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Date : 20071001

Dossier : IMM-1280-06

Référence : 2007 CF 987

Ottawa (Ontario), le 1er octobre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

 

 

ENTRE :

OSCAR ALEX DIAZ RIVERA

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), à l’égard de la décision, en date du 20 février 2006, par laquelle un agent d’immigration a conclu que le demandeur était inadmissible à présenter une demande de résidence permanente au titre de la catégorie des titulaires de permis.

 

Contexte

 

[2]               Le demandeur, Oscar Diaz Rivera, est citoyen du Honduras. Il est entré au Canada en septembre 1987 et a demandé l’asile dès son arrivée. En 1988, on a examiné sa demande et, comme on a conclu que sa demande présentait un minimum de fondement, il a été admis en 1992 en application du Règlement sur les arriérés pour des motifs d’ordre humanitaire. En 1993, le demandeur a subi avec succès les vérifications obligatoires d’antécédents judiciaires et de sécurité, mais sa demande de résidence permanente a été mise en suspens parce qu’il a été accusé d’une série infractions criminelles en février 1993.

 

[3]               Les chefs d’accusations ont été retirés en avril 1995, mais l’examen médical du demandeur avait expiré et il a donc dû se soumettre un autre examen. Le rapport médical produit en mai 1996 indiquait que le demandeur avait contracté le VIH. Par conséquent, il a été déclaré inadmissible pour des raisons médicales en vertu de l’alinéa 19(1)a) de la Loi sur l’immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (l’ancienne Loi).

 

[4]               Le demandeur a présenté une demande de dispense ministérielle et, en 1998, Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) a recommandé qu’un permis ministériel soit délivré au demandeur. Malgré la recommandation positive de CIC, qui a été approuvée par un agent des visas, son supérieur et son gestionnaire, le demandeur n’a jamais reçu de permis parce que son dossier a été renvoyé pour être soumis à un examen plus approfondi.

 

[5]               Une deuxième recommandation positive a été faite le 21 décembre 2000. Dans une lettre datée du 4 janvier 2001, le demandeur a été avisé que sa demande de permis ministériel avait été approuvée, mais il n’a reçu le permis qu’en avril 2001. Le permis, qui a été signé le 23 avril 2001, était valide jusqu’au 4 janvier 2004. Le permis était en vigueur depuis le 5 janvier 2001. Dans la lettre du 4 janvier 2001, on informait également le demandeur que les étrangers qui ont résidé sans interruption au Canada pendant au moins cinq ans en ayant un permis délivré par le ministre pouvaient demander au gouverneur en conseil le droit d’établissement en vertu du paragraphe 38(1) de l’ancienne Loi.

 

[6]               La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR), L.C. 2001, ch. 27, est entrée en vigueur en juillet 2003. Dans la LIPR, les permis ministériels sont appelés des permis de séjour temporaire (PST). Le détenteur d’un PST peut demander la résidence permanente s’il appartient à la catégorie des titulaires de permis en vertu de l’article 65 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement). L’alinéa 65(b)a) du Règlement prévoit que, pour appartenir à la catégorie des titulaires de permis, l’étranger qui est interdit de territoire pour motifs sanitaires doit avoir résidé sans interruption au Canada au titre de ce permis pendant une période minimale de trois ans.     

 

[7]               En avril 2004, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente en tant que personne appartenant à la catégorie des titulaires de permis. Dans une lettre datée du 20 février 2006, on a avisé le demandeur qu’il n’était pas admissible à demander la résidence permanente à ce titre. Il s’agit du contrôle judiciaire de cette décision.

 

Motifs de l’agent

 

[8]               Dans sa décision datée du 20 février 2006, l’agent a conclu que le demandeur n’était pas admissible à présenter une demande de résidence permanente au titre de la catégorie des titulaires de permis. L’extrait pertinent de la décision est le suivant :

[traduction] Pour que vous soyez admissible au titre de cette catégorie, vous devez avoir possédé un permis de séjour temporaire pendant une période de trois ou de cinq ans, selon les circonstances. Votre dossier indique qu’on vous a délivré le 23 avril 2001 un permis de séjour temporaire en raison de votre inadmissibilité pour raisons médicales. Ce permis était valide jusqu’au 4 janvier 2004. Selon nos dossiers, aucune prolongation n’a été demandée ni accordée et vous n’êtes donc pas admissible à présenter une demande de résidence permanente, étant donné que vous n’avez pas résidé au Canada pendant la période requise.

