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Date : 20240319


Dossier : T‑1374‑21

Référence : 2024 CF 439

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 19 mars 2024

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

HAIDA TOURISM PARTNERSHIP faisant affaire sous la raison sociale de WEST COAST RESORTS

demanderesse

et

L’ADMINISTRATEUR DE LA CAISSE D’INDEMNISATION DES DOMMAGES DUS À LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES CAUSÉE PAR LES NAVIRES

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La présente décision porte sur un appel introduit par la demanderesse, Haida Tourism Partnership, faisant affaire sous la raison sociale de West Coast Resorts [Haida], en vertu de l’article 51 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 [les Règles], contre l’ordonnance et les motifs que la juge adjointe Coughlan [la juge adjointe] a rendus le 21 décembre 2023 [l’ordonnance].

[2] Dans la présente action, Haida demande au défendeur, l’administrateur de la Caisse d’indemnisation[l’administrateur], le remboursement des frais qu’elle a engagés pour réparer les dommages découlant d’un déversement d’hydrocarbures provenant de son propre navire. L’ordonnance visée par l’appel a accueilli une requête dans laquelle l’administrateur sollicitait la radiation de l’action de Haida au motif que celle‑ci n’avait invoqué aucun fondement en droit au soutien de la responsabilité alléguée de l’administrateur. La juge adjointe a accueilli la requête de l’administrateur et a radié la déclaration de Haida sans autorisation de la modifier.

[3] Comme je l’explique en détail ci‑dessous, la requête et l’appel de Haida sont accueillis et l’ordonnance de la juge adjointe est annulée, car j’ai relevé une erreur manifeste et dominante dans la conclusion de la juge adjointe selon laquelle l’action de Haida est irrecevable par application du principe de la chose jugée et, en particulier, du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. À la demande des parties, j’ai donc tranché la requête en radiation sous‑jacente, et en conséquence, j’accueillerai la requête de Haida en autorisation de modifier sa déclaration en tenant compte de la cause d’action qu’elle a énoncée dans ses observations écrites déposées en l’espèce, car je ne suis pas convaincu qu’il est évident et manifeste que cette cause d’action est vouée à l’échec.

II. Contexte

[4] Haida, une société en commandite constituée sous le régime des lois de la Colombie‑Britannique, est propriétaire et exploitante du pavillon ou de la barge pour amateurs de pêche sportive connu sous le nom de Tasu I [le navire].

[5] La Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires [la CIDPHN] et son administrateur sont des créations de la loi établies en vertu de la partie 7 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, LC 2001, c 6 [la LRM], et ont (de façon générale) le mandat de fournir une indemnisation prévue par la loi pour les frais et les pertes découlant de la pollution par les hydrocarbures causée par les navires.

[6] Dans sa déclaration, Haida soutient que le 8 septembre 2018, le navire s’est détaché de sa bouée d’amarrage dans la baie d’Alliford, dans l’archipel Haida Gwaii, et a dérivé jusqu’à un point d’échouage dans la baie de Bearskin, en Colombie‑Britannique, où il a rejeté un mélange d’essence et de carburant diesel [l’échouage]. Le navire a été le seul impliqué dans l’incident. Haida est entrée en contact avec la Garde côtière canadienne pour l’informer de l’incident et, en collaboration avec plusieurs autres organismes, a fait des efforts pour réparer et réduire au minimum les dommages potentiellement dus à la pollution par les hydrocarbures.

[7] Haida soutient que l’échouage est survenu parce qu’une ou plusieurs tierces parties avaient trafiqué de manière intentionnelle et délibérée les câbles d’amarrage du navire dans le but de causer des dommages.

[8] Le 27 décembre 2018, Haida a déposé une demande auprès de la CIDPHN en vue d’obtenir le remboursement des frais relatifs aux mesures qu’elle a prises pour réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, y compris les mesures de prévention connexes. La demande a d’abord été déposée en vertu de l’alinéa 101(1)b) de la LRM, mais elle a par la suite été déposée en vertu du paragraphe 103(1) de la LRM.

[9] Je décrirai de façon plus détaillée ces dispositions législatives (figurant dans la partie 7 de la LRM) plus loin dans les présents motifs. Pour l’instant, je précise que le paragraphe 103(1) renvoie à d’autres dispositions de la LRM (figurant dans la partie 6, qui porte sur la responsabilité et l’indemnisation en matière de pollution causée par les navires) et permet à une personne qui a subi des pertes ou des dommages ou qui a engagé des frais visés à ces dispositions de présenter à l’administrateur une demande en recouvrement de créance. Aux termes du paragraphe 105(1) de la LRM, à la réception d’une demande en recouvrement de créance, l’administrateur enquête sur la créance, l’évalue et fait une offre d’indemnité au demandeur pour la partie de la demande qu’il juge recevable.

[10] Le 4 août 2021, l’administrateur a rendu une décision par laquelle il a rejeté la demande de Haida au motif qu’un propriétaire de navire n’a pas le droit présenter une demande en vertu du paragraphe 103(1) de la LRM afin de recouvrer les frais qu’il a engagés pour prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum les dommages potentiels dus à la pollution par les hydrocarbures qui découlent d’un incident causé uniquement par son propre navire. En vertu du paragraphe 106(2) de la LRM, Haida a interjeté appel à l’égard de la décision de l’administrateur (dans le dossier no T‑1375‑21). La juge Strickland de notre Cour a entendu et rejeté cet appel le 31 août 2022 dans la décision Haida Tourism Limited Partnership, faisant affaire sous la raison sociale de West Coast Resorts c L’administrateur de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, 2022 CF 1249 [la décision Strickland]. La juge Strickland a conclu que l’administrateur avait interprété correctement le paragraphe 103(1) de la LRM.

[11] Haida a déposé un avis d’appel à l’encontre de la décision Strickland le 28 septembre 2022. Le 29 mai 2023, Haida s’est désistée de cet appel.

[12] La présente action, qui découle aussi de l’échouage, a été engagée le 7 septembre 2021; elle est par conséquent antérieure à l’appel prévu par la loi que Haida a interjeté, mais elle a été mise en suspens (avec d’autres litiges qui ne sont pas pertinents en l’espèce) jusqu’à l’issue de l’appel prévu par la loi. Comme dans sa demande présentée en vertu du paragraphe 103(1), Haida, dans la présente action contre l’administrateur, demande le recouvrement des frais qu’elle a engagés pour prendre des mesures en réponse à la pollution causée par son propre navire. Cependant, en l’espèce, cette demande est fondée sur une autre disposition législative, à savoir le paragraphe 101(1) de la LRM. (Comme je le souligne plus loin dans les présents motifs, dans sa déclaration, Haida n’invoque pas expressément le paragraphe 101(1), mais les parties s’entendent pour dire qu’il s’agit de la disposition sur laquelle Haida s’appuie.)

[13] Le 22 août 2023, l’administrateur a présenté une requête en radiation de la déclaration de Haida dans la présente instance au motif que cette déclaration ne révèle aucune cause d’action valable. L’ordonnance par laquelle la juge adjointe a accueilli la requête de l’administrateur et a radié la déclaration de Haida sans autorisation de la modifier constitue le fondement du présent appel interjeté en vertu de l’article 51 des Règles.

III. Ordonnance visée par l’appel

[14] Dans l’ordonnance, la juge adjointe a examiné le critère applicable à une requête en radiation d’un acte de procédure, selon lequel il doit être évident et manifeste que l’acte de procédure ne révèle aucune cause d’action valable, autrement dit, que l’action est vouée à l’échec parce qu’elle contient un vice fondamental (R c Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42, au para 17). La juge adjointe a souligné que pour qu’une déclaration révèle une cause d’action valable, elle doit : a) alléguer des faits susceptibles de donner lieu à une cause d’action; b) indiquer la nature de l’action, qui doit se fonder sur ces faits et c) préciser le redressement sollicité, qui doit pouvoir découler de l’action et que la Cour doit être compétente pour accorder (Oleynik c Canada (Procureur général), 2014 CF 896 au para 5).

[15] La juge adjointe a aussi reconnu que la radiation d’un acte de procédure sans autorisation de le modifier est un pouvoir qui doit être exercé avec prudence, car le critère applicable à la radiation d’un acte de procédure est exigeant et les actes de procédure doivent être lus d’une manière qui permet l’instruction de toute demande inédite, mais soutenable (Société des loteries de l’Atlantique c Babstock, 2020 CSC 19 au para 19).

[16] La juge adjointe a d’abord examiné la déclaration pour déterminer si elle révélait une cause d’action. Haida a exposé les circonstances qui auraient causé l’échouage, ainsi que les mesures qu’elle a prises relativement aux dommages potentiels dus à la pollution en découlant, et a allégué qu’elle disposait d’un moyen de défense complet à l’égard de la responsabilité découlant de la pollution et des frais connexes de nettoyage et d’atténuation. À l’appui de ce moyen de défense, Haida a invoqué des dispositions de la LRM (article 3, annexe 8 et alinéa 77(3)b)) qui prévoient un moyen de défense pour un propriétaire de navire contre certaines créances aux termes de la LRM, parce que l’échouage a été causé par un tiers qui avait l’intention de causer des dommages. Haida a ensuite allégué qu’elle avait le droit de demander à la CIDPHN le remboursement des frais relatifs à toutes les mesures raisonnables qu’elle a prises pour réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution causée par les hydrocarbures ainsi qu’aux mesures préventives connexes.

[17] Cependant, la juge adjointe a conclu que Haida n’avait pas précisé les faits importants ou les arguments juridiques qu’elle invoquait pour affirmer qu’elle avait droit à un remboursement de la CIDPHN. La juge adjointe a souligné, comme il l’était expliqué dans la requête, que l’administrateur avait compris, par suite de discussions entre les avocats, que Haida avait l’intention d’invoquer le paragraphe 101(1) de la LRM pour faire valoir qu’elle avait droit au remboursement. Toutefois, la juge adjointe a conclu que cette interprétation de l’intention n’était pas utile à Haida, car l’acte de procédure, sous la forme qu’il avait alors, était insuffisant et était dénué de précisions étayant une demande d’indemnisation contre l’administrateur. La juge adjointe, qui a souligné que ces lacunes pouvaient être corrigées au moyen d’une modification, a ensuite conclu qu’il n’était pas nécessaire qu’elle envisage une modification, car en s’appuyant sur la décision Strickland, elle en était arrivée à la conclusion que l’affaire avait déjà été tranchée et qu’il y avait chose jugée.

[18] Dans l’ordonnance, la juge adjointe a ensuite expliqué sa conclusion selon laquelle la demande de Haida était chose jugée, plus précisément qu’elle était visée par la préclusion. La juge adjointe a souligné qu’un acte de procédure peut être radié lorsqu’il soulève une question qui a été tranchée de manière définitive dans une instance antérieure (IMS Incorporated c Toronto Regional Real Estate Board, 2023 CAF 70 au para 44 [IMS Incorporated]; citant Apotex Inc c Pfizer Ireland Pharmaceuticals, 2011 CAF 77, et Apotex Inc c Laboratoires Servier, 2007 CAF 350).

[19] La juge adjointe a énoncé les conditions préalables à une conclusion de préclusion, à savoir : a) la même question a déjà été tranchée; b) la décision judiciaire qui a mené à la préclusion était finale; c) les personnes visées par la décision sont les mêmes que les parties engagées dans la procédure dans laquelle la préclusion est soulevée; d) la question qui a donné naissance à la préclusion était fondamentale à la décision prise (Hughes Land Co v Manitoba, 1998 CanLII 17673 (MB CA) [Hughes Land], 167 DLR (4e) 652 (CA Man).

[20] La juge adjointe a ensuite examiné les positions des parties. Elle a d’abord mentionné la prétention de l’administrateur selon laquelle les observations formulées dans la décision Strickland étaient des remarques incidentes dans la mesure où elles portaient sur l’article 103 de la LRM, alors que l’action dont elle était saisie était en apparence fondée sur l’article 101. Tout en faisant remarquer que l’administrateur n’alléguait pas explicitement que l’action était chose jugée en raison de l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, la juge ajointe a cité un extrait des observations de l’administrateur : « […] la décision dans le dossier T‑1375‑21 n’a pas tranché sur le plan technique la question dont la Cour est saisie en l’espèce, mais cette décision peut et devrait être appliquée et donner lieu au rejet de la présente action. » Selon la juge adjointe, par cette observation, l’administrateur demandait à la Cour d’appliquer la doctrine de la chose jugée en fonction du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée.

[21] La juge adjointe a mentionné la position opposée de Haida selon laquelle tout élément tiré de la décision Strickland constituait une remarque incidente et ne devrait pas être pris en compte dans la requête en radiation. Haida a soutenu que peu de poids devrait être accordé à l’analyse que la juge Strickland avait faite de l’article 101 de la LRM, parce que cette analyse était beaucoup trop éloignée de la ratio decidendi de la décision concernant l’article 103 de cette même loi. De plus, Haida a contesté bon nombre des conclusions de la juge Strickland au sujet de l’article 101 et a reproché à celle‑ci d’avoir donné une interprétation trop restrictive à l’objet global de cette disposition.

[22] Les parties ont aussi adopté des positions opposées quant à la mesure dans laquelle la juge Strickland a reçu des observations détaillées au sujet de l’article 101, tandis que la demande faisant l’objet de l’appel dont elle était saisie était fondée sur l’article 103. Comme la Cour n’était saisie d’aucun élément de preuve sur les observations présentées à la juge Strickland, la juge adjointe a expliqué que la Cour était tenue de décider si les mêmes questions avaient été tranchées dans l’affaire précédente en comparant ce qui avait été décidé dans cette affaire avec les allégations de la déclaration (IMS Incorporated, au para 46).

[23] Bien qu’elle ait reconnu que la décision Strickland portait principalement sur la question de savoir si l’administrateur avait refusé à bon droit la demande d’indemnisation de Haida fondée sur le paragraphe 103(1) de la LRM, la juge adjointe a conclu que la juge Strickland avait fait un examen détaillé des parties 6 et 7 de cette loi ainsi que de l’objet de l’ensemble de celle‑ci. La juge adjointe a adopté les paragraphes 10 à 25 de la décision Strickland, puis a énoncé les conclusions suivantes de la juge Strickland :

  1. Les parties 6 et 7 de la LRM ont pour objet d’établir la responsabilité des propriétaires de navire à l’égard de la pollution par les hydrocarbures causée par un navire et d’indemniser les personnes qui subissent des dommages dus à cette pollution selon un modèle fondé sur le principe du « pollueur‑payeur » : voir les para 61‑64, 70.

  2. La LRM n’est pas une loi vouée à la protection de l’environnement et son objet principal n’est pas la protection anticipée de l’environnement : voir le para 78.

