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Date : 20071219

Dossier : IMM-6022-06

Référence : 2007 CF 1335

Toronto (Ontario), le 19 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

 

 

ENTRE :

JAVIER DIAZ PUENTES

LIZ RAQUEL URDANETA GIL

JAVIER A DIAZ URDANETA

GABRIELA A DIAZ URDANETA

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Les demandeurs sont des citoyens du Venezuela qui contestent la décision rendue le 10 octobre 2006 par la Section de la protection des réfugiés (la Section) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, qui a rejeté leur demande d’asile présentée en vertu de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, et qui était fondée sur les opinions politiques du demandeur principal. Pour arriver à sa décision, elle a tiré plusieurs conclusions d’invraisemblance qui, à mon avis, ne sont pas étayées par la preuve. Vu que ces conclusions ont amené la Section à juger que les demandeurs n’avaient pas subi les persécutions qu’ils allèguent avoir subies par le passé et que, par conséquent, leur crainte d’être persécutés s’ils retournaient au Venezuela n’était pas justifiée, la décision de la Section doit être infirmée.

I.          L’allégation de persécution

            A. Le premier FRP

[2]               Dans son premier Formulaire de renseignements personnels (FRP), le demandeur principal a déclaré être un ancien employé de la société pétrolière du Venezuela, la PDVSA. En janvier 2003, il fut congédié en raison de sa participation à une grève nationale du pétrole dénonçant les politiques du gouvernement du Venezuela dirigé par le président Hugo Chavez. Ce congédiement a incité le demandeur principal a prendre part à des activités politiques anti‑Chavez. Il s’est joint au Parti justice d’abord, qui s’oppose au gouvernement Chavez, et a participé à des activités politiques.

 

[3]               Au printemps 2003, en raison de ses activités politiques, le demandeur principal a commencé à recevoir des appels de menace. Les personnes qui l’ont appelé lui ont dit qu’elles le feraient « disparaître » s’il poursuivait ses activités anti-Chavez.

 

[4]               Certains des appels étaient anonymes, mais au fil du temps, des personnes ont déclaré être membres des Cercles bolivariens pro-Chavez. Les demandeurs ont déménagé à Merida, une autre ville du Venezuela, pour tenter d’échapper aux menaces, mais celles‑ci ont persisté. Le demandeur principal a poursuivi ses activités politiques et a consacré de son temps à encourager les gens à signer une pétition demandant un référendum sur la destitution du président Chavez. 

 

[5]               En 2004, la liste des personnes qui avaient signé la pétition concernant la destitution du président a été publiée sur Internet; les noms du demandeur principal et de son épouse y figuraient. Les appels de menace ont continué. En plus des Cercles bolivariens, des personnes ont déclaré être membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie (les FARC). 

 

[6]               En mars 2004, trois incidents ont eu lieu et c’est alors que les demandeurs ont décidé de quitter le Venezuela. Tout d’abord, ils ont reçu une lettre de menace. Ensuite, pendant que le demandeur principal était en voyage d’affaires, des hommes sont venus menacer son épouse avec une arme à feu au moment où elle rentrait chez elle après avoir été chercher leur fils à l’école. Enfin, le demandeur principal a été interpellé par des hommes en camionnette qui lui ont crié qu’on allait l’exécuter. Ces hommes lui ont aussi dit qu’ils avaient reçu l’ordre de l’enlever lui ainsi que les membres de sa famille. Lorsque le demandeur principal et son épouse ont tenté de signaler ces incidents à la police, ils ont constaté que cela serait inutile parce que toutes les autorités appuyaient le gouvernement Chavez et étaient corrompues. Par conséquent, les demandeurs ont estimé que leur seule option était de quitter le Venezuela. En avril 2004, ils sont arrivés au Canada et ont revendiqué le statut de réfugié.

 

            B. La première audience de la Section

[7]               Les demandeurs se sont vu refuser le statut de réfugié lors de la première audience. La Section n’a pas cru le témoignage du demandeur principal au motif que son premier FRP ne contenait pas tous les faits détaillés qu’il avait révélés à l’audience. La demande de contrôle judiciaire de la première décision de la Section a été accueillie le 26 janvier 2006.

