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Date : 20230922


Dossier : IMM-7951-22

Référence : 2023 CF 1276

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 22 septembre 2023

En présence de monsieur le juge Régimbald

ENTRE :

CHRISTINA MANDY BELLE

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La Cour est saisie du contrôle judiciaire d’une décision datée du 22 juillet 2022 par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] selon laquelle la demanderesse n’a pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger au titre des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR].

[2] La demanderesse est citoyenne de la Barbade. Elle craint son oncle, qui l’a agressée par le passé, a menacé sa famille, a été arrêté pour meurtre en 2013 et devait être libéré de prison à la fin de 2022. La SAR a rejeté l’appel de la demanderesse au motif que la protection offerte par l’État était suffisante et que la demanderesse disposait de possibilités de refuge intérieur [PRI] valables à la Barbade.

[3] La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la SAR. J’ai examiné le dossier soumis à la Cour, y compris les observations écrites et orales des parties, ainsi que le droit applicable. La demanderesse ne m’a pas convaincu que la décision de la SAR est déraisonnable. Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

II. Contexte factuel

[4] La demanderesse est citoyenne de la Barbade. Elle craint de subir un préjudice aux mains de son oncle maternel, qui l’a déjà agressée et a agressé des membres de sa famille.

[5] Dans sa première décision datée du 15 mars 2021, la SAR a rejeté l’appel interjeté par la demanderesse à l’encontre de la décision de la SPR, à la suite d’une audience tenue le 5 février 2021 [la première audience de la SAR]. La demanderesse a sollicité le contrôle judiciaire de la décision de la SAR à la Cour fédérale et, aux termes d’un jugement sur consentement daté du 2 septembre 2021, l’affaire a été renvoyée à la SAR pour qu’une nouvelle décision soit rendue.

[6] La Cour est maintenant saisie du contrôle judiciaire de la deuxième décision de la SAR, rendue le 22 juillet 2022.

III. Décision faisant l’objet du contrôle

[7] La SAR a rejeté l’appel de la demanderesse au motif que la protection offerte par l’État était suffisante et que la demanderesse disposait de PRI viables.

[8] La SAR a conclu que les éléments de preuve, examinés de façon cumulative, n’établissaient pas que la demanderesse était exposée à une possibilité sérieuse de persécution aux endroits proposés comme PRI, à savoir St. Lucy ou St. Andrew, à la Barbade, ou que sa vie ou sa sécurité seraient mises en péril si elle y déménageait.

[9] La SAR a passé en revue les nouveaux éléments de preuve présentés par la demanderesse et a indiqué qu’il incombait à cette dernière d’établir qu’ils répondaient aux critères de recevabilité prévus au paragraphe 29(4) des Règles de la Section d’appel des réfugiés, DORS/2012-257 [les Règles de la SAR] : la pertinence et la valeur probante du document, toute nouvelle preuve que le document apporte à l’appel, et la possibilité qu’aurait eue la demanderesse, en faisant des efforts raisonnables, de transmettre le document en première instance à la SPR.

[10] La SAR a admis tous les nouveaux éléments de preuve, à l’exception d’un affidavit de la sœur de la demanderesse daté du 16 février 2021. La SAR a conclu que, bien que cet affidavit puisse être pertinent pour l’appel, il n’apportait pas de nouveaux renseignements de fond. Le tribunal a fait remarquer que la sœur de la demanderesse était entrée au Canada le 13 décembre 2019, mais que ce fait n’expliquait pas pourquoi les renseignements contenus dans l’affidavit n’avaient pas été soumis à la SPR. En outre, le tribunal a affirmé qu’un appel devant la SAR n’était pas une occasion de corriger un dossier incomplet. La SAR a estimé qu’elle n’était pas obligée de tenir une audience, aux termes du paragraphe 110(6) de la LIPR, étant donné que les nouveaux éléments de preuve admissibles ne soulevaient aucune question de crédibilité.

