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     T-577-87

     OTTAWA (ONTARIO), LE 7 AVRIL 1997

     EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE CULLEN

E N T R E :

     THE LUBRIZOL CORPORATION

     et LUBRIZOL CANADA, LIMITED,

     demanderesses,

     - et -

     IMPERIAL OIL LIMITED

     et sa division PARAMINS,

     défenderesses.

     O R D O N N A N C E

     VU LA REQUÊTE présentée par Imperial Oil Limited en vue d'obtenir la communication, par Lubrizol, de documents censément pertinents à une autre requête présentée par Imperial, savoir celle qu'elle a soumise en vertu de la règle 1733 en vue de la réouverture du procès;

     LA COUR ORDONNE PAR LA PRÉSENTE QUE la présente requête en communication de documents soit rejetée et que les dépens suivent l'issue de la cause.

     B. Cullen

                                         J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme :

                                     Martine Guay, LL.L.

     T-577-87

E N T R E :

     THE LUBRIZOL CORPORATION

     et LUBRIZOL CANADA, LIMITED,

     demanderesses,

     - et -

     IMPERIAL OIL LIMITED

     et sa division PARAMINS,

     défenderesses.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE CULLEN

     La présente requête est présentée par Imperial Oil Limited (" Imperial ") en vue d'obtenir la communication, par Lubrizol, de documents censément pertinents à une autre requête présentée par Imperial, savoir celle soumise en vertu de la règle 1733 en vue de la réouverture du procès. J'emploierai les mots Imperial et Lubrizol pour désigner les parties étant donné qu'il serait trop lourd de parler de défenderesse (appelante) et de demanderesses (intimées).

FAITS

     Compte tenu des différentes mesures prises par les parties et du nombre de questions en suspens à plaider et à trancher, il est essentiel de connaître les faits de l'espèce.

     La présente affaire découle d'une action en contrefaçon du brevet canadien de Lubrizol délivré le 21 janvier 1981 (le brevet nE 1,094,044). Imperial nie avoir contrefait ce brevet et en conteste la validité.

     L'avocat a fourni un résumé intitulé [TRADUCTION] " Décisions rendues dans l'affaire Canadian Lubrizol c. Imperial Oil ".

[TRADUCTION]

ONGLET
DATE
COUR

ÉTAPE


     1.
12 janvier 1989
Le juge Reed

Injonction interlocutoire


     2.
22 septembre 1989
Cour d'appel fédérale

Appel de l'injonction


     3.
17 septembre 1990
Le juge Cullen

Décision de première instance


     4.
4 décembre 1992
Cour d'appel fédérale

Appel de la décision de première instance


     5.
14 avril 1993
Cour d'appel fédérale

Règlement du jugement en appel


     6.
7 octobre 1993
Cour suprême du Canada

Rejet de la demande d'autorisation de pourvoi


     7.
25 avril 1994
Le juge Cullen

Rejet de la demande d'autorisation de déposer d'autres éléments de preuve


     8.
1er juin 1994
Cour d'appel fédérale

Annulation de la décision par laquelle la demande d'autorisation de déposer d'autres éléments de preuve a été rejetée


     9.
4 octobre 1994
Le juge Cullen

Dommages-intérêts exemplaires


     10.
11 octobre 1994
Le juge Cullen

Échéancier pour le renvoi


     11.
14 décembre 1995
Cour d'appel fédérale

Rejet de la demande pour permission de présenter d'autres éléments de preuve


     12.
22 mars 1996
Protonotaire adjoint Giles

Rejet de la demande d'Imperial pour contraindre Lubrizol à communiquer des documents


     13.
3 avril 1996
Cour d'appel fédérale

Appel accueilli au sujet des dommages-intérêts exemplaires en partie, et remise


     14.
6 août 1996
Le juge Muldoon

Appel de l'ordonnance du protonotaire Giles daté du 20 mars 1996 rejeté

     15.
21 novembre 1996
Cour d'appel fédérale

Appel de l'ordonnance du juge Muldoon rejeté


     16.
24 janvier 1997
transcription de la requête présentée devant le juge Jerome

     Il est indubitable que Imperial et Lubrizol ont produit une foule de documents. Le 14 février 1997, Lubrizol a fourni d'autres documents à Imperial. Sur réception de ces documents, cette dernière a transmis la liste la plus récente de communication de documents de Lubrizol à l'avocat d'Exxon aux États-Unis, le 17 mars 1997 et lui a demandé, dans la lettre qui y était jointe, [TRADUCTION] " Pourriez-vous nous faire savoir s'il y a, à l'annexe A de l'avis de requête se rapportant à notre demande de précisions présentée en vertu de la règle 1733, d'autres documents que Lubrizol n'a pas encore produits ".

