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Date : 20231220


Dossier : IMM-10219-22

Référence : 2023 CF 1726

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 20 décembre 2023

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

SUKPREET SINGH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La présente décision porte sur une demande de contrôle judiciaire d’une décision datée du 27 septembre 2022 [la décision] par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] selon laquelle le demandeur n’a pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni qualité de personne à protéger au titre des articles 96 ou 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. La question déterminante tant à la SPR qu’à la SAR était celle de la possibilité de refuge intérieur [PRI].

[2] Pour les motifs expliqués plus en détail ci-après, la présente demande sera accueillie, puisque la SAR n’a pas traité de façon intelligible de l’observation présentée par le demandeur en appel selon laquelle l’analyse de la PRI effectuée par la SPR était déraisonnablement fondée sur le fait qu’il n’avait pas révélé l’endroit où il se trouvait aux membres de sa famille et à ses amis.

II. Contexte

[3] Le demandeur est un citoyen de l’Inde qui dit craindre d’être tué par la sarpanch de son village en raison d’un différend foncier. Il affirme que la sarpanch et ses hommes de main les ont attaqués, lui et son père, en novembre et en décembre 2016 et que la police a refusé de se pencher sur l’affaire en raison de l’influence de la sarpanch. Il affirme également que la police a faussement accusé le demandeur d’être un terroriste khalistanais.

[4] À la suite de ces attaques, le demandeur est parti vivre chez des proches, et, en mai 2017, il est parti vivre à Mumbai. Cependant, il a été sommé de partir parce qu’il n’a pas présenté sa carte d’identité et est retourné à son village en juillet 2017. Il soutient que, pendant son absence, la sarpanch a détruit les cultures de sa famille et a aussi intenté une poursuite contre son père relativement au différend foncier. Il affirme également que son père et lui ont de nouveau été arrêtés par la police et battus durant l’interrogatoire.

[5] Le demandeur a ensuite engagé un passeur afin d’organiser sa venue au Canada. Il est arrivé au Canada en décembre 2017 et a présenté une demande d’asile. La SPR a rejeté sa demande d’asile en mai 2022 à la suite de son audience, et a conclu qu’il disposait d’une PRI viable à Delhi. Le demandeur a interjeté appel de la décision de la SPR à la SAR, qui a rejeté son appel dans la décision qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

III. Décision faisant l’objet du contrôle

[6] Pour effectuer son analyse au titre du premier volet du critère relatif à la PRI (lié au risque de persécution ou de préjudice dans l’endroit désigné comme PRI), la SAR a d’abord examiné la preuve objective concernant le rôle des sarpanchs de village et a conclu qu’elle n’appuyait pas la position du demandeur selon laquelle la sarpanch de son village aurait la capacité d’influencer la police pour le retrouver partout en Inde. La SAR a pris en considération le témoignage du demandeur selon lequel la police et des dirigeants de partis politiques aideraient la sarpanch à le trouver, mais elle a conclu qu’il s’agissait d’une hypothèse et que rien ne prouvait que la sarpanch avait une quelconque influence à l’extérieur de son village. La SAR a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que la sarpanch n’avait pas d’influence hors du village du demandeur et que, même si elle en avait, les politiciens et la police ne seraient pas motivés à chercher le demandeur dans toute l’Inde.

[7] En ce qui concerne le témoignage du demandeur selon lequel la sarpanch et la police ont menacé de le faire passer pour un terroriste, ce qui motiverait les autorités à le retrouver, la SAR a de nouveau conclu qu’il s’agissait d’une hypothèse que formulait le demandeur. La SAR a mentionné que rien au dossier n’indiquait qu’il avait été déclaré terroriste ou que la sarpanch avait l’influence nécessaire pour le faire déclarer terroriste. La SAR a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur n’avait pas été déclaré terroriste et que ses agents de persécution n’avaient pas la capacité de le déclarer comme tel.

[8] La SAR a également examiné l’observation du demandeur selon laquelle il pourrait être retrouvé grâce au réseau de suivi des crimes et des criminels [Crime and Criminal Tracking Network and Systems ou CCTNS] de l’Inde, mais elle a noté que selon la preuve objective, le CCTNS ne conserve pas de dossier sur les arrestations extrajudiciaires. Elle a conclu qu’il était peu probable que la détention du demandeur ait été officiellement consignée, et que, selon la prépondérance des probabilités, l’arrestation du demandeur n’avait été consignée dans aucune base de données policière et qu’il ne serait pas retrouvé au moyen du CCTNS.

