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Date : 20230420


Dossier : IMM-2864-22

Référence : 2023 CF 571

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 20 avril 2023

En présence de madame la juge Walker

ENTRE :

ROOHOLLAH FIROOZNAM

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Le demandeur, M. Firooznam, est un citoyen de l’Iran. De 2006 à 2018, il a été l’un des principaux dirigeants d’une entreprise privée qui installait des caméras en circuit fermé et des systèmes de sécurité environnementale et de télécommunications dans les immeubles gouvernementaux et les prisons. Il a allégué devant la Section de la protection des réfugiés (la SPR) qu’il craignait de retourner en Iran parce qu’il croit qu’il est recherché pour espionnage et qu’il sera torturé et tué par les autorités iraniennes.

[2] Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision rendue le 4 mars 2022 par la Section d’appel des réfugiés (la SAR). La SAR a rejeté son appel et confirmé le rejet de sa demande d’asile par la SPR en application de l’alinéa 1Fa) de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, 189 RTNU 137 (Convention), et de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (LIPR).

[3] La SAR a procédé à sa propre analyse du dossier et a examiné les observations présentées par le demandeur en appel. Elle a convenu avec la SPR qu’il y avait des raisons sérieuses de penser que le demandeur avait été complice de crimes contre l’humanité en Iran pour avoir fourni des caméras, des systèmes de sécurité et des services de surveillance au régime iranien et à ses divers éléments de sécurité et de justice pénale pendant de nombreuses années.

[4] Pour les motifs qui suivent, la demande sera rejetée.

I. Contexte

[5] Le demandeur a commencé à travailler chez Shiraz Communications City (Shiraz) en 2006 au sein de la haute direction. Il est demeuré au sein de l’entreprise jusqu’à ce qu’il quitte l’Iran avec sa famille en 2018. Il était actionnaire de l’entreprise et est devenu président du conseil d’administration en 2009.

[6] Les principaux acheteurs des caméras et des systèmes de sécurité de Shiraz étaient des entités et des ministères du gouvernement, principalement la force disciplinaire de la province de Pars, le ministère du Renseignement et de la Sécurité, ainsi que des prisons, y compris celle d’Adel Abad. Le ministère du Renseignement et de la Sécurité est le ministère responsable de la sécurité intérieure en Iran (p. ex. l’identification des opposants au régime et la surveillance des activistes qui s’opposent au régime).

[7] Shiraz était étroitement liée au gouvernement iranien. Trois membres de son conseil d’administration étaient des membres haut placés du ministère du Renseignement de la province de Pars et un actionnaire important était un ancien vice-président de l’Iran.

[8] En 2012, le demandeur a fondé sa propre entreprise, Pars Factory, avec M. Mohammad Nezhad, connu sous le nom de Sardar Nejat, un commandant des gardes qui protègent le chef suprême de l’Iran et le commandant en chef du renseignement. À ce moment‑là, le demandeur a démissionné de son poste de président du conseil d’administration de Shiraz, mais il a continué à travailler pour l’entreprise à titre de gestionnaire des opérations. Il a également conservé ses actions de Shiraz.

[9] Après avoir appris l’assassinat d’un ancien président de l’Iran, M. Rafsanjani, et avoir été témoin de la corruption au sein du régime en 2017, le demandeur affirme avoir fourni des renseignements confidentiels auxquels il avait accès par l’entremise de Shiraz à une source à l’extérieur de l’Iran. Il affirme également avoir déréglé les systèmes de sécurité du régime iranien lors de manifestations contre le gouvernement en décembre 2017 et en août 2018 afin d’appuyer les manifestants.

[10] Le demandeur soutient qu’il a appris en septembre 2018 que ses activités étaient connues des autorités, ce qui l’a incité à fuir l’Iran pour se rendre au Canada.

[11] Le demandeur a été interrogé deux fois par des agents du Service canadien du renseignement de sécurité au sujet de son travail en Iran. La SPR a invité le ministre à participer à la procédure conformément au paragraphe 26(1) des Règles de la Section de la protection des réfugiés (DORS/2012-256) parce qu’il était possible que l’alinéa 1Fa) de la Convention s’applique à la demande d’asile du demandeur. Le ministre a cependant choisi de ne pas le faire.

[12] La SPR a instruit la demande d’asile du demandeur sur deux jours et elle a rendu sa décision le 22 juin 2021. Elle a conclu que le demandeur n’avait pas qualité de réfugié en application de l’alinéa 1Fa) et de l’article 98 de la LIPR parce qu’il y avait des raisons sérieuses de penser qu’il avait été complice de crimes contre l’humanité en Iran. Pour en arriver à cette conclusion, le tribunal a tiré un certain nombre de conclusions défavorables en matière de crédibilité concernant la question de l’exclusion. La SPR a également effectué un examen détaillé de la myriade de violations des droits de la personne bien documentées en Iran depuis de nombreuses années, y compris [traduction] « le recours systématique à la détention et à l’emprisonnement arbitraires; les conditions de détention dures et potentiellement mortelles; et des centaines de prisonniers et de détenus politiques ».