  3. Les paragraphes 101(1) et 103(1) de la LRM s’appliquent de façon indépendante l’un de l’autre et offrent à toute personne qui subit des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par un navire des mécanismes distincts pour solliciter une indemnisation : voir les para 79‑80, 84‑91, 93.

  4. Le paragraphe 101(1) de la LRM ne comporte pas le mécanisme par lequel une demande d’indemnisation peut être présentée à la CIDPHN, mais plutôt une solution de rechange en cas d’échec d’une action intentée en vertu de l’article 109, de sorte que l’administrateur de la CIDPHN puisse intervenir pour obtenir une indemnisation au nom des demandeurs. Si une demande civile initiale échoue et que le propriétaire du navire n’est pas tenu responsable, une demande en recouvrement fondée sur le paragraphe 101(1) pourra être présentée : voir le para 82.

  5. Le paragraphe 101(1) sert à protéger et à indemniser les demandeurs au cas où le propriétaire du navire ne remplit pas ou n’est pas tenu de remplir les obligations que lui impose le régime de responsabilité stricte à l’égard de la pollution par les hydrocarbures : voir le para 81.

  6. Le paragraphe 101(1) ne permet pas au propriétaire d’un navire d’engager une action contre la CIDPHN parce qu’il soutient qu’il ne peut être tenu responsable en raison de l’un des motifs exposés au paragraphe 77(3) de la LRM : voir le para 83.

  7. Le propriétaire d’un navire ne peut formuler de demande au titre de l’article 109 parce que, en tant que propriétaire du navire polluant, il ne peut pas engager une action contre lui‑même : voir le para 84.

[24] Reconnaissant que le principe de la chose jugée vise à favoriser le caractère définitif des procédures et à empêcher les contestations indirectes de jugements (Danyluk c Ainsworth Technologies Inc, 2001 CSC 44 au para 24), la juge adjointe a ensuite expliqué en ces termes sa conclusion selon laquelle le principe de la préclusion s’appliquait (au para 53) :

53. La présente action constitue une contestation indirecte des conclusions que la juge Strickland a tirées dans la décision Haida no 1. Haida a déjà eu l’occasion d’interjeter appel de cette décision. Comme je le mentionne plus haut, au paragraphe 16, Haida a soutenu que la juge Strickland avait mal interprété les parties 6 et 7 et l’article 101 de la LRM. Bien qu’elles ne soient pas invoquées correctement, il s’agit des mêmes dispositions qui seraient en jeu en l’espèce. Le désistement de la demanderesse dans l’affaire Haida no 1 rend définitives la décision et les conclusions de fait de la juge Strickland dans cette affaire. De plus, j’estime que l’analyse que la juge Strickland a faite du mécanisme de demande prévu aux articles 101 à 103 de la LRM était fondamentale à sa décision. La juge Strickland devait examiner en profondeur les parties 6 et 7 de la LRM pour étayer le fondement de sa décision dans l’appel de Haida. En conséquence, sa décision dans l’affaire Haida no 1 lie les parties à l’instance actuelle et le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’applique.

[25] Enfin, la juge adjointe a souligné que le fait qu’une instance était un appel prévu par la loi et l’autre, une action, n’a aucune importance, car Haida sollicitait la même réparation : le remboursement des frais engagés aux fins de la réparation des dommages découlant d’un incident de pollution par les hydrocarbures causé par son navire.

[26] En conséquence, l’ordonnance a accueilli la requête de l’administrateur et a radié la déclaration de Haida sans autorisation de la modifier.

IV. Questions en litige

[27] Haida soulève plusieurs arguments à l’appui de sa position selon laquelle la juge adjointe a commis une erreur de droit en radiant l’action sur le fondement de la décision Strickland. Haida soutient également qu’elle a été privée de son droit à l’équité procédurale parce que les parties avaient adopté la position selon laquelle les principes de la chose jugée et de la préclusion ne s’appliquaient pas, et que la juge adjointe était par conséquent tenue de demander des observations sur ces principes avant de s’appuyer sur ceux‑ci pour radier l’action.

[28] En outre, au cours de la semaine précédant l’audience du présent appel, Haida a déposé une requête en vue d’obtenir l’autorisation de produire de nouveaux éléments de preuve dans le cadre de l’appel. Les éléments de preuve proposés, dont ne disposait pas la juge adjointe, concernent les communications entre les avocats, qui, selon Haida, sont nécessaires pour répondre à la position que l’administrateur a exprimée dans les observations écrites fournies en réponse au présent appel, à savoir que la juge adjointe avait eu raison de conclure que la demande de Haida était chose jugée. Haida soutient que la position de l’administrateur va à l’encontre d’une entente antérieure entre les parties, comme en témoignent les éléments de preuve qu’elle souhaite produire. L’administrateur s’oppose à la requête en production de nouveaux éléments de preuve.

[29] Enfin, Haida fait valoir que le dossier de requête de l’administrateur comprend de nouveaux éléments de preuve dont ne disposait pas la juge adjointe, à savoir les mémoires des faits et du droit que les parties ont déposés dans le cadre de l’appel devant la juge Strickland. Haida souligne également que l’administrateur n’a pas présenté de requête en vue de faire admettre ces éléments de preuve.

[30] Par conséquent, dans l’ensemble, les arguments qu’invoquent les parties soulèvent les questions suivantes, que la Cour doit trancher :

  1. La Cour devrait‑elle admettre les éléments de preuve présentés par Haida dont ne disposait pas la juge adjointe?

  2. La Cour devrait‑elle admettre les éléments de preuve présentés par l’administrateur dont ne disposait pas la juge adjointe?

  3. La juge adjointe a‑t‑elle commis une erreur en appliquant les remarques incidentes tirées de la décision Strickland?

  4. La juge adjointe a‑t‑elle commis une erreur dans son application du critère du caractère évident et manifeste?

  5. La juge adjointe a‑t‑elle commis une erreur en appliquant la doctrine de la préclusion?

  6. Haida a‑t‑elle été privée de son droit à l’équité procédurale?

  7. Si la Cour relève une erreur susceptible de révision dans l’ordonnance, comment la requête en radiation de l’administrateur devrait‑elle être tranchée?

V. Norme de contrôle

[31] La norme de contrôle applicable à un appel d’une ordonnance discrétionnaire rendue par un juge adjoint est la norme de l’erreur manifeste et dominante pour les questions de fait et les questions mixtes de fait et de droit, et la norme de la décision correcte pour les questions de droit et les questions mixtes de fait et de droit lorsqu’il y a une question de droit isolable (Corporation de soins de la santé Hospira c Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215 aux para 64, 66, citant Housen c Nikolaisen, 2002 CSC 33 [Housen] aux para 17‑37).

[32] Par erreur manifeste, on entend une erreur évidente, alors que l’erreur dominante est celle qui a une incidence sur la conclusion du décideur (Clorox Company of Canada, Ltd c Chloretec sec, 2020 CAF 76 [Clorox] au para 38). La norme de contrôle de l’erreur manifeste et dominante commande une grande déférence, tandis que selon la norme de la décision correcte, aucune déférence n’est témoignée au décideur d’instance inférieure (Clorox, au para 23; Tokai of Canada Ltd c Kingsford Products Company, LLC, 2021 CF 782 au para 22).

[33] S’appuyant sur l’arrêt Agnico‑Eagle Mines Ltd c Canada, 2016 CAF 130 [AgnicoEagle] (au para 40), Haida fait valoir dans ses observations écrites qu’une cour de justice commet une erreur de droit, susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte, lorsqu’elle applique incorrectement un principe juridique. Haida soutient par conséquent que les questions qu’elle a soulevées en ce qui concerne le bien‑fondé de l’ordonnance sont toutes assujetties à la norme de la décision correcte. Dans ses observations écrites, l’administrateur convient que la norme de contrôle applicable au présent appel, uniquement en ce qui a trait aux questions de droit, devrait être celle de la décision correcte.

[34] Cependant, à l’audition de la requête, j’ai signalé aux avocats de Haida qu’ils avaient peut‑être mal interprété le paragraphe 40 de l’arrêt Agnico‑Eagle. Ce paragraphe n’indique pas que la norme de la décision correcte s’applique au contrôle de l’application incorrecte d’un principe juridique, mais plutôt que cette norme s’applique au contrôle de l’application d’un principe juridique incorrect. Cette distinction peut sembler subtile, mais elle est importante. Dans l’arrêt Agnico‑Eagle, la Cour d’appel fédérale explique que lorsqu’il est possible de dégager une pure question de droit, comme l’application de la mauvaise norme ou d’un principe juridique incorrect, le défaut de considérer un élément essentiel d’un critère juridique ou d’un facteur juridique pertinent, la norme de la décision correcte s’applique. Cependant, si la Cour examine l’application d’un principe juridique à un ensemble de fait, il s’agit d’une question mixte de fait et de droit qui est susceptible de contrôle selon la norme de l’erreur manifeste et dominante (Housen, au para 36).

[35] Les avocats de Haida semblaient avoir accepté cette distinction, bien que Haida soutienne que certains éléments de l’analyse de la juge adjointe constituent des questions de droit isolables assujetties à la norme de la décision correcte. Plus loin dans les présents motifs, lorsque j’examinerai les arguments de Haida, j’appliquerai les principes énoncés ci‑dessus afin de déterminer la norme de contrôle applicable pour trancher chaque argument.

[36] Je conviens avec les parties que l’issue du principal, qui se rapporte à l’équité procédurale de la décision relative à la requête en radiation, est assujettie à la norme de la décision correcte, ou plus précisément, que la Cour doit se demander si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances (Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 au para 54).

VI. Régime législatif applicable

[37] Comme je le mentionne plus haut, les dispositions législatives pertinentes dans le présent appel se trouvent aux parties 6 et 7 de la LRM. Au moment de l’échouage, la version de la LRM qui est entrée en vigueur le 8 juin 2015 et qui est demeurée applicable jusqu’au 12 décembre 2018 avait force exécutoire, et c’est elle qui s’applique au présent appel. Les dispositions législatives citées dans les présents motifs proviennent de cette version.

A. Partie 6 – Responsabilité et indemnisation en matière de pollution

[38] Les paragraphes 10 à 22 de la décision Strickland fournissent une description utile et détaillée de la partie 6 de la LRM, intitulée « Responsabilité et indemnisation en matière de pollution ». Je suis d’avis que cette description n’est pas en litige entre les parties. Je ne répéterais pas cette description avec le même niveau de détail, mais je m’en inspirerai largement pour résumer ci‑dessous les principales dispositions de la partie 6 qui sont mentionnées dans le présent appel. Les dispositions en soi sont reproduites à l’annexe A de la présente ordonnance et des présents motifs.

[39] La partie 6 de la LRM compte deux sections. La section 1 donne force de loi à certaines conventions internationales à l’égard desquelles le Canada est un État contractant. Les trois conventions pertinentes en l’espèce sont : a) la Convention internationale de 1992 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures [la Convention sur la responsabilité civile]; b) la Convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute [la Convention sur les hydrocarbures de soute]; c) la Convention internationale de 1992 portant création d’un Fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures [la Convention sur le Fonds international]; ainsi que le Protocole de 2003 à la Convention portant création d’un Fonds [le Protocole portant création d’un Fonds complémentaire]. De manière générale, ces conventions, et les dispositions législatives connexes de la partie 6 qui complètent l’application des conventions, régissent la responsabilité et les fonds servant à verser une indemnisation pour les frais, les pertes et les dommages découlant de la pollution par les hydrocarbures causée par les navires.

[40] La section 2 de la partie 6 de la LRM a trait à la responsabilité à l’égard de la pollution par les hydrocarbures causée par les navires qui ne tombe pas sous le coup des conventions internationales mentionnées à la section 1. Pour les fins de l’espèce, il n’est pas nécessaire d’étudier en profondeur les différences détaillées dans l’application des conventions de la section 1 et des dispositions de la section 2. Ce qui importe, c’est le fait que deux des trois conventions susmentionnées (la Convention sur les hydrocarbures de soute et la Convention sur la responsabilité civile) et la section 2 comprennent des dispositions imposant au propriétaire d’un navire une responsabilité stricte à l’égard des dommages causés par son navire, et dans certains cas, cette responsabilité vise également les frais engagés à l’égard de mesures visant à prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution causée par le navire. La responsabilité stricte du propriétaire d’un navire est soumise à certaines exceptions restreintes prévues dans ces conventions et dans la section 2.

[41] Une de ces exceptions s’applique lorsque l’événement ou les dommages sont entièrement imputables à l’acte ou à l’omission d’un tiers qui avait l’intention de causer des dommages. La position de Haida selon laquelle elle a droit de recouvrer les frais qu’elle a engagés dans la présente action s’appuie en grande partie sur cette exception.

B. Partie 7 — Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires

[42] La partie 7 de la LRM, intitulée « Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires », proroge la CIDPHN et prévoit la nomination, par le gouverneur en conseil, de son administrateur et de son administrateur adjoint. Les principales dispositions de la partie 7 qui constituaient le fondement des arguments des parties dans l’appel devant la juge Strickland et en l’espèce sont énoncées à l’annexe A de la présente ordonnance et des présents motifs. Ces dispositions comprennent l’article 101, sur lequel Haida s’appuie en l’espèce, et l’article 103, sur lequel elle s’est appuyée dans la demande contre l’administrateur sur laquelle portait la décision Strickland. J’examine ces deux articles en détail plus loin dans les présents motifs.

VII. Analyse

A. La Cour devrait‑elle admettre les éléments de preuve présentés par Haida dont ne disposait pas la juge adjointe?

[43] Tout d’abord, je souligne que la réponse de l’administrateur à la requête de Haida visant à présenter de nouveaux éléments de preuve soulève la question de savoir s’il existe un article des Règles applicable ou autre fondement sur lequel peut s’appuyer Haida pour présenter la requête. À l’audience, les avocats de Haida ont reconnu qu’aucun article des Règles ne s’applique directement à la présentation de nouveaux éléments de preuve dans un appel interjeté en vertu de l’article 51 des Règles. Cependant, les avocats s’appuient sur la décision Fondation David Suzuki c Canada (Santé), 2018 CF 379 [Suzuki], aux paragraphes 13 à 15, qui confirme l’existence d’un fondement par analogie avec l’article 351 des Règles, qui régit l’admission de nouveaux éléments de preuve devant la Cour d’appel fédérale. J’admets qu’il existe un fondement pour la requête de Haida.

[44] En réponse aux observations écrites de l’administrateur en l’espèce, Haida a déposé sa requête en vue de présenter des éléments de preuve supplémentaires dont ne disposait pas la juge adjointe. Haida estime que certaines de ces observations dénaturent le contexte du litige entre les parties, en particulier en ce qui a trait à une entente conclue entre les parties qui a poussé Haida à se désister de son appel de la décision Strickland. Plus important encore, Haida souhaite présenter des éléments de preuve concernant la correspondance entre les avocats pour établir que les parties avaient convenu que la décision Strickland ne tranchait pas la présente action et que la présente action n’était pas chose jugée.

