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Date : 20071119

Dossier : T‑1526‑07

Référence : 2007 CF 1209

 

ENTRE :

 

RON CROWE

 

demandeur

 

et

 

 

LA JUGE EN CHEF DU CANADA BEVERLY MCLACHLIN,

LA JUGE CHARRON ET

LE JUGE ROTHSTEIN, DE LA Cour suprême du Canada,

LE JUGE EN CHEF DE L’ONTARIO ROY MCMURTRY,

LA JUGE FELDMAN ET

LA JUGE LANG, DE LA COUR D’APPEL DE L’ONTARIO,

LA JUGE JANET WILSON,

DE LA COUR SUPÉRIEURE DE JUSTICE DE L’ONTARIO,

LE JUGE RICHARD SCOTT, JUGE EN CHEF DU MANITOBA

ET PRÉSIDENT DU COMITÉ SUR LA CONDUITE DES JUGES DU CONSEIL

CANADIEN DE LA MAGISTRATURE (tous ès qualités et à titre personnel)

et LE CONSEIL CANADIEN DE LA MAGISTRATURE

 

défendeurs

 

 

 

MOTIFS DES ORDONNANCES

 

 

[1]               La question soulevée par les requêtes en rejet dont je suis saisi est de savoir si une action en responsabilité de 5 milliards de dollars est recevable devant la Cour à l’encontre :

a)         d’une juge de la Cour supérieure de justice de l’Ontario qui, saisie d’une requête en jugement sommaire, a ordonné que soit décidé par procédure sommaire le point de savoir si M. Crowe était lié par un règlement à l’amiable qu’il avait signé;

b)         des trois juges de la Cour d’appel de l’Ontario qui ont rejeté sa demande d’autorisation de faire appel de ladite ordonnance;

c)         des trois juges de la Cour suprême du Canada qui à leur tour ont rejeté sa demande d’autorisation de pourvoi à l’encontre de la décision de la Cour d’appel;

d)         du Conseil canadien de la magistrature, et de son président, qui ont refusé d’enquêter sur sa plainte déposée contre la juge de première instance.

 

[2]               La réponse se trouve dans trois arrêts de la Cour suprême : Morier et Boily c. Rivard, [1985] 2 R.C.S. 716, ITO‑International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc., [1986] 1 R.C.S. 752, et Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, [2003] 3 R.C.S. 77.

 

[3]               Les requêtes seront accueillies. La déclaration sera radiée dans son intégralité, sans autorisation de la modifier, et l’action sera rejetée pour les trois motifs suivants, qui ne sont pas tous également applicables à chacun des défendeurs :

a)         l’action échappe à la compétence de la Cour;

b)         la déclaration ne révèle aucune cause d’action valable, le principe de l’immunité judiciaire tenant lieu de défense absolue;

c)                  l’action constitue par ailleurs un abus de procédure.

 

[4]               Le mois dernier, j’ai radié la déclaration de M. Crowe et rejeté son action dans la mesure où elle était dirigée contre son assureur‑invalidité, ainsi que les dirigeants et administrateurs de cet assureur, contre l’avocat qui l’avait représenté dans la procédure introduite devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario et contre le procureur général du Canada, représentant la Couronne fédérale. Les motifs sont publiés sous l’intitulé : Crowe c. Procureur général du Canada, 2007 CF 1020. M. Crowe a fait appel de ces ordonnances.

 

[5]               Les défendeurs restants ont par la suite déposé de leur propre requête en radiation de la déclaration et en rejet de l’action dans la mesure où elle était dirigée contre eux.

 

I.   Le contexte

[6]               Comme je l’écrivais dans les motifs de l’ordonnance rendue antérieurement, cette action a pour origine une police d’assurance‑invalidité que M. Crowe avait souscrite auprès de ManuLife. Avec l’aide de son avocat, il a introduit une procédure contre ManuLife devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario. Au cours d’une séance obligatoire de médiation, les parties et leurs avocats ont signé un document qu’ils ont intitulé « règlement à l’amiable ». Le document constituait la mise par écrit de leur entente. L’assureur a accepté de payer la somme de 65 000 $ à M. Crowe, et M. Crowe s’est engagé à [traduction] « signer une quittance définitive et intégrale, en une forme acceptable pour la défenderesse, y compris une exclusion portant sur toute réclamation future pour invalidité, jusqu’au 6 mars 2007, au cas où le demandeur retournerait au travail avant le 6 mars 2007 avec le même titulaire de police ».

 

[7]               Peu après, ManuLife lui a présenté une formule de quittance. M. Crowe a refusé de la signer. Selon lui, les modalités ne correspondaient pas, voire étaient contraires, aux conditions de l’entente apparaissant dans le document de règlement. Il a congédié son avocat, puis s’est représenté lui‑même dans l’action.

