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Date : 20070705

Dossier : IMM-4525-06

Référence : 2007 CF 706

Ottawa (Ontario), le 5 juillet 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE SHORE

 

 

ENTRE :

Alberto Carlos Dos Santos

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               La présomption selon laquelle un témoignage est crédible est fondée sur l’absence de motifs permettant de douter de sa crédibilité.

En l’espèce, il existe de nombreux motifs énoncés par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié qui mettent en doute la crédibilité de la preuve fournie par le demandeur.

Le fait que le demandeur a omis de demander l’asile aux États-Unis après un séjour de plus d’un an et qu’il y est retourné après en avoir été expulsé (toujours sans avoir demandé l’asile), ne joue pas en sa faveur. À la suite d’une arrestation pour une infraction au Code de la route, après un séjour de quinze mois au pays sans avoir demandé l’asile, le demandeur a finalement déposé une demande d’asile.

La Commission a raisonnablement conclu que les actions du demandeur jointes aux contradictions inhérentes à son témoignage minaient sa crédibilité et le fondement subjectif de sa crainte de persécution (Bogus c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 71 F.T.R. 260 (C.F. 1re inst.), à la page 262, confirmé par la C.A.F. (A-712-93), 26 septembre 1996).

 

PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) rendue le 5 avril 2006, par laquelle celle-ci a conclu que le demandeur n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger au titre de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la LIPR.

 

CONTEXTE

[3]               Le demandeur, M. Alberto Carlos Dos Santos, est un citoyen du Brésil qui allègue craindre avec raison d’être persécuté par des trafiquants de drogue qui auraient assassiné son frère et violé, ainsi que blessé, sa conjointe de fait.

 

[4]               M. Dos Santos allègue que son frère a été assassiné par des trafiquants de drogue en août 1997.

 

[5]               De 1997 à 1999, le demandeur allègue qu’il a vu plusieurs personnes faisant le guet devant sa maison. Il a aussi reçu des notes de menace et des appels anonymes.

 

[6]               En octobre 1999, M. Dos Santos s’est rendu en Israël pour une période « de réflexion ». Il est retourné au Brésil en juillet 2000.

 

[7]               Le demandeur allègue que le jour suivant son retour, sa conjointe de fait a été violée, blessée par balle et a dû être hospitalisée pendant deux mois. Il allègue que cette dernière a identifié les agresseurs comme faisant partie du même gang de trafic de drogue qui avait assassiné son frère.

 

[8]               En octobre 2002, le demandeur s’est rendu aux États-Unis et n’y a pas présenté de demande d’asile. En février 2003, il a donc été renvoyé au Brésil.

 

[9]               Après avoir vécu au Brésil pendant huit mois, le demandeur est retourné aux États-Unis où il est demeuré durant sept mois avant de se rendre au Canada en mai 2004. Il a présenté une demande d’asile en août 2006, quinze mois après son arrivée au pays.

 

 

 

DÉCISION FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT CONTRÔLE

[10]           Dans sa décision rendue le 5 avril 2005, la Commission a conclu que les questions déterminantes étaient l’absence de crédibilité du demandeur, l’inexistence d’un lien, le retard à demander l’asile, le défaut de demander l’asile aux États-Unis, l’existence de la protection de l’État et la possibilité de refuge intérieur. La Commission a aussi souligné que bien que le retard ne constitue pas en soi un facteur décisif, il s’agit d’un facteur pertinent et potentiellement important si le demandeur a attendu avant de demander l’asile à son arrivée au Canada.

 

[11]           La Commission a conclu que le demandeur n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger, au motif qu’il n’était pas crédible ou digne de foi et du fait que le Brésil lui offrait une protection adéquate.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[12]           (1) La Commission a-t-elle commis une erreur dans sa conclusion relative à la protection de l’État?

(2) La Commission a-t-elle rejeté un témoignage irréfuté?

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[13]           L’article 96 de la LIPR se lit comme suit :

96.       A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

96.       A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

 

[14]           Le paragraphe 97(1) de la LIPR énonce ce qui suit :

97      (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

97.     (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

NORME DE CONTRÔLE

[15]           En ce qui a trait à la protection de l’État, la juge Danièle Tremblay-Lamer, dans la décision Chaves c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 193, [2005] A.C.F. no 232 (QL) au paragraphe 11, après avoir effectué une analyse pragmatique et fonctionnelle, a conclu que l’examen de la protection de l’État nécessite l’application du droit aux faits et constitue, de ce fait, une question mixte de fait et de droit susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable simpliciter. Cela étant dit, il n’y a aucune raison de s’écarter de cette norme en l’espèce. Ainsi, en ce qui concerne la protection de l’État, une conclusion tirée par la Commission ne sera pas annulée si elle est étayée par des motifs capables de résister à un examen assez poussé (Canada (Directeur des enquêtes et recherches, Loi sur la concurrence) c. Southam Inc.), [1997] 1 R.C.S. 748, au paragraphe 56).