     Le 18 mars 1997, dans une réponse des plus complètes, l'avocat d'Exxon a fourni son exposé raisonné ainsi qu'une présumée [TRADUCTION] " Liste des documents de l'annexe A pertinents non confidentiels et non fournis à Imperial Oil par Lubrizol " (voir l'annexe A à la lettre) et une présumée [TRADUCTION] " Liste des documents de l'annexe A pertinents confidentiels et non fournis à Imperial Oil par Lubrizol " (voir l'annexe B à la lettre).

     Tout cela a abouti à la présentation par Imperial d'un avis de requête supplémentaire en vertu de la règle 327.2, exigeant qu'il soit demandé à Lubrizol de [TRADUCTION] " produire les documents se rapportant à la période allant de mars 1987 à la date actuelle de la demande, en plus des documents produits par Lubrizol vers le 14 février 1997 qui sont en la possession, sous la garde ou le contrôle de The Lubrizol Corporation ou Lubrizol Canada Limited (" Lubrizol ") et qui se rapportent à la présente requête soumise en vertu de la règle 1733, y compris... ".

     Et l'avocat décrit ou indique ensuite les documents demandés.

     Ne traiter que de la requête pour communication de documents n'est pas une tâche aisée étant donné que les parties ont échangé beaucoup de lettres et produit de nombreux documents, en raison, ainsi que je l'ai déjà indiqué, de la requête présentée en vertu de la règle 1733. Je ne suis donc pas étonné que tant Imperial que Lubrizol aient dû consacrer une bonne partie de leur exposé et de leur mémoire à la requête présentée en vertu de la règle 1733. Toutefois, il est important de porter notre attention sur la requête présentée par Imperial en vertu de la règle 327.2 aux fins de la présente audience.

     À la page 3 du mémoire de Lubrizol, il est écrit [TRADUCTION] : " la présente requête a été soumise par avis de requête daté du 2 janvier 1997 en vue d'obtenir une ordonnance contraignant Lubrizol à communiquer des documents provenant de la période de dix ans allant de mars 1987 à ce jour et censés être pertinents à la requête présentée par Imperial en vertu de la règle 1733.

     Après cela, Imperial a signifié un Avis de requête supplémentaire présenté en vertu de la règle 327.2 et daté du 19 mars 1997 en vue d'obtenir une ordonnance contraignant Lubrizol à communiquer d'autres documents, en plus de ceux qu'elle avait produits vers le 14 février 1997 (mémoire de Lubrizol, page 4, paragraphe 9), et qui décrit le type de documents demandés.

     Dans sa réponse à l'Avis supplémentaire d'Imperial, Lubrizol prétend qu'une requête ne donne pas lieu à l'exercice du pouvoir de contraindre une partie à communiquer des documents.

ANALYSE

     Ainsi que je l'ai déjà mentionné, les parties à la présente action ont déposé une foule de documents.


     Il est de la nature même d'une poursuite en justice concernant un brevet chimique que chaque partie s'estime obligée d'obtenir de son adversaire l'ensemble des renseignements, des données et des documents en cause. Les documents peuvent ensuite être examinés dans leur moindre détail pour permettre au requérant et à l'intimé de décider s'ils peuvent avoir gain de cause en demande ou en défense dans une affaire qui concerne un brevet chimique. À défaut d'obtenir chaque document imaginable, les parties craignent sans doute de perdre leur cause. Il est manifeste que tel est le cas en espèce.

     Il va sans dire qu'il est préférable que chaque partie soit convaincue qu'elle a en fait reçu tous les documents pertinents et, que cela se fasse sans qu'il soit nécessaire de présenter des requêtes pour communication de documents.

     À première vue, il semble qu'Imperial estime nécessaire que Lubrizol communique d'autres documents en plus de ceux qu'elle a déjà produits. Par ailleurs, Lubrizol estime qu'elle a fourni tous les documents qui sont pertinents à la requête présentée en vertu de la règle 1733, mais elle continue de chercher des documents et, en fait, le jour de l'audience, elle en a produit d'autres.

     Une déclaration de l'un des avocats de Lubrizol préoccupe Imperial :

             [TRADUCTION]             
                  Le 27 janvier 1997, les avocats des parties ont comparu devant le juge en chef adjoint. Durant cette comparution, Me Donald Wright, c.r., procureur de Lubrizol a fait les observations suivantes :             
                     " Mon collègue vous a cité le document dans sa requête présentée en vertu de la règle 1733 et je serais le premier à convenir que si vous le regardez, M. Billmeyer, comme témoin, paraîtrait mal. Mais, naturellement, je souligne que ce document n'est accompagné d'aucun élément de preuve de notre part, nous n'avons pas contre-interrogé ".                     
                          ****                     
                     " [...] nous avons l'intention de prouver que l'avocat américain qui l'a contre-interrogé en vertu de leur procédure, qui n'est pas comme la nôtre, son contre-interrogatoire est une déposition, c'est comme notre interrogatoire préalable, il les contre-interroge, et nous prétendrons qu'il l'a gravement induit en erreur en ne lui montrant pas les notes qui auraient dû lui être montrées , qui prouvaient que ce qu'il avait dit n'était pas faux. Il a obtenu un avis fondé sur des faits incomplets. Et j'ajouterais que ce genre de tactique -- "                     

     Ainsi, dans sa requête présentée en vertu de la règle 327.2, Imperial a demandé la communication [TRADUCTION] " des notes qu'il aurait dû lui avoir montrées, qui prouvaient que ce qu'il a dit n'était pas faux. Il a obtenu un aveu de lui à partir de faits incomplets ".

