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Date : 20240619

Dossier : T-1990-23

Référence : 2024 CF 939

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 19 juin 2024

En présence de madame la juge adjointe Catharine Moore

ENTRE :

ADMINISTRATION PORTUAIRE DE OLD PERLICAN

demanderesse

et

BOYD SQUIRES

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

VU LA REQUÊTE EX PARTE présentée par écrit le 11 juin 2024 pour le compte de la demanderesse, l’administration portuaire de Old Perlican, en vertu du paragraphe 210(1) et de l’article 369 des Règles des Cours fédérales (les Règles) en vue d’obtenir un jugement par défaut;

ET VU le dossier de requête déposé pour le compte de la demanderesse.

Saisie d’une requête en jugement par défaut, la Cour doit répondre à deux questions; en premier lieu, le défendeur est-il en défaut et, en second lieu, existe-t-il une preuve à l’appui de la demande : Chase Manhattan Corp c 3133559 Canada Inc, 2001 CFPI 895, Voltage Holdings, LLC c Untel No 1, 2023 CAF 194. L’octroi d’un jugement par défaut n’est pas assuré; il s’agit d’une décision discrétionnaire. Comme dans toutes les affaires de nature civile, et en particulier lorsque l’affaire est ex parte, la Cour doit examiner la preuve attentivement et cette preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des probabilités : Trimble Solutions Corporation c Quantum Dynamics Inc, 2021 CF 63.

En ce qui concerne la première question, le défendeur n’a pas déposé de défense, mais la demanderesse n’a pas établi que la déclaration avait été signifiée à personne au défendeur. Pour autant que la Cour puisse le déterminer, l’affidavit de Bernard Fitzpatrick, souscrit le 10 octobre 2023, indique ce qui suit :
[traduction]

  1. Le 4 octobre 2023, à 10 h 25, a été signifiée à Karen Clarke la déclaration en lui remettant une copie à Sibley’s Cove (Terre-Neuve-et-Labrador). M. Squires est absent pour 6 à 10 jours et demande que l’enveloppe soit laissée dans sa remise pour Mme Clarke.

  2. J’ai pu identifier la personne au moyen de (en blanc).

Les Règles des Cours fédérales sont très claires sur le fait que l’acte introductif d’instance doit être signifié à personne, voir le paragraphe 127(1). Bien que la signification à une personne physique puisse être effectuée d’un certain nombre de façons, comme le prévoit l’article 128, la procédure décrite dans l’affidavit de signification joint au dossier de requête n’en fait pas partie et, par conséquent, je conclus que la signification de la déclaration au défendeur n’était pas appropriée. Dans ces circonstances, je ne suis pas convaincue que le défendeur est en défaut.

Bien qu’il ne soit pas nécessaire d’examiner la deuxième question, la demanderesse a omis de joindre la déclaration à son dossier de requête, comme l’exige l’alinéa 364(2)f). Sans la déclaration, il n’est pas possible de savoir si la preuve qui a été présentée suffit à établir le bien-fondé de la demande. Comme l’a affirmé la Cour dans la décision Tehrankari v Canada, 2022 CanLII 109756 (CF) au paragraphe 9 :

[traduction]
Il n’appartient ni à la Cour ni au greffe de récupérer du dossier de la Cour les documents figurant dans le dossier de requête d’une partie pour que ceux-ci soient examinés en tant qu’éléments de preuve ou autrement dans le cadre d’une requête. C’est ce qui ressort des dispositions applicables aux requêtes. L’alinéa 359d) des Règles exige du demandeur que son avis de requête précise la liste des documents qui seront utilisés dans le cadre de la requête. L’alinéa 364(2)f) des Règles reprend l’obligation de divulgation et de description figurant à l’alinéa 359d) de façon concrète en exigeant que le dossier de la requête d’une partie contienne « les autres documents ou éléments matériels déposés qui sont nécessaires dans le cadre de la requête ». Pour pouvoir être utilisés dans le cadre de la requête, ces « autres documents ou éléments matériels déposés » doivent être conformes à la preuve documentaire décrite dans l’avis de requête et en contenir une copie si la preuve documentaire contestée est composée de documents (y compris des documents qui peuvent avoir été versés au dossier de la Cour) qui n’ont pas été établis comme étant des pièces jointes à un affidavit à l’appui de la requête.

En outre, l’affidavit de Korri Power souscrit le 1er mai 2024 à l’appui de la requête fait référence à un certain nombre de documents, y compris une facture pour le montant réclamé et plusieurs mises en demeure, qui n’ont pas été joints à l’affidavit et qui n’ont pas été présentés à la Cour par d’autres moyens. De l’avis de la Cour, ces documents sont très vraisemblablement des éléments de preuve nécessaires pour statuer sur la demande et leur omission est préoccupante.

Dans ces conditions, je conclus que le jugement par défaut ne peut être accordé et la requête est rejetée.

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

1. La requête de la demanderesse est rejetée, sans dépens.

En blanc

« Catharine Moore »

En blanc

Juge adjointe

Traduction certifiée conforme

C. Tardif

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