[45] Haida souhaite présenter ces éléments de preuve, car l’administrateur, dans les observations écrites qu’il a présentées en l’espèce, a fait valoir que la conclusion de la juge adjointe selon laquelle la demande de Haida était chose jugée était compréhensible compte tenu du contexte du litige. Comme la position que l’administrateur exprime dans ses observations écrites est incompatible avec l’entente conclue entre les parties, Haida soutient qu’elle devrait avoir le droit de présenter des éléments de preuve concernant cette entente.

[46] En réponse, l’administrateur explique qu’en faisant valoir que la conclusion de la juge adjointe concernant le principe de la chose jugée était compréhensible, il n’avait pas l’intention d’avancer un argument selon lequel l’ordonnance devrait être confirmée pour ce motif. L’administrateur précise, dans la mesure où il peut y avoir une quelconque ambiguïté dans ses observations écrites, qu’il ne soutient pas que le principe de la chose jugée s’applique en l’espèce. Au contraire, comme il en ressortait manifestement des observations que ses avocats ont présentées à l’audience relative au présent appel, l’administrateur cherche à confirmer l’ordonnance au motif que la juge adjointe s’est livrée à une analyse subsidiaire dans laquelle elle a adopté le raisonnement exposé dans la décision Strickland, qu’elle considérait comme une jurisprudence convaincante, et a accueilli la requête en radiation, car la demande de Haida soulevait une cause d’action sans fondement juridique.

[47] Dans les observations qu’elle a présentées à l’appui de sa requête visant à présenter de nouveaux éléments de preuve, Haida fait valoir que le critère que la Cour devrait appliquer pour décider s’il y a lieu d’autoriser la présentation d’éléments de preuve supplémentaires en appel est celui que la Cour suprême du Canada a établi dans l’arrêt Palmer c La Reine, [1980] 1 RCS 759 [Palmer], selon lequel il faut prouver ceci : a) il aurait été impossible, avec diligence raisonnable, d’obtenir la preuve en première instance; b) la preuve est pertinente, en ce sens qu’elle porte sur une question décisive ou potentiellement décisive; c) la preuve est plausible, en ce sens qu’on puisse raisonnablement y ajouter foi; d) la preuve est telle que si l’on y ajoute foi, on puisse raisonnablement penser qu’elle aurait influé sur le résultat en première instance.

[48] Haida soutient que la Cour devrait préférer le critère établi dans l’arrêt Palmer à celui qui s’applique généralement à la production d’éléments de preuve dans le cadre d’un appel d’une ordonnance rendue par un juge adjoint. Comme la Cour l’a indiqué dans la décision Suzuki, au paragraphe 19, selon le critère qui s’applique généralement, il est exceptionnellement possible d’admettre de nouvelles preuves dans les circonstances où : a) elles n’auraient pas pu être disponibles auparavant; b) elles serviront les intérêts de la justice; c) elles ne porteront pas gravement atteinte à l’autre partie.

[49] Il existe des similitudes importantes entre ces deux critères, y compris l’importance que le critère établi dans l’arrêt Palmer accorde à la pertinence des nouveaux éléments de preuve et à leur éventuelle incidence sur le résultat, et l’importance que le critère énoncé dans la décision Suzuki accorde à l’intérêt de la justice. Il n’est pas nécessaire que la Cour détermine quel critère appliquer, car Haida ne satisfait à aucun des deux critères. Comme l’administrateur a confirmé qu’il n’invoquerait pas l’application du principe de la chose jugée en l’espèce, la preuve que Haida souhaite produire n’est pas pertinente, n’aurait pas d’incidence sur le résultat et son admission ne sert pas l’intérêt de la justice.

[50] Par conséquent, la requête en production de nouveaux éléments de preuve de Haida est rejetée.

B. La Cour devrait‑elle admettre les éléments de preuve présentés par l’administrateur dont ne disposait pas la juge adjointe?

[51] Le dossier de requête que l’administrateur a préparé en réponse au présent appel comprenait deux documents dont ne disposait pas la juge adjointe saisie de la requête en radiation. Il s’agit des mémoires des faits et du droit respectifs des parties qui ont été déposés dans le cadre de l’appel devant la juge Strickland. Haida soutient que ces mémoires n’ont pas été dûment présentés à la Cour. L’administrateur n’a pas présenté de requête à l’appui de la production de ces documents et n’a pas particulièrement présenté ou fait valoir d’arguments convaincants en vue de les produire lors de l’audience relative à l’appel.

[52] Par conséquent, je ne tiendrai pas compte de ces mémoires des faits et du droit pour trancher l’appel dont je suis saisi en l’espèce.

C. La juge adjointe a‑t‑elle commis une erreur en appliquant les remarques incidentes tirées de la décision Strickland?

[53] Haida soutient que la juge adjointe a appliqué incorrectement les principes juridiques de la ratio decidendi et des remarques incidentes en concluant qu’elle était liée par l’analyse du paragraphe 101(1) de la LRM énoncée dans la décision Strickland. Haida s’appuie sur de la jurisprudence expliquant la distinction entre la ratio decidendi et les remarques incidentes, à savoir que seule la ratio decidendi de la décision de principe s’impose aux jugements intervenant par la suite (Association des pilotes d’Air Canada c Kelly, 2012 CAF 209 aux para 54‑56). Haida soutient que la ratio decidendi de la décision Strickland se rapporte uniquement à la question de savoir si l’administrateur avait refusé à bon droit la demande d’indemnisation de Haida fondée sur le paragraphe 103(1) de la LRM. Bien que la juge Strickland ait fourni une analyse du paragraphe 101(1), Haida fait valoir que cette analyse constitue une remarque incidente et souligne que les observations écrites des deux parties, bien qu’elles ne lient pas en soi la juge adjointe, confirmaient également la position conjointe des parties selon laquelle cette analyse constituait une remarque incidente.

[54] La norme de contrôle applicable à cet argument dépend de la question de savoir si la Cour examinait une question de droit isolable, comme la façon dont la juge adjointe a interprété la distinction entre la ratio decidendi et les remarques incidentes (auquel cas la norme de la décision correcte s’appliquerait) ou l’application de ces principes aux faits particuliers (auquel cas la Cour effectuerait le contrôle selon la norme de l’erreur manifeste et dominante).

[55] Cependant, relativement à cet argument, il n’est pas nécessaire (ni même possible) pour la Cour de choisir une norme de contrôle, car l’ordonnance ne démontre pas que la juge adjointe a conclu qu’elle était liée par l’analyse de l’article 101 énoncée dans la décision Strickland du fait que celle‑ci faisait jurisprudence. Ce n’était pas là la nature de son analyse.

[56] La juge adjointe a plutôt affirmé (au para 53, précité) que la décision Strickland liait les parties à l’instance actuelle et que le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait. Cette conclusion s’appuie sur la façon dont la juge adjointe a appliqué le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, y compris sur le fait que la juge adjointe a conclu que l’analyse que la juge Strickland a faite du mécanisme de demande prévu aux articles 101 à 103 de la LRM était fondamentale à la décision Strickland. J’interprète cette conclusion dans le cadre de la démarche par laquelle la juge adjointe a appliqué les conditions préalables à une conclusion de préclusion découlant d’une question déjà tranchée, y compris la condition exigeant que la question qui a donné naissance à la préclusion ait été fondamentale à la décision prise (Hughes Land).

[57] Comme Haida l’a affirmé à l’audience, il existe des similitudes, et peut‑être même un lien, entre, d’une part, une analyse visant à savoir si une question en particulier fait partie de la ratio decidendi d’une décision, et d’autre part, une analyse visant à savoir si une question en particulier a été tranchée et est fondamentale quant à une décision aux fins de l’analyse de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. Je souscris à cette observation, car notre Cour a conclu que les remarques incidentes n’étayent pas une conclusion de préclusion découlant d’une question déjà tranchée (Bell Canada c Canada (Commission des droits de la personne), 2000 CanLII 16451, [2001] 2 CF 392 (1re inst) [Bell] au para 56). Cependant, la première analyse est d’ordre jurisprudentiel et représente la prise en compte de l’application éventuelle d’un fondement juridique, tandis que la deuxième représente l’application d’un type de chose jugée dans l’examen de la question de savoir s’il est interdit à des parties données de plaider une question en s’appuyant sur le contexte du litige entre elles. La partie de l’ordonnance sur laquelle l’argument de Haida s’appuie, dans laquelle la juge adjointe a indiqué que la décision Strickland lie les parties, correspond à la deuxième analyse. La juge adjointe n’a pas conclu que la ratio decidendi de la décision Strickland la liait sur le plan jurisprudentiel.

[58] Comme je le mentionne plus haut, l’examen de cet argument par la Cour n’est assujetti à aucune norme de contrôle, car l’argument est fondé sur ce qui constitue, à mon avis, une interprétation erronée du raisonnement de la juge adjointe. Par conséquent, cet argument ne soulève aucune erreur susceptible de contrôle.

D. La juge adjointe a‑t‑elle commis une erreur dans son application du critère du caractère évident et manifeste?

[59] Ensuite, Haida fait valoir que la juge adjointe a commis une erreur en n’appliquant pas en totalité le critère applicable à une requête en radiation d’un acte de procédure aux termes de l’alinéa 221(1)a) des Règles, selon lequel il doit être évident et manifeste, dans l’hypothèse où les faits allégués seraient avérés, que la demande n’a aucune possibilité raisonnable d’être accueillie (voir, p. ex. Mudie c Canada (Procureur général), 2021 CF 839 au para 11, citant R c Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42). Haida soutient que la juge adjointe a appliqué le critère permettant de conclure à la préclusion découlant d’une question déjà tranchée au lieu d’appliquer en totalité le critère du caractère évident et manifeste qui s’applique à la radiation d’un acte de procédure, et a ainsi commis une erreur de droit en appliquant une partie, et non la totalité, d’un critère juridique (Housen, au para 27).

[60] Au sujet de la norme de contrôle, je conviens que le défaut d’appliquer le critère juridique applicable ou l’application incomplète du critère constituerait une erreur de droit susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte. Je souligne que dans l’ordonnance, la juge adjointe a clairement formulé le critère du caractère évident et manifeste (au para 19) dans son explication des principes juridiques applicables à une requête en radiation. Je crois comprendre que Haida soulève deux arguments à l’appui de sa position selon laquelle la juge adjointe a néanmoins commis une erreur de droit.

[61] Premièrement, dans ses observations écrites, Haida soutient que la juge adjointe a appliqué le critère du caractère évident et manifeste en partie, en concluant que son acte de procédure était dénué de précisions étayant une demande d’indemnisation contre l’administrateur de la CIDPHN, mais n’a ensuite pas terminé son analyse en se penchant sur la question de savoir si cette lacune pouvait être corrigée au moyen d’une modification (au para 32 de l’ordonnance).

[62] Je conclus que cet argument est peu fondé. La juge adjointe a expliqué qu’il n’était pas nécessaire qu’elle examine la question de savoir si une modification permettrait de remédier au manque de précisions dans la déclaration, car elle avait conclu que l’action de Haida était chose jugée. La juge adjointe a conclu que si l’action était irrecevable par application du principe de la chose jugée, aucune modification visant à apporter des précisions ne pourrait la sauver. Cette analyse ne démontre pas une application incomplète du critère applicable et ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle.

[63] Deuxièmement, à l’audience du présent appel, Haida a fait valoir que la juge adjointe avait commis une erreur en appliquant seulement le critère applicable à la préclusion découlant d’une question déjà tranchée sans appliquer également le critère du caractère évident et raisonnable applicable à une requête en radiation. Si je comprends bien les observations des avocats, la juge adjointe n’aurait pas dû se pencher sur la question de savoir si la préclusion découlant d’une question déjà tranchée faisait obstacle à la demande de Haida, mais aurait plutôt dû se pencher sur la question de savoir s’il était évident et manifeste que ce principe faisait obstacle à la demande.

[64] Je souscris à la réponse de l’administrateur à cet argument, à savoir que le critère du caractère évident et manifeste n’impose pas un seuil supplémentaire ou supérieur à respecter lors de l’analyse de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. La juge adjointe a conclu que le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait. Une telle conclusion est définitive et il ne serait pas valable de s’attendre à une autre analyse ou explication indiquant que cette conclusion était aussi évidente et manifeste. Autrement dit, dès que la juge a conclu que le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait, il était automatiquement évident et manifeste que la demande était vouée à l’échec.

[65] Je ne relève aucune erreur découlant de ces arguments.

E. La juge adjointe a‑t‑elle commis une erreur en appliquant la doctrine de la préclusion?

[66] Le résultat de la requête en radiation reposait sur la conclusion de la juge adjointe selon laquelle l’analyse que la juge Strickland avait faite du mécanisme de demande prévu aux articles 101 à 103 de la LRM était fondamentale à la décision et avait entraîné l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. Haida soutient que la juge adjointe a commis une erreur en interprétant mal le principe juridique de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée ou en appliquant incorrectement ce principe. Haida soutient que l’analyse de l’article 101 énoncée dans la décision Strickland constituait une remarque incidente, ne répond pas à une question fondamentale à la décision, et qu’en conséquence, elle n’est pas susceptible de fonder l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée en l’espèce.

[67] Cette question comporte une caractéristique inusitée, à savoir que l’administrateur ne conteste pas la position de Haida. Comme je le mentionne plus haut, l’administrateur soutient que l’ordonnance devrait être confirmée en appel; il s’appuie sur l’analyse fournie dans l’ordonnance à titre subsidiaire à l’analyse de la chose jugée ou de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. Je reviens à cette observation plus loin. Cependant, l’administrateur ne soutient pas que le principe de la chose jugée s’applique en l’espèce. Comme le souligne Haida, dans les observations écrites que l’administrateur a présentées à la juge adjointe dans le cadre de la requête en radiation, qui concordent avec la position de Haida, il a indiqué que l’analyse de l’article 101 énoncée dans la décision Strickland constituait une remarque incidente, car elle n’était pas déterminante quant à la question dont la juge Strickland était saisie, et a reconnu que Haida n’était pas précluse d’intenter la présente action aux termes de l’article 101 du fait que la juge Strickland avait rejeté son appel de la décision de l’administrateur quant à sa demande fondée sur l’article 103.

[68] Par conséquent, la Cour se trouve dans une situation inhabituelle, car elle doit évaluer l’analyse de la chose jugée formulée dans l’ordonnance pour déterminer si elle comprend une erreur susceptible de contrôle, et ce, sans qu’aucune des parties au litige ne fasse valoir que cette analyse est valable. Bien entendu, ce n’est pas parce que cette situation se produit qu’il y a nécessairement une erreur; les parties semblent reconnaître que ni la juge adjointe ni la Cour saisie de l’appel ne sont liées par le fait qu’elles estiment que l’analyse de l’article 101 énoncée dans la décision Strickland constitue une remarque incidente et n’entraîne pas l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. Cette situation a seulement pour conséquence que la Cour ne peut pas s’appuyer sur des arguments en faveur de l’analyse de la chose jugée et doit faire preuve de prudence en examinant les arguments de Haida selon lesquels la juge adjointe a commis une erreur en effectuant cette analyse.

