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Date : 20070706

Dossier : T-927-06

Référence : 2007 CF 723

Ottawa (Ontario), le 6 juillet 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

 

 

ENTRE :

IRENE MCINTOSH

demanderesse

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et

LE COMITÉ DE L’ÉQUITÉ DE

L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU

 

défendeurs

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision du 12 mai 2006 par laquelle l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) a refusé d’accorder à la demanderesse, pour des raisons de difficulté financière, dispense des intérêts et des pénalités cotisés pour les années d’imposition 2000 à 2004 en application du paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, (5e supp.), ch. 1 (la Loi).

 

[2]               Dans son avis de demande, la demanderesse sollicite ce qui suit :

(i)                  une ordonnance annulant la décision datée du 12 mai 2006 de rejeter sa demande d’équité;

(ii)                une ordonnance prescrivant qu’on procède à une nouvelle cotisation;

(iii)               subsidiairement, une ordonnance prévoyant la renonciation aux pénalités et à l’arriéré d’intérêts, ou l’annulation de ceux-ci;

(iv)              une ordonnance pour les dépens.

 

[3]               Dans son mémoire des faits et du droit, la demanderesse sollicite l’annulation des intérêts et des pénalités ou, subsidiairement, demande qu’on recalcule les intérêts et les pénalités selon un taux de dix-sept pour cent et qu’on lui accorde un échéancier raisonnable pour effectuer ses paiements.

 

Le contexte

 

[4]               En date du 20 juillet 2006, la demanderesse devait 81 871,92 $ en pénalités et intérêts à l’égard des années d’imposition 2002, 2003 et 2004. La demanderesse a écrit au chef des appels de l’ADRC, le 19 mars 2005, pour lui demander d’être dispensée de verser les intérêts et pénalités cotisés pour les années d’imposition 2001 et 2002 en raison d’une situation particulière (problèmes familiaux). On a interprété cette lettre comme une demande présentée en vertu de la  disposition d’équité en vue de la renonciation aux intérêts et aux pénalités en raison d’une situation particulière. Cette demande a été rejetée au moyen d’une lettre datée du 16 novembre 2005, parce que la demanderesse n’avait pas fourni de preuve étayant sa prétention selon laquelle elle avait vécu des problèmes familiaux pendant la période en cause.

 

[5]               Par une lettre datée du 30 novembre 2005, la demanderesse a sollicité l’examen de la décision de rejeter sa demande d’équité. Elle y mentionnait avoir eu à la fois des problèmes familiaux et financiers qui l’avaient empêchée de produire promptement ses déclarations. La demanderesse précisait qu’elle avait dû s’occuper de sa mère, gravement malade, et que son fils avait détourné une importe somme d’argent pour payer des dettes de jeu. Le fils de la demanderesse avait également été arrêté et, prétendument, brutalisé par la police. De plus, l’époux de la demanderesse avait subi un accident d’automobile et n’avait été incapable de travailler pendant un an. La demanderesse était devenue déprimée et stressée et son revenu avait énormément diminué.

 

[6]               L’ADRC a répondu par une lettre datée du 6 décembre 2005 qu’il lui faudrait obtenir des renseignements additionnels sur la situation financière de la demanderesse. On demandait à celle-ci d’établir un état de ses revenus et dépenses et de le transmettre à l’ADRC. En réponse, la demanderesse a envoyé un tel état à l’ADRC, qui indiquait des dépenses mensuelles de 6 753 $ et des revenus mensuels de 5 900 $. Elle a également fourni des renseignements sur des propriétés qu’elle possédait et sur des prêts en cours. L. Hayter (gestionnaire, Recouvrement des recettes) a ensuite dit conclure, dans une lettre datée du 10 février 2006, qu’aucune preuve concluante n’avait été présentée quant à des difficultés financières, et il a informé la demanderesse qu’une dispense ne lui serait pas accordée.

 

[7]               Par lettre datée du 14 mars 2006, la demanderesse a sollicité l’examen de la décision prise par L. Hayter en réponse à sa demande d’équité. Dans cette lettre, la demanderesse donnait des précisions sur la situation, tant familiale que financière, qui avait conduit à sa production tardive de déclarations. La demanderesse a joint un certain nombre de documents à sa lettre, soit notamment (1) des renseignements au sujet de l’altercation de son fils avec la police, et (2) un « résumé des versements échelonnés » faisant état du paiement de 33 606,65 $ à l’ADRC en date du 3 septembre 2004.

