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Date : 20230831


Dossier : T-1881-21

Référence : 2023 CF 1188

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 31 août 2023

En présence de madame la juge Fuhrer

ENTRE :

NORTH BREWING COMPANY LTD.

appelante

et

DLA PIPER (CANADA) S.E.N.C.R.L.

intimé

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La question qui se trouve au cœur de la présente affaire en est une épineuse et consiste à savoir dans quelle mesure l’usage, par le propriétaire, de variantes d’une marque de commerce enregistrée, peut être qualifié d’emploi, de manière à éviter au propriétaire (ou, plus précisément dans la présente affaire, à infirmer) l’annulation sommaire de l’enregistrement de la marque pour défaut d’emploi.

[2] La North Brewing Company Ltd. [NBCL] interjette appel de la décision du registraire des marques de commerce [le registraire] de radier du registre, en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 [la LMC], l’enregistrement de sa marque de commerce North Brewing. Les dispositions législatives applicables sont énoncées à l’annexe « A ».

[3] L’intimée, DLA Piper (Canada) S.E.N.C.R.L. [DLA], qui a engagé la procédure d’annulation sommaire, ne se prononce pas au sujet du présent appel.

[4] Après avoir examiné les éléments de preuve nouveaux et pertinents, ainsi que les arguments présentés par NBCL, je fais droit au présent appel. Pour les motifs qui suivent, la décision par laquelle le registraire radie la marque de commerce de North Brewing sera annulée. L’enregistrement de la marque sera quant à lui maintenu, mais modifié selon les modalités présentées ci-après.

II. Le contexte

[5] La marque de commerce « North Brewing » [la marque] a été enregistrée sous le numéro d’enregistrement LMC900498 le 8 avril 2015 pour le compte de NBCL, pour un emploi en liaison avec les produits suivants : 1) boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager, liqueur de malt, 2) articles promotionnels, nommément verres à bière, grandes tasses, ouvre‑bouteilles, chaînes porte-clés,vêtements, nommément, chemises, chapeaux, vestes et pantalons [les produits visés par l’enregistrement].

[6] À la demande de DLA, le registraire a émis à NBCL, conformément à l’article 45 de la LMC, un avis daté du 31 mai 2021 [l’avis prévu à l’article 45] par lequel il enjoint à l’appelante de lui fournir, dans un délai de trois mois, soit, pour chacun des produits visés par l’enregistrement, une preuve de l’emploi de la marque au cours des trois ans précédant la date de l’avis, c’est-à-dire entre le 31 mai 2018 et le 31 mai 2021 [la période pertinente], soit la date à laquelle NBCL a utilisé sa marque au Canada pour la dernière fois ainsi que la raison justifiant son défaut d’emploi depuis cette date.

[7] Selon l’affidavit souscrit par Peter Burbridge, président, directeur et actionnaire majoritaire de NBCL, à l’appui du présent appel, NBCL n’avait pas reçu l’avis prévu à l’article 45 émis en 2019 en raison d’un changement d’adresse qui n’aurait pas été consigné comme il se doit. Elle n’avait donc pas pu fournir au registraire les preuves qu’il demandait alors. NBCL agissait pour son propre compte devant le registraire des marques de commerce et avait omis de modifier son adresse avant qu’un avis prévu à l’article 45 ne lui soit transmis.

[8] Le 12 octobre 2021, le registraire a envoyé une lettre à l’ancienne adresse de NBCL afin d’informer cette dernière de sa décision de radier l’enregistrement de la marque [la décision], puisque NBCL n’avait pas donné suite à l’avis prévu à l’article 45. En vertu de l’article 56 de la LMC, NBCL pouvait néanmoins interjeter appel de cette décision dans les délais prescrits. Dans son affidavit, M. Burbridge explique que l’actuel occupant des anciens locaux de NBCL, qui connaît celle‑ci, a réacheminé la lettre du registraire à la nouvelle adresse de NBCL, qui a donc pu interjeter appel à temps.