[13] La SPR connaissait la norme des « raisons sérieuses de penser » énoncée à l’article 1F et a appliqué le cadre d’analyse de la complicité à des crimes contre l’humanité établi aux paragraphes 84 à 100 de l’arrêt Ezokola c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CSC 40 (Ezokola), de la Cour suprême du Canada (CSC). Dans son analyse de l’exclusion, le tribunal a examiné chaque élément du critère de la complicité (la connaissance des crimes, l’importance de la contribution et le caractère volontaire) établi par la CSC dans l’arrêt Ezokola. La SPR a conclu que le demandeur avait consciemment et volontairement apporté une contribution significative au dessein criminel du régime iranien dans le cadre de son rôle au sein de Shiraz en fournissant des systèmes de sécurité et des services de soutien aux entités gouvernementales de 2006 à 2018.

[14] Le demandeur a interjeté appel de la décision de la SPR à la SAR, a demandé à faire admettre de nouveaux éléments de preuve et a fait valoir que la SPR avait commis une erreur dans son évaluation de l’alinéa 1Fa).

II. La décision faisant l’objet du contrôle

[15] La SAR a rejeté les nouveaux éléments de preuve du demandeur et confirmé l’analyse que la SPR avait faite de l’alinéa 1Fa).

A. Les nouveaux éléments de preuve

[16] Le demandeur a présenté en preuve un affidavit daté du 12 août 2021 et une série d’articles et de rapports de sources gouvernementales et privées concernant l’Iran en général, ses gardiens de la révolution, ses prisons et le terrorisme. La SAR a examiné les nouveaux éléments de preuve proposés en tenant compte des exigences énoncées au paragraphe 110(4) de la LIPR ainsi que des principes de nouveauté, de crédibilité et de pertinence (Raza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CAF 385; Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 96). Le tribunal a commencé son analyse en faisant remarquer que le demandeur n’avait pas présenté d’observations complètes et détaillées sur la façon dont ses nouveaux éléments de preuve satisfaisaient aux critères énoncés au paragraphe 110(4) de la LIPR ou sur la façon dont les éléments de preuve le concernaient. Il a néanmoins évalué les nouveaux éléments de preuve, en commençant par l’affidavit du demandeur.

[17] Bien que l’affidavit du demandeur satisfaisait aux exigences du paragraphe 110(4) parce qu’il portait une date postérieure à la décision de la SPR, la SAR a conclu que certaines parties de l’affidavit n’étaient pas nouvelles, que d’autres parties n’étaient pas crédibles et que d’autres visaient à contester les conclusions de la SPR. Le tribunal a conclu que la réitération des allégations du demandeur ne constituait pas de nouveaux éléments de preuve et que les parties qui contestaient les conclusions de la SPR n’étaient pas crédibles, car elles contredisaient les éléments de preuve dont disposait la SPR. Ces contradictions ont également soulevé des questions de crédibilité. Par conséquent, la SAR a refusé d’admettre l’affidavit.

[18] La SAR a conclu que les autres documents du demandeur ne satisfaisaient manifestement pas aux exigences du paragraphe 110(4). Les documents en soi ou bien leur contenu étaient antérieurs à la décision de la SPR. De plus, le demandeur aurait normalement pu présenter ces documents à la SPR, étant donné qu’il savait que l’article 1F était en litige en octobre 2020, qu’une autre audience de la SPR avait eu lieu en avril 2021 et que deux mois s’étaient écoulés avant que la SPR ne rende sa décision.

B. L’analyse établie dans l’arrêt Ezokola et effectuée par la SAR

[19] Dans l’appel qu’il a interjeté devant la SAR, le demandeur a contesté l’évaluation que la SPR a faite de la complicité au titre de l’alinéa 1Fa), faisant valoir en grande partie qu’il n’avait jamais appartenu à l’une ou l’autre des branches criminelles du gouvernement iranien. En l’espèce, la SPR et la SAR ont examiné les liens que le demandeur entretenait avec Shiraz pour évaluer sa complicité dans les violations des droits de la personne commises par le régime iranien.

[20] Bien que la SAR ait accepté l’argument du demandeur selon lequel la SPR avait confondu Shiraz avec le régime iranien et ses diverses entités, elle a néanmoins conclu que Shiraz agissait comme un entrepreneur auprès du gouvernement iranien et que l’entreprise fonctionnait effectivement comme une branche du gouvernement. La conclusion de la SAR reposait sur l’objectif des systèmes de surveillance fournis par Shiraz, les liens très étroits de l’entreprise avec le gouvernement et le fait que le gouvernement et ses éléments de sécurité et de justice pénale étaient les principaux clients de Shiraz.