 

[16]           En ce qui a trait aux conclusions relatives à la crédibilité, il est de droit constant que la Commission a une expertise bien établie pour statuer sur des questions de fait et, plus particulièrement, pour évaluer la crédibilité du demandeur. Lors d’un contrôle judiciaire, la présente Cour ne peut pas modifier les conclusions de fait tirées par la Commission, sauf s’il est établi que ces conclusions sont déraisonnables ou arbitraires, tirées de mauvaise foi ou ne sont pas étayées par la preuve (Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (C.A.F.), [1993] A.C.F. no 732 (QL), au paragraphe 4; Wen c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 907 (QL), au paragraphe 2; Giron c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] A.C.F. no 481 (QL); He c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1107 (QL); Khan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 839, [2006] A.C.F. no 1064 (QL), au paragraphe 27).

 

 

 

 

ANALYSE

(1) La Commission a-t-elle commis une erreur dans sa conclusion relative à la protection de l’État?

[17]           Le demandeur allègue que la Commission a commis une erreur dans son analyse sur la protection de l’État en évaluant incorrectement l’efficacité de cette protection offerte au Brésil.

 

[18]           Il faut souligner que dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, aux paragraphes 49, 50 et 52, la Cour suprême du Canada a conclu qu’en l'absence d'un effondrement complet de l'appareil étatique, il y a lieu de présumer que l'État est capable de protéger  ses citoyens. Le danger que cette présomption ait une application trop générale est atténué par l'exigence d'une preuve claire et convaincante de l'incapacité d'un État d'assurer la protection. Un demandeur pourrait présenter le témoignage de personnes qui sont dans une situation semblable à la sienne et que les dispositions prises par l'État pour les protéger n'ont pas aidées, ou son propre témoignage au sujet d'incidents personnels antérieurs au cours desquels la protection de l'État ne s'est pas concrétisée, ou encore sa situation personnelle comme preuve de l’incapacité d’un État d’assurer la protection de ses citoyens. Un demandeur peut aussi fournir la documentation au sujet de la situation dans le pays en cause pour réfuter la présomption selon laquelle l’État a la capacité de protéger ses citoyens (On fait aussi référence aux paragraphes 27 et 32 de la décision Avila c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 359, [2006] A.C.F. no 439 (QL)).

 

[19]           En outre, dans la décision Xue c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 1728, le juge Marshall E. Rothstein a statué qu’il n’était pas erroné de conclure que l’exigence de « clarté et de conviction » nécessitait une norme de preuve plus élevée que l'extrémité inférieure du vaste registre de la « prépondérance des probabilités ». Plus particulièrement, il a énoncé ce qui suit :

[12]      Compte tenu du point de vue exprimé par le juge en chef Dickson dans l'arrêt Oakes, savoir que dans certaines circonstances il faut un degré plus élevé de probabilité, ainsi que de la règle énoncée dans l'arrêt Ward, qu'il faut confirmer d'une façon claire et convaincante l'incapacité de l'État d'assurer la protection, je suis d'avis qu'on ne peut dire que la Commission a commis une erreur en déterminant la norme de preuve applicable en l'instance. Si la Commission avait abordé la question en exigeant d'être convaincue hors de tout doute (absolument), ou même hors de tout doute raisonnable (la norme criminelle), elle aurait commis une erreur. Toutefois, il faut replacer les termes utilisés par la Commission dans le contexte de la citation de l'arrêt Ward qu'elle paraphrasait. Bien que la Commission ne renvoie aucunement aux arrêts Oakes et Bater, et même si elle aurait pu être plus précise et indiquer qu'elle devait être convaincue selon la prépondérance des probabilités, il semble clair que ce qu'elle a voulu faire c'est imposer au demandeur, aux fins de réfuter la présomption de la protection de l'État, le fardeau d'un plus grand degré de probabilité aligné sur l'exigence de clarté et de conviction énoncée dans l'arrêt Ward. Ce faisant, je ne peux conclure que la Commission a commis une erreur.