III. La question en litige et la norme de contrôle

[9] Les questions qui sont soumises à notre Cour sont celles de savoir si les nouveaux éléments de preuve présentés par NBCL sont pertinents et, le cas échéant, s’ils démontrent que NBCL a bel et bien utilisé la marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement durant la période pertinente, en conséquence de quoi l’enregistrement devrait être maintenu.

[10] Une norme de contrôle en appel s’applique lorsque, comme en l’espèce, il existe un droit d’appel prévu par la loi : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 36‑37, citant Housen c Nikolaisen, 2002 CSC 33. Au départ, il faut déterminer si les nouveaux éléments de preuve auraient influencé sensiblement la décision du registraire : The Clorox Company of Canada, Ltd. c Chloretec s.e.c., 2020 CAF 76 [Clorox] au para 19; Caterpillar Inc. c Puma SE, 2021 CF 974 [Puma] au para 32, conf par 2023 CAF 4.

[11] Pour être jugés « pertinents », les nouveaux éléments de preuve doivent être suffisamment importants et avoir une valeur probante : Clorox, au para 21 [renvois omis]; Sea Tow Services International, Inc. c Trademark Factory International Inc., 2021 CF 550 au para 16; Vivo Mobile Communication Co., Ltd. c Garmin Switzerland GmbH, 2022 CF 1410 au para 18. Le critère ne consiste pas à déterminer si les nouveaux éléments de preuve auraient conduit le registraire à changer d’avis, mais plutôt s’ils auraient pu influer sur sa décision : Papiers Scott Limitée c Georgia-Pacific Consumer Products LP, 2010 CF 478 au para 49. À cet égard, le critère en est un de qualité, et non de quantité : Vivat Holdings Ltd c Levi Strauss & Co, 2005 CF 707 au para 27.

[12] En vertu du paragraphe 56(5) de la LMC, la Cour peut, lorsqu’elle conclut à la pertinence de la preuve, « exercer toute discrétion dont le registraire est investi ». Autrement dit, la Cour n’a pas à s’en remettre au raisonnement du décideur; en entreprenant sa propre analyse, la Cour peut décider si elle est d’accord avec les conclusions du décideur ou si elle y substituera sa propre conclusion : Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 au para 50; Clorox, précité, au para 21.

[13] En somme, je dois apprécier la nature, l’importance, la valeur probante et la fiabilité de la nouvelle preuve de NBCL, dans le contexte du dossier, et déterminer si cette preuve ajoute un élément « important » et, par conséquent, si elle aurait influencé sensiblement la décision du registraire : Seara Alimentos Ltda c Amira Enterprises Inc., 2019 CAF 63 aux para 23-26 [Seara]. En d’autres termes, les éléments de preuve auraient‑ils amélioré ou autrement clarifié le dossier d’une manière qui aurait pu avoir une incidence sur les conclusions de fait tirées par le registraire ou sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire s’ils avaient été à sa disposition au moment de la décision?

[14] En outre, l’admission de nouveaux éléments de preuve en appel n’aboutit pas automatiquement à la répudiation des conclusions du registraire sur chaque question en litige, mais bien sur les seules questions visées par ces nouveaux éléments : Seara, précité, au para 22. Cela étant dit, en l’espèce, le registraire n’a tiré aucune conclusion de fait qui soit pertinente au présent appel compte tenu du défaut de NBCL de répondre à l’avis prévu à l’article 45.

IV. Les nouveaux éléments de preuve

[15] Dans son affidavit, M. Burbridge affirme que NBCL a été constituée sous le régime des lois de la Nouvelle-Écosse le 22 juillet 2011, et qu’il en est le président depuis ce jour.

[16] Il indique que NBCL est installée dans ses locaux actuels depuis 2019 et qu’elle y exploite une microbrasserie, une boutique de détail et un bar. Il précise que, depuis 2018, NBCL exploite également une microbrasserie et une boutique de détail situées dans une brasserie en plein air connue sous le nom de Battery Park.