[21] Contribution volontaire : La SAR a conclu que la contribution du demandeur aux crimes et au dessein criminel du gouvernement iranien par l’entremise de l’entreprise Shiraz était volontaire. Il s’est joint à l’entreprise en 2006 à titre de dirigeant et a continué à travailler pour Shiraz après avoir fondé sa propre entreprise. Il n’a pas subi de pressions pour rester et a déclaré qu’il était demeuré au sein de l’entreprise parce qu’il était actionnaire et qu’il fournissait une expertise dans le domaine. Le demandeur a eu l’occasion de quitter Shiraz, mais a choisi de rester. Le fait qu’il n’appartenait pas à l’organisation criminelle en soi n’était pas un facteur déterminant eu égard à la question de la complicité.

[22] Contribution significative : La SAR a rejeté l’argument du demandeur selon lequel sa contribution aux actes criminels du gouvernement n’était pas significative. Le tribunal a conclu que les caméras et les systèmes de sécurité installés par Shiraz facilitaient le déroulement des activités quotidiennes dans les prisons et les centres de détention où des violations des droits de la personne et des crimes étaient commis. Sans les caméras, les systèmes de sécurité des centres n’existeraient pas et la surveillance des détenus, un aspect essentiel des activités criminelles du régime, ne serait pas possible. En ce qui concerne le demandeur lui-même, il occupait des postes de direction au sein de Shiraz et participait directement à l’installation et à l’entretien des caméras et des systèmes de surveillance dans les prisons et ailleurs. Il s’est rendu sur les lieux une ou deux fois par mois pendant plus de 10 ans. La SAR a également conclu que l’affirmation du demandeur selon laquelle il n’avait aucune connaissance du dessein criminel du régime avant 2017 n’était pas crédible.

[23] Contribution consciente : Les conclusions défavorables de la SAR en matière de crédibilité ont occupé une place importante dans son évaluation du moment où le demandeur a pris connaissance des violations des droits de la personne commises dans les prisons et les centres de détention où Shiraz avait installé des systèmes de sécurité. La SAR a expliqué en détail l’analyse que la SPR a faite du témoignage contradictoire du demandeur sur sa connaissance des conditions et des mauvais traitements infligés aux détenus. Le tribunal n’a relevé aucune erreur dans le raisonnement de la SPR. La SAR a également fait remarquer que le demandeur était au courant des problèmes qui avaient mené à la demande d’asile de son frère 20 ans plus tôt et des raisons pour lesquelles son ami, un haut fonctionnaire du ministère du Renseignement et de la Sécurité, avait demandé l’asile en Suède en 2009. Elle a tenu compte du niveau d’influence du demandeur au sein de Shiraz, du fait qu’il s’était rendu à maintes reprises dans des prisons pendant de nombreuses années et du fait que son travail exigeait beaucoup de collaboration avec les clients de l’entreprise. Ces considérations, combinées à la prévalence des crimes commis contre les détenus par le régime iranien, ont amené la SAR à conclure que le demandeur savait ou aurait dû savoir que sa conduite avait contribué au dessein criminel du régime iranien avant 2017.

[24] En fin de compte, la SAR a souscrit à la conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur était complice de crimes contre l’humanité en Iran. Il y avait des raisons sérieuses de penser que sa contribution au dessein criminel de la force disciplinaire de la province de Pars, du ministère du Renseignement et de la Sécurité et des prisons du pays était consciente, significative et volontaire :

[Le demandeur] a consciemment et volontairement apporté une contribution importante au dessein criminel du régime iranien et de ses éléments dans le cadre de son rôle au sein de Shiraz en fournissant l’équipement, en installant des systèmes de sécurité et en offrant des services de soutien continus à ces entités de 2006 jusqu’à ce qu’il quitte l’Iran en 2018.

III. Analyse

[25] Le demandeur soutient que, (1) la SAR a commis une erreur en refusant d’admettre ses nouveaux éléments de preuve, et (2) l’évaluation que la SAR a faite de l’alinéa 1Fa) et de son exclusion de la protection accordée aux réfugiés au Canada contient plusieurs erreurs qui minent le rejet de son appel.

[26] Le rejet des nouveaux éléments de preuve du demandeur par la SAR et le fond de la décision sont susceptibles de contrôle par la Cour selon la norme de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 10, 23 (Vavilov); Kanawati c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 12 au para 9; Okunowo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 175 aux paras 27‑28).