 

[8]               En vue de la nouvelle audience, le demandeur principal a modifié son FRP. De telles modifications sont autorisées en vertu du paragraphe 6(4) des Règles de la Section de la protection des réfugiés (DORS/2002-228). 

 

            C. Le FRP modifié

[9]               Le FRP modifié révèle les mêmes faits que le premier FRP, mais il contient davantage de détails sur les activités politiques du demandeur principal ainsi que sur les menaces particulières qui lui ont été proférées. Par exemple, l’une des allégations mentionnées dans le FRP modifié est la suivante : le demandeur principal a donné une entrevue radiophonique et il a reçu un appel de menace par la suite. Le FRP modifié précise les dates d’autres appels et contient des détails sur les menaces proférées. Il est également mentionné que le demandeur principal était non seulement membre du Parti justice d’abord, mais encore qu’il en était le délégué de sa région.

 

[10]           Lors de la deuxième audience devant la Section, qui a donné lieu à la décision visée par le présent contrôle judiciaire, le demandeur principal a expliqué pourquoi il n’avait pas fourni les précisions supplémentaires dans son premier FRP : il avait remis une ébauche de nature générale à son premier avocat, qu’il n’avait pas encore rencontré, et n’avait pas eu la chance de la réviser avant son dépôt. Le demandeur principal a fait part de son mécontentement à l’égard de son premier avocat et il a fourni à la Section une copie de la lettre qu’il avait écrite au Barreau du Haut‑Canada dans laquelle il déclarait que son avocat avait traité sa demande négligemment.

 

 

II.        La décision de la Section

[11]           La Section a prononcé sa décision le 10 octobre 2006. Bien qu’elle ait accepté que le demandeur principal et son épouse étaient politiquement engagés, elle a rejeté leur demande pour le motif que leur crainte d’être persécutés n’était pas justifiée.

 

[12]           L’une des questions clés que devait trancher la Section était celle de la crédibilité du demandeur principal :

Les questions qui ont joué pour moi un rôle déterminant dans les demandes d’asile présentées par les demandeurs d’asile étaient la crédibilité du demandeur d’asile principal et la question de savoir si la crainte qu’éprouvaient les demandeurs d’asile d’être persécutés par les partisans du gouvernement actuel du président Chavez, comme les Cercles bolivariens et les FARC, avait un fondement subjectif et objectif. Je n’ai pas estimé que le demandeur d’asile principal était un témoin crédible et digne de foi pour ce qui est de sa demande d’asile et de celles présentées par les autres demandeurs d’asile.

 

[décision de la Section, page 5]

 

 

Cette conclusion défavorable sur la crédibilité est fondée sur les invraisemblances suivantes :

1.      il était déraisonnable que le demandeur principal n’ait pas fourni dans son premier FRP les détails ajoutés dans son FRP modifié;

2.      le fait que le demandeur principal n’ait pas fourni de preuve documentaire de son entrevue radiophonique qu’il avait alléguée dans son FRP modifié;

3.      il était déraisonnable que le demandeur principal n’ait pas mentionné les FARC lors de son entrevue au point d’entrée;

4.      vu que les demandeurs détenaient des visas valides leur permettant de se rendre aux États‑Unis, il était déraisonnable qu’ils n’aient quitté le Venezuela qu’en avril 2004 s’ils avaient une crainte subjective de persécution.

 

[13]           En conséquence, la Section a conclu ce qui suit :

En résumé, compte tenu des conclusions négatives précédentes au sujet de la crédibilité du demandeur d’asile principal, je n’admets pas les allégations qui figurent dans l’addenda qu’a ajouté le demandeur d’asile principal à l’exposé circonstancié de son FRP le 17 juillet 2006 et qui concernait les problèmes que lui et sa famille avaient eus à cause des membres des Cercles bolivariens ou qui indiquait que le demandeur d’asile principal et les membres de sa famille étaient ciblés, tel que ce dernier l’allègue, par des membres des FARC opérant au Venezuela. J’estime que toutes ces allégations montrent que le demandeur d’asile principal a voulu renforcer sa demande d’asile et celle des autres demandeurs d’asile. J’estime également que le temps qu’ont attendu les demandeurs d’asile avant de quitter le Venezuela n’est pas compatible avec l’existence d’une crainte subjective de persécution au Venezuela.