[11] La SAR a jugé qu’il ne faisait aucun doute que la demanderesse avait subi de la violence physique, psychologique et sexuelle aux mains de son oncle, alors qu’elle vivait avec sa famille à St. Barnabas Heights, dans la paroisse de St. Michael, à la Barbade. La SAR a également examiné les directives concernant la persécution fondée sur le sexe et a conclu que la demanderesse, à titre de femme victime de violence fondée sur le sexe, avait établi un lien clair avec un des motifs prévus par la Convention. La SAR a examiné la question de la violence fondée sur le sexe à la Barbade, la qualifiant de problème majeur dont les origines sont profondément enracinées dans les attitudes patriarcales.

[12] La SAR a ensuite conclu que la demanderesse pouvait se prévaloir de la protection de l’État puisque la Barbade est un pays démocratique doté d’un système judiciaire impartial et où les autorités civiles exercent un contrôle efficace sur les services de police. La SAR a également mentionné les mécanismes législatifs qui existent pour protéger les victimes de violence familiale.

[13] En ce qui concerne le caractère suffisant de la protection de l’État, la SAR a indiqué que les services de police avaient répondu aux incidents antérieurs de violence impliquant l’oncle de la demanderesse. Plus précisément, la demanderesse a déclaré qu’avant qu’il soit arrêté en 2013, son oncle avait été détenu à deux reprises en raison de ses activités criminelles.

[14] Pour ce qui est de l’existence de PRI viables, la SAR a indiqué que la Barbade est certes un petit pays, mais qu’il ne faut pas pour autant écarter la possibilité d’y trouver des options de réinstallation sécuritaires ou raisonnables. Après avoir examiné l’ensemble des éléments de preuve, la SAR a conclu que la demanderesse ne serait pas exposée à une possibilité sérieuse de persécution ni à un risque de préjudice si elle quittait son domicile situé dans la paroisse de St. Michael. La SAR a estimé que la demanderesse ne s’était pas acquittée du fardeau de démontrer qu’il n’était pas objectivement raisonnable pour elle de songer à se réinstaller dans l’un des endroits proposés comme PRI, même si elle a noté que la demanderesse pourrait avoir de la difficulté à y trouver un logement et un emploi. La demanderesse est âgée de 37 ans et a quatre enfants. Elle est titulaire d’un diplôme universitaire de premier cycle en histoire et elle a déjà travaillé à son propre compte comme maquilleuse à la Barbade. La SAR a conclu que la réinstallation de la demanderesse dans l’un des endroits proposés comme PRI ne lui causerait pas de difficultés excessives.

IV. Questions en litige et norme de contrôle

[15] La demanderesse soulève les questions suivantes :

[16] La norme de contrôle qui s’applique en l’espèce est celle de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] aux para 10, 25). Pour être à l’abri d’une intervention judiciaire, la décision doit posséder les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité (au para 99). Une décision peut être déraisonnable si le décideur s’est mépris sur la preuve qui lui a été soumise (aux para 125-126). Il incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable (au para 100).

V. Analyse

A. Admissibilité des nouveaux éléments de preuve et première audience de la SAR

[17] La demanderesse soutient que la SAR a commis une erreur en refusant d’admettre l’affidavit de sa sœur. Selon elle, la SAR a adopté une approche indûment étroite qui a conduit à un résultat déraisonnable lorsqu’elle a déclaré que l’affidavit ne contenait pas de nouveaux renseignements. La demanderesse fait valoir que l’affidavit contient des renseignements considérés comme « nouveaux ».

[18] La demanderesse soutient que, lors de la première audience de la SAR, elle avait mentionné que sa sœur avait également quitté la Barbade par crainte de son oncle. À l’époque, la SAR avait posé des questions sur la pertinence de tenir compte des témoignages de personnes se trouvant dans une situation semblable pour déterminer le risque prospectif auquel la demanderesse était exposée, et elle avait demandé à la demanderesse de fournir la preuve de la demande d’asile de sa sœur. La demanderesse a fait valoir que l’affidavit de sa sœur répondait à la demande de preuve de la SAR.

