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     T-1834-96

Ottawa (Ontario), le lundi 29 septembre 1997

En présence de M. le juge Gibson

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), ch. C-29

     ET un appel de la décision

     d'un juge de la citoyenneté,

     ET

     CHI TAI WONG,

     appelant.

     JUGEMENT

     L'appel est rejeté.

                             FREDERICK E. GIBSON

                        

                                     Juge

Traduction certifiée conforme         

                             F. Blais, LL.L.

     T-1835-96

Ottawa (Ontario), le lundi 29 septembre 1997

En présence de M. le juge Gibson

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), ch. C-29

     ET un appel de la décision

     d'un juge de la citoyenneté,

     ET

     CHI YUEN WONG,

     appelant.

     JUGEMENT

     L'appel est rejeté.

                             FREDERICK E. GIBSON

                        

                                     Juge

Traduction certifiée conforme         

                             F. Blais, LL.L.

     T-1834-96

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), ch. C-29

     ET un appel de la décision

     d'un juge de la citoyenneté,

     ET

     CHI TAI WONG,

     appelant.

     - ET -

     T-1835-96

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), ch. C-29

     ET un appel de la décision

     d'un juge de la citoyenneté,

     ET

     CHI YUEN WONG,

     appelant.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE GIBSON

     Ces appels ont été entendus à Toronto (Ontario), le 3 septembre 1997. Les appelants, qui sont deux frères, en appellent des décisions d'un juge de la citoyenneté, toutes deux datées du 29 mai 1996, refusant leur demande de citoyenneté canadienne au motif qu'ils ne respectaient pas la condition de résidence prévue à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté1. Les appelants ont reçu séparément cette décision. Les lettres portent une date antérieure à la date des audiences des appelants devant le juge de la citoyenneté qui ont eu lieu le 10 juin 1996, ce qui pourrait donc laisser supposer que les décisions ont été prises avant que les appelants aient la possibilité de présenter leur cas devant le juge de la citoyenneté. Les deux appelants ont déclaré devant moi que le résultat de leur demande semblait, dès le début des audiences, une simple formalité.

     Le contenu des deux lettres que les appelants ont reçues est pratiquement identique. Devant moi, l'avocat des appelants a reconnu que les situations de fait qui sous-tendent les appels de ses deux clients sont identiques. Cela dit, comme je l'ai déjà indiqué, les deux appelants ont témoigné devant moi.

     Selon la preuve dont disposait le juge de la citoyenneté et qui a été déposée devant moi, les appelants, tous deux citoyens du Royaume-Uni sont arrivés au Canada où ils ont obtenu le droit d'établissement le 9 février 1992, en compagnie de leurs parents et de leur soeur. Ils sont tous deux retournés au Royaume-Uni le 25 février, pour y poursuivre leurs études : dans le cas de Chi Yuen Wong, en médecine dentaire au Collège médical de Londres; et dans le cas de Chi Tai Wong, en économie et administration des affaires à l'université de Birmingham. Pendant leur bref séjour au Canada, ils ont communiqué avec plusieurs universités ontariennes pour s'enquérir de la possibilité de poursuivre leurs études au Canada. Tous deux en sont venus à la conclusion qu'ils seraient lourdement pénalisés, en raison du nombre d'années qu'ils devraient consacrer à se requalifier, s'ils voulaient poursuivre leurs études au Canada. Par conséquent, même s'ils auraient préféré continuer leurs études au Canada, ils se sont sentis obliger de retourner au Royaume-Uni.

     Les parents des appelants ont acheté une maison à Waterloo (Ontario), dans laquelle chacun des appelants a établi et conservé sa propre chambre. Chacun a témoigné qu'il garde la totalité de ses effets personnels dans sa chambre et ailleurs dans la maison de ses parents, à l'exception des effets personnels essentiels dont ils ont besoin pendant leurs études en Angleterre. Ils ont vécu tous les deux dans des résidences pour étudiants en Angleterre. Les week-ends, ils demeuraient chez un oncle. Ils sont tous deux revenus dans la famille à Waterloo pour de brefs congés de Noël. Leurs programmes d'études les empêchaient de revenir à d'autres occasions, bien que Chi Tai Wong ait déclaré dans sa déposition être revenu passer un été au Canada. Ce retour au Canada n'a pas été documenté. Les deux appelants sont revenus au Canada munis de permis de retour pour résident permanent.

