à être visionner en lieu sécuritaire, l’exception à l’application de cette règle pourra faire l’objet des représentations écrites  sur les règles applicables à être déposées par les parties (pour l’intéressé au plus tard le 27 mars 2009, le 3 avril 2009 pour les avocats spéciaux et le 10 avril 2009 pour les ministres) et être contestées lors des audiences publiques et à huis clos.

À la lumière de cette directive, la Cour note que l’information qui demeurerait caviardée, le serait aux motifs suivants :

            (b) identification des sources humaines;

            (f) secret professionnel de l’avocat; et

            (g) caractère confidentiel des documents du Cabinet.

De ces trois catégories, la Cour note, dans un premier temps, que l’article 39. (1) de la Loi sur la preuve prévoit que le ministre ou le greffier du Conseil Privé peut attester par écrit qu’un renseignement constitue un renseignement confidentiel du Conseil Privé de la Reine pour le Canada. 

Pour ce qui est des informations qui révéleraient l’identification des sources humaines, la Cour tient à noter que cette catégorie se doit d’être appliquée restrictivement et ne devrait pas inclure des documents qui font simplement référence à l’utilisation de sources humaines et pour lesquels des méthodes utilisées dans le document maintiennent la protection de l’identité de la source humaine.

 S’il en est ainsi, la Cour constate que le motif le plus fondamental de caviardage invoqué par les ministres est celui où il serait allégué que l’information relève du secret professionnel de l’avocat.

 

 

       « Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :        DES-4-08

 

 

INTITULÉ :       DANS L’AFFAIRE CONCERNANT un

certificat en vertu du paragraphe 77(1) de la Loi

sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR);

 

DANS L’AFFAIRE CONCERNANT le dépôt

de ce certificat à la Cour fédérale en

vertu du paragraphe 77(1) de la LIPR;

 

ET DANS L’AFFAIRE CONCERNANT Adil

Charkaoui;

                              

ET LE BARREAU DU QUÉBEC, intervenant

 

                       

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATES DE L’AUDIENCE :             5 mai 2009

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :  LE JUGE TREMBLAY-LAMER

 

DATE DES MOTIFS :                      le 27 mai 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Me Dominique Larochelle

Me Johanne Doyon

 

POUR M. ADIL CHARKAOUI

Me Nancie Couture

Me Lori Beckerman

Me François Joyal

Me Gretchen Timmins

 

POUR LES MINISTRES

Me Denis Couture

Me François Dadour

AVOCATS SPÉCIAUX

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Des Longchamps, Bourassa, Trudeau & Lafrance,

Montréal (Québec)

 

Doyon & Ass.

Montréal (Québec)

 

POUR M. ADIL CHARKAOUI

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LES MINISTRES

 

 

Me Denis Couture       

Ashton (Ontario)

 

Me François Dadour   

Montréal (Québec)

 

AVOCATS SPÉCIAUX

Me Louis Belleau

Filteau Belleau

Montréal (Québec)

POUR L’INTERVENANT

 

 

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