A. Admissibilité des nouveaux éléments de preuve – paragraphe 110(4) de la LIPR

[27] Le point de départ de mon analyse de l’admissibilité de nouveaux éléments de preuve déposés devant la SAR est la prémisse selon laquelle la SAR instruit les appels sur dossier (Ching c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 725 au para 59). Un appel interjeté devant la SAR n’offre pas une deuxième chance de présenter des éléments de preuve pour corriger les faiblesses relevées par la SPR (Abdullahi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 260 au para 15) :

[15] En d’autres termes, la réponse à une lacune relevée par la SPR, dans le cas d’une partie, ne peut pas être un fondement légitime pour que cette partie prétende que si elle avait été au courant de la lacune, elle aurait pu présenter une meilleure preuve qui existait toujours et qui provenait de personnes qui auraient pu être appelées, à savoir, dans ce cas, son cousin. Cela ferait du processus de la SPR un gaspillage de temps monumental, ce qui n’est certainement pas dans l’intention du législateur en accordant des droits d’appel.

[28] Le principal argument que le demandeur avance pour contester le rejet de ses nouveaux éléments de preuve par la SAR est qu’il n’aurait pas pu prévoir certaines des hypothèses formulées par la SPR dans le cadre de l’analyse établie dans l’arrêt Ezokola. Par exemple, il affirme qu’il ne pouvait pas savoir que la SPR supposerait que Shiraz est une organisation criminelle ou que sa contribution à l’entreprise et aux violations des droits de la personne en Iran était significative.

[29] Les arguments du demandeur ne sont pas convaincants pour trois raisons.

[30] Premièrement, le demandeur savait que l’alinéa 1Fa) était en jeu devant la SPR et il a eu amplement le temps de présenter des éléments de preuve à l’appui de sa position selon laquelle il n’était aucunement complice de violations des droits de la personne et de crimes en Iran. L’audience de la SPR a duré deux jours, et le demandeur était représenté par un conseil durant le processus. En fait, le dossier contient des observations du conseil au sujet de l’application de l’article 1F. Ces observations sont datées du 9 novembre 2020, bien avant le deuxième jour de l’audience de la SPR.

[31] Deuxièmement, je ne souscris pas à l’observation du demandeur selon laquelle il n’aurait pas pu prévoir certaines des conclusions de la SPR. L’analyse par la SPR des trois éléments du critère établi dans l’arrêt Ezokola concernant la complicité découle directement de la preuve présentée par le demandeur lui‑même au sujet de son rôle et son travail chez Shiraz, ainsi que de l’identité et de la composition des clients de l’entreprise. Le demandeur peut être catégoriquement en désaccord avec les conclusions particulières que la SPR a tirées de la preuve, mais son désaccord ne lui permet pas de présenter de nouveaux éléments de preuve en appel. À mon avis, les nouveaux éléments de preuve du demandeur peuvent raisonnablement être considérés comme une tentative inadmissible de corriger les faiblesses de son dossier relevées par la SPR (Eshetie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1036 au para 33; Hassan c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 459 au para 24).

[32] Troisièmement, la SAR a raisonnablement rejeté les parties de l’affidavit qui ne faisaient que réitérer les observations du demandeur en appel et contester les conclusions de la SPR. L’évaluation, par le tribunal, des parties restantes de l’affidavit par rapport au témoignage du demandeur est rationnelle et repose sur des contradictions précises entre le témoignage et l’affidavit. Le demandeur n’a pas relevé d’erreur dans les inférences négatives que la SAR a tirées en matière de crédibilité.

[33] En résumé, je conclus qu’il n’y a pas d’erreur susceptible de contrôle dans l’analyse faite par la SAR de l’admissibilité des nouveaux éléments de preuve.

B. L’analyse, par la SAR, de l’exclusion au titre de l’article 1F et de l’arrêt Ezokola

[34] Il ne fait aucun doute que le régime iranien, par l’entremise de son système carcéral, de la force disciplinaire de la province de Pars et du ministère du Renseignement et de la Sécurité, a commis des crimes graves et généralisés contre l’humanité au cours de la période visée (2006-2018). La question à trancher en l’espèce est de savoir si l’analyse que la SAR a faite de la complicité du demandeur dans ces crimes par rapport au cadre établi dans l’arrêt Ezokola est raisonnable.

[35] Le demandeur soutient que la SAR a confondu son adhésion volontaire à une entreprise privée, Shiraz, avec une contribution au régime iranien et à la perpétration de crimes et de violations des droits de la personne. Il soutient également que la SAR a commis une erreur en concluant qu’il avait sciemment contribué aux crimes et au dessein criminel du régime avant 2017.

1. Le cadre juridique

[36] L’article 98 de la LIPR dispose que « [l]a personne visée aux sections E ou F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés ne peut avoir la qualité de réfugié ni de personne à protéger ». La présente affaire fait intervenir l’alinéa 1Fa), qui prévoit que la Convention ne s’applique pas aux personnes dont on a des raisons sérieuses de penser qu’elles ont commis un crime contre l’humanité, tel que cette expression est définie dans les instruments internationaux pertinents.