[69] En ce qui a trait à la norme de contrôle, la position de Haida selon laquelle ses arguments donnent ouverture à un contrôle selon la norme de la décision correcte ne me convainc pas. En effet, la juge adjointe affirme à juste titre que le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée permet de radier un acte de procédure lorsque celui‑ci soulève une question qui a été tranchée de manière définitive dans une instance antérieure. La juge adjointe décrit aussi correctement les conditions préalables à une conclusion de préclusion (susmentionnées), y compris celle exigeant que la question qui a donné naissance à la préclusion ait été fondamentale à la décision antérieure, et aucun argument ne me convainc qu’une de ces conditions préalables a été ignorée.

[70] Les observations de Haida ne constituent pas un argument selon lequel la juge adjointe a commis une erreur en raison d’une question de droit isolable. Haida demande plutôt à la Cour de conclure que la juge adjointe a appliqué incorrectement le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée en évaluant l’incidence de la décision Strickland et les observations des parties à ce sujet. Ces considérations sont suffisamment factuelles (comme la décision Strickland est pertinente quant à l’analyse de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée sur le plan factuel, et non jurisprudentiel) pour faire en sorte que la norme qui s’applique est celle de l’erreur manifeste et dominante.

[71] Cela dit, Haida m’a convaincu qu’il y a eu une erreur manifeste et dominante dans l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. Premièrement, il semble clair que l’ordonnance démontre une interprétation erronée de la position de l’administrateur quant à la question de savoir si le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait. La juge adjointe a souligné que l’administrateur avait reconnu que les observations formulées dans la décision Strickland étaient des remarques incidentes dans la mesure où elles portaient sur l’article 103 de la LRM, alors que l’action dont elle était alors saisie était en apparence fondée sur l’article 101. Cependant, la juge adjointe a ensuite mentionné que l’administrateur avait fait valoir que la décision Strickland devrait être appliquée et donner lieu au rejet de l’action, et a interprété que, par cette observation, l’administrateur demandait à la Cour d’appliquer le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée.

[72] C’était une erreur. Dans les observations écrites que l’administrateur a présentées à la juge adjointe dans le cadre de la requête en radiation, après avoir reconnu que l’analyse de l’article 101 effectuée par la juge Strickland constituait une remarque incidente, car elle n’était pas déterminante quant à la question dont elle était saisie, l’administrateur a également mentionné l’entente qu’il avait conclue avec Haida, selon laquelle la décision Strickland n’empêchait pas Haida d’intenter la présente action. Pour en revenir à la distinction que j’ai expliquée plus haut, entre une position fondée sur une décision judiciaire pour invoquer les principes de la chose jugée ou de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée et une position fondée sur une décision pour sa valeur jurisprudentielle, la position de l’administrateur était manifestement cette dernière. L’administrateur a expressément indiqué qu’il était d’accord avec Haida pour dire que le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée ne s’appliquait pas. Il a fait valoir que l’analyse de l’article 101, qui constituait une remarque incidente dans la décision Strickland, était convaincante sur le plan jurisprudentiel et devrait être adoptée et appliquée à la requête en radiation.

[73] En outre, comme je l’explique plus loin, je souscris à la position que les deux parties ont adoptée devant la juge adjointe et en l’espèce, selon laquelle l’analyse de l’article 101 énoncée dans la décision Strickland constitue une remarque incidente et ne donne pas lieu, en l’espèce, à l’application de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée.

[74] La juge Strickland a effectué une analyse de l’article 101 de la LRM, car Haida avait fait valoir qu’il existait un lien entre les articles 101 et 103. Bien que l’administrateur ait fait valoir que l’article 101 n’avait aucune incidence sur la fonction de l’article 103 et était peu pertinent dans le cadre de l’appel, la juge Strickland a examiné les arguments de Haida et en est venue aux conclusions que la juge adjointe a énoncées dans son ordonnance. La juge Strickland a effectué son analyse conformément à la composante contextuelle de l’interprétation des lois (voir la décision Strickland, aux para 57‑59) et a finalement convenu avec l’administrateur que les articles 101 et 103 étaient des voies séparées et distinctes pour faire valoir des demandes. Par conséquent, l’affirmation de Haida selon laquelle elle disposait d’un moyen de défense fondé sur l’alinéa 101(1)b) n’est pas entrée en jeu dans l’évaluation de la demande présentée en vertu du paragraphe 103(1) (voir la décision Strickland, au para 90).

[75] Bien que les arguments des parties dans le cadre de l’appel prévu par la loi aient donné lieu à cette analyse de l’article 101, l’interprétation de cet article n’était pas la question que devait trancher la juge Strickland. La décision Strickland indique expressément que la question en litige dans cet appel était distincte, à savoir si l’administrateur avait commis une erreur dans son interprétation du paragraphe 103(1) de la LRM (au para 38). De la façon dont j’interprète l’analyse effectuée par la juge Strickland, c’est cette interprétation qui a entraîné le rejet de l’appel, plus précisément la conclusion selon laquelle il n’existe aucun mécanisme servant à trancher une demande déposée en vertu du paragraphe 103(1) qui permette de tenir compte du moyen de défense prévu à l’alinéa 101(1)b). Cependant, ce résultat ne reposait pas sur une analyse ou des conclusions quant à la question de savoir si le propriétaire d’un navire a le droit de présenter une demande d’indemnisation à la CIDPHN en vertu de l’article 101.

[76] Par conséquent, il est impossible de conclure que l’analyse de l’article 101 était fondamentale à la décision. Haida renvoie la Cour à l’explication donnée dans l’ouvrage de Donald J. Lange, The Doctrine of Res Judicata in Canada, 5e édition, Toronto, LexisNexis Canada, 2021, au c 2, 3.A, selon laquelle il y a deux volets à la question de savoir si une Cour a déjà tranché une question dans une instance donnée, c’est‑à‑dire l’identification de l’objet fondamental à la question. Le premier volet porte sur la question expresse qui a réellement été tranchée. Le deuxième volet porte sur la structure latente sur laquelle s’appuie la question expresse, par la reconnaissance implicite, inférée ou présumée de cette structure. Prenons l’exemple souvent cité d’une première instance portant sur l’interprétation d’un testament; les parties à cette instance ne peuvent pas ultérieurement contester la validité du testament, car la validité présumée de celui‑ci était fondamentale quant à la première instance.

[77] Manifestement, l’interprétation de l’article 101 de la LRM n’était pas la question que devait trancher la juge Strickland. Il est aussi impossible de conclure que l’interprétation de l’article 101 constitue un fondement implicite, inféré ou présumé pour le règlement de la question dont la Cour était saisie, à savoir l’interprétation de l’article 103. L’analyse de l’article 101 est plutôt une remarque incidente, ce qui n’étaye pas une conclusion de préclusion découlant d’une question déjà tranchée (Bell, au para 56).

[78] Selon moi, comme dans son interprétation erronée de la position de l’administrateur quant à la question de savoir si le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait, la juge adjointe a commis une erreur manifeste et dominante en concluant que l’analyse de l’article 101 effectuée par la juge Strickland était fondamentale quant à sa décision et entraînait l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée.

[79] Pour arriver à cette conclusion, je tiens compte des efforts que l’administrateur a déployés pour confirmer l’ordonnance au motif que la juge adjointe s’était livrée à une analyse subsidiaire dans laquelle elle avait adopté le raisonnement exposé dans la décision Strickland, qu’elle considérait comme une jurisprudence convaincante, et avait accueilli la requête en radiation, car la demande de Haida soulevait une cause d’action sans fondement juridique. Pour étayer cette position, l’administrateur s’appuie sur le paragraphe 51 de l’ordonnance, dans lequel la juge adjointe a adopté les paragraphes 10 à 25 de la décision Strickland, qui, selon la juge adjointe, font état d’un examen exhaustif des parties 6 et 7 de la LRM. La juge adjointe a ensuite énoncé ce qu’elle a décrit comme étant plusieurs conclusions cruciales de la juge Strickland, y compris une conclusion selon laquelle le paragraphe 101(1) ne permet pas au propriétaire d’un navire d’engager une action contre la CIDPHN.

[80] Je souscris à la réponse de Haida à l’argument avancé par l’administrateur. Les paragraphes de la décision Strickland que la juge adjointe a adoptés expliquent de façon générale le contenu des parties 6 et 7 de la LRM. L’ordonnance ne saurait être interprétée comme adoptant les conclusions subséquentes de la juge Strickland. La décision de la juge adjointe d’accueillir la requête en radiation sans autorisation de la modifier s’appuyait sur l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée. Elle ne s’appuyait pas sur l’adoption du raisonnement de la décision Strickland du fait de son caractère convaincant sur le plan jurisprudentiel.

F. Haida a‑t‑elle été privée de son droit à l’équité procédurale?

[81] Haida fait valoir, à titre d’argument subsidiaire, qu’avant de décider de s’écarter de la position conjointe des parties selon laquelle le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée ne s’appliquait pas, la juge adjointe devait, conformément à l’équité procédurale, informer les parties de cette possibilité et leur donner l’occasion de présenter des observations sur la question de savoir si ce principe s’appliquait.

[82] Comme j’en suis venu à la conclusion expliquée ci‑dessus, selon laquelle la juge adjointe a commis une erreur dans l’application du principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, il n’est pas nécessaire que la Cour examine l’argument subsidiaire de Haida selon lequel elle a été privée de son droit à l’équité procédurale.

G. Si la Cour relève une erreur susceptible de révision dans l’ordonnance, comment la requête en radiation de l’administrateur devrait‑elle être tranchée?

[83] Comme j’ai relevé une erreur susceptible de contrôle dans l’ordonnance, il reste à savoir si je devrais trancher la requête en radiation ou la renvoyer à la juge adjointe pour que celle‑ci statue à nouveau sur l’affaire. Du moins en partie dans l’objectif de régler la question le plus rapidement possible, les deux parties exhortent la Cour à trancher la requête en radiation parallèlement au présent appel interjeté en vertu de l’article 51 des Règles.

[84] Je suis conscient du fait que les observations des parties en l’espèce étaient principalement axées sur la question de savoir si l’ordonnance comportait une erreur susceptible de contrôle, et non sur la question d’interprétation législative qui était au cœur de la requête en radiation. Cependant, le dossier dont la Cour est saisie comprend les observations écrites respectives des parties dont disposait la juge adjointe qui sont quant à elles axées sur la question d’interprétation législative. Les parties demandent à la Cour de s’appuyer sur ces observations (et sur tout argument pertinent invoqué de vive voix en l’espèce) pour trancher la requête en radiation sur le fond.

[85] D’après mon expérience, habituellement (mais pas inévitablement), un appel interjeté en vertu de l’article 51 des Règles a une issue favorable si le juge qui tranche l’appel tranche aussi la requête sous‑jacente. Dans les circonstances actuelles, comme il s’agit de la volonté commune des deux parties, je suis prêt à trancher la requête en radiation.

[86] Avant de me pencher sur la question d’interprétation législative, je souligne que la juge adjointe, avant d’effectuer l’analyse de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, a conclu que, dans sa déclaration, Haida ne précisait pas les faits importants ou les arguments juridiques qu’elle invoquait pour affirmer qu’elle avait droit à un remboursement de la part de la CIDPHN. La juge adjointe a affirmé que l’acte de procédure n’indique pas au défendeur comment et de quelle façon sa responsabilité a été engagée. Le fait que, par suite de discussions avec les avocats, l’administrateur a compris que Haida avait l’intention d’invoquer l’article 101 de la LRM n’a pas été utile à celle‑ci, car sous la forme actuelle qu’il avait alors, l’acte de procédure était insuffisant (voir l’ordonnance, aux para 40‑41).

[87] La juge adjointe a donc conclu que, même si elle devait comprendre de l’acte de procédure que l’article 101 de la LRM y était invoqué, l’acte de procédure ne survivrait pas à la requête en radiation, parce qu’il demeurerait entièrement dénué de précisions étayant une demande d’indemnisation contre l’administrateur de la CIDPHN. La juge adjointe a expliqué que cette lacune pourrait être corrigée au moyen d’une modification; cependant, compte tenu de son analyse de la chose jugée, il n’était pas nécessaire qu’elle envisage une modification (voir l’ordonnance, au para 42).

[88] Dans le cadre du présent appel interjeté en vertu de l’article 51 des Règles, Haida n’a pas fait valoir que cette partie de l’analyse de la juge adjointe comportait une quelconque erreur susceptible de contrôle. En outre, je considère que cette analyse est valable, particulièrement du fait que la déclaration n’établit pas le fondement d’une cause d’action contre le défendeur désigné, l’administrateur, par opposition à la CIDPHN. Par conséquent, sous sa forme actuelle, l’acte de procédure ne peut pas survivre à la requête en radiation. Cependant, il reste à la Cour à trancher la question de fond de savoir si cette lacune dans l’acte de procédure peut être corrigée au moyen d’une modification. Pour trancher cette question, la Cour doit déterminer si la cause d’action au titre de l’article 101, que Haida veut invoquer selon les explications données dans ses observations, est vouée à l’échec, ou, autrement dit, s’il est évident et manifeste que cette cause d’action sera rejetée.

[89] Comme l’administrateur l’a indiqué dans les observations écrites dont disposait la juge adjointe, il soutient que ni l’article 101 de la LRM ni aucune autre disposition législative ne permet que l’administrateur soit désigné comme défendeur, et que si Haida modifiait son acte de procédure afin de désigner la CIDPHN comme partie défenderesse, l’action serait tout de même rejetée, parce que la CIDPHN n’est pas une personne morale ayant la capacité d’être poursuivie.

[90] Pour étayer cette position, l’administrateur s’appuie sur le paragraphe 84 de la décision Strickland, où la Cour a formulé l’observation suivante :

84. Les responsabilités qu’assume la CIDPHN, aux termes du paragraphe 101(1), prennent naissance lorsqu’un demandeur a intenté une action contre le propriétaire de navire polluant en vue d’obtenir une indemnisation, mais que, pour les raisons énoncées aux alinéas 101(1)a) à h), le demandeur ne peut pas recouvrer ce qu’il demande. Dans ce contexte, comme le décrit l’administrateur, il s’agit d’une demande d’indemnisation de dernier recours car le demandeur doit tout d’abord tenter d’obtenir une indemnité du propriétaire de navire avant de pouvoir s’adresser à la CIDPHN. Cependant, comme l’a conclu l’administrateur, Haida, en tant que propriétaire du navire polluant, ne peut pas engager une action contre elle‑même. De ce fait, elle ne peut pas déclencher l’application de l’article 109 – qui constitue le point d’entrée pour l’administrateur – ce qui lui permettrait de participer à l’action engagée par le demandeur et de répondre aux responsabilités que la CIDPHN assume en vertu du paragraphe 101(1).