 

[8]               ManuLife a présenté une requête en jugement sommaire sur le document de règlement. M. Crowe a riposté en demandant le rejet de la requête. Le 9 décembre 2005, la juge de première instance, la juge Wilson, a ordonné [traduction] « par consentement des deux parties, que les requêtes pendantes déposées par les parties suivent leur cours selon une procédure sommaire, qui permettra de dire si le demandeur est lié par l’entente conclue durant la médiation ». Elle a fixé la procédure sommaire pour la semaine du 27 février 2006.

 

[9]               M. Crowe a décidé de faire appel de cette ordonnance. Comme, à première vue, cette ordonnance avait été rendue par consentement des parties, il a demandé l’autorisation de la Cour d’appel de l’Ontario, comme le prévoit l’article 133 de la Loi sur les tribunaux judiciaires de l’Ontario. Puisque son action était une action ordinaire, qui ne relevait pas des règles applicables aux actions simplifiées, la juge Wilson ne pouvait ordonner une procédure sommaire qu’avec son consentement. S’il a donné ce consentement, c’est parce qu’il aurait été dupé par toutes les personnes concernées, y compris par la juge Wilson elle‑même. Il a fait valoir, entre autres, qu’il était déplacé de sa part d’évoquer la possibilité d’une procédure sommaire comme autre forme acceptable pour la tenue d’un procès, en ajoutant qu’elle lui avait donné des renseignements inexacts, incomplets et trompeurs sur la différence qu’il y a entre un procès sommaire et un procès ordinaire. La formation de la Cour d’appel, qui comprenait le juge en chef McMurtry et les juges Feldman et Lang, a rejeté sa demande d’autorisation d’interjeter appel de l’ordonnance.

 

[10]           M. Crowe a alors demandé l’autorisation de se pourvoir devant la Cour suprême du Canada. Dans son avis de demande, il soulevait plusieurs points. Il voulait savoir si une cour de justice était autorisée à obtenir par la persuasion le consentement d’une partie non représentée à ce qu’une action soit soumise à la procédure sommaire, et si une ordonnance « rendue par consentement » pouvait être considérée comme une ordonnance rendue d’un commun accord lorsque ladite ordonnance échappait au départ à la compétence de la Cour. Il voulait aussi savoir s’il était empêché de réclamer des dommages‑intérêts extracontractuels par suite de ladite ordonnance.

 

[11]           La formation de la Cour suprême, composée de la juge en chef McLachlin et des juges Charron et Rothstein, a rejeté sa demande d’autorisation de pourvoi.

 

[12]           Dans l’intervalle, il s’est plaint de la conduite de la juge Wilson auprès du Conseil canadien de la magistrature. Le Conseil, présidé par le juge Richard Scott, juge en chef du Manitoba, a refusé d’étudier la plainte.

 

[13]           Hormis d’autres actions que M. Crowe a engagées devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario, il a introduit des procédures devant la Cour fédérale et demande réparation à hauteur de 5 milliards de dollars à ManuLife et à ses dirigeants et administrateurs, à son ancien avocat, Paul Greco, au procureur général du Canada, qui représente la Couronne fédérale, aux juges désignés dans l’intitulé de la cause et au Conseil canadien de la magistrature, de même qu’à son président.

 

II.   Les premières ordonnances de rejet

[14]           La déclaration a été radiée, sans autorisation de la modifier, et l’action, dans la mesure où elle était engagée contre l’assureur, ses dirigeants et administrateurs, et contre M. Greco, l’ancien avocat de M. Crowe, a été rejetée au motif que la cause d’action échappait à la compétence de la Cour. Les sujets en litige concernaient « la propriété et les droits civils dans la province ». Le précédent invoqué à l’appui était l’arrêt ITO, précité, de la Cour suprême du Canada.

 

[15]           La déclaration a été radiée, sans autorisation de la modifier, et l’action, dans la mesure où elle était engagée contre le procureur général, a été rejetée, pour d’autres motifs. La Cour a compétence pour statuer sur les actions en responsabilité engagées contre la Couronne fédérale. Le fondement d’une telle action, selon la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, est que, dans certains cas, la Couronne répond des actions ou omissions de ses préposés. Cependant, les juges ne sont pas des préposés de la Couronne, et la déclaration ne révélait donc aucune cause d’action valable.

 

[16]           Il convient de mentionner que, durant l’audition de ces premières requêtes à Toronto le 26 septembre 2007, un avocat a comparu pour le Conseil canadien de la magistrature et pour les autres juges désignés dans la déclaration, à l’exception des trois juges de la Cour suprême. Il a prié la Cour de rejeter le recours déposé contre ses clients (et implicitement contre les trois juges de la Cour suprême) : a) pour les motifs invoqués par le procureur général dans son exposé; ou b) de la propre initiative de la Cour. J’ai refusé de le faire parce que le procureur général a dit qu’il n’avait reçu aucun mandat des juges de la Cour suprême et que, bien que la Cour puisse soulever la question de sa propre initiative, elle ne le ferait pas sans en donner un avis suffisant à M. Crowe.