     Les deux appelants ont témoigné avec beaucoup de sincérité quant à leur désir et à leur intention de faire du Canada le lieu de leur résidence permanente. Au moment de l'audience devant moi, Chi Tai Wong avait terminé ses études et vivait ici au Canada. Il se cherche activement de l'emploi, mais ses recherches n'ont pas encore porté fruit. Chi Yuen Wong espère terminer ses études en médecine dentaire à Londres en 1998, date à laquelle il a l'intention de revenir au Canada, malgré le fait qu'apparemment il n'aura pas l'autorisation de pratiquer sa profession ici. Il a témoigné, que, si cela était nécessaire, il s'inscrirait à une école de médecine dentaire canadienne pour améliorer sa formation et obtenir une spécialité qu'il sera en mesure de pratiquer au Canada.

     J'ai fait brièvement référence à la sincérité avec laquelle les appelants ont témoigné quant à leur engagement à faire du Canada leur lieu de résidence permanente. En outre, il ressort clairement de leur témoignage qu'ils ont la ferme intention de se faire des amis au Canada, de s'intéresser davantage à la culture, aux usages et aux coutumes canadiens, bref, de se "canadianiser" complètement. Cela dit, à la date de leur demande de citoyenneté canadienne, ils n'avaient eu que peu de possibilités de parvenir à ces fins. Dans les quatre ans précédant la date de leur demande, leurs périodes de résidence au Canada, celles qui ont été documentées, s'élevaient, dans chaque cas, à 55 jours, ce qui est fort loin de la condition exigée à l'alinéa 5(1)c ) de la Loi sur la citoyenneté comme condition pour obtenir la citoyenneté canadienne.

     Dans la décision Lee2, Mme le juge Reed écrit ceci :

     Je ne doute nullement que l'appelante serait une excellente citoyenne du Canada. Elle étudie en Angleterre depuis l'âge de seize ans, et elle achève actuellement des études médicales à l'University of Cambridge. Elle est venue au Canada le 24 mai 1991 en même temps que ses parents et ses frères et soeurs. La famille tout entière a obtenu à cette date le statut d'immigrants ayant obtenu le droit d'établissement. L'appelante est partie deux jours plus tard pour retourner au Royaume-Uni afin d'y continuer ses études.         
     Elle a demandé la citoyenneté le 4 juillet 1994. Dans la période de quatre ans précédente, elle avait résidé au canada pendant 165 jours. Il lui manquait 930 jours pour avoir les 1095 jours de résidence requis par la Loi sur la citoyenneté. Même en faisant un gros effort d'imagination on ne peut dire qu'elle a satisfait aux conditions de résidence posées par la Loi.         
     Il est allégué que son mode d'existence centralisé se trouve au Canada parce que sa famille y est et parce qu'elle a résidé au Royaume-Uni seulement en tant qu'étudiante. Je ne saurais tirer une telle conclusion. Elle n'est pas mineure. Sa profession choisie est celle à l'égard de laquelle il est bien connu qu'il existe des obstacles considérables à l'admission au Canada pour les personnes qui ne sont pas formées au Canada. Elle est une étudiante au Royaume-Uni depuis maintenant bien des années. Peut-être un jour viendra-t-elle au canada et remplir les conditions de résidence. Dans ce cas, elle aura droit à la citoyenneté. J'espère sincèrement qu'elle le fera puisque, ainsi que je l'ai fait savoir, j'estime qu'elle constituerait un excellent enrichissement de l'ensemble de nos citoyens.         

     Les faits dont était saisie le juge Reed dans Lee sont remarquablement semblables aux faits dont il est question dans les présents appels. Bien que l'on ne puisse dire à l'égard de Chi Tai Wong qu'il y a "des obstacles considérables à l'admission au Canada pour les personnes qui ne sont pas formées au Canada" dans son domaine, soit l'économie et l'administration des affaires, je suis convaincu que l'on peut dire qu'il n'est pas facile à l'heure actuelle d'obtenir au Canada un emploi muni d'un tel diplôme, sans expérience de travail. Les observations de Mme le juge Reed concernant les obstacles considérables qui existent pour les personnes qui ont fait des études médicales à l'extérieur du Canada peuvent certainement s'appliquer à la situation de Chi Yuen Wong qui est sur le point de terminer ses études en médecine dentaire. Je répète l'opinion exprimée par Mme le juge Reed à l'égard de Mme Lee pour le cas des deux appelants devant moi. Je suis d'avis qu'ils constitueraient un excellent enrichissement de l'ensemble de nos citoyens.