 

L’examen administratif

 

[8]               Un agent d’examen en matière d’équité, L. Webster, a examiné la demande et a établi un rapport précisant que la dette totale de la demanderesse était de 82 559,59 $ (33 307,32 $ à titre d’intérêts et 45 561,37 $ à titre de pénalités). L’agent a examiné la décision de l’ADRC de ne pas accorder la dispense demandée par la demanderesse et a conclu comme suit :

[traduction]

D’après les renseignements fournis, la demande ne répond pas aux critères prévus par la disposition d’équité pour accorder dispense pour raison de difficultés financières. La contribuable et son époux possèdent leur résidence et deux immeubles locatifs. Ils sont également propriétaires d’une entreprise dirigeant des foyers de groupe dans ces immeubles locatifs. Bien que, dans l’état, on ne mentionne pas d’épargnes ni de placements, la contribuable a eu un revenu d’intérêts de 4 785 $ en 2004. La contribuable a versé un paiement en réduction de sa dette pour la dernière fois en mai 2005. La valeur nette réelle des trois propriétés de la demanderesse est de 90 000 $. La contribuable dispose également d’un REÉR d’un montant de 20 000 $. Il faut inclure deux prêts privés de 355 000 $ à l’égard desquels aucun paiement n’a été versé. Une information complète n’a pas été fournie et je recommande que la demande soit rejetée.

 

 

La décision rendue par J. Jackson au nom du ministre

 

[9]               J. Jackson, directeur du bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest, a examiné le rapport de L. Webster et a accepté au nom du ministre la recommandation faite de ne pas accorder de dispense pour motif d’équité. Il a conclu qu’on n’avait pas prouvé de manière concluante que le paiement de la dette fiscale causerait des difficultés financières à la demanderesse. Cette dernière a été informée de cette décision défavorable le 12 mai 2006.

 

[10]           Le 2 juin 2006, l’ADRC a confirmé sa décision du 16 novembre 2005 de rejeter la demande d’équité présentée par la demanderesse en raison d’une situation particulière (problèmes familiaux). La présente demande de contrôle judiciaire présentée par la demanderesse vise la conclusion de l’ADRC relative aux difficultés financières.

 

[11]           Le 2 juin 2006, la demanderesse a sollicité le contrôle judiciaire de la décision du 12 mai 2006 par laquelle l’ADRC a rejeté sa demande d’équité présentée pour motif de difficultés financières. Il s’agit du contrôle judiciaire de la décision de rejeter la demande d’équité présentée par la demanderesse pour ce motif.

 

 

 

 

La question en litige

 

[12]           La question en litige dans le présent appel est la suivante : 

            L’ADRC a-t-elle commis une erreur en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire d’accorder à la demanderesse, pour motif de difficultés financières, dispense du paiement des intérêts et des pénalités imposés?

 

Les prétentions de la demanderesse

 

[13]           La demanderesse soutient qu’on aurait dû la dispenser, en vertu des Lignes directrices concernant l’annulation des intérêts et des pénalités, IC‑92‑2 (Lignes directrices) datées du 18 mars 1992, de payer les pénalités et les intérêts établis par l’ADRC. 

 

[14]           En vertu de l’alinéa 6a) des Lignes directrices, l’annulation des intérêts ou des pénalités, ou la renonciation à ceux-ci, peuvent être justifiées si ces intérêts ou pénalités découlent principalement d’actions attribuables au ministère, comme des retards de traitement, ce qui a eu pour effet que la contribuable n’a pas été informé, dans un délai raisonnable, de l’existence d’une somme en souffrance. Or, la demanderesse a mentionné avoir produit le 9 septembre 2004 les déclarations pour les années d’imposition 2000, 2001 et 2002, et ce n’est que le 17 janvier 2005 que l’ADRC a établi les cotisations pour les années 2000 et 2001, et que le 10 mars 2005 la cotisation pour l’année 2002.