[37] Dans l’arrêt Ezokola, la CSC a énoncé les trois éléments clés du critère de complicité prévu à l’alinéa 1Fa) : une personne est complice de crimes contre l’humanité s’il y a des raisons sérieuses de penser qu’elle a volontairement apporté une contribution consciente et significative au dessein criminel de l’auteur des crimes ou qu’elle a participé à une infraction prévue à la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, LC 2000, c 24 (Ezokola, aux para 29, 77 et 84; Sarwary c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 437 au para 30 (Sarwary)). L’importance de la contribution doit être évaluée en fonction des crimes ou du dessein criminel de l’auteur du crime (Bedi c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2019 CF 1550 au para 26).

[38] La culpabilité par association ou l’acquiescement passif ne suffit pas pour conclure qu’il y a complicité (Ezokola, aux para 3 et 53). Il doit y avoir un lien suffisant entre l’individu et le crime ou le dessein criminel de l’auteur pour établir l’existence d’une contribution significative.

[39] La CSC a proposé une liste non exhaustive de six facteurs pour aider le décideur à déterminer si une personne a volontairement apporté une contribution significative et consciente au crime ou au dessein criminel de l’organisation qui l’a perpétré (Ezokola, au para 91) :

  • (i)la taille et la nature de l’organisation;

  • (ii)la section de l’organisation à laquelle le demandeur d’asile était le plus directement associé;

  • (iii)les fonctions et les activités du demandeur d’asile au sein de l’organisation;

  • (iv)le poste ou le grade du demandeur d’asile au sein de l’organisation;

  • (v)la durée de l’appartenance du demandeur d’asile à l’organisation (surtout après qu’il a pris connaissance de ses crimes ou de son dessein criminel);

  • (vi)le mode de recrutement du demandeur d’asile et la possibilité qu’il a eue ou non de quitter l’organisation.

[40] Le fardeau de la preuve dans les affaires reposant sur l’alinéa 1Fa) est celui des « raisons sérieuses de penser », lequel exige plus qu’un simple soupçon, mais moins que la prépondérance des probabilités (Ezokola, au para 101). Ce fardeau incombe à la partie qui requiert l’exclusion (Ezokola, au para 29).

2. La SAR a-t-elle confondu Shiraz et le gouvernement iranien?

[41] Le demandeur soutient que la SAR, tout comme la SPR, n’a pas démontré qu’il faisait partie du régime iranien ou des organisations et entités gouvernementales nommées par le tribunal. Les deux décideurs ont simplement présumé qu’il faisait partie du régime. En fait, il était actionnaire et employé de Shiraz, une entreprise privée qui n’a commis aucune des violations dont il est question en Iran au cours de la période visée. Selon le demandeur, la SAR a commis une erreur en confondant Shiraz et le gouvernement.

[42] L’argument du demandeur m’oblige à examiner la portée de l’exigence de la CSC selon laquelle la contribution doit être significative, ainsi que sa mise en garde contre la culpabilité par association. Le demandeur souligne également l’importance des faits particuliers de chaque dossier, un point sur lequel la CSC insiste particulièrement dans l’arrêt Ezokola.

[43] Je ne trouve pas l’argument du demandeur convaincant. Le fait qu’il ne fasse pas directement partie des organisations iraniennes qui commettent des crimes contre les droits de la personne n’est pas fatal à une conclusion d’exclusion au titre de l’alinéa 1Fa). Le critère établi dans l’arrêt Ezokola ne s’applique nécessairement que lorsque la contribution d’une personne à une entreprise criminelle est indirecte (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Alamri, 2023 CF 203 au para 28).

[44] Le critère établi par la CSC pour déterminer si une personne a volontairement apporté une contribution significative et consciente à des crimes internationaux contre les droits de la personne n’exige pas que cette personne fasse partie du groupe qui commet les crimes. Le critère ne repose pas sur une structure officielle (Ezokola, au para 29) :

[29] […] nous concluons qu’une personne est inadmissible à la protection des réfugiés suivant l’art. 1Fa) pour cause de complicité dans la perpétration de crimes internationaux lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’elle a volontairement apporté une contribution consciente et significative aux crimes ou au dessein criminel du groupe qui les aurait commis.

[45] Le décideur doit se concentrer sur la contribution de la personne au crime ou au dessein criminel, et non sur son poste ou son rôle officiel dans l’organisation (Ezokola, au para 92). Le fait que le demandeur a été complice des actes criminels commis par les véritables auteurs en raison de son travail pour une entité distincte ne peut pas à lui seul le mettre à l’abri de l’exclusion au titre de l’alinéa 1Fa). Autrement, le critère établi par la CSC dans l’arrêt Ezokola dépendrait de la forme et non du fond.

[46] La SAR a convenu avec le demandeur que la SPR avait confondu Shiraz avec les services de sécurité et de justice pénale du gouvernement iranien. La SPR n’avait pas tenu compte du fait que le demandeur ne participait pas directement aux activités de ces entités. Toutefois, la SAR a tenu compte de l’élément manquant dans l’analyse de la SPR.