[17] Toujours selon l’affidavit de M. Burbridge, au cours de la période pertinente, NBCL vendait à sa clientèle au Canada, en ligne et en boutique, les produits suivants : boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager, et articles promotionnels, nommément verres à bière, grandes tasses, ouvre-bouteilles, chaînes porte-clés et vêtements, nommément chandails et chapeaux. Dans les observations écrites fournies par NBCL, il est admis qu’aucun élément de preuve ne concerne la liqueur de malt, les pantalons et les vestes, de sorte que ces produits spécifiques devraient être supprimés de l’enregistrement.

[18] D’après M. Burbridge, NBCL vendait ses boissons alcoolisées brassées par l’entremise de la Société des alcools de la Nouvelle-Écosse ainsi que dans des bars et des restaurants, en plus de ses propres boutiques, de son bar et de sa boutique en ligne.

[19] M. Burbridge ajoute que NBCL vendait des articles promotionnels dans ses boutiques physiques et en ligne ou alors les distribuait gratuitement à sa clientèle.

[20] Les pièces accompagnant l’affidavit comprennent des photos des canettes de NBCL qui, soutient M. Burbridge, mettent bien en évidence la marque de commerce. M. Burbridge affirme que des clients ont acheté ces produits au cours de la période pertinente. Il soutient également que les photos représentent bien la façon dont la marque figurait sur chaque canette de bière, d’ale et de lager vendue par NBCL au cours de la période pertinente. Il ajoute que plus de 5 000 canettes arborant la marque ont été vendues durant la période pertinente, mais que ce nombre a été sous-estimé à des fins de confidentialité.

[21] Dans le même esprit, M. Burbridge a également fourni des photos illustrant la façon dont la marque était représentée, au cours de la période pertinente, 1) sur les boîtes dans lesquelles NBCL expédiait ses caisses de canettes de boissons alcoolisées brassées, 2) sur les verres à bière et les grandes tasses que NBCL utilisait pour servir la clientèle sur place, 3) sur les articles promotionnels vendus ou distribués gratuitement, 4) sur les reçus d’achat, 5) sur le site Web de NBCL, 6) sur les panneaux surmontant la porte d’entrée que franchissait la clientèle des points de vente et du bar de NBCL ainsi que 7) sur les écriteaux utilisés lors d’événements.

V. Analyse

[22] Je suis convaincue que le présent appel doit être accueilli et la décision annulée. J’examinerai les questions en litige une à une.

A. Les nouveaux éléments de preuve de NBCL sont pertinents

[23] Comme NBCL n’avait pas donné suite à l’avis prévu à l’article 45, j’estime que l’affidavit de M. Burbridge, qui décrit l’emploi de la marque par NBCL au cours de la période pertinente, aurait sensiblement influencé la décision du registraire des marques de commerce s’il lui avait été présenté : Clorox, précité, au para 19; Puma, précitée, au para 32; Randy River Inc. c Osler, Hoskin & Harcourt LLP, 2022 CF 1015 [Randy River] au para 9.

[24] De plus, la Cour peut admettre de nouveaux éléments de preuve en appel et les examiner, même dans les cas comme celui de l’espèce, où aucune preuve n’avait été remise au registraire : Roebuck v Canada (Registrar of Trade Marks) (1987), 15 CPR (3d) 113, 1987 CarswellNat 629 (CF 1re inst) aux para 3, 16; Trademark Tools Inc. c Miller Thomson LLP, 2016 CF 971 au para 8, conf par 2017 CAF 98.

[25] Par conséquent, conformément au paragraphe 56(5) de la LMC, la Cour peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi et donc, se substituer à lui.