     L'avocat des appelants ne connaissait pas bien la décision Lee. J'ai exprimé à l'audience mon opinion préliminaire selon laquelle le dispositif de ces appels devrait être identique à celui de la décision Lee, c'est-à-dire que les appels devraient être rejetés. Cela dit, j'ai invité l'avocat à examiner les motifs de Mme le juge Reed et je lui ai donné du temps, de même qu'à l'amicus curiae, pour présenter des observations écrites sur la question de savoir s'il y avait lieu d'établir une distinction avec la décision Lee.

     L'avocat des appelants m'a remis des observations écrites et me demande instamment d'établir une distinction avec la décision Lee et d'adopter le raisonnement du juge MacKay dans Grace Kar Yan Cheung3, dans laquelle le juge MacKay s'est appuyé en partie sur l'extrait suivant de la décision Secrétaire d'État du Canada et Abi Zeid4 :

     Les principes essentiels qui se dégagent de la jurisprudence en la matière sont à l'effet qu'il n'est pas nécessaire d'être présent au Canada, physiquement et continuellement, au cours de toute la période requise. Par contre, une personne qui s'absente physiquement doit d'abord, avant son absence, avoir établi sa résidence au pays, elle doit ensuite, d'une certaine façon, continuer sa résidence au pays au cours de l'absence à l'étranger.         

     Je ne peux conclure que l'exposé de principes ci-dessus aide les appelants. Je ne peux conclure qu'ils ont établi leur résidence au Canada quant ils sont arrivés pour la première fois et qu'ils n'ont séjourné ici qu'à peine quinze jours. Conclure que les appelants ont établi leur résidence dans une aussi courte période, tout en tenant compte de l'ensemble des autres facteurs qui découlent de ces demandes, ne serait pas donner une interprétation libérale à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur l'immigration, quand cet alinéa est lu dans le contexte global de la Loi. Cette conclusion, à mon avis, aurait plutôt pour effet d'enlever tout son sens à cette disposition. Je ne suis pas disposé à aller aussi loin. Si le législateur avait l'intention d'adopter une telle interprétation, il lui était facile de le dire en choisissant des termes plus simples que le libellé qui est actuellement en vigueur.

     L'avocat me renvoie également à une décision très récente de Mme le juge McGillis dans Re Suet Ki Amy Lee5, dans laquelle un appel en matière de citoyenneté a été accueilli et dans laquelle on s'est appuyé sur la décision Re Grace Kar Yan Cheung. Il n'est pas clairement indiqué si la décision Lee du juge Reed a été citée devant le juge McGillis.

     Je demeure convaincu que l'extrait de la décision Lee cité ci-dessus est tout à fait applicable aux faits des présents appels. Par conséquent, les appels sont rejetés.

                             FREDERICK E. GIBSON

                        

                                     Juge

Ottawa (Ontario)

le 29 septembre 1997

Traduction certifiée conforme         

                             F. Blais, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

    

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :                  T-1834-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :          LOI SUR LA CITOYENNETÉ c.
                         CHI TAI WONG
LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO
DATE DE L'AUDIENCE :          le 3 septembre 1997

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE GIBSON

DATE :                      le 29 septembre 1997

ONT COMPARU :

Peter K. Large                      POUR L'AMICUS CURIAE

Robert Mark                          POUR L'APPELANT

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Peter Large                          POUR L'AMICUS CURIAE

Toronto (Ontario)

Robert Mark                          POUR L'APPELANT

Toronto (Ontario)

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

    

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :                  T-1835-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :          LOI SUR LA CITOYENNETÉ c.
                         CHI YUEN WONG
LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO
DATE DE L'AUDIENCE :          le 3 septembre 1997

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE GIBSON

DATE :                      le 29 septembre 1997

ONT COMPARU :

Peter K. Large                      POUR L'AMICUS CURIAE

Robert Mark                          POUR L'APPELANT

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Peter Large                          POUR L'AMICUS CURIAE

Toronto (Ontario)

Robert Mark                          POUR L'APPELANT

Toronto (Ontario)

__________________

1      L.R.C. (1985), ch. C-29 (et ses modifications)

2      [1996] A.C.F. no 33 (C.F. 1re inst.) (QL)

3      (10 janvier 1990), no du greffe T-691-89 (C.F. 1re inst.) (non publiée)

4      (1983), 4 D.L.R. (4th) 664 (C.F. 1re inst.)

5      (16 septembre 1997), no du greffe T-1682-96 (C.F. 1re inst.) (non publiée)

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