 

[9]               L’extrait pertinent des notes du STIDI indique ce qui suit :

[traduction] LE DOSSIER INDIQUE QU’UN PERMIS A ÉTÉ DÉLIVRÉ LE 23 AVRIL 2001 ET QU’IL EST VALIDE JUSQU’AU 4 JANVIER 2004. POUR RAISONS MÉDICALES. AUCUNE PROLONGATION N’A ÉTÉ DEMANDÉE NI ACCORDÉE. PAR CONSÉQUENT, IL N’A PAS RÉSIDÉ AU CANADA PENDANT LA PÉRIODE REQUISE AU TITRE DU PERMIS.

 

[10]           Le 29 mai 2007, les parties ont informé la Cour qu’elles avaient convenu que la demande de contrôle judiciaire devait être accordée, mais qu’elles ne s’entendaient pas sur la forme que devait prendre l’ordonnance.

 

[11]           Question en litige

            Quelle devrait être la teneur de l’ordonnance?

 

Observations des parties

 

[12]           Le demandeur a demandé que l’ordonnance prévoie, dans les termes suivants,

i)       que soit annulée la décision du 20 février 2006 rejetant la demande de résidence permanente du demandeur au titre de la catégorie des titulaires de permis de séjour temporaire;

 

ii)      que la demande de résidence permanente du demandeur soit réexaminée par un autre agent d’immigration sur le fondement que le demandeur appartient à la catégorie des titulaires de permis en vertu des articles 64 et 65 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés;

 

iii)      que la demande de résidence permanente du demandeur soit réexaminée dans les six mois de la date de l’ordonnance de la Cour accueillant la demande de contrôle judiciaire;

 

iv)     que la Cour demeure saisie de la présente affaire et que, si la demande de résidence permanente du demandeur n’est pas réexaminée dans les six mois, la Cour évalue le besoin de fixer une nouvelle date;

 

v)      qu’un permis de séjour temporaire soit délivré au demandeur en attendant le réexamen de sa demande de résidence permanente;

 

vi)     que les dépens soient adjugés et taxés par la Cour à l’audience;

 

 

Le demandeur a demandé que des dépens lui soient adjugés sur la base avocat‑client.

 

[13]           Le défendeur a accepté l’inclusion du paragraphe i) dans l’ordonnance, mais s’est opposé aux autres propositions.

 

Décision

 

[14]           En ce qui concerne le paragraphe ii), je ne suis disposé qu’à inclure la partie suivante dans l’ordonnance : « que la demande de résidence permanente du demandeur soit réexaminée par un autre agent d’immigration ». Je ne suis pas disposé à inclure le reste du paragraphe, car je crois que l’agent doit tirer d’autres conclusions pour décider si le demandeur appartient à la catégorie des titulaires de permis.

 

[15]           Je ne suis pas disposé non plus à inclure le paragraphe iii) dans l’ordonnance puisque je ne sais pas combien de temps peut prendre un tel réexamen, mais je demanderais au défendeur de procéder au réexamen dans un délai raisonnable.

.

[16]           Je ne suis pas disposé à demeurer saisi de l’affaire puisque je n’ai pas imposé le délai de six mois sollicité par le demandeur. De toute façon, le demandeur peut présenter une demande à la Cour s’il estime que son réexamen n’est pas traité avec diligence.

 

[17]           En ce qui concerne le paragraphe v), je ne suis pas disposé à l’inclure parce qu’il ne s’agit pas du rôle de la Cour, mais du rôle de l’agent d’immigration.