[91] Tout en reconnaissant que cette partie de la décision Strickland constitue une remarque incidente, l’administrateur soutient qu’il s’agit néanmoins d’une analyse valable de l’interaction entre les articles 101 et 109 de la LRM. L’administrateur exhorte la Cour à adopter cette analyse et à s’appuyer sur celle‑ci pour conclure que Haida n’a pas de cause d’action valable.

[92] Conformément à la description fournie par la juge Strickland, l’administrateur indique que, ensemble, les articles 101 et 109 de la LRM mettent en œuvre ce que l’on appelle parfois le régime des demandes d’indemnisation « de dernier recours », qui s’appelle ainsi, car il s’applique lorsqu’un demandeur échoue dans sa tentative de recouvrer des frais du propriétaire du navire ayant causé la pollution. Le paragraphe 101(1) rend la CIDPHN responsable des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, mais seulement dans la mesure où des critères juridiques supplémentaires sont satisfaits. Selon les faits de l’espèce, le critère le plus pertinent, qui est énoncé à l’alinéa 101(1)b) reproduit ci‑dessous, engage la responsabilité de la CIDPHN :

Responsabilités de la Caisse d’indemnisation

Liability of Ship‑source Oil Pollution Fund

101 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, la Caisse d’indemnisation assume les responsabilités prévues aux articles 51, 71 et 77 en rapport avec les hydrocarbures, à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile et à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute dans les cas suivants :

101 (1) Subject to the other provisions of this Part, the Ship‑source Oil Pollution Fund is liable for the matters referred to in sections 51, 71 and 77 in relation to oil, Article III of the Civil Liability Convention and Article 3 of the Bunkers Convention, if

[…]

[…]

b) d’une part, le propriétaire du navire n’est pas responsable en raison de l’une des défenses mentionnées au paragraphe 77(3), à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile ou à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute et, d’autre part, le Fonds international et le Fonds complémentaire ne sont pas responsables non plus;

(b) the owner of a ship is not liable by reason of any of the defences described in subsection 77(3), Article III of the Civil Liability Convention or Article 3 of the Bunkers Convention and neither the International Fund nor the Supplementary Fund are liable;

[93] L’administrateur fait valoir un élément important pour les besoins de son argument, à savoir que le paragraphe 101(1) n’est pas, en soi, un moyen d’obtenir une indemnisation, car il lui manque un mécanisme d’accès interne. L’administrateur soutient que bien que le paragraphe 101(1) rende la CIDPHN responsable, la CIDPHN n’est pas une personne morale (au paragraphe 92(1) de la LRM, la CIDPHN est décrite comme un « compte ») et ne se voit pas conférer, par la LRM ou un autre instrument, la capacité de poursuivre ou d’être poursuivie. Lorsque la responsabilité de la CIDPHN est engagée en vertu du paragraphe 101(1), il est plutôt possible d’obtenir un recouvrement auprès d’elle par l’application de l’article 109, qui est ainsi libellé :

Action contre le propriétaire d’un navire

Proceedings against owner of ship

109 (1) À l’exception des actions fondées sur l’alinéa 77(1)c) intentées par le ministre des Pêches et des Océans à l’égard d’un polluant autre que les hydrocarbures, les règles ci‑après s’appliquent aux actions en responsabilité fondées sur les articles 51, 71 ou 77, l’article III de la Convention sur la responsabilité civile ou l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute intentées contre le propriétaire d’un navire ou son garant :

109 (1) If a claimant commences proceedings against the owner of a ship or the owner’s guarantor in respect of a matter referred to in section 51, 71 or 77, Article III of the Civil Liability Convention or Article 3 of the Bunkers Convention, except in the case of proceedings based on paragraph 77(1)(c) commenced by the Minister of Fisheries and Oceans in respect of a pollutant other than oil,

a) l’acte introductif d’instance doit être signifié à l’administrateur — soit par la remise à celui‑ci d’une copie en main propre, soit par le dépôt d’une copie au lieu de sa dernière résidence connue — qui devient de ce fait partie à l’instance;

(a) the document commencing the proceedings shall be served on the Administrator by delivering a copy of it personally to him or her, or by leaving a copy at his or her last known address, and the Administrator is then a party to the proceedings; and

 

b) l’administrateur doit comparaître et prendre les mesures qu’il juge à propos pour la bonne gestion de la Caisse d’indemnisation, notamment conclure une transaction avant ou après jugement.

(b) the Administrator shall appear and take any action, including being a party to a settlement either before or after judgment, that he or she considers appropriate for the proper administration of the Ship‑source Oil Pollution Fund.

Règlement d’une affaire

If Administrator party to settlement

(2) Dans le cas où il conclut une transaction en application de l’alinéa (1)b), l’administrateur ordonne le versement au demandeur, par prélèvement sur la Caisse d’indemnisation, du montant convenu.

(2) If the Administrator is a party to a settlement under paragraph (1)(b), he or she shall direct payment to be made to the claimant of the amount that the Administrator has agreed to pay under the settlement.

[94] L’administrateur indique que son rôle dans un litige, par l’application de l’article 109, s’apparente à celui d’un tuteur à l’instance ou d’un autre représentant juridique agissant au nom de la CIDPHN. Toutefois, il souligne que l’article 109 s’applique uniquement dans le contexte d’une demande en recouvrement de créance contre le propriétaire d’un navire. Par conséquent, cet article ne s’appliquerait pas à la demande de Haida, et selon l’administrateur, l’impossibilité pour Haida de recourir à l’article 109 empêche celle‑ci de présenter une demande contre lui fondée sur l’article 101. Cette observation et l’analyse à l’appui concordent avec l’analyse de la Cour constituant une remarque incidente dans la décision Strickland.

[95] Si je comprends bien la position de Haida, celle‑ci souscrit en partie à l’analyse susmentionnée, en ce sens qu’elle reconnaît qu’elle ne peut pas se prévaloir du mécanisme prévu à l’article 109. Cependant, Haida fait valoir qu’elle peut engager directement une action contre la CIDPHN aux termes de l’article 101. Haida souligne que le paragraphe 101(1) impose expressément une responsabilité à la CIDPHN (relativement aux hydrocarbures l’égard de questions visées à d’autres articles de la LRM) et ne souscrit pas à la position de l’administrateur selon laquelle ni l’administrateur ni la CIDPHN n’ont la capacité d’être poursuivis aux termes de ce paragraphe.

[96] Pour étayer sa position, Haida s’appuie sur l’explication donnée dans Westlake v Ontario, [1971] 3 OR 533 [Westlake], une décision de première instance que la Cour d’appel de l’Ontario et la Cour suprême du Canada ont approuvée sous réserve de brèves remarques et qui est décrite comme la décision de principe pour déterminer si un organisme public possède sa propre personnalité civile. La décision Westlake recense différentes catégories d’organismes créés par une loi, et Haida soutient que l’administrateur ou la CIDPHN appartiennent à la cinquième catégorie, soit des organismes non dotés de la personnalité morale dont la loi constitutive ne prévoit pas expressément qu’ils peuvent être poursuivis, mais qui, par déduction nécessaire, peuvent faire l’objet d’une action en dommages‑intérêts.

[97] Haida s’appuie également sur l’arrêt Teal Cedar Products Ltd v British Columbia, 2019 BCCA 194 [Teal Cedar], dans lequel la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique a examiné la cinquième catégorie énoncée dans la décision Westlake dans le cadre d’un appel de la Couronne à l’encontre d’une ordonnance rejetant sa demande visant à exclure une partie, Haida Gwaii Management Council [HGMC], au motif que celle‑ci n’avait pas la capacité d’être poursuivie. Haida renvoie la Cour à l’explication selon laquelle la question centrale consiste à savoir si le législateur avait l’intention que l’entité d’origine législative ait la capacité d’être poursuivie, ce qui nécessite d’interpréter la loi créant l’entité, sans se limiter à la question de savoir si la loi, par déduction nécessaire, confère des pouvoirs commerciaux particuliers à l’entité (au para 29).

[98] Haida invoque différentes dispositions de la LRM pour faire valoir que l’administrateur ou la CIDPHN ont la capacité d’être poursuivis, y compris les paragraphes 92(2) et (3), qui prévoient que la CIDPHN est créditée et débitée de sommes données; l’article 100, qui permet à l’administrateur d’obtenir les avis et l’assistance techniques, professionnels et autres qu’il juge nécessaires; l’article 101, qui prévoit la responsabilité de la CIDPHN à l’égard de frais de nettoyage désignés; l’article 102, qui confère à l’administrateur le pouvoir d’intenter une action contre un navire ou à l’égard du produit de la vente de celui‑ci; l’article 105, qui prévoit que l’administrateur a la capacité de faire une offre d’indemnité; le paragraphe 106(3), qui prévoit que l’administrateur a l’obligation de prendre toute mesure raisonnable pour recouvrer auprès de parties désignées la somme de toute indemnité qu’il a versée à un demandeur; et l’article 109, qui énonce le rôle de l’administrateur en tant que partie à toute action intentée par un demandeur contre le propriétaire d’un navire. Je précise qu’aux termes du paragraphe 92(3) de la LRM, la CIDPHN est entre autres débitée des sommes qu’un tribunal ordonne à la CIDPHN de payer, dans un jugement rendu contre elle, ainsi que les dépens auxquels le tribunal la condamne (alinéa 92(3)f)).

[99] Pour sa part, l’administrateur attire l’attention de la Cour sur les dispositions de la LRM applicables à la Convention sur le Fonds international et au Protocole portant création d’un Fonds complémentaire, qui régissent respectivement le Fonds international et le Fonds complémentaire, qui entrent en jeu dans le contexte d’incidents de pollution par les hydrocarbures causés par des pétroliers. Les articles 61 et 67 de la LRM prévoient expressément que ces fonds sont dotés de la personnalité juridique, de sorte qu’ils peuvent poursuivre et être poursuivis. L’administrateur souligne que la LRM ne comprend aucune disposition analogue s’appliquant à la CIDPHN.

[100] Outre la question de la capacité de la CIDPHN et de l’administrateur à être poursuivis, chacune des parties a également présenté des observations sur l’interprétation du libellé du paragraphe 101(1), qui indique que la CIDPHN assume « en rapport avec les hydrocarbures, les responsabilités prévues aux articles 51, 71 et 77, à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile et à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute pour tout type de frais, pertes ou dommages […] ». L’administrateur examine les articles cités et soutient que les « responsabilités prévues » dans ceux‑ci font toutes intervenir la responsabilité du propriétaire du navire à l’égard des personnes touchées par un incident de pollution par les hydrocarbures causé par le navire. L’administrateur soutient qu’en raison du fait que toutes ces dispositions sont axées sur la responsabilité du propriétaire du navire, le paragraphe 101(1) ne peut être interprété comme offrant à un propriétaire de navire la possibilité de présenter une demande d’indemnisation à la CIDPHN.

[101] Haida s’attarde aussi au libellé du paragraphe 101(1), mais fait valoir qu’en raison de la syntaxe de cette disposition, l’interprétation de l’administrateur n’est pas valable et le libellé étaye plutôt l’interprétation selon laquelle les « responsabilités prévues » aux articles mentionnés sont des pertes, des dommages ou des frais. Selon Haida, cette interprétation permet à toute partie qui a supporté de tels frais, etc., y compris un propriétaire de navire innocent, de présenter à la CIDPHN une demande en recouvrement de ces frais. En plus de fournir cette interprétation textuelle, Haida fait valoir des arguments contextuels et téléologiques à l’appui de son interprétation, conformément à la méthode d’interprétation législative établie dans l’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd (Re), [1998] 1 RCS 27 (au para 21).

[102] Il serait loisible à la Cour d’examiner les arguments contradictoires des parties au sujet de l’interprétation législative et d’en arriver à une interprétation de l’application de l’article 101 de la LRM qui pourrait soit soutenir soit réfuter la validité de la cause d’action de Haida. Pour effectuer une telle analyse, la Cour devrait naturellement accorder une attention respectueuse au raisonnement formulé dans la décision Strickland, qui, bien qu’elle constitue une remarque incidente, comporte une certaine partie de l’analyse nécessaire et énonce des conclusions pertinentes à l’égard de l’interprétation législative nécessaire.

[103] Cependant, il faut se rappeler qu’il ne s’agit pas d’une requête, qui pourrait être présentée en vertu de l’article 220 des Règles, visant à trancher un point de droit. La Cour est plutôt saisie d’une requête en radiation et doit établir si, à la suite d’une modification d’un acte de procédure tenant compte de la cause d’action que Haida a énoncée dans ses observations écrites dans le cadre de la présente requête, il est néanmoins évident et manifeste que cette cause d’action est vouée à l’échec.

[104] Je suis aussi conscient de la jurisprudence qui décourage la Cour d’effectuer des exercices d’interprétation législative complexes et litigieux dans le cadre d’une requête en radiation, ou, à tout le moins, qui reconnaît que le refus d’effectuer de tels exercices constitue un exercice acceptable du pouvoir discrétionnaire (Apotex Inc v Ely Lilly and Co, 2001 CFPI 636 [Apotex] aux para 13‑14; Safilo Canada Ltd c Contour Optik Inc, 2004 CF 1534 aux para 11‑12, 17‑18; British Columbia (Director of Civil Forfeiture) v Flynn, 2013 BCCA 91 [Flynn] aux para 13 et 15; British Columbia v Apotex Inc, 2022 BCSC 1 au para 126). Autrement dit, si la question d’interprétation législative ne donne pas lieu à une réponse évidente et manifeste selon laquelle l’action de la partie demanderesse est vouée à l’échec, elle ne devrait pas être réglée par le juge des requêtes dans le cadre d’une instance préliminaire (Apotex, au para 14).

[105] La question d’interprétation législative en cause en l’espèce (c.‑à‑d. la question de savoir si un propriétaire de navire peut avoir une cause d’action contre la CIDPHN ou l’administrateur aux termes de l’article 101 de la LRM) est, à mon avis, manifestement complexe et litigieuse. La décision Strickland démontre que l’administrateur a fait valoir, dans le cadre de l’appel prévu par la loi, que la CIDPHN n’avait pas la capacité d’être poursuivie aux termes de l’article 101 (voir le para 51), et les conclusions incidentes de la juge Strickland indiquent que celle‑ci a accepté cette position (voir les para 82‑83). Cependant, la décision ne permet pas de dire avec certitude si la juge Strickland a eu l’avantage de recevoir des observations détaillées sur la façon dont les dispositions de la LRM devraient guider une analyse et une décision, du genre dont il est question dans l’arrêt Teal Cedar, quant à la question de savoir si la CIDPHN a la capacité d’être poursuivie à titre d’entité appartenant à la cinquième catégorie énoncée dans la décision Westlake.