 

[17]           D’ailleurs, comme je l’écrivais au paragraphe [32] des motifs de la première ordonnance, je n’avais pas l’assurance que la déclaration avait été signifiée aux juges, ou du moins validement signifiée. Il se peut fort bien que la comparution d’un avocat pour le Conseil canadien de la magistrature et pour les juges ontariens valait comparution à titre gracieux et renonciation à tout vice entachant la signification. Cependant, s’agissant des trois juges de la Cour suprême, l’affidavit de signification produit par M. Crowe précise que la déclaration leur a été signifiée par dépôt de copies aux bureaux du ministère fédéral de la Justice à Toronto, avec la mention [traduction] « à l’attention du ministre de la Justice et procureur général du Canada ». J’étais d’avis, et demeure d’avis, que ce n’était pas là une signification valide selon ce que prévoit l’article 128 des Règles des Cours fédérales.

 

III.   Les requêtes qui ont précipité la deuxième audience

[18]           Vu la décision que j’avais déjà rendue, mon sentiment que les trois juges de la Cour suprême n’avaient pas été informés qu’une procédure avait été introduite contre eux, et mes doutes sur l’à‑propos de ladite procédure, j’ai, le 15 octobre, et de ma propre initiative, ordonné à M. Crowe de se justifier en exposant les raisons pour lesquelles la déclaration déposée à l’encontre des défendeurs restants ne devrait pas être radiée pour les motifs suivants :

a.         compte tenu du principe de l’immunité judiciaire, la procédure introduite ne révèle aucune cause d’action valable;

b.         elle ne révèle aucune cause d’action valable qui puisse relever de la compétence de la Cour;

c.         elle est scandaleuse, frivole ou vexatoire ou constitue un abus de procédure de la Cour.

 

[19]           Sans doute M. Crowe ne fut‑il pas persuadé de la validité de la signification de sa déclaration aux trois juges de la Cour suprême, puisqu’il a déposé un deuxième affidavit de signification où il affirme que la déclaration leur a été signifiée à l’édifice de la Cour suprême, à Ottawa, le 15 octobre 2007.

 

[20]           Par la suite, des requêtes en rejet ont été déposées, séparément, par le Conseil canadien de la magistrature et al., et par les trois juges de la Cour suprême.

 

IV.   L’initiative prise par la Cour

[21]           Au cours de l’audience tenue le 6 novembre 2007, j’ai dit à M. Crowe que l’initiative que la Cour avait prise était devenue théorique eu égard aux requêtes déposées par les défendeurs restants eux‑mêmes. Il a exprimé son désaccord. Selon lui, les défendeurs n’auraient sans doute pas déposé leurs propres requêtes si la Cour ne l’avait pas prié de se justifier et, dans son exposé des points en litige, il posait la question suivante : [traduction] « Peut‑on raisonnablement dire que la Cour se comporte comme une institution judiciaire, ou agit‑elle plutôt comme si elle était l’avocat des défendeurs restants? »

 

[22]           La Cour est une cour de common law, d’amirauté et d’equity, et une cour supérieure d’archives, ainsi que le prévoit l’article 4 de la Loi sur les Cours fédérales. Ce sont la Constitution et le Parlement, non les parties, qui confèrent sa compétence à la Cour. La Cour ne saurait demeurer inerte et laisser l’administration de la justice tomber en discrédit, et il lui appartient de se demander si une procédure qui apparemment ne révèle aucune cause d’action valable, qu’elle relève ou non de la compétence de la Cour, devrait suivre son cours. Agir autrement équivaudrait de sa part à fermer les yeux sur les abus de la procédure.

 

[23]           Lorsque la Cour soulève un point de sa propre initiative, le mot « initiative » ne prétend pas évoquer un avis formel de requête, avec exposé des faits, énumération des points litigieux et observations écrites, comme l’envisagent les Règles. Le mot évoque plutôt l’expression d’une interrogation de la Cour, avec possibilité pour la partie concernée d’y répondre.

