Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20230920


Dossier : IMM-9235-22

Référence : 2023 CF 1254

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 20 septembre 2023

En présence de madame la juge Turley

ENTRE :

IGNACIO JR ORTIZ

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

I. Aperçu

[1] Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision de rejeter sa demande visant à parrainer son fils en tant qu’enfant à charge. Je rejette la demande parce que le demandeur n’a pas exercé son droit d’interjeter appel devant la Section d’appel de l’immigration [la SAI] en vertu du paragraphe 63(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. Conformément à l’alinéa 72(2)a) de la LIPR, la demande de contrôle judiciaire ne peut être présentée tant qu’un appel devant la SAI n’a pas été interjeté.

II. Analyse

[2] Dans une lettre datée du 18 juillet 2022, un agent d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [l’agent] a rejeté la demande de parrainage du demandeur parce que son fils ne répondait pas à la définition d’« enfant à charge » prévue dans le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés [le RIPR]. Lorsque le demandeur a déposé son engagement, en octobre 2020, son fils était âgé de 22 ans et subvenait financièrement à ses propres besoins. En conséquence, l’agent a conclu que le fils n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial au sens de l’alinéa 117(1)b) du RIPR et qu’il n’était pas admissible au parrainage.

[3] Même s’il a été informé du fait qu’il avait le droit d’interjeter appel de la décision de l’agent devant la SAI en vertu du paragraphe 63(1) de la LIPR, le demandeur ne l’a pas fait. Au lieu de cela, le demandeur a sollicité le contrôle judiciaire de la décision de l’agent pour des motifs liés à l’équité procédurale et au caractère raisonnable.

[4] Je conviens avec le défendeur que la présente demande doit être rejetée parce que le demandeur n’a pas exercé son droit d’interjeter appel en vertu de la LIPR. Le contrôle judiciaire est un recours de dernier ressort qui ne doit pas être entrepris tant que tous les recours administratifs disponibles n’ont pas été épuisés : Obazughanmwen c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2023 CAF 151 au para 51; Lin c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2021 CAF 81 au para 5; C.B. Powell Limited c Canada (Agence des services frontaliers), 2010 CAF 61 aux para 30-33.

[5] Dans la présente affaire, en tant que répondant d’un étranger au titre du regroupement familial, le demandeur avait le droit d’interjeter appel devant la SAI du refus, par l’agent, de délivrer un visa de résident permanent : LIPR, art 63(1). Aux termes de l’alinéa 72(2)a) de la LIPR, la demande de contrôle judiciaire « ne peut être présentée tant que les droits d’appel ne sont pas épuisés ».

[6] La jurisprudence est claire : le répondant doit exercer son droit d’appel conformément au paragraphe 63(1) avant de demander le contrôle judiciaire : Somodi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 288 [Somodi] aux para 21-23, 29; Watzke c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 323 aux para 6-7; Zheng c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 796 aux para 15-17; Landaeta c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 219 aux para 24, 27-28; Sadia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1011 au para 11.

[7] L’argument du demandeur selon lequel il ne pouvait pas interjeter appel devant la SAI parce que l’agent a conclu que son fils n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial n’est pas fondé. La Cour a rejeté ce même argument dans la décision Canada (Sécurité publique et Protection civile) c Martinez-Brito, 2012 CF 438 [Martinez-Brito].

[8] Dans cette affaire, le ministre avait contesté la compétence de la SAI d’instruire l’appel en se fondant sur la même jurisprudence que celle sur laquelle le demandeur s’appuie dans la présente demande : Martinez-Brito aux para 23-25, 33-35, 38-39. Après avoir analysé de manière exhaustive la législation et la jurisprudence, le juge Noël a jugé que la SAI avait compétence pour déterminer si l’agent des visas avait commis une erreur de droit ou de fait ou contrevenu à l’équité procédurale en concluant que l’étranger n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial : Martinez-Brito aux para 19-41.

[9] De plus, le demandeur a mal interprété la décision Samra c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 16129 [Samra], rendue par notre Cour. Cette décision n’appuie pas l’argument selon lequel la SAI n’a pas compétence pour déterminer si un étranger appartient à la catégorie du regroupement familial. Dans cette affaire, en fait, la SAI avait rejeté la demande de résidence permanente après avoir conclu que les demandeurs n’appartenaient pas à la catégorie du regroupement familial : Samra, au para 2; Martinez-Brito, au para 35. La question de la compétence a été invoquée parce que l’article 65 de la LIPR interdit à la SAI de prendre en considération les motifs d’ordre humanitaire une fois qu’il a été statué que l’étranger parrainé n’appartient pas à la catégorie du regroupement familial : Samra, au para 11; Martinez-Brito, aux para 27, 35.

[10] Conformément au paragraphe 67(1) de la LIPR, la SAI a la compétence requise pour examiner tous les arguments avancés par le demandeur dans le cadre de la présente demande, y compris le fait que l’agent n’aurait pas respecté le principe de la réunification familiale et que le processus décisionnel n’aurait pas été équitable. Comme la Cour l’a déclaré, il appartient à la SAI, et non à la Cour, de se prononcer sur la validité du parrainage : Manesh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 765 au para 43.

[11] Il convient de souligner que, pour faire valoir le bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire, le demandeur s’appuie sur la décision Vincent c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CanLII 84599 [Vincent] rendue par la SAI : mémoire des faits et du droit du demandeur, aux para 16, 26. Dans cette affaire, la SAI n’a pas conclu qu’elle n’avait pas compétence pour instruire l’appel interjeté par un répondant à l’encontre de la décision d’un agent de refuser de délivrer un visa de résident permanent. La SAI a conclu que la décision de l’agent des visas était valide en droit et qu’il n’y avait eu aucun manquement à l’équité procédurale lorsqu’elle avait conclu que le fils du répondant n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial : Vincent, aux para 17, 23-31. Cette décision mine davantage la position du demandeur selon laquelle la SAI n’avait pas compétence en l’espèce.

III. Conclusion

[12] Compte tenu de ce qui précède, la demande est rejetée parce que le demandeur n’a pas exercé son droit d’interjeter appel conformément au paragraphe 63(1) de la LIPR. Comme l’a exposé avec justesse le juge Martineau : « Les ressources précieuses de la Cour ne doivent pas être indûment sollicitées par une partie lorsqu’un autre recours est disponible et n’a pas été exercé » : Huot c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 180 au para 16.

[13] Les parties n’ont pas soulevé de question à certifier, et la présente affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-9235-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Anne M. Turley »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-9235-22

INTITULÉ :

IGNACIO JR ORTIZ c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR vidÉoconfÉrence

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 13 SEPTEMBRE 2023

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA JUGE TURLEY

DATE DES MOTIFS :

lE 20 SEPTEMBRE 2023

COMPARUTIONS :

Khatidja Moloo-Alam

POUR LE DEMANDEUR

Asha Gafar

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Green and Spiegel LLP

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.