 

[15]           En vertu de l’alinéa 6b) des Lignes directrices, l’annulation des intérêts ou des pénalités ou la renonciation à ceux-ci peuvent également se justifier si ces intérêts ou pénalités découlent principalement d’erreurs figurant dans la documentation mise à la disposition du public, ce qui a amené des contribuables à soumettre des déclarations ou à faire des paiements en se fondant sur des renseignements erronés. Il en est de même pour les erreurs de traitement (alinéa 6d) des Lignes directrices). La demanderesse soutient à cet égard que l’ADRC a crédité pour la mauvaise année d’imposition les sommes qu’elle a versées en septembre 2004, ce qui a entraîné la cotisation d’intérêts et de pénalités supplémentaires. Le 19 mars 2005, le comptable de la demanderesse a informé l’ADRC de l’erreur dans le traitement des déclarations de revenus de sa cliente, et l’ADRC a transféré les sommes en cause le 22 juin 2005. La demanderesse n’a toutefois été informée de ce transfert qu’en novembre 2005.

 

[16]           La demanderesse a en outre fait remarquer que son comptable avait transmis un chèque de 33 795,78 $ à l’ADRC en vue de parfaire le paiement pour les années d’imposition 2003 et 2004. Toutefois, a-t-elle ajouté, l’ADRC a crédité erronément cette somme, ce qui a entraîné l’accumulation de pénalités et d’intérêts en fonction d’un montant inexact.

 

[17]           La demanderesse a signalé qu’on avait calculé les intérêts et les pénalités selon un taux de 50 p. 100 pour l’année d’imposition 2001 et de 42 p. 100 pour l’année 2002. On a également fait remarquer qu’en réponse à la demande d’équité présentée par la demanderesse, l’agent de l’ADRC avait déclaré que si une déclaration n’était pas produite avant la date limite, la demanderesse se verrait imposer une pénalité pour production tardive de 5 p. 100 de l’impôt exigible, plus une pénalité additionnelle de 1 p. 100 par mois où la déclaration serait en souffrance, à concurrence de 12 p. 100.

 

[18]           La demanderesse a relevé la prétention du défendeur selon laquelle elle avait des antécédents en matière de production tardive, soit depuis 1998, et qu’on lui aurait envoyé des avis à cet égard. La demanderesse précise qu’elle n’avait trouvé consignés nulle part de tels avis, et qu’aucune preuve n’a été présentée quant à l’existence de tels avis dans les dossiers du défendeur. On a également fait remarquer que la demanderesse avait volontairement produit simultanément ses déclarations pour 2000, 2001 et 2002, et plus tard sa déclaration pour 2003 (des explications étant fournies pour le retard). La demanderesse ajoute avoir produit à temps sa déclaration de revenus pour 2004.

 

[19]           On prévoit à l’alinéa 5d) des Lignes directrices, en outre, qu’il sera convenable d’annuler des intérêts ou des pénalités, ou de renoncer à ceux-ci, si ces intérêts ou pénalités découlent de situations indépendantes de la volonté du contribuable, comme des troubles émotifs sérieux ou une souffrance morale grave. La demanderesse soutient à cet égard que les problèmes psychiatriques de son fils avaient détourné son esprit de son entreprise, et qu’elle avait également dû s’occuper de sa mère malade, ce qui avait aussi réduit le temps qu’elle pouvait consacrer à l’entreprise. La demanderesse ajoute que l’accident d’automobile de son époux en 2002 avait également nui à sa capacité de diriger son affaire. De 2001 à 2003, en outre, la demanderesse a souffert d’insomnie due à l’angoisse et, en 2004, elle a obtenu des soins pour des céphalées par tension psychique.

 

[20]           Selon l’alinéa 10c) des Lignes directrices, parmi les points dont le ministère doit tenir compte dans l’étude des demandes d’annulation des intérêts ou des pénalités ou de renonciation à ceux-ci, il y a la question de savoir si le contribuable a fait des efforts raisonnables et s’il n’a pas fait preuve de négligence ni d’imprudence dans la conduite de ses affaires en vertu du régime d’autocotisation. À l’alinéa 10d), on ajoute comme point à considérer celui de savoir si le contribuable a agi avec diligence pour remédier à tout retard ou à toute omission. La demanderesse a signalé à cet égard avoir éprouvé des problèmes avec ses comptables, et qu’elle a dû embaucher trois comptables différents. Elle soutient en outre avoir tenté de participer activement au processus de règlement de sa dette fiscale envers l’ADRC.