[19] La demanderesse soutient que la SAR a refusé d’admettre l’affidavit de sa sœur au motif qu’il ne contenait aucun renseignement « nouveau » et qu’il ne satisfaisait donc pas aux exigences prévues au paragraphe 100(4) de la LIPR et au paragraphe 29(4) des Règles de la SAR. De l’avis de la demanderesse, les paragraphes 9 à 11 de l’affidavit de sa sœur présentent des éléments de preuve nouveaux et importants survenus après le rejet par la SPR de sa demande d’asile. De plus, il s’agit selon elle de renseignements pertinents puisqu’ils corroborent ses craintes. La demanderesse ajoute que les renseignements portent sur une question déterminante, qu’ils n’étaient pas connus de la demanderesse ou de la SPR avant le rejet de la demande d’asile et qu’ils sont survenus après la date à laquelle elle a présenté sa demande d’asile. Enfin, la demanderesse mentionne que la décision de la SAR ne contient aucune analyse de son témoignage présenté lors de la première audience de la SAR.

[20] À mon avis, il n’était pas déraisonnable pour la SAR de refuser d’admettre l’affidavit de la sœur de la demanderesse. Tout d’abord, il y a la question du recours de la demanderesse à la transcription de la première audience de la SAR pour contester la décision faisant l’objet du présent contrôle. La demanderesse ne peut pas s’appuyer sur cette transcription ou sur les témoignages présentés lors de cette première audience pour étayer ses arguments dans le cadre du contrôle judiciaire puisque la première décision de la SAR a été annulée. Les témoignages présentés lors de la première audience de la SAR n’étaient pas pertinents dans le contexte de la deuxième audience de la SAR. Le nouveau tribunal de la SAR était libre de tirer ses propres conclusions sur la base des faits et des arguments qui lui ont été présentés (voir Patricks c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 745 aux para 16-20, Tran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 215 au para 75, Ouellet c Canada (Procureur général), 2017 CF 586 au para 27, Burton c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 910 au para 30).

[21] En ce qui concerne les paragraphes 9 à 11 de l’affidavit de la sœur de la demanderesse, la SAR a conclu de façon raisonnable que les éléments de preuve n’étaient pas substantiellement nouveaux ou importants au regard de la demande d’asile et que les renseignements ne concernaient pas des événements survenus après le prononcé de la décision de la SPR. Il est vrai que la SAR a mentionné que l’affidavit corroborait le témoignage de la demanderesse et que la sœur de cette dernière était arrivée au Canada le 13 décembre 2019, soit après le prononcé de la décision de la SPR rejetant la demande d’asile de la demanderesse. Cependant, l’affidavit contenait des renseignements liés à des événements survenus alors que la demanderesse était encore à la Barbade, ainsi que d’autres renseignements de nature générale qui ne faisaient qu’étayer la demande d’asile de la demanderesse. Aucun événement précis survenu après le départ de la demanderesse de la Barbade ou après le prononcé de la décision de la SPR n’y était mentionné. La SAR a donc conclu de façon raisonnable que l’affidavit n’expliquait pas pourquoi les renseignements n’avaient pas pu être inclus dans le dossier de la demanderesse et qu’il n’apportait pas de nouveaux renseignements pertinents quant à l’appel.

B. Évaluation du caractère suffisant de la protection de l’État

[22] Pour réfuter, selon la prépondérance des probabilités, la présomption que la protection offerte par l’État est suffisante, la demanderesse doit mettre l’accent sur l’efficacité réelle de cette protection, plutôt que sur l’ensemble des efforts déployés par l’État (Lakatos c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 367 aux para 20-21; Bito c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1370; St. Brice c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 1139).

[23] La demanderesse soutient que la SAR n’a pas examiné son témoignage concernant ses expériences avec la police ainsi que l’absence de protection de l’État et la perte de confiance en la police qui en ont découlé. Les éléments de preuve fournis dans le récit de la demanderesse en lien avec plusieurs incidents de violence impliquant son oncle, d’autres membres de la famille et des voisins n’ont pas été pris en compte dans la nouvelle décision ni mentionnés dans le cadre de l’évaluation de la protection de l’État. La demanderesse soutient également que la surveillance exercée par la police sur son oncle, qui doit notamment respecter un couvre-feu et se présenter au poste de police tous les matins à neuf heures, ne constitue pas une [traduction] « surveillance policière », car son oncle a amplement le temps de se déplacer dans toute la Barbade et de lui faire du mal où qu’elle se trouve. La police est donc inefficace et négligente.