 

[décision de la Section, pages 10 et 11]

 

[14]           C’est pourquoi, étant donné que la décision de la Section est fondée sur les invraisemblances qu’elle a perçues dans les faits relatés par le demandeur principal, la question à trancher en l’espèce est la suivante : la Section a-t-elle tiré conformément à la loi les conclusions d’invraisemblance contestées?

 

III.       La norme de contrôle qui s’applique aux conclusions sur la crédibilité et aux conclusions d’invraisemblance

[15]           Il est généralement reconnu que la norme de contrôle qui s’applique aux conclusions sur la crédibilité tirées par la Section est la décision manifestement déraisonnable (Aguebor c. Canada (M.E.I.), [1993] A.C.F. no 732). Dans le même ordre d’idées, lorsque la Section tire des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance des faits relatés par un demandeur, elle devrait bénéficier d’une retenue à l’égard de ces conclusions. Cependant, malgré la retenue exigée par cette norme de contrôle, la Section doit tirer ses conclusions sur la crédibilité avec soin. Dans l’arrêt Hilo c. Canada, (1991) 130 N.R. 236, la Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit au paragraphe 6 :

Selon moi, la Commission se trouvait dans l’obligation de justifier, en termes clairs et explicites, pourquoi elle doutait de la crédibilité de l’appelant. L’évaluation (précitée) que la Commission a faite au sujet de la crédibilité de l’appelant est lacunaire parce qu’elle est exposée en termes vagues et généraux.

 

 

[16]           De plus, avant de tirer toute conclusion sur la crédibilité ou conclusion d’invraisemblance, il faut se rappeler que les faits relatés par un demandeur d’asile sont présumés véridiques. Le juge Muldoon dans Valtchev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] A.C.F. no 1131, aux paragraphes 6, 7 et 8, expose clairement la rigueur dont il faut faire preuve en tirant des conclusions défavorables sur la crédibilité et des conclusions d’invraisemblance :

 

[6]                Le tribunal a fait allusion au principe posé dans l’arrêt Maldonado c. M.E.I., [1980] 2 C.F. 302 (C.A.), à la page 305, suivant lequel lorsqu’un revendicateur du statut de réfugié affirme la véracité de certaines allégations, ces allégations sont présumées véridiques sauf s’il existe des raisons de douter de leur véracité. […]

 

[7]                Un tribunal administratif peut tirer des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance de la version des faits relatée par le revendicateur, à condition que les inférences qu’il tire soient raisonnables. Le tribunal administratif ne peut cependant conclure à l’invraisemblance que dans les cas les plus évidents, c’est‑à‑dire que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s’attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le revendicateur le prétend. Le tribunal doit être prudent lorsqu’il fonde sa décision sur le manque de vraisemblance, car les revendicateurs proviennent de cultures diverses et que des actes qui semblent peu plausibles lorsqu’on les juge en fonction des normes canadiennes peuvent être plausibles lorsqu’on les considère en fonction du milieu dont provient le revendicateur [voir L. Waldman, Immigration Law and Practice (Markham, ON, Butterworths, 1992) à la page 8.22].

 

[8]                Dans le jugement Leung c. M.E.I., (1994), 81 F.T.R. 303 (C.F. 1re inst.), voici ce que le juge en chef adjoint Jerome déclare à la page 307 :

[14] [...] Néanmoins, la Commission est clairement tenue de justifier ses conclusions sur la crédibilité en faisant expressément et clairement état des éléments de preuve.

[15] Cette obligation devient particulièrement importante dans des cas tels que l’espèce où la Commission a fondé sa conclusion de non-crédibilité sur des « invraisemblances » présumées dans les histoires des demanderesses plutôt que sur des inconsistances [sic] et des contradictions internes dans leur récit ou dans leur comportement lors de leur témoignage. Les conclusions d’invraisemblance sont en soi des évaluations subjectives qui dépendent largement de l’idée que les membres individuels de la Commission se font de ce qui constitue un comportement sensé. En conséquence, on peut évaluer l’à-propos d’une décision particulière seulement si la décision de la Commission relève clairement tous les faits qui sous-tendent ses conclusions [...]. La Commission aura donc tort de ne pas faire état des éléments de preuve pertinents qui pourraient éventuellement réfuter ses conclusions d’invraisemblance.