[106] Je n’ai pas l’avantage d’avoir reçu de la part des deux parties des observations détaillées qui seraient, à mon avis, nécessaires pour effectuer une telle analyse. Dans l’arrêt Teal Cedar, la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique s’est appuyée sur l’arrêt Flynn pour confirmer la décision du juge des requêtes de ne pas effectuer l’analyse établie dans la décision Westlake dans le cadre d’une requête interlocutoire et de ne pas trancher la question de savoir si HGMC avait la capacité d’être poursuivie (au para 21). Je me retrouve dans une situation semblable. En appliquant le critère exigeant que le défendeur doit respecter pour que sa requête en radiation soit accueillie, je ne suis pas convaincu que l’analyse législative, particulièrement en ce qui a trait à la capacité de l’administrateur ou de la CIDPHN d’être poursuivi, serait nécessairement favorable au défendeur. Par conséquent, il n’est pas manifeste et évident que la cause d’action de Haida est vouée à l’échec si Haida a l’avantage d’apporter des modifications en vue de mieux formuler sa demande fondée sur l’article 101 de la LRM.

[107] Par conséquent, bien que mon ordonnance ne modifiera pas la décision de la juge adjointe de radier la déclaration de Haida, elle accordera à Haida l’autorisation de modifier la déclaration, dans les 30 jours suivant la date de l’ordonnance, pour formuler les arguments juridiques à l’appui de sa demande fondée sur l’article 101 de la LRM.

VIII. Dépens

[108] Chacune des parties réclame les dépens afférents à la requête advenant que l’issue de l’appel lui soit favorable. Elles estiment les dépens, sous forme de somme globale, à 1 000,00 $. Comme l’appel de Haida a été accueilli, du fait qu’elle aura l’autorisation de modifier sa déclaration, mon ordonnance lui adjugera des dépens de la somme globale dont ont convenu les parties.


ORDONNANCE dans le dossier T‑1374‑21

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  1. La requête et l’appel de la demanderesse sont accueillis.

  2. La demanderesse a l’autorisation de modifier sa déclaration, dans les 30 jours suivant la date de la présente ordonnance, pour formuler les arguments juridiques à l’appui de sa demande fondée sur l’article 101 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, LC 2001, c 6.

  3. La demanderesse a droit aux dépens afférents à la requête, qui sont fixés à une somme globale de 1 000,00 $, y compris les taxes et les débours.

« Richard F. Southcott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc


ANNEXE A

Dispositions pertinentes des parties 6 et 7 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, LC 2001, c 6 (et annexes connexes)

PARTIE 6

PART 6

Responsabilité et indemnisation en matière de pollution

Liability and Compensation for Pollution

[…]

[…]

Responsabilité en matière de pollution et frais connexes

Liability for pollution and related costs

51 La responsabilité du propriétaire d’un navire à l’égard des mesures de sauvegarde prévue par la Convention sur la responsabilité civile vise également :

51 The liability of the owner of a ship in relation to preventive measures, for the purposes of the Civil Liability Convention, also includes

a) les frais supportés par le ministre des Pêches et des Océans, un organisme d’intervention au sens de l’article 165 de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, toute autre personne au Canada ou toute personne d’un État étranger partie à cette convention pour la prise de mesures visant à prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution causée par le navire, y compris les mesures en prévision de rejets d’hydrocarbures causés par le navire, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables, de même que les pertes ou dommages causés par ces mesures;

(a) the costs and expenses incurred by the Minister of Fisheries and Oceans, a response organization within the meaning of section 165 of the Canada Shipping Act, 2001, any other person in Canada or any person in a state, other than Canada, that is a party to that Convention in respect of measures taken to prevent, repair, remedy or minimize pollution damage from the ship, including measures taken in anticipation of a discharge of oil from it, to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures; and

b) s’agissant des hydrocarbures, les frais supportés par le ministre des Pêches et des Océans à l’égard des mesures visées à l’alinéa 180(1)a) de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, de la surveillance prévue à l’alinéa 180(1)b) de cette loi ou des ordres visés à l’alinéa 180(1)c) de la même loi et les frais supportés par toute autre personne à l’égard des mesures qu’il lui a été ordonné ou interdit de prendre aux termes de ce même alinéa, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables, de même que les pertes ou dommages causés par ces mesures.

(b) in relation to oil, the costs and expenses incurred by

BLANK

(i) the Minister of Fisheries and Oceans in respect of measures taken under paragraph 180(1)(a) of the Canada Shipping Act, 2001, in respect of any monitoring under paragraph 180(1)(b) of that Act or in relation to any direction given under paragraph 180(1)(c) of that Act to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures, or

BLANK

(ii) any other person in respect of the measures that they were directed to take or refrain from taking under paragraph 180(1)(c) of the Canada Shipping Act, 2001 to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures.

[…]

[…]

Responsabilité en matière de pollution et frais connexes

Liability for pollution and related costs

71 La responsabilité du propriétaire d’un navire à l’égard des mesures de sauvegarde prévue par la Convention sur les hydrocarbures de soute vise également :

71 The liability of the owner of a ship in relation to preventive measures, for the purposes of the Bunkers Convention, also includes

a) les frais supportés par le ministre des Pêches et des Océans, un organisme d’intervention au sens de l’article 165 de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, toute autre personne au Canada ou toute personne d’un État étranger partie à cette convention pour la prise de mesures visant à prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution causée par le navire, y compris les mesures en prévision de rejets d’hydrocarbures de soute causés par le navire, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables, de même que les pertes ou dommages causés par ces mesures;

(a) the costs and expenses incurred by the Minister of Fisheries and Oceans, a response organization within the meaning of section 165 of the Canada Shipping Act, 2001, any other person in Canada or any person in a state, other than Canada, that is a party to that Convention in respect of measures taken to prevent, repair, remedy or minimize pollution damage from the ship, including measures taken in anticipation of a discharge of bunker oil from it, to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures; and

b) s’agissant des hydrocarbures de soute, les frais supportés par le ministre des Pêches et des Océans à l’égard des mesures visées à l’alinéa 180(1)a) de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, de la surveillance prévue à l’alinéa 180(1)b) de cette loi ou des ordres visés à l’alinéa 180(1)c) de la même loi et les frais supportés par toute autre personne à l’égard des mesures qu’il lui a été ordonné ou interdit de prendre aux termes de ce même alinéa, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables, de même que les pertes ou dommages causés par ces mesures.

(b) in relation to bunker oil, the costs and expenses incurred by

BLANK

(i) the Minister of Fisheries and Oceans in respect of measures taken under paragraph 180(1)(a) of the Canada Shipping Act, 2001, in respect of any monitoring under paragraph 180(1)(b) of that Act or in relation to any direction given under paragraph 180(1)(c) of that Act to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures, or

BLANK

(ii) any other person in respect of the measures that they were directed to take or refrain from taking under paragraph 180(1)(c) of the Canada Shipping Act, 2001 to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures.

[…]

[…]

Responsabilité en matière de pollution et frais connexes

Liability for pollution and related costs

77 (1) Le propriétaire d’un navire est responsable :

77 (1) The owner of a ship is liable

a) des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par le navire;

(a) for oil pollution damage from the ship;

b) des frais supportés par le ministre des Pêches et des Océans, un organisme d’intervention au sens de l’article 165 de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada ou toute autre personne au Canada pour la prise de mesures visant à prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par le navire, y compris des mesures en prévision de rejets d’hydrocarbures causés par le navire, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables, de même que des pertes ou dommages causés par ces mesures;

(b) for the costs and expenses incurred by the Minister of Fisheries and Oceans, a response organization within the meaning of section 165 of the Canada Shipping Act, 2001 or any other person in Canada in respect of measures taken to prevent, repair, remedy or minimize oil pollution damage from the ship, including measures taken in anticipation of a discharge of oil from it, to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures; and

c) des frais supportés par le ministre des Pêches et des Océans à l’égard des mesures visées à l’alinéa 180(1)a) de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, de la surveillance prévue à l’alinéa 180(1)b) de cette loi ou des ordres visés à l’alinéa 180(1)c) de la même loi et des frais supportés par toute autre personne à l’égard des mesures qu’il lui a été ordonné ou interdit de prendre aux termes de ce même alinéa, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables, de même que des pertes ou dommages causés par ces mesures.

(c) for the costs and expenses incurred by

BLANK

(i) the Minister of Fisheries and Oceans in respect of measures taken under paragraph 180(1)(a) of the Canada Shipping Act, 2001, in respect of any monitoring under paragraph 180(1)(b) of that Act or in relation to any direction given under paragraph 180(1)(c) of that Act to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures, or

BLANK

(ii) any other person in respect of the measures that they were directed to take or refrain from taking under paragraph 180(1)(c) of the Canada Shipping Act, 2001 to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, and for any loss or damage caused by those measures.

Responsabilité : dommage à l’environnement

Liability for environmental damage

(2) Lorsque des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par un navire ont des conséquences néfastes pour l’environnement, le propriétaire du navire est responsable des frais occasionnés par les mesures raisonnables de remise en état qui sont prises ou qui le seront.

(2) If oil pollution damage from a ship results in impairment to the environment, the owner of the ship is liable for the costs of reasonable measures of reinstatement undertaken or to be undertaken.

Défenses

Strict liability subject to certain defences

(3) La responsabilité du propriétaire prévue aux paragraphes (1) et (2) n’est pas subordonnée à la preuve d’une faute ou d’une négligence, mais le propriétaire n’est pas tenu pour responsable s’il démontre que l’événement :

(3) The owner’s liability under subsections (1) and (2) does not depend on proof of fault or negligence, but the owner is not liable under those subsections if they establish that the occurrence

a) soit résulte d’un acte de guerre, d’hostilités, de guerre civile ou d’insurrection ou d’un phénomène naturel d’un caractère exceptionnel, inévitable et irrésistible;

(a) resulted from an act of war, hostilities, civil war or insurrection or from a natural phenomenon of an exceptional, inevitable and irresistible character;

b) soit est entièrement imputable à l’acte ou à l’omission d’un tiers qui avait l’intention de causer des dommages;

(b) was wholly caused by an act or omission of a third party with intent to cause damage; or

c) soit est entièrement imputable à la négligence ou à l’action préjudiciable d’un gouvernement ou d’une autre autorité dans le cadre des responsabilités qui lui incombent en ce qui concerne l’entretien des feux et autres aides à la navigation.

(c) was wholly caused by the negligence or other wrongful act of any government or other authority that is responsible for the maintenance of lights or other navigational aids, in the exercise of that function.

Droits du propriétaire envers les tiers

Owner’s rights against third parties

(4) La présente section n’a pas pour effet de porter atteinte aux recours que le propriétaire d’un navire responsable aux termes du paragraphe (1) peut exercer contre des tiers.

(4) Nothing in this Division shall be construed as limiting or restricting any right of recourse that the owner of a ship who is liable under subsection (1) may have against another person.

Réclamation du propriétaire

Owner’s own claim for costs and expenses

(5) Les frais supportés par le propriétaire d’un navire qui prend volontairement les mesures visées à l’alinéa (1)b) sont du même rang que les autres créances vis‑à‑vis des garanties que le propriétaire a données à l’égard de la responsabilité que lui impose le présent article, pour autant que ces frais et ces mesures soient raisonnables.

(5) The costs and expenses incurred by the owner of a ship in respect of measures voluntarily taken by them to prevent, repair, remedy or minimize oil pollution damage from the ship, including measures taken in anticipation of a discharge of oil from it, to the extent that the measures taken and the costs and expenses are reasonable, rank equally with other claims against any security given by that owner in respect of their liability under this section.

Prescription

Limitation period

(6) Les actions fondées sur la responsabilité prévue au paragraphe (1) se prescrivent :

(6) No action lies in respect of a matter referred to in subsection (1) unless it is commenced

a) s’il y a eu dommages dus à la pollution, par trois ans à compter du jour de leur survenance ou par six ans à compter du jour de l’événement qui les a causés ou, si cet événement s’est produit en plusieurs étapes, du jour de la première de ces étapes, selon que l’un ou l’autre délai expire le premier;

(a) if pollution damage occurs, within the earlier of

BLANK

(i) three years after the day on which the pollution damage occurs, and

BLANK

(ii) six years after the occurrence that causes the pollution damage or, if the pollution damage is caused by more than one occurrence having the same origin, six years after the first of the occurrences; or

b) sinon, par six ans à compter du jour de l’événement.

(b) if no pollution damage occurs, within six years after the occurrence.

[…]

[…]

PARTIE 7

PART 7

Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires

Ship‑source Oil Pollution Fund

Définitions

Definitions

91 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente partie.

91 (1) The following definitions apply in this Part.

rejet S’agissant d’un hydrocarbure, rejet de celui‑ci qui, directement ou indirectement, atteint l’eau, notamment par déversement, fuite, déchargement ou chargement par pompage, rejet liquide, émanation, vidange, rejet solide et immersion. (discharge)

discharge, in relation to oil, means a discharge of oil that directly or indirectly results in the oil entering the water, and includes spilling, leaking, pumping, pouring, emitting, emptying, throwing and dumping. (rejet)

en vrac Dans une cale ou une citerne faisant partie de la structure du navire, sans contenant intermédiaire. (in bulk)

in bulk means in a hold or tank that is part of a ship’s structure, without any intermediate form of containment. (en vrac)

hydrocarbures Les hydrocarbures de toutes sortes sous toutes leurs formes, notamment le pétrole, le fioul, les boues, les résidus d’hydrocarbures et les hydrocarbures mélangés à des déchets, à l’exclusion des déblais de dragage. (oil)

oil means oil of any kind or in any form and includes petroleum, fuel oil, sludge, oil refuse and oil mixed with wastes but does not include dredged spoil. (hydrocarbures)

dommages dus à la pollution par les hydrocarbures S’agissant d’un navire, pertes ou dommages extérieurs au navire et causés par une contamination résultant du rejet d’hydrocarbures par ce navire. (oil pollution damage)

oil pollution damage, in relation to a ship, means loss or damage outside the ship caused by contamination resulting from the discharge of oil from the ship. (dommages dus à la pollution par les hydrocarbures)

propriétaire

owner

a) S’agissant d’un navire assujetti à la Convention sur la responsabilité civile, s’entend au sens de l’article premier de cette convention;

(a) in relation to a ship subject to the Civil Liability Convention, has the same meaning as in Article I of that Convention;

b) s’agissant d’un navire assujetti à la Convention sur les hydrocarbures de soute, s’entend au sens de propriétaire du navire à l’article 1 de cette convention;

(b) in relation to a ship subject to the Bunkers Convention, has the same meaning as the definition Shipowner in Article 1 of that Convention; and

c) s’agissant de tout autre navire, s’entend de la personne qui a, au moment considéré, en vertu de la loi ou d’un contrat, les droits du propriétaire du navire en ce qui a trait à la possession et à l’usage de celui‑ci. (owner)

(c) in relation to any other ship, means the person who has for the time being, either by law or by contract, the rights of the owner of the ship with respect to its possession and use. (propriétaire)

navire Bâtiment ou embarcation conçus, utilisés ou utilisables, exclusivement ou non, pour la navigation, indépendamment de leur mode de propulsion ou de l’absence de propulsion. Y sont assimilés les navires en construction à partir du moment où ils peuvent flotter, les navires échoués ou coulés ainsi que les épaves et toute partie d’un navire qui s’est brisé. (ship)

ship means any vessel or craft designed, used or capable of being used solely or partly for navigation, without regard to its method of propulsion or lack of propulsion, and includes

BLANK

(a) a ship in the process of construction from the time that it is capable of floating; and

BLANK

(b) a ship that has been stranded, wrecked or sunk and any part of a ship that has broken up. (navire)

Caisse d’indemnisation La Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires prorogée par l’article 92. (Ship‑source Oil Pollution Fund)

Ship‑source Oil Pollution Fund means the Ship‑source Oil Pollution Fund continued by section 92. (Caisse d’indemnisation)

Autres définitions

Other definitions

(2) Dans la présente partie, Convention sur la responsabilité civile, Convention sur le Fonds international, Convention sur les hydrocarbures de soute, Convention sur les substances nocives et potentiellement dangereuses, Fonds complémentaire, Fonds international, Fonds SNPD et Protocole portant création d’un Fonds complémentaire s’entendent au sens du paragraphe 47(1).