[24] Le défendeur soutient que la SAR a raisonnablement évalué la documentation sur la situation dans le pays, notant qu’elle a tiré des conclusions favorables et défavorables au sujet de la violence fondée sur le sexe à la Barbade. Le défendeur fait remarquer que, comme l’a soutenu la SAR, dans le cas précis de la demanderesse, la police a agi et est intervenue de manière efficace lors des incidents de violence impliquant l’oncle. Le défendeur soutient que, pour conclure à l’existence de la protection de l’État, la police n’a pas à décourager les activités criminelles; il suffit qu’elle ait la capacité d’intervenir. Le défendeur fait valoir qu’il n’est pas nécessaire que la protection soit parfaite. Il s’agit plutôt de déterminer si l’État est disposé et apte à protéger ses citoyens et si cette protection est efficace. La norme ne commande pas une protection parfaite, mais bien une protection suffisante (Burai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 966 aux para 24-25).

[25] En l’espèce, j’estime que la SAR a correctement examiné et résumé les éléments de preuve étayant sa conclusion relative au caractère suffisant de la protection de l’État. La SAR a également appliqué les directives concernant la persécution fondée sur le sexe et analysé les renseignements qui pourraient laisser croire à l’existence de violence fondée sur le sexe. La SAR a conclu que la Barbade est un pays démocratique doté d’un système judiciaire généralement respecté et impartial, et où les autorités civiles exercent un contrôle sur les services de police. La common law et plusieurs lois offrent également une protection contre la violence familiale et sexuelle. Même si les mécanismes ne sont pas parfaits et que le délai d’intervention de la police est parfois long, la police est sensible aux plaintes; elle est tenue de répondre aux plaintes, de rédiger un rapport et de tenir des registres de celles-ci. La SAR a estimé que la protection offerte à la demanderesse par la police de la Barbade était suffisante, puisque l’oncle de la demanderesse avait été arrêté et détenu à la suite de plaintes. La police est intervenue de manière efficace lorsque des éléments de preuve crédibles lui ont été présentés. L’État serait donc raisonnablement en mesure d’accorder une protection à la demanderesse.

[26] Les motifs de la SAR concernant le caractère suffisant de la protection de l’État sont donc raisonnables. La SAR a examiné les éléments de preuve objectifs, notamment ceux qui démontrent que la protection de l’État n’est pas parfaite et que le délai d’intervention de la police est parfois long, et elle a jugé que la protection de l’État était néanmoins suffisante. Le raisonnement de la SAR est intelligible, transparent et justifié (Vavilov, aux para 15, 98).

C. Caractère raisonnable des PRI

[27] Le critère permettant de déterminer si un demandeur d’asile dispose d’une PRI valable dans son pays est défini au paragraphe 10 de la décision Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706, 1991 CanLII 13517 (CAF) et comporte deux volets. Pour qu’un demandeur dispose d’une PRI, 1) il ne doit pas risquer sérieusement d’être persécuté ou d’être exposé à l’un des risques énoncés au paragraphe 97(1) de la LIPR à l’endroit proposé comme PRI; 2) il ne doit pas être objectivement déraisonnable pour le demandeur, compte tenu de toutes les circonstances, d’y chercher refuge. Les deux volets doivent être remplis pour pouvoir conclure qu’un demandeur d’asile dispose d’une PRI (Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 1211 au para 18; Thirunavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 CF 589 (CAF) aux pp 597-598; Hamdan c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 643 aux para 10-12; Leon c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 428 au para 9; Mora Alcca c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 236 au para 5; Souleyman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 708 au para 17). Il incombe au demandeur d’asile de démontrer que la PRI n’est pas valable.