 

[Souligné dans l’original.]

 

 

 

IV.       Application de la norme juridique aux conclusions d’invraisemblance tirées par la Section

            A. Le FRP modifié

[17]           Comme l’a souligné le défendeur, la Section peut comparer les faits relatés par un demandeur dans son FRP avec son témoignage et tirer des conclusions sur la crédibilité en se fondant sur des incohérences et des omissions (Khalifa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 36). Cependant, je suis d’avis qu’une distinction doit être faite entre la situation où un demandeur a modifié son FRP dans le but d’y ajouter des déclarations qui sont différentes de celles qu’il avait présentées dans un premier FRP et la situation en l’espèce, c’est‑à‑dire où le demandeur a modifié son FRP dans le but d’y ajouter des précisions. Dans ce dernier type de cas, avant de conclure qu’une demande repose sur de fausses allégations, la Section doit examiner toute la preuve au dossier afin de déterminer si certains éléments de preuve permettent d’étayer une telle conclusion (Ameir c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 876.  

 

[18]           Lorsqu’un demandeur apporte des modifications à son FRP sans changer les faits relatés, mais tout simplement pour y ajouter des précisions, cet élément, à lui seul, ne mine pas la présomption que son témoignage est véridique. En l’espèce, le demandeur principal avait déclaré dans son premier FRP qu’en raison de ses activités politiques, il avait reçu des appels de menace de la part de membres des Cercles bolivariens et des FARC. Dans le FRP modifié, le demandeur principal a relaté les mêmes faits, mais de façon plus détaillée. Il a également expliqué pourquoi les renseignements fournis dans son premier FRP étaient de nature si générale : il n’avait pas bénéficié du soutien de son premier avocat.

 

[19]           Vu qu’aucune preuve ne contredit les faits relatés par le demandeur principal, ceux‑ci sont considérés comme véridiques. Toutefois, la Section a conclu que les faits relatés étaient invraisemblables et les a rejetés pour cette raison. Pour légitimement pouvoir tirer cette conclusion, la Section devait expliquer pourquoi elle estimait que les faits présentés par le demandeur principal débordaient le cadre de ce à quoi on pouvait logiquement s’attendre; elle ne l’a pas fait. La Section a conclu que les allégations faites dans le FRP modifié étaient « graves » et « au cœur » de la demande d’asile, que le demandeur principal était représenté par un conseiller juridique lorsqu’il a rempli son FRP et que, dans les instructions sur la façon de remplir le FRP, on avisait les demandeurs de fournir tous les faits importants qui les avaient incités à demander l’asile. La Section a conclu qu’il était en conséquence déraisonnable que les précisions fournies dans le FRP modifié ne figuraient pas dans le premier FRP. La Section a par la suite consacré deux pages de sa décision à la question de savoir si le premier avocat des demandeurs avait vraiment fait preuve de négligence; elle a conclu que non. L’explication donnée pour justifier les omissions relevées dans le premier FRP n’était donc « pas raisonnable ».

 

[20]           Ce raisonnement est déficient parce que la Section n’a pas expliqué pourquoi elle estimait que les faits relatés par le demandeur principal débordaient le cadre de ce à quoi on pouvait logiquement s’attendre. Elle n’a pas procédé à une analyse des faits relatés par le demandeur principal et s’est plutôt penchée sur la question de savoir si le premier avocat avait fait preuve de négligence, ce qui n’est pas, à mon avis, un facteur pertinent.  

 

            B. L’absence d’une preuve corroborante

[21]           La Section n’a pas cru l’affirmation du demandeur principal selon laquelle il avait donné une entrevue radiophonique et qu’il avait reçu un appel de menace par la suite. La raison qu’elle a donnée pour ne pas croire cette affirmation, c’est que le demandeur principal n’avait pas été en mesure de fournir une preuve confirmant la tenue de l’entrevue.