[9] De même, la SAR a examiné l’observation du demandeur selon laquelle il pourrait être retrouvé au moyen du système Aadhaar. La SAR a pris note de la preuve objective selon laquelle le système Aadhaar attribue un numéro aléatoire à 12 chiffres aux résidents de l’Inde, mais qu’il n’y a aucun lien entre ce numéro et les systèmes de suivi de la police. La SAR a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur ne peut être retrouvé par la base de données Aadhaar.

[10] Enfin, la SAR a examiné l’observation du demandeur selon laquelle il serait trouvé au moyen du système de vérification des locataires, auquel l’enregistrement est obligatoire, si une telle vérification était envoyée à la police, qui pourrait alors informer la police de son village. Soulignant que le critère applicable est celui de la prépondérance des probabilités et non d’une simple possibilité, la SAR a examiné la preuve objective selon laquelle, même si l’enregistrement des locataires est obligatoire et qu’il existe des programmes de vérification policière, il est impossible pour la police, dans les faits, de vérifier l’identité de tous les locataires. La preuve indiquait également que les policiers ne font aucun suivi auprès des postes de police dans les autres États. Comme la SAR avait conclu que la détention du demandeur était extrajudiciaire, de sorte que son nom ne figurerait dans aucune base de données sur les criminels, elle a conclu, selon la prépondérance des probabilités, qu’il ne pourrait pas être retrouvé par une vérification des locataires.

[11] En conclusion, en ce qui a trait au premier volet du critère relatif à la PRI, la SAR a jugé que le demandeur n’avait pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que ses agents de persécution avaient les moyens de le retrouver à Delhi. Ainsi, la SAR a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur ne serait pas personnellement exposé à une menace à sa vie, au risque de traitements ou peines cruels et inusités, ou au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumis à la torture à Delhi.

[12] En ce qui concerne le second volet du critère relatif à la PRI (le caractère raisonnable de la réinstallation dans l’endroit désigné comme PRI), la SAR a examiné le niveau de scolarité, les antécédents professionnels, les compétences linguistiques, l’origine ethnique sikhe et la richesse du demandeur et a conclu qu’il ne serait pas déraisonnable pour lui de se réinstaller à Delhi. Même si elle a pris acte de son observation selon laquelle il n’était jamais allé à Delhi et n’avait pas de réseau de soutien dans cette ville, la SAR a convenu avec la SPR qu’il n’y avait pas de preuve établissant que le fait d’être loin de sa famille mettrait en péril sa vie ou sa sécurité, ce qui est nécessaire pour rendre déraisonnable une PRI proposée.

[13] En conclusion, la SAR a jugé qu’il n’y avait pas de possibilité sérieuse de persécution au titre de l’article 96 de la LIPR si le demandeur retournait en Inde et que, selon la prépondérance des probabilités, il ne serait pas personnellement exposé soit au risque d’être soumis à la torture, soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités en Inde au titre de l’article 97 de la LIPR.

IV. Questions en litige et norme de contrôle

[14] Le demandeur demande à la Cour de trancher les questions suivantes :

  1. La SAR a-t-elle commis une erreur en appliquant le seuil de la prépondérance des probabilités au risque prospectif?
  2. La SAR a-t-elle commis une erreur en concluant que le demandeur dispose d’une PRI viable à Delhi?

[15] Les parties conviennent, et je suis d’accord, que la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique à ces questions.

V. Analyse

La SAR a-t-elle commis une erreur en concluant que le demandeur dispose d’une PRI viable à Delhi?

[16] Je présente d’abord mon analyse de la seconde question soulevée par le demandeur, puisque ma décision d’accueillir la présente demande de contrôle judiciaire repose sur l’argument de ce dernier voulant que, lorsqu’elle a conclu qu’il disposait d’une PRI viable à Delhi, la SAR n’a pas examiné de façon intelligible l’argument soulevé dans ses observations en appel selon lequel la SPR s’attendait de façon déraisonnable à ce qu’il vive dans la ville désignée comme PRI sans divulguer l’endroit où il se trouvait à sa famille et à ses amis.