(2) In this Part, Bunkers Convention, Civil Liability Convention, Fund Convention, Hazardous and Noxious Substances Convention, HNS Fund, International Fund, Supplementary Fund and Supplementary Fund Protocol have the same meaning as in subsection 47(1).

Caisse d’indemnisation

Ship‑source Oil Pollution Fund

Prorogation de la Caisse d’indemnisation

Ship‑source Oil Pollution Fund continued

92 (1) Est prorogé le compte ouvert parmi les comptes du Canada intitulé Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires.

92 (1) The account known as the Ship‑source Oil Pollution Fund in the accounts of Canada is continued.

Crédits

Credits

(2) Ce compte est crédité des sommes suivantes :

(2) The following shall be credited to the Ship‑source Oil Pollution Fund:

a) les versements reçus en vertu des articles 112 et 115;

(a) all payments received under sections 112 and 115;

b) l’intérêt calculé en conformité avec l’article 93;

(b) interest computed in accordance with section 93; and

c) les sommes qu’obtient l’administrateur en vertu de l’alinéa 106(3)c).

(c) any amounts recovered by the Administrator under paragraph 106(3)(c).

Débits

Charges

(3) Il est débité des sommes suivantes :

(3) The following shall be charged to the Ship‑source Oil Pollution Fund:

a) les sommes que l’administrateur verse en application des alinéas 106(3)a) ou 108(1)a), du paragraphe 108(6) ou de l’article 117 ou conformément à une transaction;

(a) all amounts that are directed by the Administrator to be paid under paragraph 106(3)(a) or 108(1)(a), subsection 108(6) or section 117 or under a settlement;

b) les sommes que l’administrateur est tenu de payer en application du paragraphe 117(3);

(b) all amounts for which the Administrator is liable under subsection 117(3);

c) les intérêts à verser en conformité avec l’article 116;

(c) all interest to be paid under section 116;

d) les frais et honoraires dont le paiement est prévu à l’article 98;

(d) all costs and expenses that are directed to be paid under section 98;

e) la rémunération et les indemnités des évaluateurs dont le versement est prévu au paragraphe 108(2);

(e) the remuneration and expenses of assessors that are directed to be paid under subsection 108(2); and

f) les sommes qu’un tribunal ordonne à la Caisse d’indemnisation de payer, dans un jugement rendu contre elle, ainsi que les dépens auxquels le tribunal la condamne.

(f) the amount of any judgment and any costs awarded against that Fund in litigation.

[…]

[…]

Assistance

Professional and technical assistance

100 Dans l’exercice de ses attributions, notamment de celles que lui confère la présente partie, l’administrateur peut obtenir les avis et l’assistance techniques, professionnels et autres qu’il juge nécessaires.

100 The Administrator may, for the purpose of fulfilling his or her functions, including performing his or her duties under this Part, obtain the professional, technical and other advice and assistance that he or she considers necessary.

Responsabilités de la Caisse d’indemnisation

Liability of Ship‑source Oil Pollution Fund

101 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, la Caisse d’indemnisation assume les responsabilités prévues aux articles 51, 71 et 77 en rapport avec les hydrocarbures, à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile et à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute dans les cas suivants :

101 (1) Subject to the other provisions of this Part, the Ship‑source Oil Pollution Fund is liable for the matters referred to in sections 51, 71 and 77 in relation to oil, Article III of the Civil Liability Convention and Article 3 of the Bunkers Convention, if

a) malgré la prise de toutes les mesures raisonnables dans les circonstances, il a été impossible d’obtenir une indemnité de la part du propriétaire du navire ou, dans le cas d’un navire au sens de l’article premier de la Convention sur la responsabilité civile, de la part du Fonds international et du Fonds complémentaire;

(a) all reasonable steps have been taken to recover payment of compensation from the owner of the ship or, in the case of a ship within the meaning of Article I of the Civil Liability Convention, from the International Fund and the Supplementary Fund, and those steps have been unsuccessful;

b) d’une part, le propriétaire du navire n’est pas responsable en raison de l’une des défenses mentionnées au paragraphe 77(3), à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile ou à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute et, d’autre part, le Fonds international et le Fonds complémentaire ne sont pas responsables non plus;

(b) the owner of a ship is not liable by reason of any of the defences described in subsection 77(3), Article III of the Civil Liability Convention or Article 3 of the Bunkers Convention and neither the International Fund nor the Supplementary Fund are liable;

c) la créance excède :

(c) the claim exceeds

(i) dans le cas d’un navire au sens de l’article premier de la Convention sur la responsabilité civile, la limite fixée à la responsabilité du propriétaire du navire en vertu de cette convention, dans la mesure où l’excédent ne peut être recouvré auprès du Fonds international ni auprès du Fonds complémentaire,

(i) in the case of a ship within the meaning of Article I of the Civil Liability Convention, the owner’s maximum liability under that Convention to the extent that the excess is not recoverable from the International Fund or the Supplementary Fund, and

(ii) dans le cas de tout autre navire, la limite fixée à la responsabilité du propriétaire du navire en vertu de la partie 3;

(ii) in the case of any other ship, the owner’s maximum liability under Part 3;

d) le propriétaire du navire est incapable financièrement de remplir les obligations que lui imposent l’article 51 et l’article III de la Convention sur la responsabilité civile, dans la mesure où le Fonds international et le Fonds complémentaire ne sont pas tenus de remplir l’une quelconque de ces obligations;

(d) the owner is financially incapable of meeting their obligations under section 51 and Article III of the Civil Liability Convention, to the extent that the obligation is not recoverable from the International Fund or the Supplementary Fund;

e) le propriétaire du navire est incapable financièrement de remplir les obligations que lui imposent l’article 71 et l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute;

(e) the owner is financially incapable of meeting their obligations under section 71 and Article 3 of the Bunkers Convention;

f) le propriétaire du navire est incapable financièrement de remplir les obligations que lui impose l’article 77;

(f) the owner is financially incapable of meeting their obligations under section 77;

g) la cause des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures est inconnue et l’administrateur est incapable d’établir que l’événement qui est à l’origine des dommages n’est pas imputable à un navire;

(g) the cause of the oil pollution damage is unknown and the Administrator has been unable to establish that the occurrence that gave rise to the damage was not caused by a ship; or

h) l’administrateur est partie à la transaction d’une affaire conclue en vertu de l’article 109.

(h) the Administrator is a party to a settlement under section 109.

Exception : opérations de forage

Exception — drilling activities

(2) La présente partie ne s’applique pas, eu égard à la fuite ou au rejet d’hydrocarbures, aux navires de forage situés sur un emplacement de forage qui sont utilisés dans le cadre d’activités d’exploration ou d’exploitation du fond ou du sous‑sol marin, si le rejet provient de ces activités.

(2) This Part does not apply to a drilling ship that is on location and engaged in the exploration or exploitation of the seabed or its subsoil in so far as an escape or discharge of oil emanates from those activities.

Exception : unité flottante de stockage

Exception — floating storage units

(3) La présente partie ne s’applique pas à une unité flottante de stockage ou à une unité flottante de production, de stockage et de déchargement, sauf si elle transporte des hydrocarbures comme cargaison entre ports ou terminaux à l’extérieur des limites d’un champ pétrolifère extracôtier.

(3) This Part does not apply to a floating storage unit or floating production, storage and offloading unit unless it is carrying oil as a cargo on a voyage to or from a port or terminal outside an offshore oil field.

Action intentée par l’administrateur

Action by Administrator

102 (1) En cas d’événement dont la responsabilité est imputable au propriétaire d’un navire au titre des articles 51, 71 ou 77, de l’article III de la Convention sur la responsabilité civile ou de l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute, l’administrateur peut, même avant d’avoir reçu la demande visée à l’article 103, intenter une action réelle contre le navire qui fait l’objet de la demande ou à l’égard du produit de la vente de celui‑ci déposé au tribunal, et, à cette occasion, peut, sous réserve du paragraphe (3), demander une garantie d’un montant au moins égal à la responsabilité maximale cumulée du propriétaire calculée conformément aux articles 71 ou 77 ou à l’article V de la Convention sur la responsabilité civile.

102 (1) If there is an occurrence that gives rise to the liability of an owner of a ship under section 51, 71 or 77, Article III of the Civil Liability Convention or Article 3 of the Bunkers Convention,

BLANK

(a) the Administrator may, either before or after receiving a claim under section 103, commence an action in rem against the ship that is the subject of the claim, or against any proceeds of sale of the ship that have been paid into court; and

BLANK

(b) subject to subsection (3), the Administrator is entitled in any such action to claim security in an amount not less than the owner’s maximum aggregate liability determined in accordance with section 71 or 77, or Article V of the Civil Liability Convention.

Subrogation

Subrogation

(2) L’administrateur ne peut continuer cette action que s’il est subrogé dans les droits du demandeur aux termes de l’alinéa 106(3)c).

(2) The Administrator may continue the action only if he or she has become subrogated to the rights of the claimant under paragraph 106(3)(c).

Demande de garantie non fondée

Entitlement to claim security

(3) L’administrateur ne peut demander la garantie visée au paragraphe (1) si :

(3) The Administrator is not entitled to claim security under subsection (1) if

a) dans le cas d’un navire au sens de l’article premier de la Convention sur la responsabilité civile, le fonds visé au paragraphe 52(2) a été constitué;

(a) in the case of a ship within the meaning of Article I of the Civil Liability Convention, a fund has been constituted under subsection 52(2); and

b) dans le cas d’un autre navire, le fonds visé à l’article 11 de la Convention au sens de l’article 24 a été constitué.

(b) in the case of any other ship, a fund has been constituted under Article 11 of the Convention as defined in section 24.

Dépôt des demandes auprès de l’administrateur

Claims filed with Administrator

103 (1) En plus des droits qu’elle peut exercer contre la Caisse d’indemnisation en vertu de l’article 101, toute personne qui a subi des pertes ou des dommages ou qui a engagé des frais mentionnés aux articles 51, 71 ou 77, à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile ou à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute à cause de dommages — réels ou prévus — dus à la pollution par les hydrocarbures peut présenter à l’administrateur une demande en recouvrement de créance à l’égard de ces dommages, pertes et frais.

103 (1) In addition to any right against the Ship‑source Oil Pollution Fund under section 101, a person who has suffered loss or damage or incurred costs or expenses referred to in section 51, 71 or 77, Article III of the Civil Liability Convention or Article 3 of the Bunkers Convention in respect of actual or anticipated oil pollution damage may file a claim with the Administrator for the loss, damage, costs or expenses.

Délais

Limitation period

(2) Sous réserve du pouvoir donné à la Cour d’amirauté à l’alinéa 111a), la demande en recouvrement de créance doit être faite :

(2) Unless the Admiralty Court fixes a shorter period under paragraph 111(a), a claim must be made

a) s’il y a eu des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, dans les deux ans suivant la date où ces dommages se sont produits et dans les cinq ans suivant l’événement qui les a causés;

(a) within two years after the day on which the oil pollution damage occurs and five years after the occurrence that causes that damage; or

b) sinon, dans les cinq ans suivant l’événement à l’égard duquel des dommages ont été prévus.

(b) if no oil pollution damage occurs, within five years after the occurrence in respect of which oil pollution damage is anticipated.

Exceptions

Exception

(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas à un organisme d’intervention visé aux alinéas 51a), 71a) ou 77(1)b) ou à une personne dans un État étranger.

(3) Subsection (1) does not apply to a response organization referred to in paragraph 51(a), 71(a) or 77(1)(b) or a person in a state other than Canada.

[…]

[…]

Fonctions de l’administrateur

Administrator’s duties

105 (1) Sur réception d’une demande en recouvrement de créance présentée en vertu de l’article 103, l’administrateur :

105 (1) On receipt of a claim under section 103, the Administrator shall

a) enquête sur la créance et l’évalue;

(a) investigate and assess it; and

b) fait une offre d’indemnité pour la partie de la demande qu’il juge recevable.

(b) make an offer of compensation to the claimant for whatever portion of it that the Administrator finds to be established.

Pouvoirs de l’administrateur

Administrator’s powers

(2) Aux fins d’enquête et d’évaluation, l’administrateur a les pouvoirs d’un commissaire nommé en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes.

(2) For the purpose of investigating and assessing a claim, the Administrator has the powers of a commissioner under Part I of the Inquiries Act.

Facteurs à considérer

Factors to be considered

(3) Dans le cadre de l’enquête et de l’évaluation, l’administrateur ne prend en considération que la question de savoir :

(3) When investigating and assessing a claim, the Administrator may consider only

a) d’une part, si la créance est visée par le paragraphe 103(1);

(a) whether it is for loss, damage, costs or expenses referred to in subsection 103(1); and

b) d’autre part, si la créance résulte, en tout ou en partie :

(b) whether it resulted wholly or partially from

(i) soit d’une action ou omission du demandeur visant à causer un dommage,

(i) an act done or omitted to be done by the claimant with intent to cause damage, or

(ii) soit de sa négligence.

(ii) the claimant’s negligence.