[47] La SAR a reconnu que le demandeur était employé par Shiraz et que l’équipement de l’entreprise était utilisé par le régime iranien et ses organisations criminelles. Elle a déclaré ce qui suit :

[28] […] compte tenu de la nature du travail effectué par l’appelant et l’entreprise de l’appelant, des liens étroits que l’entreprise entretenait avec le gouvernement, des rapports qu’elle entretenait avec de hauts fonctionnaires du ministère du Renseignement de la province de Pars et un ancien vice-président de l’Iran, et du fait que le gouvernement était le principal client de Shiraz et que l’appelant avait connaissance des mauvais traitements perpétrés dans les prisons (selon mes conclusions ci-après), je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que l’entreprise de l’appelant était un sous-traitant du gouvernement iranien, ou, autrement dit, un organe du gouvernement.

[48] Le demandeur n’a relevé aucune erreur de fait dans le résumé que la SAR a fait des liens étroits entre Shiraz et le gouvernement iranien ou dans sa déclaration selon laquelle les entités gouvernementales en question étaient les principaux clients de Shiraz. La SAR a indiqué clairement dans sa décision qu’elle est demeurée consciente du fait que la complicité du demandeur dans les crimes contre les droits de la personne commis par le régime de renseignement et de justice pénale de l’Iran ne pouvait être évaluée qu’en établissant un lien entre son travail à titre de membre de la direction de Shiraz, la fourniture de systèmes de surveillance dans les prisons iraniennes, le dessein criminel et les crimes commis dans ces prisons.

[49] Le demandeur soutient que la SAR a indûment étendu l’application du critère établi dans l’arrêt Ezokola à toute personne employée par les nombreuses organisations qui étaient contrôlées par le régime iranien ou qui fournissaient des biens ou des services au régime. Je ne suis pas d’accord parce que l’argument du demandeur ne tient pas compte de l’application rigoureuse du critère aux faits de l’espèce par le tribunal. Le demandeur a été un dirigeant principal de Shiraz pendant plus de 10 ans et, dans le cadre de son travail, il a dû se rendre chez les principaux clients de l’entreprise. Il a collaboré avec le personnel des clients pour s’assurer que les caméras et les systèmes de surveillance de Shiraz répondaient aux besoins de l’institution cliente. Shiraz elle-même entretenait des liens étroits avec le gouvernement iranien. La nature même de ses produits a facilité la perpétration de violations et de tortures dissimulées, des actes qui sont endémiques dans le système de surveillance et de justice pénale iranien. Chacun de ces faits a réduit la portée de l’analyse de la SAR, qui au lieu d’examiner la simple existence d’une certaine association avec le régime s’est penchée sur l’existence d’un lien précis et important avec le dessein criminel, les violations et les crimes commis par le système. L’argument du demandeur n’est pas convaincant.

[50] Par conséquent, je conclus que la SAR n’a pas confondu Shiraz et le régime iranien, et que le tribunal n’a pas présumé que le demandeur avait participé aux crimes contre les droits de la personne commis par le régime. La SAR a reconnu l’importance d’évaluer non seulement la contribution de Shiraz aux crimes contre les droits de la personne commis par ses clients et le rôle de ses systèmes de surveillance dans la facilitation de ces crimes, mais aussi les obligations du demandeur au sein de Shiraz, lui qui occupait un poste de dirigeant principal et gérait les activités de l’entreprise.

3. La contribution du demandeur était-elle volontaire?

[51] Le demandeur ne conteste pas la conclusion de la SAR selon laquelle sa contribution à la fourniture de caméras et de systèmes de surveillance au régime iranien était volontaire. Il ne prétend pas avoir été forcé de travailler ou de continuer à travailler pour Shiraz. Les circonstances dans lesquelles le demandeur a commencé à travailler pour Shiraz, son accession au poste de président du conseil d’administration et le travail qu’il a continué à accomplir pour Shiraz après avoir formé sa propre entreprise suffisent à établir la nature volontaire de son association avec Shiraz.

4. La contribution du demandeur aux crimes contre les droits de la personne en Iran peut-elle être considérée comme étant significative?

[52] Le demandeur soutient que la SAR n’a pas prouvé qu’il avait apporté une contribution significative aux crimes contre les droits de la personne commis par les principaux clients gouvernementaux de Shiraz, et que le tribunal a simplement présumé que les caméras et les systèmes de surveillance de l’entreprise avaient joué un rôle important dans la perpétration de ces crimes. Il affirme que les prisons et les centres de détention auxquels Shiraz fournissait du matériel s’acquittaient des responsabilités légitimes qui leur incombaient dans le système de justice pénale iranien et qu’ils n’ont peut-être pas utilisé l’équipement de l’entreprise dans un dessein criminel.