[26] J’ajouterai que l’abstention de DLA de se prononcer sur le présent appel ne délivre pas NBCL du fardeau qui lui incombe de convaincre la Cour de la pertinence de la preuve qui sous‑tend l’appel de la décision ainsi que de l’emploi avéré de la marque au Canada pendant la période pertinente, pas plus qu’elle n’allège ce fardeau. À mon avis, la décision rendue dans l’affaire Randy River va dans le même sens. La première question étant résolue, penchons-nous sur la seconde.

B. NBCL a employé la marque au cours de la période pertinente

[27] Après examen de l’affidavit de M. Burbridge, je conclus que NBCL a employé la marque au cours de la période pertinente pour au moins une partie des produits visés par l’enregistrement, même si l’on exclut la liqueur de malt, les pantalons et les vestes, pour lesquels NBCL a reconnu n’avoir aucune preuve d’emploi de la marque. Examinons les principes applicables, puis passons à l’analyse de la marque telle qu’elle est employée et de ses variantes présentées dans la preuve de NBCL.

(1) Les principes applicables

[28] La procédure d’annulation prévue à l’article 45 de la LMC est de nature sommaire et vise à débarrasser le registre des marques de commerce tombées en désuétude. Pour maintenir son enregistrement, le propriétaire d’une marque doit alléguer des faits qui témoignent de l’emploi de celle-ci et ne pas se contenter de simples allégations d’emploi. La surenchère de preuves n’est pas nécessaire, et chaque exemple d’emploi n’a pas à être prouvé. Le critère de preuve d’une procédure amorcée au titre de l’article 45 est faible ou « peu rigoureux ». Ces principes sont résumés dans la décision Swabey Ogilvy Renault c Vêtements Golden Brand (Canada) Ltée, 2002 CFPI 458 au para 7, ainsi que dans plusieurs autres décisions relatives à l’article 45, dont l’arrêt Miller Thomson S.E.N.C.R.L., s.r.l. c Hilton Worldwide Holding LLP, 2020 CAF 134 [Hilton Worldwide] au para 9.

[29] Conformément au paragraphe 4(1) de la LMC, « une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits s’il est prouvé que le propriétaire inscrit ou sa licenciée a vendu les produits visés au Canada au cours de la période pertinente et que la marque était apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si la marque est, de toute autre manière, liée aux produits au moment de la vente » : Randy River, précitée, au para 10.

[30] Lorsque, comme en l’espèce, le propriétaire d’une marque donne des exemples d’emploi de variantes qui diffèrent de la marque enregistrée, la Cour doit examiner la mesure dans laquelle ces variantes constituent néanmoins un emploi de la marque enregistrée.

[31] Lorsqu’une marque de commerce n’est enregistrée que sous la forme de mots, le propriétaire peut l’employer dans la taille, le style de lettres, la couleur ou le motif de son choix : Masterpiece Inc. c Alavida Lifestyles Inc., 2011 RCS 27 [Masterpiece] au para 55. Dans cet arrêt, le juge Rothstein donne en exemple la portée de l’enregistrement de la marque « Masterpiece Living » pour illustrer cette proposition. À son avis, rien n’empêcherait le propriétaire de la marque de mettre en relief le mot « Masterpiece » et de donner au mot « Living » moins d’importance, ou encore d’en modifier la typographie : Masterpiece, précité, au para 58. Toutefois, lorsqu’elle a analysé la possibilité de confusion dans cette affaire, la Cour suprême du Canada ne s’est pas prononcée sur l’ajout de nouveaux éléments à la marque enregistrée, lequel aurait, comme en l’espèce, donné naissance à une marque composite.

[32] Dans l’arrêt de principe Registraire des marques de commerce c CII Honeywell Bull, 1985 CanLII 5537 (CAF), [1985] 1 CF 406 [Honeywell], la Cour d’appel fédérale devait déterminer si la combinaison des mots CII, HONEYWELL et BULL en la marque composite CII HONEYWELL BULL représentait un emploi valable de la marque enregistrée BULL. Elle a conclu par la négative.