[17] Le passage de la décision de la SPR sur lequel le demandeur s’appuie a trait au risque que les agents de persécution le retrouvent à Delhi :

[traduction]
37. Le conseil du demandeur d’asile a également fait valoir qu’en raison du harcèlement continu de sa famille par les agents de persécution, le demandeur d’asile pourrait être retrouvé par l’intermédiaire de sa famille. Je garde présent à l’esprit que de devoir dissimuler l’endroit où il se trouve à sa famille et à ses amis revient à exiger que le demandeur d’asile se tienne caché, ce que la Cour a jugé déraisonnable. Cependant, il ne s’agit pas de couper toutes les communications avec les membres de sa famille. Il ne s’agit pas non plus de se cacher d’eux. Il s’agit de ne pas divulguer aux membres de la famille des renseignements précis qui ne sont pas essentiels au maintien de leur relation et qui constituent un compromis raisonnable si cela offre autrement au demandeur d’asile la possibilité de poursuivre sa vie dans son pays d’origine sans danger pour lui ou pour les membres de sa famille. Aucun élément de preuve n’a été présenté pour expliquer pourquoi le demandeur d’asile ne pourrait pas informer ses amis et sa famille du fait qu’il se trouve en Inde, communiquer avec eux régulièrement et les voir à l’extérieur de la zone d’influence de ses agents de persécution. De plus, aucun élément de preuve n’a été présenté pour montrer que sa famille divulguerait l’endroit où se trouve le demandeur d’asile à ses agents de persécution, d’autant plus qu’elle a exprimé son soutien au demandeur d’asile. Par conséquent, je conclus que le demandeur d’asile serait en mesure d’avoir un degré raisonnable de contacts et de communications avec ses amis et sa famille sans être retrouvé, selon la prépondérance des probabilités, par ses agents de persécution.

[18] À l’appui de son commentaire selon lequel la Cour a statué qu’il est déraisonnable de ne pas pouvoir communiquer l’endroit où l’on se trouve à sa famille et à ses amis, la SPR a renvoyé à la décision Zamora Heurta c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 586 [Zamora].

[19] Dans les observations écrites qu’il a présentées à la SAR à l’appui de son appel, le demandeur a fait valoir que la conclusion figurant au paragraphe de la décision de la SPR reproduit ci-dessus ne concorde pas avec le principe énoncé dans la décision Zamora, invoquée par la SPR. Il a fait valoir qu’il ne pouvait pas se permettre de communiquer à sa famille l’endroit où il se trouvait dans la ville désignée comme PRI, puisque son témoignage établissait que son père était encore pris pour cible par les agents de persécution. Par conséquent, il faudrait qu’il se cache dans l’endroit désigné comme PRI.

[20] Dans la seule partie de la décision qui est éventuellement liée à cette observation, la SAR affirme ce qui suit :

35. L’appelant affirme qu’il n’a pas de réseau de soutien à Delhi, où il n’a jamais vécu ni séjourné. Rien au dossier ne porte à croire que l’appelant devrait couper les ponts avec sa famille et ses amis, et la SPR a constaté avec raison qu’il n’y avait pas d’élément de preuve établissant qu’être loin de sa famille mettrait en péril la vie ou la sécurité de l’appelant. [...]

[21] Je conviens avec le demandeur que, si ce passage de la décision vise à répondre à ses observations en appel, il ne le fait pas de façon intelligible. En appel, le demandeur a fait valoir que l’analyse de la SPR était fondée sur le fait qu’il ne devait pas communiquer l’endroit où il se trouve dans la ville désignée comme PRI à sa famille et à ses amis, une analyse comparable à celle que la Cour a jugée déraisonnable dans la décision Zamora. Si l’analyse de la SAR doit être interprétée comme une conclusion selon laquelle le demandeur interprète mal la décision de la SPR, je ne vois pas bien comment la SAR en est arrivée à cette conclusion. L’analyse de la SAR ne porte pas non plus sur l’observation présentée par le demandeur en appel selon laquelle, compte tenu des éléments de preuve montrant que l’agent de persécution continue de prendre son père pour cible, il ne peut pas vivre en sécurité dans l’endroit désigné comme PRI sans s’assurer que son père ne sait pas où il se trouve.

[22] À la lumière de ce qui précède, j’estime que l’analyse de la PRI effectuée par la SAR est déraisonnable.

