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20090216

Dossier : IMM-2520-08

Référence : 2009 CF 163

Ottawa (Ontario), le 16 février 2009

En présence de monsieur le juge Beaudry

 

ENTRE :

EDGAR LLAMAS GONZALEZ

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.R., 2001, ch. 27 (la loi) à l’encontre d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’Immigration et du statut de réfugié (le tribunal), rendue le 2 mai 2008, selon laquelle Edgar Llamas Gonzalez (le demandeur) n’a pas la qualité de réfugié au sens de la Convention, ni de personne à protéger en vertu des articles 96 et 97 de la loi.

 

 

Questions en litige

[2]               Est-ce que le tribunal a commis une erreur en concluant que le demandeur n’était pas crédible?

 

[3]               Est-ce que le tribunal a erré en concluant qu’il y avait une possibilité de refuge interne pour le demandeur?

 

[4]               Pour les raisons qui suivent la demande contrôle judiciaire sera  rejetée.

 

Contexte factuel

[5]               Le demandeur est un jeune homme dans la vingtaine, provenant du Mexique. Il déclare avoir été témoin de l’enlèvement de ses deux amis, alors qu’il était dans un restaurant avec eux le 15 juillet 2007.

 

[6]               Il dit craindre de retourner dans son pays car il aurait reçu des appels intimidants et menaçants suite à la libération de ses amis le 30 juillet 2007, ces derniers ayant été relâchés après avoir payé une rançon.

 

[7]               Il affirme ne pas avoir d’argent pour payer une rançon, donc il a décidé de venir au Canada puisqu’il a vu sur Internet que le Canada offrait de l’aide dans ce genre de situations.

 

 

 

Décision contestée

[8]               Après avoir analysé les faits, le tribunal a conclu que  le demandeur manquait de crédibilité et son histoire n'avait pas de minimum de fondements. Subsidiairement, il y avait une possibilité de refuge interne dans quatre villes du Mexique.

 

Analyse

Norme de contrôle

[9]               Lorsqu’il est question de crédibilité et d’appréciation de la preuve, il est bien établi en vertu du paragraphe 18.1(4)(d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, c. F-7, que la Cour n’interviendra que si la décision est basée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon arbitraire ou abusive ou si la décision est rendue sans égard à la preuve.

 

[10]            Le tribunal est un tribunal spécialisé et ses conclusions en matière de crédibilité sont des questions de fait. La Cour ne devrait donc intervenir qu’en cas d’erreur manifestement déraisonnable (Aguebor c. Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.), 42 A.C.W.S. (3d) 886).

 

[11]           L’évaluation de la crédibilité et l’appréciation de la preuve relèvent de la compétence du tribunal administratif qui doit apprécier l’allégation d’une crainte subjective d’un demandeur d’asile (Cepeda-Gutierrez c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 F.T.R. 35 (C.F. 1ère inst.), 83 A.C.W.S. (3d) 264 au paragraphe 14). Avant Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, la norme de contrôle applicable dans des circonstances semblables était celle de la décision manifestement déraisonnable. Depuis, il s’agit de la décision raisonnable.

 

[12]           La norme de contrôle applicable aux questions de protection de l’État est la décision raisonnable (Chaves c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 193, 137 A.C.W.S. (3d) 392 aux paragraphes 9 à 11 et Gorria c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 284, 310 F.T.R. 150 au paragraphe 14) ainsi que celle nouvellement articulée dans Dunsmuir.

 

1.         Est-ce que le tribunal a commis une erreur en concluant que le demandeur n’était pas crédible?

[13]           La conclusion du tribunal à ce sujet n'est pas déraisonnable compte tenu du fait que le demandeur n'a jamais fait appel à la police. Les notes au point d'entrée et le Formulaire de Renseignements Personnels du demandeur comportent une divergence importante concernant les raisons invoquées pour ne pas avoir eu recours aux autorités policières (Grinevich c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 70 A.C.W.S. (3d) 1059 (C.F. 1ère inst.), [1997] A.C.F. no 444 (QL); Basseghi c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1994), 52 A.C.W.S. (3d) 165 (C.F. 1ère inst.), [1994] A.C.F. no 1867 (QL); Sanchez c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 98 A.C.W.S. (3d) 1265 (C.F. 1ère inst.), [2000] A.C.F. no 536 (QL)).

 

[14]           Le tribunal est le mieux placé pour évaluer les explications fournies par les demandeurs au sujet des contradictions et invraisemblances apparentes. Il n’appartient pas à la Cour de substituer son jugement aux conclusions de fait tirées par le tribunal au sujet de la crédibilité des demandeurs (Singh c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 181, 146 A.C.W.S. (3d) 329 au paragraphe 36; Mavi c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] A.C.F. no 1 (QL)).

 

2.         Est-ce que le tribunal a erré en concluant qu’il y avait une possibilité de refuge interne pour le demandeur?

[15]           Le demandeur a été questionné au point d’entrée sur la possibilité d’aller vivre ailleurs au Mexique et il a répondu : « Oui, je l’ai pensé mais je ne l’ai pas fait. Mais je sais que je vais me sentir plus protégé ici, et je sais que peut-être ces gens me chercheraient si j’allais dans une autre ville. » (page 49, dossier du tribunal). Interrogé à l'audition, le demandeur répond qu'il pourrait vivre en sécurité dans un des endroits suggérés comme PRI et qu'il pourrait peut-être oui ou non se trouver du travail (pages 110 et 111, dossier du tribunal).

 

[16]           Dans Kanagaratnam c. Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1996), 194 N.R. 46 (C.A.F.), 60 A.C.W.S. (3d) 1216 au paragraphe 4, la Cour d’appel fédérale a noté que :

… En examinant s’il existe une possibilité raisonnable de refuge dans une autre partie du même pays, la Commission doit bien entendu tenir compte de l'ensemble des circonstances pertinentes. C'est ce qu’elle a fait en l'espèce. Étant donné qu’une possibilité de refuge dans une autre partie du même pays existait, la requérante ne pouvait, par définition, avoir raison de craindre d’être persécutée dans le pays dont elle a la nationalité. Ainsi, bien que la Commission puisse certainement le faire si elle en décide ainsi, elle n’était aucunement tenue en droit de décider, au préalable, si la requérante avait raison de craindre d’être persécutée dans la région dont elle était originaire lorsqu’elle s’est prononcée sur la question de la possibilité de refuge dans une autre partie du même pays.

 

[17]           Dans la cause qui nous occupe, la décision du tribunal est basée sur le témoignage du demandeur ainsi que la preuve documentaire au dossier. Le tribunal a tenu compte de la situation personnelle du demandeur et la possibilité raisonnable que ce dernier se relocalise dans d'autres villes du Mexique. Le demandeur ne s'est pas acquitté de son fardeau de démontrer que le tribunal a commis une erreur dans l'établissement d’un refuge interne. La Cour considère cette décision raisonnable car elle est conforme à la jurisprudence.

 

[18]           La présente demande ne soulève aucune question importante de portée générale.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2520-08

 

INTITULÉ :                                       EDGAR LLAMAS GONZALEZ

                                                            et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                           L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 12 février 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT:                               Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 16 février 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :                       

 

Stéphanie Valois                                                           POUR LE DEMANDEUR

 

Steve Bell                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Stéphanie Valois                                                           POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John Sims, c.r.                                                              POUR LE DÉFENDEUR       

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

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