[33] Le critère issu de Honeywell, abondamment cité, est expliqué comme suit (à la p 409) :

Le critère pratique qu’il faut appliquer pour résoudre un cas de cette nature consiste à comparer la marque de commerce enregistrée et la marque de commerce employée et à déterminer si les distinctions existant entre ces deux marques sont à ce point minimes qu’un acheteur non averti conclurait, selon toute probabilité, qu’elles identifient toutes deux, malgré leurs différences, des marchandises ayant la même origine.

[Non souligné dans l’original.]

[34] Je suis toutefois d’avis que le passage souligné est en contradiction avec le début du paragraphe de même qu’avec la conclusion subséquente. Le juge Pratt, au nom de la Cour, amorce le paragraphe portant sur le critère en ces termes (aux p 408‑409) :

Il ne s’agit pas de déterminer si CII a trompé le public quant à l’origine de ses marchandises. Elle ne l’a manifestement pas fait. La seule et véritable question qui se pose consiste à se demander si, en identifiant ses marchandises comme elle l’a fait, CII a employé sa marque de commerce « Bull ». Il faut répondre non à cette question sauf si la marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les distinctions existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée.

[Non souligné dans l’original.]

[35] La Cour conclut ainsi (à la p 409) :

Si on considère le problème sous cet angle et qu’on applique ce critère, nous ne pouvons que conclure qu’en employant la marque composite « CII Honeywell Bull » CII n’a pas employé sa marque « Bull ».

[36] La Cour d’appel fédérale a ensuite tenté de concilier les différentes descriptions que fait le juge Pratte du critère, notamment dans un autre arrêt de principe en lien avec l’article 45, Promafil Canada Ltée c Munsingwear, Inc., 1992 CanLII 12831 (CAF) 44 CPR (3d) 59 [Promafil] à la p 66 :

Le juge Pratte a formulé le même critère de deux façons : sur le plan théorique, en considérant le maintien de l’identité et du caractère reconnaissable de la marque bien qu’elle revête des formes différentes; sur le plan pratique, en appréciant la confusion probable créée chez l’acheteur non averti. Ce critère pratique doit manifestement viser une probabilité puisque, en règle générale, on ne peut énoncer un tel critère de façon à exiger la certitude d’une conclusion.

[37] Dans l’arrêt Promafil, la Cour a conclu à la validité des critères dégagés dans Honeywell, précisant toutefois « [qu’]on ne doit pas conclure qu’ils ferment la porte à d’autres façons d’exprimer la même chose » (à la p 66).

[38] Compte tenu des circonstances soumises à la Cour dans l’affaire Honeywell et selon l’application que fait la Cour du double critère, je suis d’avis que celui-ci doit être divisé en deux volets, qu’ils soient théoriques ou pratiques, tous deux axés sur les différences qui existent entre la forme sous laquelle la marque a été enregistrée et celle sous laquelle la marque est employée. Le premier volet consisterait à examiner si les différences entre les versions de la marque en cause sont susceptibles de tromper le public quant à l’origine des produits (ou des services) visés. En d’autres termes, il s’agit de déterminer si les différences aboutissent à des versions si éloignées l’une de l’autre qu’il ne fait aucun doute que la marque enregistrée n’est plus utilisée et que la version utilisée est susceptible de tromper le public quant à l’origine des produits ou des services qui y sont liés.

[39] S’il est établi que la probabilité de tromper le public est nulle, le second volet consisterait alors à déterminer si « la marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les distinctions existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée ». Voilà qui me paraît logique, puisque l’article 45 vise à débarrasser le registre du « bois mort », à savoir les marques tombées en désuétude. L’analyse du second volet du critère doit prendre pour prémisse la conclusion formulée dans l’arrêt Honeywell, soit que la marque composite CII HONEYWELL BULL menait à une perte de l’identité de la marque enregistrée BULL, qui n’était alors plus reconnaissable. Il ne faisait aucun doute, dans cette affaire, que la marque n’était pas susceptible de tromper le public quant à l’origine des produits visés.