La SAR a-t-elle commis une erreur en appliquant le seuil de la prépondérance des probabilités au risque prospectif?

[23] Dans son mémoire des faits et du droit, le demandeur a fait valoir que la SAR a mal énoncé le critère applicable lorsqu’elle s’est penchée sur l’existence d’une PRI et qu’elle a appliqué la norme de la « prépondérance des probabilités » alors qu’elle aurait dû appliquer la norme selon laquelle il faut « plus qu’une simple possibilité » ou la norme de la « possibilité sérieuse » à l’évaluation du risque prospectif. Dans ses observations écrites, le demandeur parle de l’interaction entre l’application de la norme de la prépondérance des probabilités aux conclusions de fait et la norme de la possibilité sérieuse qui s’applique lorsqu’il s’agit de décider si une personne a qualité de réfugié au sens de la Convention. Le tribunal doit appliquer la norme de la prépondérance des probabilités pour tirer les conclusions de fait nécessaires à sa tâche, puis appliquer la norme de la possibilité sérieuse à ces faits et se fonder sur ceux-ci pour déterminer s’il y a plus qu’une simple possibilité de persécution.

[24] Dans son mémoire, le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en ne comprenant pas cette interaction et en appliquant le seuil de la prépondérance des probabilités lorsqu’elle a examiné le risque prospectif, et que cela est l’un des types d’erreur relevée par le juge Grammond dans la décision Gomez Dominquez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1098. Dans son mémoire des arguments supplémentaire, le défendeur adopte la position selon laquelle la SAR n’a pas commis d’erreur à cet égard, puisque son application de la norme de la prépondérance des probabilités dans son analyse de la PRI était liée à son évaluation des faits.

[25] À l’audience relative à la présente demande, j’ai demandé aux avocats des deux parties s’il était pertinent que cette question soit soulevée en l’espèce, étant donné qu’il ressort clairement de la décision que la SPR n’avait conclu à l’existence d’aucun lien entre la demande d’asile du demandeur et un motif prévu dans la Convention, conclusion que le demandeur n’a pas contestée et à laquelle la SAR a souscrit. Ainsi, la décision reflète l’analyse effectuée par la SAR au titre du paragraphe 97(1) de la LIPR seulement. Le seuil de la « possibilité sérieuse » de l’article 96 ne s’applique pas.

[26] Les avocats des deux parties ont souscrit à ma description de la décision, et l’avocat du demandeur a concédé qu’il n’était d’aucune utilité d’avancer l’argument formulé dans son mémoire des faits et du droit. En fait, les deux avocats ont souligné qu’ils avaient eux-mêmes cerné ce point en se préparant pour l’audience la veille. Cependant, comme il avait été cerné tardivement, l’avocat du demandeur a demandé la possibilité de présenter, après l’audience, des observations écrites sur la question de savoir s’il y avait une version de cette question et de cet argument qui s’appliquait toujours dans le contexte de l’analyse de la PRI fondée sur l’article 97 de la LIPR seulement. J’ai convenu de donner aux deux parties l’occasion de présenter de telles observations.

[27] Ayant maintenant reçu et examiné les observations, je refuse d’effectuer une analyse de fond de la question. En effet, le demandeur encourage la Cour à revenir sur la conclusion tirée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 1, selon laquelle le degré de danger ou de risque visé à l’article 97 de la LIPR doit être évalué selon la prépondérance des probabilités. À mon avis, tout examen de ces arguments devrait être fait dans le cadre d’une affaire où la Cour dispose à la fois d’observations écrites et de vive voix et où cette question serait déterminante.

VI. Conclusion

[28] Pour les motifs exposés précédemment, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision sera annulée et l’affaire sera renvoyée à un autre commissaire de la SAR pour qu’il rende une nouvelle décision. Aucune des parties n’a proposé de question à certifier en vue d’un appel, et aucune n’est énoncée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-10219-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant : la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre commissaire de la SAR pour qu’il rende une nouvelle décision. Aucune question n’est certifiée en vue d’un appel.

« Richard F. Southcott »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-10219-22

 

INTITULÉ :

SUKPREET SINGH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 NOVEMBRE 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SOUTHCOTT

 

DATE DES MOTIFS :

LE 20 décembre 2023

 

COMPARUTIONS :

Stephen Blakey

POUR LE DEMANDEUR

 

Sarah Merredew

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Ministère de la Justice du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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