 

Les prétentions du défendeur

 

[21]           Le défendeur soutient pour sa part que, dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire visant une décision prise par le ministre en application du paragraphe 220(3.1) de la Loi, la Cour ne peut accorder réparation que si elle est convaincue que le ministre, selon le cas :

a)    a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

b)   n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

c)    a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

d)   a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

e)   a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

f)   a agi de toute autre façon contraire à la loi.

 

[22]           Selon le défendeur, la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision du ministre est celle de la décision raisonnable (Lanno c. Canada (Agence des douanes et du revenu) (2005), 334 N.R. 348, 2005 CAF 153). Il ajoute que la Cour peut annuler la décision à l’examen si celle-ci a été prise de mauvaise foi, si le ministre a omis de tenir compte de faits pertinents ou tenu compte de faits non pertinents, ou si la décision est erronée en droit (Barron c. Canada (Ministre du Revenu national), [1997] 2 C.T.C. 198, (1997) 209 N.R. 392 (C.A.F.)). Le défendeur signale que, parmi les points qui, selon les Lignes directrices, peuvent être pris en compte dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire, il y a notamment

a)      des situations extraordinaires indépendantes de la volonté du contribuable et qui l’ont empêché de se conformer à la Loi – par exemple, une maladie ou un accident grave ou encore des troubles émotifs sérieux (comme un décès dans la famille immédiate);

b)      le fait que les pénalités et les intérêts découlent principalement d’actions attribuables au ministère;

c)      l’incapacité du contribuable de verser le montant exigible.

 

[23]           Selon le défendeur, la demanderesse n’a pas réussi, dans le cadre de sa demande de contrôle judiciaire, à expliquer le moindrement pourquoi elle estimait que la décision du ministre était déraisonnable. La demanderesse n’aurait fourni aucun renseignement financier au soutien de sa demande d’examen administratif de la décision de rejeter sa demande d’équité. Le ministre, le défendeur précise-t-il, a rendu sa décision en se fondant sur l’information fournie, il a observé les principes de justice naturelle et sa décision n’était pas entachée d’une erreur de droit. Selon le défendeur, enfin, la décision était raisonnable et il n’y a pas lieu pour la Cour d’intervenir.

 

Analyse et décision

La norme de contrôle judiciaire

 

[24]           La norme de contrôle applicable à la décision prise par le ministre à l’égard d’une dispense discrétionnaire visée par la disposition d’équité de la Loi est celle de la décision raisonnable (Lanno, précité).

 

[25]           La question en litige

            L’ADRC a-t-elle commis une erreur en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire d’accorder à la demanderesse, pour motif de difficultés financières, dispense du paiement des intérêts et des pénalités imposés?

            En vertu de l’article 7 des Lignes directrices (IC-92-2), le ministre peut dispenser un contribuable de payer des pénalités et des intérêts dans des situations où il y a incapacité de verser le montant exigible. La demanderesse a demandé à être dispensée, en raison de difficultés financières, de payer les pénalités et les intérêts cotisés par l’ADRC. Pour prouver ses difficultés financières à l’ADRC, la demanderesse a notamment déclaré

-         que son fils avait contrefait sa signature et détourné la somme de 120 000 $ pour acquitter des dettes de jeu;

-         qu’elle avait dû acquitter des frais juridiques afin de poursuivre des policiers ayant prétendument brutalisé son fils;

-         que son époux avait subi un accident d’automobile et avait été incapable de travailler du 18 septembre 2002 au 17 mars 2002;

-         qu’elle avait obtenu un prêt en 2004 afin d’acquitter des frais de comptabilité et sa dette fiscale, mais qu’en raison d’une erreur de l’ADRC, l’année d’imposition 2000 avait été créditée et le solde transféré au compte pour 2004, de sorte qu’ont été imputés au compte des intérêts qui n’auraient pas été imposés si on les avaient imputés à l’année appropriée, soit 2001;

-         qu’elle avait obtenu des prêts en 2004 et 2005 pour payer tout l’impôt sur le revenu dû pour les années 2000 à 2004, le solde impayé de 80 000 $ correspondant à des pénalités et des intérêts;

-         que, comme les problèmes familiaux ont été au centre de ses préoccupations, la demanderesse a vu son revenu d’entreprise diminuer de 90 p. 100;

-         qu’il restait à payer un montant de 690 000 $ sur sa maison et que la juste valeur marchande de celle-ci n’était donc que de 550 000 $.