[40] J’ajouterai que, dans l’arrêt Promafil, la Cour fait référence non seulement au « maintien de l’identité et du caractère reconnaissable de la marque », mais aussi à la « conservation de ses traits dominants » (à la p 70). Insistant sur ce dernier point, la Cour a conclu que les deux images de pingouin en cause présentaient des différences « insignifiantes » et que le pingouin corpulent « [était] une simple modification du pingouin maigre puisqu’il préserve les mêmes traits dominants », constituant en réalité un « deuxième dessin presque identique » : Promafil, précitée, aux p 70‑71.

[41] Je souligne également que les deux images de pingouin étaient utilisées simultanément, ce qui, à mon avis, permet de contextualiser encore davantage la citation souvent reprise de l’arrêt Promafil, à savoir que « la loi canadienne n’a pas une optique linéaire de l’enregistrement d’une marque de commerce et peut en tolérer des variantes multiples » (à la p 71) (non souligné dans l’original).

[42] La Cour réitère également que « le propriétaire joue avec le feu chaque fois qu’il utilise une nouvelle variante. […] Mais des modifications prudentes peuvent être apportées sans conséquences fâcheuses si les mêmes traits dominants sont préservés et si les différences sont si insignifiantes qu’elles ne trompent pas l’acheteur non averti » (à la p 71).

[43] Les questions de savoir quels sont les éléments qui constituent les traits dominants d’une marque et si les différences que présente la marque de commerce employée sont à ce point mineures que l’on peut conclure à l’emploi de la marque enregistrée sont des questions de fait qui doivent être tranchées au cas par cas : Padcon Ltd. c Gowling Lafleur Henderson S.E.N.C.R.L., s.r.l., 2015 CF 943 au para 108; Fasken Martineau Dumoulin LLP c Gentec, 2022 CF 327 au para 89, citant Robichaud c Clio/Oz Division of Mainline Fashions Inc, 2015 COMC 210 au para 27.

[44] En gardant à l’esprit les principes énoncés ci-dessus, j’examinerai la preuve de NBCL quant à l’emploi de la marque et des variantes présentées dans l’affidavit de M. Burbridge.

(2) La marque et les variantes employées par NBCL

[45] Pour les motifs qui suivent, je conclus que la preuve présentée par NBCL témoigne d’un emploi suffisant de la marque enregistrée, de sorte que l’enregistrement peut être maintenu en liaison avec les boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager, et les articles promotionnels, nommément grandes tasses et chaînes porte-clés, mais pas en liaison avec les autres articles promotionnels.

[46] Sur la base de l’affidavit de M. Burbridge, je conclus qu’il ne fait aucun doute que l’emploi démontré de la marque, y compris de ses variantes, a eu lieu au cours de la période pertinente. Il convient toutefois de déterminer si les variantes figurant dans la preuve de NBCL présentent les mêmes traits dominants que la marque et si les différences sont si insignifiantes qu’elles ne trompent pas l’acheteur non averti.

[47] L’affidavit de M. Burbridge confirme qu’il est dans la pratique normale du commerce de NBCL de vendre ses produits directement à la clientèle dans ses points de vente physiques et en ligne à des fins de consommation hors établissement, à la Société des alcools de la Nouvelle‑Écosse, à des restaurants et à des bars, et directement à la clientèle pour consommation sur place dans le bar de NBCL. J’insiste néanmoins sur le fait que la marque n’est pas enregistrée en liaison avec quelque service que ce soit.

[48] Les pièces accompagnant l’affidavit de M. Burbridge comprennent des photos des produits visés par l’enregistrement ou de leur emballage sur lesquels NBCL allègue avoir utilisé la marque, à savoir des canettes de boissons alcoolisées brassées, les boîtes dans lesquelles celles-ci sont vendues et expédiées, les verres et les grandes tasses que NBCL utilise pour servir la clientèle sur place ainsi que des chandails, chapeaux, grandes tasses, ouvre-bouteilles et chaînes porte-clés. M. Burbridge n’a pas précisé le montant des recettes tirées de la vente de ces produits, mais a indiqué le nombre estimatif d’articles vendus ou distribués gratuitement. Le tableau de l’annexe B présente bon nombre d’exemples de l’emploi de la marque allégué par NBCL au cours de la période pertinente (d’après l’affidavit de M. Burbridge et les pièces connexes).