[28] La demanderesse s’appuie sur la taille de la Barbade pour affirmer qu’elle serait confrontée à des risques partout sur l’île. En outre, les conditions de la mise en liberté de son oncle ne sont pas suffisamment strictes pour assurer sa protection. La demanderesse explique que les paroisses de St. Lucy et de St. Andrew [traduction] « se voyagent bien » à partir de Bridgetown et qu’il serait facile pour son oncle de faire l’aller‑retour n’importe quand.

[29] La demanderesse soutient que, compte tenu de sa situation personnelle de mère célibataire de quatre enfants, le fait de devoir se réinstaller dans un nouvel endroit tout en se cachant de son oncle lui causerait des difficultés excessives. Le caractère rural des endroits proposés comme PRI par la SAR exacerberait les difficultés à trouver un logement et un emploi convenables, de sorte que les deux PRI sont déraisonnables.

[30] À mon avis, la demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau d’établir que, dans les circonstances, elle ne disposait pas de PRI raisonnables à St. Lucy ou à St. Andrew, à la Barbade. Dans ses motifs, la SAR a déclaré que l’existence de PRI ne pouvait être exclue, étant donné que tous les actes de préjudice subis par la demanderesse s’étaient produits au domicile familial ou à proximité de celui-ci. Même si la Barbade est une île relativement petite d’environ 430 km2, la SAR a affirmé que l’île n’était pas suffisamment petite pour que les endroits proposés comme PRI soient jugés dangereux ou déraisonnables. La SAR a également indiqué que la demanderesse n’avait subi aucun préjudice de la part de son oncle depuis 2002, qu’elle n’avait pas reçu de menaces de celui-ci depuis qu’il avait été incarcéré et que la preuve n’était pas suffisante pour conclure que son oncle avait les moyens et la motivation nécessaires pour la poursuivre dans les endroits proposés comme PRI. Pour ces motifs, la SAR a conclu que la demanderesse ne risquait pas sérieusement d’être persécutée ou d’être exposée à l’un des risques énoncés à l’article 97 de la LIPR dans les endroits proposés comme PRI. Les conclusions de la SAR sont raisonnables au regard de la preuve et des arguments qui lui ont été présentés.

[31] En ce qui concerne la question des difficultés, la SAR a reconnu que la recherche d’un logement et d’un emploi, tout comme d’autres facteurs sociaux, pouvaient constituer des difficultés, mais pas au point de rendre les PRI proposées déraisonnables. La SAR a pris note du fait que la demanderesse est une mère célibataire de quatre enfants, mais elle a aussi retenu des éléments jouant en sa faveur, notamment le fait qu’elle est instruite et qu’elle a déjà eu un emploi. Ces conclusions sont raisonnables dans le contexte de la présente affaire.

[32] À mon avis, la conclusion de la SAR au sujet des endroits désignés comme PRI est raisonnable. La demanderesse n’a pas réussi à démontrer qu’il serait objectivement déraisonnable pour elle de déménager à l’un des endroits proposés comme PRI. Le raisonnement de la SAR expliquant pourquoi la demanderesse disposait de PRI valables est intelligible, transparent et justifié (Vavilov, aux para 15, 98). Les conclusions de la SAR sur les PRI proposées sont factuelles et fondées sur les éléments de preuve et les arguments présentés par les parties. Je ne vois donc aucune raison d’intervenir.

VI. Conclusion

[33] La décision de la SAR est raisonnable. La SAR n’a pas commis d’erreur dans sa conclusion relative à l’admissibilité des nouveaux éléments de preuve et a évalué de façon raisonnable la protection offerte par l’État et l’existence de PRI viables.

[34] La demande de contrôle judiciaire de la demanderesse sera rejetée.

[35] Les parties n’ont proposé aucune question aux fins de certification, et je conclus que la présente affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-7951-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a pas de question à certifier.

« Guy Régimbald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-7951-22

INTITULÉ :

CHRISTINA MANDY BELLE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 SEPTEMBRE 2023

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RÉGIMBALD

DATE DES MOTIFS :

LE 22 SEPTEMBRE 2023

COMPARUTIONS :

Seyfi Sun

POUR LA DEMANDERESSE

Nicole Paduraru

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lewis & Associates LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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