[53] La SAR n’a pas conclu que le demandeur avait contribué à un crime précis, et elle n’était pas tenue de le faire. Le lien requis entre le demandeur et la conduite criminelle du régime iranien n’a pas besoin d’être direct, il peut « viser un “dessein commun plus large, comme la réalisation de l’objectif d’une organisation par tous les moyens nécessaires, y compris la commission de crimes de guerre” » [référence omise] (Ezokola, au para 87).

[54] La SAR a reconnu que les clients de Shiraz menaient diverses activités, qui n’étaient pas toutes criminelles. Cependant, les systèmes de sécurité de l’entreprise ont facilité les activités quotidiennes des centres de détention; des activités qui comprenaient des crimes généralisés contre les droits de la personne. Les caméras et les systèmes de surveillance ont permis au personnel du régime de surveiller les activités menées dans les centres, d’assurer la garde physique des détenus et de contrôler ce que les caméras enregistraient et par qui ces enregistrements étaient visionnés. La SAR a réitéré la conclusion de la SPR selon laquelle Shiraz « a offert un service qui était essentiel au bon fonctionnement » des prisons iraniennes.

[55] Comme je l’ai mentionné précédemment, le demandeur lui-même a occupé un poste de dirigeant au sein de Shiraz pendant de nombreuses années et a participé directement à l’installation et à l’entretien de caméras de surveillance dans les prisons où la torture était pratiquée. Sa présence dans les institutions contestées et son étroite collaboration avec les clients pour déterminer leurs besoins ont constitué un élément central de l’analyse de la SAR et de l’approbation de la décision de celle-ci par la SPR.

[56] Je conviens avec le défendeur que la présente affaire donne lieu à des considérations semblables à celles dont la Cour était saisie dans l’affaire Sarwary, y compris la question de la culpabilité par association. Dans l’affaire Sarwary, le demandeur avait été responsable de trois départements dans une prison afghane pendant 20 ans. Il accomplissait surtout des tâches administratives (p. ex. transfert de prisonniers, formation de nouveaux policiers). La Cour a pris note de la conclusion de la SAR selon laquelle le système carcéral s’engageait dans des activités légitimes ainsi que criminelles, mais que les activités criminelles étaient fréquentes (Sarwary, au para 43). Elle a jugé que la SAR n’avait pas tiré de conclusion de complicité par association parce que sa décision n’était pas fondée uniquement sur la fréquence de la torture et des mauvais traitements. Le tribunal a tenu compte de la période pendant laquelle le demandeur avait travaillé au sein de l’organisation, de son grade et de son rôle dans celle-ci, ainsi que du fait qu’il devait savoir dès le début de sa carrière que la prison où il travaillait pratiquait la torture. La Cour a confirmé la conclusion de la SAR selon laquelle il y avait des raisons sérieuses de penser que la contribution du demandeur à un système utilisé pour torturer les détenus était significative.

[57] En l’espèce, la SAR a entrepris la même analyse détaillée du grade, du rôle et du mandat du demandeur au sein de Shiraz, de ses nombreuses visites sur les lieux et de sa collaboration avec le personnel carcéral, ainsi que de la prévalence de la torture et des mauvais traitements dans les prisons iraniennes. Les faits de l’espèce diffèrent sensiblement de ceux de l’affaire Eriator c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1154, dans laquelle le juge Roy a convenu avec le demandeur que la SAR avait tiré une conclusion de culpabilité par association. Confrontée à un appelant qui occupait un poste de bureau au sein du service de police nigérian, la Section d’appel de l’immigration s’était fondée sur la durée du service, la participation à des « enquêtes » et des généralisations non fondées, sans analyser les aspects particuliers du travail de l’appelant et la façon dont ce travail se rapprochait davantage du principe de contribution que de celui de soupçon.

[58] Je conclus qu’en l’espèce, la SAR n’a pas tiré une conclusion de culpabilité par association. Le travail du demandeur à titre de dirigeant principal de Shiraz a facilité la perpétration de crimes contre les droits de la personne et de mauvais traitements dans les centres de détention qui utilisaient l’équipement de Shiraz. Il ne s’agissait pas d’un acquiescement passif (Elve c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 454 au para 67). L’analyse par la SAR de la contribution significative du demandeur aux crimes contre l’humanité était justifiée et intelligible compte tenu du poste que celui-ci occupait, de ses obligations et de ses actes, ainsi que de la jurisprudence de la Cour.

5. Quand le demandeur est-il devenu au courant des crimes et des violations des droits de la personne dans les centres de détention auxquels Shiraz fournissait des systèmes de surveillance?

[59] En l’espèce, le demandeur répète qu’avant 2017, il n’était pas au courant des crimes contre les droits de la personne commis dans les centres de détention qui utilisaient les systèmes de Shiraz. Il affirme qu’après s’être rendu compte que l’État iranien utilisait les caméras de Shiraz pour violer les droits de la personne, il a pris des mesures. Il a non seulement communiqué des renseignements de sécurité confidentiels à une source à l’extérieur de l’Iran, mais il a aussi déréglé des systèmes de sécurité du régime iranien pour aider les manifestants antigouvernementaux en 2017 et en 2018.