[49] Comme on peut le constater dans le tableau, plusieurs des emplois allégués portent en fait sur des variantes de la marque. Tout d’abord, en ce qui concerne les produits visés par l’enregistrement « boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager », plusieurs raisons me portent à conclure que l’affidavit de M. Burbridge démontre l’emploi de la marque en liaison avec ces produits au cours de la période pertinente.

[50] M. Burbridge soutient que plus de 100 boîtes de boissons alcoolisées brassées, nommément d’ale, ont été expédiées à la Société des alcools de la Nouvelle-Écosse. Elles arboraient toutes la marque suivante :

[51] Même si les mots NORTH BREWING qui, écrits en lettres majuscules ou minuscules, composent la marque sont accompagnés du mot COMPANY, j’estime que cet ajout est mineur ou sans conséquence sur le trait dominant, c’est-à-dire les mots « North Brewing », qui est maintenu : Fairweather Ltd. c Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 1248 aux para 57‑61; Conduit Law Professional Corp c Great Western Brewing Co, 2021 COMC 182 aux para 18‑20. Selon les instructions données par la Cour suprême dans l’arrêt Masterpiece (aux para 55 et 58), toute variation de style est acceptable dans la présentation d’un mot servant de marque.

[52] M. Burbridge soutient également que les boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager, que NBCL servait à sa clientèle pour consommation sur place, dans son bar et dans celui de Battery Park, étaient servies dans des grandes tasses et des verres comme ceux-ci :

[53] Quant à la grande tasse sur la gauche, j’estime que les images de verres remplis en tout ou en partie d’une boisson jaune (comme l’est la bière) constituent un ajout descriptif à la marque en lien avec les boissons alcoolisées brassées. Autrement dit, je suis d’avis que le fait de remettre à un client la bière qu’il a commandée dans un contenant comme ceux donnés en exemple dans le cadre de la pratique courante du commerce de NBCL constitue un emploi de la marque durant la période pertinente. Je souligne néanmoins que j’aurais pu arriver à la conclusion inverse si la preuve avait démontré la vente de boissons alcoolisées brassées d’un tiers. Toutefois, selon la preuve présentée, NBCL est une brasserie qui vend ses propres boissons, qu’elles soient vendues en canette ou servies pour consommation sur place, dans des verres comme ceux présentés ci-dessus : Lapointe Rosenstein Marchand Melançon LLP c American Dairy Queen Corporation, 2014 COMC 185 [Lapointe] au para 28.

[54] Puisque M. Burbridge explique dans son affidavit que la grande tasse sur la gauche (représentée au paragraphe 52) a été vendue et distribuée gratuitement au cours de la période pertinente, je conclus que la marque a été employée en liaison avec les produits visés par l’enregistrement, à savoir les « articles promotionnels, nommément […] grandes tasses ». L’affidavit est toutefois muet quant à la vente ou à la distribution gratuite du verre sur la droite.

[55] Dans son affidavit, M. Burbridge décrit également l’enseigne extérieure des locaux de NBCL, y compris le bar de la rue Portland, qui arbore les mots NORTH BREWING CO. disposés à l’horizontale sur une ligne ou sur deux lignes(voir la ligne 8 du tableau de l’annexe B). Une enseigne extérieure peut suffire à créer l’association requise entre la marque qu’elle arbore et la nourriture qui est servie en ces lieux (ou, dois-je préciser, les boissons alcoolisées brassées dans le cas d’une brasserie) : Lapointe, précitée, au para 28; Goudreau, Gage, Dubuc & Martineau Walker c Cinnabon Inc, [1997] COMC no 264 au para 6. À la lumière de ma précédente conclusion selon laquelle l’ajout du mot COMPANY (ou CO. dans les présents exemples) constitue une modification mineure ou sans conséquence, je juge que les exemples ci‑dessus sont une preuve de l’emploi de la marque par NBCL au cours de la période pertinente.