 

[18]           Le demandeur a demandé que des dépens lui soient adjugés sur la base avocat‑client dans la présente affaire. Conformément à l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, il doit exister des raisons spéciales pour justifier l’adjudication de dépens. Je ne suis pas convaincu qu’il existe de telles raisons spéciales justifiant l’adjudication de dépens. Il me semble que l’agent a simplement commis une erreur dans le traitement du document. Le dossier semble indiquer que ni l’une ni l’autre des parties n’a remarqué l’erreur qu’à un stade avancé de l’instance. Comme aucuns dépens ne sont adjugés, le demandeur ne peut obtenir de dépens sur la base avocat‑client.

 

[19]           La demande de contrôle judiciaire est accueillie (sur consentement des parties) et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il rende une nouvelle décision.

 

[20]           Le demandeur a présenté les questions suivantes à titre de questions graves de portée générale aux fins de certification :

[traduction]

La Section de première instance de la Cour fédérale a‑t‑elle compétence pour ordonner au ministre de déclarer qu’un demandeur appartient à la catégorie des titulaires de permis en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales?

 

Lorsque le ministre ne tient pas compte d’une ordonnance antérieure de la Cour dans une procédure d’immigration connexe, s’agit-il d’une « raison spéciale » pour ordonner des dépens en application des Règles des cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés?

 

 

[21]           Je ne suis disposé à certifier ni l’une ni l’autre question parce qu’elles ne soulèvent pas des questions graves qui transcendent la présente instance.

JUGEMENT

 

[22]           LA COUR ORDONNE :

            1.         que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie;

            2.         que la décision du 20 février 2006 rejetant la demande de résidence permanente du demandeur au titre de la catégorie des titulaires de permis de séjour temporaire soit annulée;

            3.         que la demande de résidence du demandeur soit réexaminée par un autre agent d’immigration;

            4.         qu’aucuns dépens ne soient adjugés en l’espèce.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


ANNEXE

 

Dispositions législatives et réglementaires pertinentes

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 :

64. La catégorie des titulaires de permis est une catégorie réglementaire d’étrangers qui peuvent devenir résidents permanents sur le fondement des exigences prévues à la présente section.

65. Est un titulaire de permis et appartient à la catégorie des titulaires de permis l’étranger qui satisfait aux exigences suivantes:

 

a) il s’est vu délivrer un permis de séjour temporaire au titre du paragraphe 24(1) de la Loi;

 

b) il a résidé sans interruption au Canada au titre de ce permis, pendant une période minimale:

 

(i) de trois ans, dans le cas de l’étranger qui, selon le cas:

 

(A) est interdit de territoire pour motifs sanitaires aux termes du paragraphe 38(1) de la Loi,

 

. . .

 

c) il n’est pas devenu interdit de territoire aux termes de la Loi depuis la délivrance du permis;

 

 

64. The permit holder class is prescribed as a class of foreign nationals who may become permanent residents on the basis of the requirements of this Division.


65. A foreign national is a permit holder and a member of the permit holder class if

 

 

 

(a) they have been issued a temporary resident permit under subsection 24(1) of the Act;

 

(b) they have continuously resided in Canada as a permit holder for a period of

 

(i) at least three years, if they

 

 

(A) are inadmissible on health grounds under subsection 38(1) of the Act,

 

. . .

 

(c) they have not become inadmissible on any ground since the permit was issued; and

 

 

 

 

 

Règles des cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93‑22 :

22. Sauf ordonnance contraire rendue par un juge pour des raisons spéciales, la demande d’autorisation, la demande de contrôle judiciaire ou l’appel introduit en application des présentes règles ne donnent pas lieu à des dépens.

22. No costs shall be awarded to or payable by any party in respect of an application for leave, an application for judicial review or an appeal under these Rules unless the Court, for special reasons, so orders.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER                                                       IMM-1280-06

 

INTITULÉ :                                                   OSCAR ALEX DIAZ RIVERA

 

                                                                        - et -

 

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                        ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 30 mai 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 1er octobre 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Timothy Wichert

 

POUR LE DEMANDEUR

Martin Anderson

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Timothy Wichert

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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