[60] La SAR a exposé la conclusion de la SPR selon laquelle le témoignage du demandeur concernant le moment où il a été mis au courant des conditions et des mauvais traitements dans les prisons était : a) contradictoire et b) incompatible avec ce à quoi on s’attendrait à la lumière de son profil et de la portée de ses activités au sein de Shiraz. La SAR n’a relevé aucune erreur dans l’évaluation de la SPR, la décrivant comme étant détaillée et exacte.

[61] La SAR a examiné les observations présentées par le demandeur en appel concernant la date à laquelle il a appris que les caméras et les systèmes de Shiraz étaient utilisés pour faciliter la perpétration de crimes contre les droits de la personne, mais a conclu que ses observations et ses éléments de preuve n’étaient pas crédibles. Le demandeur n’est pas d’accord et soutient que la conclusion de la SAR était fondée sur des conclusions défavorables quant à la crédibilité qui sont déraisonnables et erronées.

[62] La SAR a souligné que le demandeur savait pourquoi son frère et son ami avaient fui l’Iran et demandé l’asile bien avant 2017. Son frère a été arrêté et battu après avoir manifesté contre les actes du régime. L’ami du demandeur était un expert en renseignement des Gardiens de la révolution de Pars qui a quitté l’Iran pour la Suède. Le demandeur lui-même entretenait d’excellents liens avec de hauts fonctionnaires du régime iranien. Il a déclaré qu’il avait travaillé sur place dans les locaux des clients une ou deux fois par mois pendant plus de 10 ans. Son ancienneté et la durée de son travail chez Shiraz auraient nécessité un échange « ouvert et transparent » d’information avec ses clients afin de veiller à ce que les systèmes de sécurité qu’il fournissait étaient adaptés à l’usage prévu. Le tribunal a renvoyé au témoignage du demandeur selon lequel [traduction] « [l]orsque nous effectuions une vérification des caméras, nous visionnions au même moment les séquences qu’elles avaient enregistrées ». Ces facteurs ont amené la SAR à rejeter l’allégation du demandeur selon laquelle il ne savait rien des crimes et du dessein criminel du régime iranien avant 2017. Le tribunal a également déclaré que le demandeur savait avant 2017 que sa conduite contribuerait à la perpétration de ces crimes et à la réalisation de ce dessein criminel.

[63] Le demandeur n’a pas démontré d’erreur susceptible de contrôle dans l’analyse que la SAR a faite de la durée pendant laquelle il était au courant des crimes contre les droits de la personne commis par les clients de Shiraz. Son désaccord avec les conclusions de la SAR n’établit pas de circonstances exceptionnelles qui justifient l’intervention de la Cour (Vavilov, au para 125). Il n’appartient pas à la Cour d’apprécier à nouveau la preuve dont disposait la SAR. Il incombe à la SAR de soupeser les éléments de preuve et à la Cour de déterminer si ses conclusions étaient raisonnables (Sarwary, au para 45).

IV. Conclusion

[64] Dans l’arrêt Ezokola, la CSC a souligné l’importance des faits de chaque dossier dans l’évaluation que fait le décideur de la complicité au titre de l’alinéa 1Fa) de la Convention. En l’espèce, l’analyse par la SAR du critère énoncé dans l’arrêt Ezokola ainsi que des facteurs pertinents suggérés par la CSC maintient la distinction essentielle entre une simple association avec une organisation qui se livre à des crimes contre les droits de la personne et une contribution significative et consciente à cette organisation et à ses crimes ou à son dessein criminel. Bien que la SAR ne puisse tirer de conclusion de complicité fondée sur des soupçons, elle a le droit de tirer des conclusions raisonnables à partir de la preuve. Le fait que le demandeur a occupé un poste de direction pendant longtemps chez Shiraz, sa collaboration sur place avec le personnel de sécurité des prisons iraniennes, et la fonction centrale des caméras et des systèmes de surveillance fournis par Shiraz ont établi le fondement factuel sur lequel la SAR a fondé sa conclusion de complicité au titre de l’alinéa 1Fa). Je ne relève aucune erreur susceptible de contrôle dans l’analyse de la SAR et je rejetterai donc la demande de contrôle judiciaire.

[65] Les parties n’ont proposé aucune question aux fins de certification, et l’affaire n’en soulève aucune.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-2864-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Elizabeth Walker »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2864-22

 

INTITULÉ :

ROOHOLLAH FIROOZNAM c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 FÉVRIER 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE WALKER

 

DATE DES MOTIFS :

LE 20 AVRIL 2023

 

COMPARUTIONS :

Mehran Youssefi

 

Pour le demandeur

 

David Cranton

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mehran Youssefi

Avocat

Thornhill (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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