 

[20]           La Commission a effectué un examen approfondi de la protection de l’État au Brésil. Elle a tenu compte des efforts du demandeur en vue de se réclamer de la protection du Brésil et de la réponse de l’État :

a)  Lorsque le demandeur et sa famille ont appelé la police pour se plaindre de leurs voisins qui vendaient de la drogue, la police a patrouillé le secteur plus fréquemment;

b)  L’augmentation du nombre de patrouilles dans le secteur a eu une incidence sur le commerce de drogues et a mis les trafiquants de drogue en colère;

c)  Après le viol de la conjointe de fait du demandeur, la police a fait un rapport et a entrepris une enquête criminelle;

d)  Le demandeur a été avisé lors d’appels anonymes que les auteurs du crime ne voulaient pas que la police soit impliquée, car « elle [la police] les poursuivrait et les punirait ».

(Décision de la Commission, aux pages 7 et 8)

 

[21]           En se fondant sur ce qui précède, la Commission a conclu avec raison que la preuve établissait l’existence d’une protection efficace de l’État au Brésil.

 

[22]           La Commission a examiné la preuve documentaire relative à la situation du pays et a souligné l’adoption d’un Plan national de sécurité publique au Brésil provoquant des changements dans les domaines du contrôle des armes, de la protection des témoins, ainsi que de la promotion du professionnalisme et de la responsabilité de la police. Dans son examen, elle a aussi tenu compte du fait que bien que la criminalité était répandue, la présence accrue de la police à certains endroits avait entraîné une diminution du nombre de crimes.

(Décision de la Commission, aux pages 8 et 9)

 

[23]           Par conséquent, l’analyse de la Commission sur la protection de l’État au Brésil était suffisante et abordait correctement la question de l’efficacité d’une telle protection.

 

(2) La Commission a-t-elle rejeté un témoignage irréfuté?

[24]           M. Dos Santos allègue que la Commission a rejeté son témoignage irréfuté quant à l’identité des personnes responsables du décès de son frère sans avoir conclu qu’il n’était pas crédible.

 

[25]           Il est bien établi que la Commission est présumée avoir soupesé toute la preuve dont elle est saisie et en avoir tenu compte jusqu’à preuve du contraire. La Cour a aussi statué, à de nombreuses reprises, que la Commission a le pouvoir discrétionnaire d’écarter la preuve qui n'a aucun rapport avec l'affaire en instance. La décision de la Commission de ne pas admettre la preuve dont elle dispose ou de ne pas mentionner expressément chacune des preuves produites, ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle (Yushchuk c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1324 (QL), au paragraphe 17).

 

[26]           En fait, la Commission dispose d’une grande souplesse en ce qui a trait à la preuve dont elle peut tenir compte. Elle n’est pas liée par les règles légales ou techniques de présentation de la preuve et peut s’appuyer sur tous les éléments qu’elle juge crédibles ou dignes de foi en l’occurrence (les alinéas 173c) et d) de la LIPR, Thanaratnam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 349, [2004] A.C.F. no 395 (QL), au paragraphe 7).

 

[27]           Cela étant dit, dans son formulaire de renseignements personnels (FRP) et son affidavit, le demandeur a déclaré qu’il croyait que son frère avait été assassiné par des trafiquants de drogue. Cependant, il a rendu le témoignage suivant :

[traduction]

 

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : […] Qui l’a tué?

 

DEMANDEUR : Je ne sais pas qui l’a tué exactement, mais il s’agissait de personnes liées au trafic de la drogue.

 

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : Comment le savez-vous?

 

DEMANDEUR : D’après les voisins et les témoins présents ce jour-là, mon frère s’est bagarré, physiquement, avec les bandits.

 

[…]

 

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : Mais, sont-ils des voleurs? Ces bandits sont-ils des voleurs?

 

DEMANDEUR : Oui.

 

PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE : Alors, qu’est-ce que cela a à voir avec des trafiquants de drogue?

 

DEMANDEUR : Les bandits ont tout à voir avec le trafic de la drogue.

 

[…]

 

DEMANDEUR : Je crois qu’il consommait peut-être de la drogue. Peut-être, je ne sais pas, c’est quelque chose qui n’a pas été établi jusqu’à présent. Peut-être pour le voler, puisqu’il occupait un bon emploi; il ne gagnait pas beaucoup d’argent, mais assez, donc il menait une bonne vie.

 

[28]           Après avoir examiné la preuve, la Commission a conclu que le demandeur n’avait pas réussi à établir l’existence d’un lien entre les bandits qui auraient tué son frère et les trafiquants de drogue dont il semblait craindre neuf ans plus tard. La Commission a conclu ce qui suit :

De l’avis du tribunal, il s’agit là de pures conjectures, et le demandeur d’asile n’a pas réussi à présenter des éléments de preuve crédibles corroborant que des trafiquants de drogue avaient tué son frère. Le tribunal n’a pas trouvé ce témoignage crédible.