 

[24]           Le résultat ne va pas de soi. Dans l’arrêt Wire Rope Industries of Canada (1966) Ltd. c. B.C. Marine Shipbuilders Ltd. et al., [1981] 1 R.C.S. 363, un précédent que j’ai mentionné dans mes motifs antérieurs, les parties, la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale avaient toutes présumé que la Cour fédérale était compétente. La Cour suprême, de sa propre initiative, avait invité les parties à justifier cette présomption, mais avait finalement admis que la Cour fédérale avait bien compétence. Une affaire semblable à celle‑ci, qui intéressait le Conseil canadien de la magistrature, est la décision Chavali c. Canada, [2000] A.C.F. n° 1602, décision confirmée : [2002] A.C.F. n° 770, autorisation de pourvoi refusée : [2002] C.S.C.R. n° 364. La règle que j’ai invoquée, celle de l’article 221 des Règles, confirme « le pouvoir discrétionnaire résiduel inhérent » dont est investie la Cour « pour empêcher les abus de procédure » : arrêt Toronto (Ville), précité, la juge Arbour, au paragraphe 35.

 

[25]           Il s’ensuit que, lorsqu’un juge exprime une interrogation, cela n’en fait pas pour autant un avocat de telle ou telle des parties. M. Crowe n’a pas déposé une requête me priant de me récuser. Je ne me récuserais certainement pas de mon propre chef. Il m’est impossible de croire qu’« une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique », jugerait fondée une crainte de partialité (Committee for Justice and Liberty c. Canada (Office national de l’énergie), [1978] 1 R.C.S. 369, le juge de Grandpré, page 394.)

 

[26]           Comme je l’écrivais dans la décision Gordon c. Canada (Ministre de la Défense nationale), 2005 CF 223, [2005] A.C.F. n° 276, au paragraphe 12 :

La jurisprudence s’est déjà prononcée sur le rôle joué par le décideur, notamment le juge, dans les questions interlocutoires. Je considère que la décision Charkaoui (Re), 2004 CF 624, rendue récemment par mon collègue le juge Simon Noël, est on ne peut plus utile. Il avait été saisi d’une demande de récusation d’un juge et il a exposé les principes de droit pertinents aux paragraphes 5 et suivants de sa décision. Il a dit au paragraphe 8 :

La présomption d’intégrité et d’impartialité judiciaire est telle qu’elle reconnaît au juge la possibilité d’agir et de décider dans des circonstances où celui‑ci a déjà acquis une connaissance dans le cadre de procédures et de décisions antérieures impliquant les mêmes parties.

 

V.   La compétence de la Cour fédérale

[27]           Pour les motifs que j’ai exposés quand j’ai rejeté l’action engagée contre ManuLife et contre l’ancien avocat de M. Crowe, je suis d’avis que la Cour n’a pas compétence pour statuer sur l’action engagée contre la juge Wilson, le juge en chef McMurtry, les juges Feldman et Lang, la juge en chef McLachlin, et les juges Charron et Rothstein. Autoreprésenté, et nullement démonté par les précédents, M. Crowe dit que, tant qu’une loi fédérale peut être invoquée, la Cour fédérale a compétence à moins que cette compétence ne lui ait été expressément retirée. Plusieurs lois fédérales peuvent être invoquées, dont la Loi constitutionnelle, y compris ses dispositions relatives à la Charte, la Loi sur la Cour suprême et la Loi sur les juges.

 

[28]           Cependant, comme l’a dit maintes fois la Cour suprême, notamment dans l’arrêt ITO, précité, à la page 766, pour que l’on puisse conclure à la compétence de la Cour fédérale :

1.  il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral;

 

2.  il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et qui constitue le fondement de l’attribution légale de compétence;

 

3.  la loi invoquée dans l’affaire doit être « une loi du Canada », au sens où cette expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867.

 

 

 

[29]           Aucune compétence n’a été attribuée à la Cour fédérale pour les actions en responsabilité engagées contre les juges de l’Ontario ou ceux de la Cour suprême du Canada, et l’ensemble existant des règles de droit fédérales n’est pas essentiel, ni même utile, pour la solution du litige.

 

[30]           M. Crowe fait valoir que, n’eût été une ordonnance de la protonotaire Milczynski, il aurait modifié sa déclaration pour invoquer toute une série de lois fédérales. L’ordonnance de la protonotaire Milczynski est sans rapport avec la question. Elle concernait les requêtes de ManuLife, de l’ancien avocat de M. Crowe et du procureur général, requêtes qui devaient à l’origine être présentées le 10 septembre. M. Crowe a dit qu’il n’était pas prêt. La protonotaire a ajourné lesdites requêtes sine die et a gelé l’action jusqu’à ce qu’il en soit disposé.

 

[31]           Après que j’eus rendu mes ordonnances antérieures, la propre ordonnance de la protonotaire Milczynski était devenue caduque. Cependant, en tout état de cause, les articles 174 et 175 des Règles des Cours fédérales disposent que tout acte de procédure doit contenir un exposé concis des faits substantiels sur lesquels une partie se fonde. Il est loisible à une partie de soulever des points de droit. M. Crowe a été en mesure de prétendre, à tort selon moi, que plusieurs lois fédérales rendaient la Cour compétente.