 

[22]           Vu que la présomption selon laquelle le témoignage du demandeur principal est véridique, la Section ne peut pas conclure que les faits qu’il a relatés ne sont pas crédibles pour le seul motif qu’il n’a pas fourni de preuve corroborante (Ahortor c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 705). Le demandeur principal a témoigné quant à l’existence de l’émission radiophonique et quant à la personne qui l’a interviewé et il a présenté des documents à l’appui. Cependant, dans son témoignage, il a dit que bien qu’il eût communiqué avec le personnel de la station de radiodiffusion, il n’avait pas été en mesure d’obtenir une copie de l’enregistrement de l’émission. En l’absence d’une preuve niant la tenue de l’entrevue ainsi que d’une raison convaincante de mettre en doute les faits relatés par le demandeur principal, je suis d’avis qu’il n’était pas loisible à la Section d’invoquer l’absence d’une preuve confirmant la tenue de l’entrevue pour douter de la crédibilité du demandeur.

 

 

            C. Les omissions commises à l’entrevue au point d’entrée

[23]           À son entrevue au point d’entrée, le demandeur principal devait énumérer ses persécuteurs. Il a mentionné les Cercles bolivariens, mais pas les FARC, parce qu’on lui avait dit d’être bref et parce qu’il s’agissait du groupe qu’il craignait le plus. Il est loisible à la Section de noter les omissions dans les notes au point d’entrée et d’y recourir pour décider du poids à accorder au témoignage d’un demandeur. Cependant, toute omission relevée doit être examinée dans le contexte donné et être évaluée à la lumière de l’ensemble de la preuve. En l’espèce, la Section a rejeté l’explication du demandeur principal concernant l’omission et a conclu, essentiellement, qu’il avait inventé les faits à l’égard des FARC puisqu’il avait omis de les mentionner. Vu que la Section n’a exposé aucun motif pour justifier cette conclusion et qu’elle n’a pas examiné la preuve recueillie au point d’entrée dans le contexte donné, je conclus que sa conclusion est manifestement déraisonnable.

 

            D. L’absence d’une crainte subjective

[24]           La Section n’a pas cru non plus que le demandeur principal avait une crainte subjective de persécution; elle a jugé invraisemblable que les demandeurs n’aient pas quitté le Venezuela plus tôt vu qu’ils subissaient des persécutions depuis quelque temps déjà et qu’ils détenaient tous des visas pour se rendre aux États-Unis.

 

[25]           La Section n’a exposé aucun motif pour justifier sa conclusion selon laquelle la façon d’agir des demandeurs était anormale. Elle a plutôt fondé sa conclusion sur une évaluation subjective qui n’a aucun rapport avec les faits relatés par le demandeur principal. En réalité, aucune analyse critique de la preuve n’a été réalisée. La preuve avancée par le demandeur principal, tant dans ses FRP que dans son témoignage, est la suivante : les demandeurs ont quitté le Venezuela au moment où ils sont partis en raison des trois incidents, mentionnés précédemment, qui ont eu lieu en mars 2004. Ces incidents étaient beaucoup plus graves que les incidents précédents et, selon le demandeur principal, les demandeurs ont constaté qu’ils n’échapperaient jamais à la persécution s’ils demeuraient au Venezuela. La Section n’a pas précisé, à la lumière de cette explication, la raison pour laquelle elle jugeait que le retard accusé par les demandeur à quitter le pays était anormal. En conséquence, je suis d’avis que cette conclusion de la Section est manifestement déraisonnable.

 

V.        Conclusion

[26]           La question à trancher est la suivante : La Section a-t-elle tiré les conclusions d’invraisemblance contestées conformément à la loi? J’estime que non. Par conséquent, je conclus que la décision visée par le contrôle judiciaire est manifestement déraisonnable.


ORDONNANCE

Compte tenu de ce qui précède, la décision de la Section est infirmée et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu’il statue à nouveau sur l’affaire.

 

                                                                                                            « Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Annie Beaulieu


 

 

 

 

 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        IMM-6022-06

 

INTITULÉ :                                       JAVIER DIAZ PUENTES ET AL. c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 18 décembre 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 19 décembre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Greg Willoughby

 

POUR LES DEMANDEURS

Leanne Briscoe

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Greg Willoughby,

Law Professional Corporation

 

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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