 

(Décision de la Commission, page 3)

L’affaire en l’espèce peut être distinguée d’avec celles citées par le demandeur dans lesquelles la Commission n’a tiré aucune conclusion défavorable en ce qui concerne la crédibilité du demandeur, mais a pourtant rejeté la preuve dont elle disposait.

 

[29]           À cet égard, la Commission a clairement conclu que le demandeur n’était pas crédible. Cette conclusion était amplement étayée, compte tenu du fait que M. Dos Santos n’avait pas fourni de preuve à l’appui de sa croyance selon laquelle les bandits qui avaient tué son frère étaient liés aux trafiquants de drogue qu’il craignait.

 

[30]           En plus des conclusions susmentionnées, la Commission a tiré des conclusions supplémentaires qui appuient sa décision. Plus précisément, la Commission a souligné ce qui suit :

a)   Le demandeur n’a jamais subi de préjudice durant les deux années lors desquelles il allègue avoir été surveillé et avoir reçu des appels et des notes de menace, même si les auteurs soupçonnés auraient amplement eu la possibilité de s’en prendre à lui;

b)   Les frères et sœurs du demandeur qui vivaient encore au Brésil n’ont jamais été victimes de cette forme de harcèlement.

(Décision de la Commission, pages 3 et 4)

 

[31]           La Commission a donc conclu que « […] le demandeur d’asile n’a jamais établi de raison valable ou crédible pour laquelle il devrait être personnellement ciblé ». (Décision de la Commission, page 4)

 

[32]           De surcroît, bien que le demandeur prétend que la Commission a mal interprété la preuve à l’égard de ses voyages à l’extérieur du Brésil, la Commission n’a pas laissé entendre qu’il aurait dû rester en Israël.

 

[33]           La preuve dont disposait la Commission établit ce qui suit concernant le demandeur :

a) Après s’être enfui du Brésil, il y est retourné à deux reprises (il y est demeuré pendant plus de deux ans la première fois et pendant sept mois la deuxième fois);

b) Il a fait deux voyages aux États-Unis (qui ont respectivement duré quatre mois et plus d’un an) sans jamais y demander l’asile;

c) Il est arrivé au Canada et a attendu quinze mois avant d’y demander l’asile.

(Décision de la Commission, pages 3 et 5)

 

[34]           En outre, lorsqu’on lui a demandé pourquoi il avait omis de demander l’asile aux États‑Unis, le demandeur n’a fourni aucune explication. Bien que le retard à demander l’asile ne soit pas un facteur décisif, il s’agit d’un facteur qui peut être pris en compte. La Commission n’a donc pas commis d’erreur en concluant que : « Ses agissements, plutôt son inaction, ne sont pas compatibles avec ceux d’une personne qui a une crainte fondée de persécution » (Mughal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1557, [2006] A.C.F. no 1952 (QL), aux paragraphes 33 à 36; décision de la Commission, page 5).

 

[35]           De même, la Commission n’a pas commis d’erreur en tenant compte du retard de quinze mois accusé par M. Dos Santos avant qu’il ne présente une demande d’asile au Canada. Le retard à formuler une demande d’asile, du fait que le demandeur n’a pas quitté son propre pays et qu’il n’a pas présenté une demande d’asile dans les plus brefs délais, est un facteur dont la Commission peut tenir compte et qui peut nuire à la crédibilité de la demande et miner la prétention de crainte subjective du demandeur (Huerta c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 271 (QL)).

 

[36]           Par conséquent, la Cour conclut que la Commission a correctement examiné les éléments objectif et subjectif de la demande du demandeur. Aucune erreur n’a donc été commise à cet égard.

 

CONCLUSION

[37]           Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Il n’y a aucune question sérieuse de portée générale aux fins de certification.

 

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Caroline Tardif, LL.B, trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                              IMM-4525-06

 

INTITULÉ :                                                                             ALBERTO CARLOS DOS

                                                                                                  SANTOS

                                                                                                  c.

                                      LE MINISTRE DE LA

                                      CITOYENNETÉ ET DE

                                      L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                      TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                     LE 19 JUIN 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                                   LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                                                           LE 5 JUILLET 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dariusz Wroblewski

 

  POUR LE DEMANDEUR

Sharon Stewart Guthrie

 

                               POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

                                 POUR LE DÉFENDEUR

 

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