 

[26]           La demanderesse a fourni une preuve documentaire, qui comprenait un dossier relatant l’altercation de son fils avec des policiers ainsi qu’un résumé des versements échelonnés faisant voir que la demanderesse avait effectué en septembre 2004 un paiement imputé à l’année d’imposition 2004. La demanderesse a également fourni des renseignements sur la valeur de son entreprise et de ses résidences ainsi qu’un état de ses revenus et dépenses.

 

[27]           Le processus suivi dans le cadre de l’examen administratif a consisté en l’examen par un agent d’examen en matière d’équité des documents fournis par la demanderesse, puis en la préparation par l’agent d’un rapport où une recommandation était faite au représentant du ministre. L’agent L. Webster a examiné la demande d’annulation des intérêts présentée par la demanderesse pour motif de difficultés financières. L’agent a relevé que la demanderesse et son époux étaient tous deux des travailleurs autonomes, qu’ils étaient propriétaires d’immeubles évalués à 1 050 000 $ et, qu’au passif, leurs hypothèques, marges de crédit et emprunts s’élevaient à 960 000 $; la valeur nette réelle des immeubles des époux était de 90 000 $. L’agent a également indiqué que la demanderesse avait eu un revenu en intérêts de 4 785 $ en 2004.

 

[28]           L’agent a précisé que la demanderesse devait en outre rembourser des prêts privés, et qu’elle avait des REÉR d’un montant de 20 000 $ ainsi qu’un véhicule de 1992. L’agent a relevé que deux erreurs de l’ADRC ayant entraîné l’imputation de paiements de la part de demanderesse à de mauvaises années d’imposition avaient été corrigées et que des rajustements d’intérêts avaient été effectués au moment du transfert. L’agent a souligné enfin que la demanderesse comptait des antécédents en matière de production tardive de déclarations, et qu’on avait rejeté sa demande d’équité pour motif de situation particulière. L’agent a alors conclu que la demanderesse ne satisfaisait pas aux critères prévus par la disposition d’équité quant à l’existence de difficultés financières, et il a rejeté sa demande.

 

[29]           Jack Johnson, directeur du bureau des services fiscaux de Toronto-Ouest, a accepté la recommandation au nom du ministre, et il a conclu qu’on n’avait pas prouvé de manière concluante que le paiement de la dette fiscale occasionnerait des difficultés financières à la demanderesse. L’examen par l’agent d’examen en matière d’équité de la demande de la demanderesse me semble avoir été raisonnable, et il en est de même pour l’adoption par le ministre de la recommandation de rejeter la demande d’équité. Je suis moi aussi d’avis que la preuve fournie par la demanderesse ne justifiait pas d’accueillir la demande d’équité pour motif de difficultés financières.

 

[30]           Il convenait, ferais-je enfin remarquer, que le ministre considère la demande de la demanderesse comme ayant été faite en vertu de la disposition d’équité, comme cette demande avait trait à l’annulation d’intérêts et de pénalités.

 

[31]           La demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée.

 

 

JUGEMENT

 

[32]           LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.

 


ANNEXE

 

 

Les dispositions législatives pertinentes

 

Les dispositions législatives pertinentes figurent ci-après.

 

La Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1, 5e supp., en sa version modifiée :

 

220(3.1) Le ministre peut, à tout moment, renoncer à tout ou partie de quelque pénalité ou intérêt payable par ailleurs par un contribuable ou une société de personnes en application de la présente loi, ou l'annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

 

220(3.1) The Minister may at any time waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by a taxpayer or partnership and, notwithstanding subsections 152(4) to 152(5), such assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made as is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.

 

 

 

La Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7:

 

18.1 […]

 

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l'office fédéral, selon le cas :

 

 

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

 

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

 

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

 

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

 

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

 

f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

 

18.1 . . .

