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Date : 20090306

Dossier : IMM-3970-08

Référence : 2009 CF 246

Toronto (Ontario), le 6 mars 2009

En présence de madame la juge Heneghan

 

 

ENTRE :

MEKEDLAWETE HAILU SHEFERAW

demanderesse

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Mme Mekedlawete Hailu Sheferaw (la demanderesse) demande le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission), rendue le 25 août 2008. Dans cette décision, la Commission a conclu que la demanderesse n’était pas une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger au sens des articles 96 et 97, respectivement, de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).

 

[2]               La demanderesse a présenté sa demande d’asile au regard de l’Éthiopie. La Commission a rejeté sa demande au motif que la demanderesse n’avait pas établi son identité. Dans sa demande de contrôle judiciaire, la demanderesse a présenté des arguments qui contestent la conclusion de la Commission et elle a aussi soutenu qu’il y avait eu manquement à l’équité procédurale. Plus précisément, elle soutient que la Commission a manqué aux exigences en matière d’équité procédurale parce qu’elle ne lui a pas donné la possibilité de poser des questions ou de présenter des observations finales. De plus, elle fait valoir que la Commission a tiré sa conclusion sans lui avoir donné la possibilité de poser des questions ou de présenter des observations.

 

[3]               J’ai examiné attentivement les documents présentés, y compris la transcription de l’audience devant la Commission et les observations de l’avocat, et je suis convaincue que la demande de contrôle judiciaire doit être accueillie.

 

[4]               La transcription de l’audience se trouve dans le dossier certifié du tribunal. L’extrait suivant est tiré de la transcription :

[traduction]

 

LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : Bon, nous reprenons l’audience maintenant. Y a-t-il quelque chose que vous voulez faire? Pour être honnête avec vous, j’ai beaucoup de doutes au sujet de l’identité de la demanderesse.

 

L’AVOCAT : Bien, je lui ai parlé quand je suis sorti, et elle m’a dit qu’elle pourrait obtenir tous les documents scolaires, la cabale, ou quoi que ce soit, mais vous devez lui donner du temps.

 

LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : Elle a eu un an et demi pour faire tout ça, alors je ne crois pas pouvoir accepter sa demande. Elle a eu amplement le temps de présenter à la Commission les documents adéquats au sujet de son identité, et elle ne l’a pas fait.

Je ne sais pas si vous voulez faire des observations, mais je suis prêt à rendre une décision aujourd’hui.

Donc, est-ce que je peux rendre ma décision?

 

[5]               Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) soutient que la transcription démontre que la demanderesse a bien eu la possibilité de présenter des observations, mais qu’elle a refusé de le faire. De plus, le défendeur soutient que la rapidité du président de l’audience à rendre une décision, après une suspension de l’audience, ne signifie pas que le président avait préjugé du bien-fondé de la demande.

 

[6]               J’ai examiné attentivement les documents présentés et les observations de l’avocat. La norme applicable à la question du manquement à l’équité procédurale, y compris à une conclusion ou à un résultat prédéterminé, est la décision correcte; voir Ha c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2004] 3 R.C.F 195, et Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190.

 

[7]               La défense du défendeur et de la Commission ne me convainquent pas. J’accepte l’argument de la demanderesse, selon lequel la transcription de la prétendue décision de la Commission rendue oralement signifie qu’une décision avait été prise avant la fin de l’audience. Je souscris au point de vue du juge Blais dans la décision Agastra c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 179 F.T.R. 316 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 10, où il a écrit :

10        À mon avis, il est clair que le tribunal a manqué d'équité. Les membres du tribunal doivent se consulter puisqu'un désaccord serait à l'avantage du demandeur. Les membres du tribunal ne doivent pas paraître comme ayant déjà tranché l'affaire avant d'avoir entendu toute la preuve et avant de s'être consultés, même si l'audience n'aurait rien apporté de nouveau. Ces actions ternissent l'intégrité du système.

 

[8]               L’efficacité administrative ne peut pas primer sur le respect de l’équité procédurale. Même si les demandeurs d’asile ne peuvent pas revendiquer une issue particulière en vertu de la Loi, ils ont tout de même droit à une audience équitable.

 

[9]               Je ne suis pas convaincue que ce droit a été respecté en l’espèce. La demande de contrôle judiciaire sera accueillie et l’affaire sera renvoyée à une formation différente de la Commission pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que l’affaire soit renvoyée à une formation différente de la Commission pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier. 

 

 

« E. Heneghan »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3970-08

 

INTITULÉ :                                       MEKEDLAWETE HAILU SHEFERAW c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 4 mars 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LA JUGE HENEGHAN

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 6 mars 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Micheal Crane

 

POUR LA DEMANDERESSE

Ladan Shahrooz

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Micheal Crane

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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