 

VI.   La responsabilité du Conseil canadien de la magistrature

[32]           La Cour a compétence pour juger les actes du Conseil canadien de la magistrature. Le Conseil est un office fédéral, et ses décisions sont donc susceptibles d’être contestées par procédure de contrôle judiciaire devant la Cour, en vertu des articles 18 et suivants de la Loi sur les Cours fédérales (voir l’arrêt Cosgrove c. Conseil canadien de la magistrature, 2007 CAF 103, 279 D.L.R. (4th) 352).

 

[33]           C’est en vertu de la Loi sur les juges que le Conseil a été constitué. Il comprend le juge en chef du Canada et les autres juges en chef et juges en chef adjoints, selon l’énumération qui apparaît dans l’article 59 de cette Loi. Il a pour mission d’améliorer le fonctionnement des juridictions supérieures, ainsi que la qualité de leurs services judiciaires, et de favoriser l’uniformité dans l’administration de la justice devant ces tribunaux. L’article 63 dispose que le Conseil « peut en outre enquêter sur toute plainte ou accusation relative à un juge d’une juridiction supérieure ».

 

[34]           Le Conseil a reçu une plainte de M. Crowe à l’encontre de la juge Wilson, mais il a refusé d’enquêter sur la plainte. Il convient de garder à l’esprit que le mandat du Conseil, dans ce contexte, est d’enquêter, s’il le juge à propos, sur la conduite des juges, mais non sur l’à‑propos de leurs décisions. S’agissant de l’à‑propos de l’ordonnance rendue par la juge Wilson, M. Crowe avait deux possibilités. La première, qui est aujourd’hui épuisée, était d’interjeter appel. La deuxième, qui est encore d’actualité, consiste à demander que l’ordonnance soit modifiée ou annulée, un aspect sur lequel j’en dirai davantage.

 

[35]           Il est loisible à M. Crowe de présenter devant la Cour une demande de contrôle judiciaire à l’encontre du refus du Conseil d’ouvrir une enquête. Le délai normal de 30 jours est depuis longtemps expiré, mais l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales autorise un juge de la Cour à proroger ce délai.

 

[36]           La partie qui demande des dommages‑intérêts par suite de la décision d’un office fédéral doit affronter un maquis procédural. D’une part, il n’est pas loisible à la Cour d’accorder des dommages‑intérêts dans une procédure de contrôle judiciaire. De l’autre, une procédure de contrôle judiciaire est l’une des conditions préalables à une action en responsabilité (Canada c. Grenier, 2005 CAF 348, [2006] 2 R.C.F. 287). Il y a eu des cas où, si la déclaration révélait une cause d’action tant soit peu défendable, la Cour a suspendu cette action au lieu de la rejeter (Momi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 738, [2007] 2 R.C.F. 291). Cependant, la déclaration de M. Crowe ne révèle aucune cause d’action valable à l’encontre du Conseil canadien de la magistrature, ou à l’encontre de son président intérimaire, le juge en chef Scott. Même si le Conseil et le juge en chef Scott n’étaient pas revêtus de l’immunité judiciaire, ce qui paraît improbable puisqu’ils exerçaient des fonctions que leur imposait la Loi sur les juges, le plus que M. Crowe ait pu espérer était que le Conseil recommande au Parlement de destituer la juge Wilson. Une telle recommandation n’aurait pas mis un cent dans sa poche. Il n’y a aucun lien de causalité entre le présumé manquement à l’obligation que, dit‑il, le Conseil et son président avaient envers lui, et les dommages‑intérêts de cinq milliards de dollars qu’il réclame.

 

VI.   L’immunité judiciaire

[37]           Il serait plutôt stérile de limiter le rejet de l’action en cause à des arguments fondés sur la compétence, arguments dont il a déjà été fait appel pour ce qui concerne les autres défendeurs. L’immunité des juges à l’égard d’éventuelles poursuites est un important principe constitutionnel. Les juges doivent agir avec impartialité. Ainsi que l’écrivait lord Denning dans l’arrêt Sirros v. Moore, [1974] 3 All E.R. 776, [1975] Q.B. 118, à la page 136 :