     Il s'agit-là d'une demande qui n'est pas déraisonnable dans les circonstances mais, malheureusement pour Imperial, la règle 327.2 ne me confère pas le pouvoir d'ordonner la communication de documents.

     La Cour conclut que la prétention de Lubrizol au sujet d'une ordonnance de communication de documents est exacte. Imperial ne peut obtenir la communication de documents en vertu de la règle 327.2.

     Après l'introduction dans laquelle il a commenté la requête présentée par Imperial en vertu de la règle 1733, l'avocat de Lubrizol s'est concentré sur la requête en communication de documents présentée par Imperial en vertu de la règle 327.2. Pour rendre justice au raisonnement avancé, la Cour se propose d'intégrer dans les présents motifs, la partie de la plaidoirie qui traite de la communication de documents dans les présents motifs, argumentation à laquelle la Cour souscrit.

             [TRADUCTION]             
             " La Cour n'a pas le pouvoir d'ordonner la communication de documents dans le cadre d'une requête             
             21.      Il n'est pas contesté que la communication de documents en Cour fédérale se limite à l'action au sens de la règle 2 qui définit le mot " action " comme suit : " action " désigne une procédure devant la Division de première instance, à l'exception d'un appel, d'une demande ou d'une requête introductive d'instance ... " (non souligné dans l'original). Dans ces cas, pour lesquels les règles ne prévoient aucune procédure de communication, les requérants ne peuvent s'attendre à élaborer leur argumentation à partir du témoignage de l'intimé.             
                      Sovereign Life Insurance Co. c. Canada, (1995) 100 F.T.R. 81,             
                      aux pages 97 et 98 (le juge Nadon)      Onglet 6             
                      Merck Frosst Canada Inc. c. Canada, (1994) 55 C.P.R. (3d)             
                      302 (C.A.F.), à la page 320      Onglet 7             
                      Apotex Inc. c. Canada, (1992) 41 C.P.R. (3d) 390 (le juge Muldoon),             
                      à la page 391      Onglet 8             
             Règle 327.2             
             22.      Imperial prétend fonder sa requête sur la règle 327.2.             
             23.      La règle 327.2 dispose :             
                     " Le juge en chef ou le juge qu'il désigne peut, à tout moment sur requête ou de sa propre initiative :                     
                     a)      fixer les délais applicables au dépôt des documents;                     
                     b)      fixer les date, heure et lieu de l'audition d'une action, d'un appel ou d'une demande;                     
                     c)      donner les directives qu'il estime indiquées pour faire avancer la tenue de l'audition de l'action, de l'appel ou de la demande. "                     
             24.      La règle 327.2 complète la règle 327.1 qui prévoit que la Cour peut ordonner que soit avancée la tenue de l'instruction ou de l'audition d'une action, ou d'une demande et donner des directives relativement à cette audition avancée.             
                      CF : Règle 327.1             
             25.      La règle 327.2 prévoit la fixation de délais ainsi que des dates, heure et lieu et l'émission de directives " pour " faire avancer la tenue de l'audition.             
                      Règle 327.2             
             26.      Cette règle ne concerne pas la communication de documents par une partie adverse.             
             27.      Les règles 447 à 453 prévoient un code régissant la communication de documents par une partie à une action. Aucune règle ne prévoit la communication de documents par une partie à une requête ".             

     La présente requête pour communication de documents est rejetée, et les dépens suivront l'issue de la cause.

OTTAWA      B. Cullen

    

7 avril 1997 J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme :     
                     Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :              T-577-87
INTITULÉ DE LA CAUSE :      The Lubrizol Corporation et Lubrizol Canada, Limited c. imperial Oil Limited et sa division Paramins
LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :          27 mars 1997

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR

     MONSIEUR LE JUGE CULLEN

     EN DATE DU 7 AVRIL 1997

ONT COMPARU :

Me Donald J. Wright, c.r.                      pour les demanderesses

Me Donald H. MacOdrum et Me Peter E.J. Wells

Me Ian C. Binnie, c.r. et Me Marguerie F. Éthier          pour les défenderesses

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Ridout & Maybee

Toronto (Ontario)                          pour les demanderesses

McCarthy, Tétrault

Toronto (Ontario)                          pour les défenderesses
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