Cause de l’événement

Cause of occurrence

(4) Bien que le demandeur ne soit pas tenu de démontrer que l’événement a été causé par un navire, l’administrateur rejette la demande si la preuve le convainc autrement.

(4) A claimant is not required to satisfy the Administrator that the occurrence was caused by a ship, but the Administrator shall dismiss a claim if he or she is satisfied on the evidence that the occurrence was not caused by a ship.

Partage de la responsabilité

When claimant at fault

(5) L’administrateur réduit proportionnellement ou éteint la créance s’il est convaincu que l’événement à l’origine de celle‑ci est attribuable :

(5) The Administrator shall reduce or nullify any amount that he or she would have otherwise assessed in proportion to the degree to which he or she is satisfied that the claim resulted from

a) soit à une action ou omission du demandeur visant à causer un dommage;

(a) an act done or omitted to be done by the claimant with intent to cause damage; or

b) soit à sa négligence.

(b) the claimant’s negligence.

Offre d’indemnité

Offer of compensation

106 (1) Le demandeur a soixante jours, à compter de la réception de l’offre d’indemnité visée à l’alinéa 105(1)b), pour l’accepter ou la refuser; si l’administrateur n’est pas avisé du choix du demandeur dans ce délai, celui‑ci est présumé avoir refusé.

106 (1) If the Administrator makes an offer of compensation to a claimant under paragraph 105(1)(b), the claimant shall, within 60 days after receiving the offer, notify the Administrator whether they accept or refuse it and, if no notification is received by the Administrator at the end of that period, the claimant is deemed to have refused the offer.

Appel à la Cour d’amirauté

Appeal to Admiralty Court

(2) Le demandeur peut, dans les soixante jours suivant la réception de l’offre d’indemnité ou de l’avis de rejet de sa demande, interjeter appel devant la Cour d’amirauté; dans le cas d’un appel du rejet de la demande, la Cour d’amirauté ne prend en considération que les faits mentionnés aux alinéas 105(3)a) et b).

(2) A claimant may, within 60 days after receiving an offer of compensation or a notification that the Administrator has disallowed the claim, appeal the adequacy of the offer or the disallowance of the claim to the Admiralty Court, but in an appeal from the disallowance of a claim, that Court may consider only the matters described in paragraphs 105(3)(a) and (b).

Acceptation de l’offre

Acceptance of offer by claimant

(3) L’acceptation par le demandeur de l’offre d’indemnité entraîne les conséquences suivantes :

(3) If a claimant accepts the offer of compensation from the Administrator,

a) l’administrateur ordonne sans délai que la somme offerte soit versée au demandeur par prélèvement sur la Caisse d’indemnisation;

(a) the Administrator shall without delay direct payment to be made to the claimant of the amount of the offer out of the Ship‑source Oil Pollution Fund;

b) le demandeur ne peut plus faire valoir les droits qu’il peut avoir contre qui que ce soit à l’égard des questions visées aux articles 51, 71 et 77, à l’article III de la Convention sur la responsabilité civile et à l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute en ce qui concerne l’événement auquel se rapporte l’offre d’indemnité;

(b) the claimant is then precluded from pursuing any rights that they may have had against any person in respect of matters referred to in sections 51, 71 and 77, Article III of the Civil Liability Convention and Article 3 of the Bunkers Convention in relation to the occurrence to which the offer of compensation relates;

c) dans la limite de la somme versée au demandeur, l’administrateur est subrogé dans les droits de celui‑ci visés à l’alinéa b);

(c) the Administrator is, to the extent of the payment to the claimant, subrogated to any rights of the claimant referred to in paragraph (b); and

d) l’administrateur prend toute mesure raisonnable pour recouvrer auprès du propriétaire du navire, du Fonds international, du Fonds complémentaire ou de toute autre personne responsable la somme qu’il a versée et, à cette fin, peut notamment intenter une action en son nom ou au nom du demandeur, réaliser toute garantie donnée à celui‑ci ainsi qu’intenter une action contre le fonds du propriétaire constitué aux termes de la Convention sur la responsabilité civile.

(d) the Administrator shall take all reasonable measures to recover the amount of the payment from the owner of the ship, the International Fund, the Supplementary Fund or any other person liable and, for that purpose, the Administrator may commence an action in the Administrator’s or the claimant’s name, including a claim against the fund of the owner of a ship established under the Civil Liability Convention and may enforce any security provided to or enforceable by the claimant.

[…]

[…]

Action contre le propriétaire d’un navire

Proceedings against owner of ship

109 (1) À l’exception des actions fondées sur l’alinéa 77(1)c) intentées par le ministre des Pêches et des Océans à l’égard d’un polluant autre que les hydrocarbures, les règles ci‑après s’appliquent aux actions en responsabilité fondées sur les articles 51, 71 ou 77, l’article III de la Convention sur la responsabilité civile ou l’article 3 de la Convention sur les hydrocarbures de soute intentées contre le propriétaire d’un navire ou son garant :

109 (1) If a claimant commences proceedings against the owner of a ship or the owner’s guarantor in respect of a matter referred to in section 51, 71 or 77, Article III of the Civil Liability Convention or Article 3 of the Bunkers Convention, except in the case of proceedings based on paragraph 77(1)(c) commenced by the Minister of Fisheries and Oceans in respect of a pollutant other than oil,

a) l’acte introductif d’instance doit être signifié à l’administrateur — soit par la remise à celui‑ci d’une copie en main propre, soit par le dépôt d’une copie au lieu de sa dernière résidence connue — qui devient de ce fait partie à l’instance;

(a) the document commencing the proceedings shall be served on the Administrator by delivering a copy of it personally to him or her, or by leaving a copy at his or her last known address, and the Administrator is then a party to the proceedings; and

b) l’administrateur doit comparaître et prendre les mesures qu’il juge à propos pour la bonne gestion de la Caisse d’indemnisation, notamment conclure une transaction avant ou après jugement.

(b) the Administrator shall appear and take any action, including being a party to a settlement either before or after judgment, that he or she considers appropriate for the proper administration of the Ship‑source Oil Pollution Fund.

Règlement d’une affaire

If Administrator party to settlement

(2) Dans le cas où il conclut une transaction en application de l’alinéa (1)b), l’administrateur ordonne le versement au demandeur, par prélèvement sur la Caisse d’indemnisation, du montant convenu.

(2) If the Administrator is a party to a settlement under paragraph (1)(b), he or she shall direct payment to be made to the claimant of the amount that the Administrator has agreed to pay under the settlement.


La Convention internationale de 1992 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures

ANNEXE 5

SCHEDULE 5

Texte des articles I à XI, XII bis et 15 de la Convention internationale de 1992 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures modifiée par la résolution de 2000

Text of Articles I to XI, XII bis and 15 of the International Convention on Civil Liability for Oil Pollution Damage, 1992, as Amended by the Resolution of 2000

[…]

[…]

ARTICLE III

ARTICLE III

1 Le propriétaire du navire au moment d’un événement ou, si l’événement consiste en une succession de faits, au moment du premier de ces faits, est responsable de tout dommage par pollution causé par le navire et résultant de l’événement, sauf dans les cas prévus aux paragraphes 2 et 3 du présent article.

1 Except as provided in paragraphs 2 and 3 of this Article, the owner of a ship at the time of an incident, or, where the incident consists of a series of occurrences, at the time of the first such occurrence, shall be liable for any pollution damage caused by the ship as a result of the incident.

2 Le propriétaire n’est pas responsable s’il prouve que le dommage par pollution :

2 No liability for pollution damage shall attach to the owner if he proves that the damage:

a) résulte d’un acte de guerre, d’hostilités, d’une guerre civile, d’une insurrection, ou d’un phénomène naturel de caractère exceptionnel, inévitable et irrésistible, ou

(a) resulted from an act of war, hostilities, civil war, insurrection or a natural phenomenon of an exceptional, inevitable and irresistible character, or

b) résulte en totalité du fait qu’un tiers a délibérément agi ou omis d’agir dans l’intention de causer un dommage, ou

(b) was wholly caused by an act or omission done with intent to cause damage by a third party, or

c) résulte en totalité de la négligence ou d’une autre action préjudiciable d’un gouvernement ou autre autorité responsable de l’entretien des feux ou autres aides à la navigation dans l’exercice de cette fonction.

(c) was wholly caused by the negligence or other wrongful act of any Government or other authority responsible for the maintenance of lights or other navigational aids in the exercise of that function.

3 Si le propriétaire prouve que le dommage par pollution résulte en totalité ou en partie, soit du fait que la personne qui l’a subi a agi ou omis d’agir dans l’intention de causer un dommage, soit de la négligence de cette personne, le propriétaire peut être exonéré de tout ou partie de sa responsabilité envers ladite personne.

3 If the owner proves that the pollution damage resulted wholly or partially either from an act or omission done with intent to cause damage by the person who suffered the damage or from the negligence of that person, the owner may be exonerated wholly or partially from his liability to such person.

4 Aucune demande de réparation de dommage par pollution ne peut être formée contre le propriétaire autrement que sur la base de la présente Convention. Sous réserve du paragraphe 5 du présent article, aucune demande de réparation de dommage par pollution, qu’elle soit ou non fondée sur la présente Convention, ne peut être introduite contre :

4 No claim for compensation for pollution damage may be made against the owner otherwise than in accordance with this Convention. Subject to paragraph 5 of this Article, no claim for compensation for pollution damage under this Convention or otherwise may be made against:

a) les préposés ou mandataires du propriétaire ou les membres de l’équipage;

(a) the servants or agents of the owner or the members of the crew;

b) le pilote ou toute autre personne qui, sans être membre de l’équipage, s’acquitte de services pour le navire;

(b) the pilot or any other person who, without being a member of the crew, performs services for the ship;

c) tout affréteur (sous quelque appellation que ce soit, y compris un affréteur coque nue), armateur ou armateur‑gérant du navire;

(c) any charterer (howsoever described, including a bareboat charterer), manager or operator of the ship;

d) toute personne accomplissant des opérations de sauvetage avec l’accord du propriétaire ou sur les instructions d’une autorité publique compétente;

(d) any person performing salvage operations with the consent of the owner or on the instructions of a competent public authority;

e) toute personne prenant des mesures de sauvegarde;

(e) any person taking preventive measures;

f) tous préposés ou mandataires des personnes mentionnées aux alinéas c), d) et e);

(f) all servants or agents of persons mentioned in subparagraphs (c), (d) and (e);

à moins que le dommage ne résulte de leur fait ou de leur omission personnels, commis avec l’intention de provoquer un tel dommage, ou commis témérairement et avec conscience qu’un tel dommage en résulterait probablement.

unless the damage resulted from their personal act or omission, committed with the intent to cause such damage, or recklessly and with knowledge that such damage would probably result.

5 Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte aux droits de recours du propriétaire contre les tiers.

5 Nothing in this Convention shall prejudice any right of recourse of the owner against third parties.


La Convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute

ANNEXE 8

SCHEDULE 8

Texte des articles 1 à 10 de la Convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute

Text of Articles 1 to 10 of the International Convention on Civil Liability for Bunker Oil Pollution Damage, 2001

[…]

[…]

ARTICLE 3

ARTICLE 3

Responsabilité du propriétaire du navire

Liability of the Shipowner

1 Sauf dans les cas prévus aux paragraphes 3 et 4, le propriétaire du navire au moment d’un événement est responsable de tout dommage par pollution causé par des hydrocarbures de soute se trouvant à bord ou provenant du navire, sous réserve que, si un événement consiste en un ensemble de faits ayant la même origine, la responsabilité repose sur le propriétaire du navire au moment du premier de ces faits.

1 Except as provided in paragraphs 3 and 4, the shipowner at the time of an incident shall be liable for pollution damage caused by any bunker oil on board or originating from the ship, provided that, if an incident consists of a series of occurrences having the same origin, the liability shall attach to the shipowner at the time of the first of such occurrences.

2 Lorsque plus d’une personne sont responsables en vertu du paragraphe 1, leur responsabilité est conjointe et solidaire.

2 Where more than one person is liable in accordance with paragraph 1, their liability shall be joint and several.

3 Le propriétaire du navire n’est pas responsable s’il prouve :

3 No liability for pollution damage shall attach to the shipowner if the shipowner proves that:

a) que le dommage par pollution résulte d’un acte de guerre, d’hostilités, d’une guerre civile, d’une insurrection ou d’un phénomène naturel de caractère exceptionnel, inévitable et irrésistible; ou

(a) the damage resulted from an act of war, hostilities, civil war, insurrection or a natural phenomenon of an exceptional, inevitable and irresistible character; or

b) que le dommage par pollution résulte en totalité du fait qu’un tiers a délibérément agi ou omis d’agir dans l’intention de causer un dommage; ou

b) the damage was wholly caused by an act or omission done with the intent to cause damage by a third party; or

c) que le dommage par pollution résulte en totalité de la négligence ou d’une autre action préjudiciable d’un gouvernement ou d’une autre autorité responsable de l’entretien des feux ou d’autres aides à la navigation dans l’exercice de cette fonction.

(c) the damage was wholly caused by the negligence or other wrongful act of any Government or other authority responsible for the maintenance of lights or other navigational aids in the exercise of that function.

4 Si le propriétaire du navire prouve que le dommage par pollution résulte en totalité ou en partie soit du fait que la personne qui l’a subi a délibérément agi ou omis d’agir dans l’intention de causer un dommage, soit de la négligence de cette personne, le propriétaire du navire peut être exonéré intégralement ou partiellement de sa responsabilité envers ladite personne.

4 If the shipowner proves that the pollution damage resulted wholly or partially either from an act or omission done with intent to cause damage by the person who suffered the damage or from the negligence of that person, the shipowner may be exonerated wholly or partially from liability to such person.

5 Aucune demande en réparation d’un dommage par pollution ne peut être formée contre le propriétaire du navire autrement que sur la base de la présente Convention.

5 No claim for compensation for pollution damage shall be made against the shipowner otherwise than in accordance with this Convention.

6 Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte aux droits de recours du propriétaire du navire qui pourraient exister indépendamment de la présente Convention.

6 Nothing in this Convention shall prejudice any right of recourse of the shipowner which exists independently of this Convention.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1374‑21

 

INTITULÉ :

HAIDA TOURISM PARTNERSHIP faisant affaire sous la raison sociale de WEST COAST RESORTS c L’ADMINISTRATEUR DE LA CAISSE D’INDEMNISATION DES DOMMAGES DUS À LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES CAUSÉE PAR LES NAVIRES

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 21 FÉVRIER 2024

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE SOUTHCOTT

 

DATE DE L’ORDONNANCE ET DES MOTIFS :

LE 19 MARS 2024

 

COMPARUTIONS :

Peter Swanson

Brogan Pastro

POUR LA DEMANDERESSE

Ryan Gauvin

Cameron Grant

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bernard LLP

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Bureau de l’administrateur de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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