 

(4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

 

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

 

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

 

(c) erred in law in making a decision or an order, whether or not the error appears on the face of the record;

 

 

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

 

 

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

 

(f) acted in any other way that was contrary to law.

 

 

Les Lignes directrices concernant l’annulation des intérêts et des pénalités (IC-92-2), 18 mars 1992 :

 

Lignes directrices et exemples de cas où l’annulation des intérêts et des pénalités ou la renonciation à ceux-ci peuvent être autorisées

 

5. Il sera convenable d'annuler la totalité ou une partie des intérêts ou des pénalités, ou de renoncer à ceux-ci, si ces intérêts ou ces pénalités découlent de situations indépendantes de la volonté du contribuable ou de l'employeur. Voici des exemples de situations extraordinaires qui pourraient empêcher un contribuable, un agent d'un contribuable, l'exécuteur d'une succession ou un employeur de faire un paiement dans les délais exigés ou de se conformer à d'autres exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu :

 

[…]

 

d) des troubles émotifs sérieux ou une souffrance morale grave comme un décès dans la famille immédiate

 

6. L'annulation des intérêts ou des pénalités ou la renonciation à ceux-ci peuvent également être justifiées si ces intérêts ou pénalités découlent principalement d'actions attribuables au Ministère comme dans les cas suivants :

 

a) des retards de traitement, ce qui a eu pour effet que le contribuable n'a pas été informé, dans un délai raisonnable, de l'existence d'une somme en souffrance;;

 

b) des erreurs dans la documentation mise à la disposition du public, ce qui a amené des contribuables à soumettre des déclarations ou à faire des paiements en se fondant sur des renseignements erronés;

 

c) une réponse erronée qu'un contribuable ou un employeur a reçue concernant une demande de renseignements comme dans le cas où le Ministère a informé par erreur un contribuable qu'aucun acompte provisionnel n'est nécessaire pour l'année en cours;

 

d) des erreurs de traitement;

 

e) des renseignements fournis en retard comme dans le cas où un contribuable n'a pu faire les paiements voulus d'acomptes provisionnels ou d'arriérés parce qu'il n'avait pas les renseignements nécessaires.

 

7. Il peut être convenable dans des situations où il y a incapacité de verser le montant exigible d'examiner la possibilité de renoncer ou d'annuler la totalité ou une partie des intérêts afin d'en faciliter le recouvrement, par exemple dans les cas suivants : 

 

Par exemple,

 

a) lorsque les mesures de recouvrement ont été suspendues à cause de l'incapacité de payer;

 

b) lorsqu'un contribuable ne peut conclure une entente de paiement qui serait raisonnable parce que les frais d'intérêts comptent pour une partie considérable des versements; dans un tel cas, il faudrait penser à renoncer à la totalité ou à une partie des intérêts pour la période où les versements débutent jusqu'à ce que le montant exigible soit payé pourvu que les versements convenus soient effectués à temps.

 

10. Le Ministère tiendra compte des points suivants dans l'étude des demandes d'annulation des intérêts ou des pénalités ou de renonciation à ceux-ci :

 

a) si le contribuable ou l'employeur a respecté, par le passé, ses obligations fiscales;

 

b) si le contribuable ou l'employeur a, en connaissance de cause, laissé subsister un solde en souffrance qui a engendré des intérêts sur arriérés;

 

c) si le contribuable ou l'employeur a fait des efforts raisonnables et s'il n'a pas fait preuve de négligence ni d'imprudence dans la conduite de ses affaires en vertu du régime d'autocotisation;

 

d) si le contribuable ou l'employeur a agi avec diligence pour remédier à tout retard ou à toute omission.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-927-06

 

INTITULÉ :                                       IRENE MCINTOSH

 

                                                            c.

 

                                                            LE PROCUREUT GÉNÉRAL DU CANADA et

                                                            LE COMITÉ DE L’ÉQUITÉ DE L’AGENCE

                                                            DES DOUANES ET DU REVENU

                                                           

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 13 JUIN 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       LE 6 JUILLET 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Irene McIntosh

Pour son propre compte

 

POUR LA DEMANDERESSE

Maria Vujnovic

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Irene McIntosh

Brampton (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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