[traduction] À l’époque moderne, j’opterais pour la formulation suivante: en principe, les juges des cours supérieures n’ont pas plus de prétention à l’immunité que les juges des cours d’instance inférieure. Tous les juges des cours du pays, de l’instance la plus haute à la plus inférieure, devraient jouir des mêmes privilèges et être soumis aux mêmes responsabilités. Si la raison d’être de l’immunité est de garantir qu’ils « soient libres d’esprit et indépendants de pensée » elle s’applique à tous les juges indépendamment de leur rang. Tout juge doit être à l’abri de toute action en responsabilité lorsqu’il agit de façon judiciaire. Tout juge devrait être en mesure de travailler en toute indépendance et à l’abri de toute crainte. Il ne doit pas feuilleter ses recueils en tremblant et en se demandant « Si je prends ce parti, suis‑je exposé à une action en responsabilité? » Pour autant qu’il exerce ses fonctions de bonne foi et sincèrement convaincu d’agir dans les limites de sa compétence, il est à l’abri de toute poursuite. Il peut commettre une erreur sur les faits, il peut ne pas connaître le droit, ce qu’il fait peut être hors de sa compétence, en fait ou en droit, mais pour autant qu’il est sincèrement convaincu d’agir dans les limites de sa compétence, il ne doit pas être recherché en responsabilité. Dès qu’il en est sincèrement convaincu, rien d’autre ne peut le rendre sujet à poursuite. Il ne peut être inquiété par des allégations de mauvaise foi, de préjudice ou d’autre chose de semblable. On a déjà radié des actions fondées sur ces allégations et on continuera de le faire. Rien ne peut le rendre sujet à des poursuites sauf la démonstration qu’il n’exerçait pas une fonction judiciaire, en sachant qu’il n’avait pas la compétence d’agir.

 

[38]           L’immunité des juges des juridictions supérieures du Canada a été décrite par la Cour suprême dans l’arrêt Morier, précité, aux paragraphes 85 et suivants. Le point soulevé dans ce précédent était de savoir si les membres de la Commission de police du Québec jouissaient de la même immunité que les juges des juridictions supérieures. La réponse était affirmative, comme l’expliquait le juge Chouinard, au paragraphe 110 :

En effet, en l’espèce il est incontestable que les appelants, membres de la Commission de police, étaient compétents pour faire enquête et pour faire rapport. Il est possible qu’ils aient excédé leur compétence en posant ou en omettant de poser les actes décrits dans la déclaration. Il est possible qu’ils aient violé les règles de la justice naturelle, qu’ils n’aient pas informé l’intimé des faits qu’on lui reprochait et qu’ils ne l’aient pas entendu. Il est possible qu’ils aient violé la Charte des droits et libertés de la personne. Ce sont là autant d’allégations de nature à appuyer l’autre recours de l’intimé visant à faire annuler le rapport de la Commission de police et la preuve recueillie. La Cour supérieure demeure saisie de ce recours sur lequel, évidemment, je ne me prononce pas. Mais ce ne sont pas à mon avis des allégations propres à fonder un recours en dommages.

 

 

 

[39]           Il ressort clairement de l’arrêt Morier que l’immunité des juges n’est pas absolue. Un juge doit agir en tant que juge. C’est là une condition préalable à toute affirmation d’après laquelle il n’est pas sincèrement convaincu d’agir dans les limites de sa compétence. Comme l’écrivait lord Denning, « Rien ne peut le rendre sujet à des poursuites sauf la démonstration qu’il n’exerçait pas une fonction judiciaire, en sachant qu’il n’avait pas la compétence d’agir. »

 

[40]           L’immunité partielle à l’égard d’éventuelles poursuites permet de garantir l’indépendance de la justice. Comme l’écrivait la juge Sharlow dans l’arrêt Cosgrove, précité :

[30]      L’indépendance judiciaire est un droit fondamental des justiciables, qui leur garantit que les juges prononceront sur les causes dont ils sont saisis à l’abri de toute ingérence, réelle ou apparente, notamment de l’ingérence de quiconque représente le pouvoir exécutif ou le pouvoir législatif : voir l’arrêt Beauregard c. Canada, [1986] 2 R.C.S. 56, paragraphe 21, et l’arrêt R. c. Lippé, [1991] 2 R.C.S. 114, page 139.

 

[31]      Le juge Strayer avait exposé ce principe comme il suit dans le jugement Gratton c. Conseil canadien de la magistrature (1re inst.), [1994] 2 C.F. 769, au paragraphe 16 (cité avec approbation dans l’arrêt Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, [1997] 3 R.C.S. 3, au paragraphe 329) :

 

Qu’il suffise de dire que l’indépendance judiciaire fait partie intégrante de notre société libre et démocratique. Elle est reconnue et sauvegardée par la Constitution et les conventions constitutionnelles, par les lois et par la common law. Elle sert essentiellement à permettre aux juges de rendre des décisions en conformité avec leur conception du droit et des faits, sans avoir à craindre de subir eux‑mêmes des conséquences fâcheuses. Cela s’impose pour assurer au public que, tant en apparence qu’en réalité, leurs causes seront jugées, leurs lois interprétées et leur Constitution appliquée sans distinction de personnes. La garantie aux juges de pouvoir rester en poste sans subir d’ingérence irrégulière dans l’exercice de leurs fonctions est indispensable à l’indépendance de la justice […] Mais il importe tout autant de se rappeler que la protection de l’inamovibilité [traduction] « vise à profiter non pas aux juges, mais bien aux justiciables ».

 

 

VIII.   La responsabilité de la juge Wilson

[41]           On peut supposer que les trois juges de la Cour d’appel de l’Ontario qui ont refusé au demandeur l’autorisation d’en appeler étaient d’avis que la juge Wilson agissait dans les limites de sa compétence. La transcription de la procédure qui s’est déroulée devant elle le 9 décembre 2005 montre clairement qu’elle agissait dans les limites de sa compétence. Par ailleurs, il est manifeste et évident qu’elle était convaincue d’agir dans les limites de cette compétence.

 

[42]           Ce que dit M. Crowe, c’est qu’elle ne pouvait pas, sans son consentement, ordonner la tenue d’une procédure sommaire portant sur la question du règlement. Elle aurait, comme tous les autres, obtenu ce consentement par fraude. Ce propos est totalement dépourvu de fondement. Plutôt que de statuer sur la requête de l’assureur en jugement sommaire, elle a dit que ce qui avait été convenu, ou qui ne l’avait pas été, lors de la médiation, c’était un autre point distinct, susceptible d’être décidé, et qui pouvait l’être rapidement à la faveur d’une procédure sommaire. M. Crowe voulait alors poursuivre l’assureur et obtenir de lui des dommages‑intérêts exemplaires. Elle lui a clairement fait observer que, même s’il pouvait invoquer tous les arguments qu’il voulait au cours d’une procédure sommaire à propos du comportement de l’assureur, cette procédure serait limitée à la question de savoir s’il y avait ou non entente exécutoire. Dans la négative, l’action se poursuivrait, et il pourrait solliciter des dommages‑intérêts extracontractuels comme il le jugerait à propos.

 

[43]           Après avoir consenti à ce que l’affaire suive son cours de cette manière, M. Crowe a changé d’avis. Il croit que, en raison de l’ordonnance de la juge Wilson, il ne pourra plus jamais contester l’existence de l’entente. M. Crowe a tort de penser ainsi. Comme, à l’époque, il se représentait lui‑même, la juge Wilson a employé le mot « malentendu » au lieu de termes plus techniques décrivant le droit applicable aux erreurs. Elle a même obtenu de l’avocat de ManuLife l’admission selon laquelle, si M. Crowe obtenait gain de cause dans la procédure sommaire, alors il n’existait aucune entente, et l’action se poursuivrait.

 

[44]           M. Crowe a invoqué un arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario, Law Society of Upper Canada c. Ernst & Young, (2003) 65 O.R. (3d) 577, 227 D.L.R. (4th) 577. Il s’est totalement fourvoyé sur le sens de ce précédent. Le Barreau de l’Ontario avait engagé une procédure contre ses anciens vérificateurs et actuaires en alléguant avoir subi un préjudice parce qu’ils avaient sous‑évalué ses déficits et obligations relativement aux réclamations non réglées au titre de son régime d’assurance‑responsabilité civile professionnelle. Les défendeurs ont nié toute responsabilité contractuelle ou délictuelle. Ils ont demandé le rejet de l’action par voie de jugement sommaire et ont également sollicité un jugement déclaratoire sur une question de droit, à savoir si le demandeur avait subi un préjudice donnant lieu à des dommages‑intérêts. Ils faisaient valoir que, même s’ils avaient été négligents, des dommages‑intérêts n’auraient pu être accordés parce que le Barreau de l’Ontario avait transféré sa perte à ses propres membres au moyen de cotisations supplémentaires et majorés. Pour que l’affaire puisse suivre son cours comme elle l’a fait, ils ont admis, mais uniquement aux fins de leurs requêtes, qu’une rupture de contrat, une faute et une déclaration inexacte faite par négligence pouvaient être établies. Le juge de première instance a estimé que la défense de « transmission », ainsi appelée, n’était pas recevable, mais il a considéré qu’une portion de la réclamation du Barreau de l’Ontario, celle qui concernait les intérêts perdus qu’il aurait recueillis sur les primes, ne pouvait pas être admise. Il en a résulté un appel et un appel incident.

 

[45]           Finalement, la Cour d’appel a estimé que le juge de première instance s’était fourvoyé sur la défense de « transmission », parce qu’il n’était pas manifeste et évident qu’une telle défense n’était pas recevable. Par conséquent, l’affaire devait être rejugée. Cependant, deux des trois juges ont exprimé l’avis que l’admission hypothétique d’une faute de la part des défendeurs n’était pas fatale pour une requête en jugement sommaire. Il n’y a dans ce précédent absolument rien qui appuie l’argument de M. Crowe selon lequel l’ordonnance de la juge Wilson l’a forcé à admettre l’existence d’une entente.

 

IX.   La responsabilité des autres juges

[46]           Il s’ensuit que les autres juges agissaient tous en tant que juges, dans les limites de leur compétence. Il n’y a absolument rien pour appuyer l’idée saugrenue de M. Crowe pour qui tous étaient de connivence, non seulement les uns avec les autres, mais avec ManuLife, avec le gouvernement fédéral et avec l’ancien avocat de M. Crowe, M. Greco, dans le dessein de l’escroquer.

 

[47]           Par ailleurs, s’agissant de la Cour suprême, la loi de l’offre et de la demande entre en jeu. La Cour suprême ne peut se prononcer que sur un certain nombre de pourvois. S’agissant de l’examen des demandes d’autorisation de pourvoi, le paragraphe 40(1) de la Loi sur la Cour suprême prévoit ce qui suit :

[…] lorsque la Cour estime, compte tenu de l’importance de l’affaire pour le public, ou de l’importance des questions de droit ou des questions mixtes de droit et de fait qu’elle comporte, ou de sa nature ou importance à tout égard, qu’elle devrait en être saisie et lorsqu’elle accorde en conséquence l’autorisation d’en appeler.

 

 

 

X.   L’abus de la procédure

 

[48]           Comme je l’ai dit précédemment dans les présents motifs, M. Crowe avait deux moyens d’exprimer d’une manière judiciaire son déplaisir à l’égard de l’ordonnance de la juge Wilson. Il pouvait en appeler, ou bien il pouvait présenter une requête en annulation ou en modification de l’ordonnance.

 

[49]           La procédure d’appel a été épuisée. Plus récemment, M. Crowe a déposé devant la Cour supérieur de l’Ontario une requête en vue de faire annuler pour fraude l’ordonnance de la juge Wilson. Cette requête est pendante. Pour les motifs exposés dans l’arrêt Morier, précité, il serait inopportun de ma part de m’exprimer sur cette requête.

 

[50]           Les contestations avancées par M. Crowe devant la Cour à propos des décisions rendues par la Cour supérieure de justice de l’Ontario, par la Cour d’appel de l’Ontario et par la Cour suprême du Canada sont en réalité des contestations parallèles ou, sinon, un abus de la procédure de la Cour (voir l’arrêt Toronto (Ville), précité, et la décision S.G. c. Larochelle, [2004] A.J. nº 264, confirmée par la Cour d’appel de l’Alberta : [2005] A.J. nº 242).

 

XI.   Les dépens

[51]           En accord avec les motifs que j’ai exposés dans la procédure antérieure, l’avocat du Conseil canadien de la magistrature et des juges autres que ceux de la Cour suprême, qui a pris les rênes de l’argumentation, a limité à 1 000 $ les dépens qu’il sollicite. Cette somme est bien inférieure à celle que prévoit le tarif, et elle sera accordée. Les juges de la Cour suprême n’ont pas sollicité de dépens, et il n’en sera pas accordé.

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑1526‑07

 

INTITULÉ :                                                   RON CROWE
c.
LA JUGE EN CHEF DU CANADA BEVERLY MCLACHLIN et al.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 6 NOVEMBRE 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :              LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 19 NOVEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ron Crowe

 

LE DEMANDEUR (en son propre nom)

Janice E. Cheney

POUR LES DÉFENDEURS

La juge en chef du Canada Beverly McLachlin et la juge Charron et le juge Rothstein, de la Cour suprême du Canada

 

Martin W. Mason

POUR LES DÉFENDEURS

Le juge en chef de l’Ontario Roy McMurtry, la juge Feldman et la juge Lang de la Cour d’appel de l’Ontario, la juge Janet Wilson, de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, le juge Richard Scott, juge en chef du Manitoba et président du Comité sur la conduite des juges du Conseil canadien de la magistrature (tous ès qualités et à titre personnel)

 

 

Michael Birley

POUR LA DÉFENDERESSE

ManuLife Insurance Company et al.

 

Derek Allen

POUR LE DÉFENDEUR le procureur général du Canada

 

Leslie Albert

 

POUR LE DÉFENDEUR Paolo Greco

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ron Crowe

Toronto (Ontario)

 

LE DEMANDEUR (en son propre nom)

 

Janice E. Cheney

Conseillère juridique, Direction juridique

Cour suprême du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DÉFENDEURS

la juge en chef du Canada Beverly McLachlin et la juge Charron et le juge Rothstein, de la Cour suprême du Canada

 

Gowling Lafleur

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DÉFENDEURS

le juge en chef de l’Ontario Roy McMurtry, la juge Feldman et la juge Lang, de la Cour d’appel de l’Ontario, la juge Janet Wilson, de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, le juge Richard Scott, juge en chef du Manitoba et président du Comité sur la conduite des juges du Conseil canadien de la magistrature (tous ès qualités et à titre personnel)

 


John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

le procureur général du Canada

Gilbert Wright & Kirby

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR Paolo Greco

 

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