[56] M. Burbridge renvoie également au site Web de NBCL, sur lequel la clientèle pouvait se procurer des boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager, ce qu’elle faisait effectivement. Les pages archivées de ce site Web présentent un affichage semblable à celui décrit dans le paragraphe précédent (voir la ligne 6 du tableau de l’annexe B). De plus, M. Burbridge affirme qu’au cours de la période pertinente, chaque page Web était coiffée de l’image ci-dessous, que pouvaient apercevoir tous les clients les visitant en vue de commander des boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager :

[57] Je ne constate aucune différence substantielle entre la variante de la marque ci-dessus et celle figurant sur la grande tasse présentée précédemment. Dans les deux cas, les mots NORTH BREWING sont représentés de façon proéminente en tant qu’élément principal ou dominant. Je conclus donc que les exemples examinés au paragraphe 56 témoignent eux aussi en faveur d’un maintien de l’enregistrement en liaison avec les boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager, au cours de la période pertinente : Kirby Eades Gale Baker c Endress+Hauser Group Services AG, 2021 COMC 284 au para 24.

[58] Pour des motifs similaires, je conclus que la preuve de NBCL démontrant l’emploi des mots NORTH BREWING CO. (ou COMPANY), accompagnés ou non de verres de bière remplis en tout ou en partie, sur des ouvre-bouteilles, des chaînes porte-clés et des chapeaux au cours de la période pertinente suffit à justifier le maintien de l’enregistrement en liaison avec ces produits. Ma conclusion à l’égard des chapeaux repose uniquement sur le logo qu’arbore le chapeau de droite présenté à la ligne 12 du tableau de l’annexe B. Je discuterai du logo sur le chapeau de gauche dans les paragraphes qui suivent.

[59] J’ai quelques réserves relativement aux logos ci-dessous, apposés sur des canettes de boissons alcoolisées brassées et les reçus d’achat connexes (qui, selon M. Burbridge, accompagnent les produits) ainsi que sur des verres de bière, des chandails et certains chapeaux :

[60] À mon avis, ces logos représentent plus qu’un simple ajout d’un élément simplement descriptif ou mineur, comme le mot COMPANY ou CO. Ils correspondent plutôt à une marque composite formée d’un élément graphique important : Likörfabrik c Registraire des marques de commerce, 1997 CanLII 4743 (CF). Par ailleurs, tout comme dans l’affaire Honeywell, il est peu probable que ces logos soient susceptibles de tromper le public quant à l’origine des produits qui y sont liés.

[61] Par contre, j’estime que les mots NORTH BREWING ne constituent pas, à eux seuls, le trait dominant de la marque telle que présentée dans ces logos. Ils sont plutôt intégrés à ces derniers, dont le trait dominant est le mot NORTH placé dans un ovale superposé à un élément graphique dominant représentant une boussole ou une étoile stylisée. Les logos en cause en l’espèce me semblent similaires aux trois dessins que notre Cour a examinés dans l’affaire Universal Protein Supplements Corporation c H Young (Operations) Limited, 2018 CF 1261 [Universal Protein]. Au paragraphe 59, elle conclut que les dessins donnent à penser que la marque enregistrée ANIMAL, dans la représentation graphique qui en est faite, a été amalgamée en une marque composite de telle sorte qu’elle n’en est plus le trait dominant.

[62] Pour paraphraser le juge Roy, de même, nul ne sait de quelle façon la caractéristique dominante de la marque est préservée dans les logos ci-dessus, et NBCL n’a offert aucune justification à cet égard. À mon avis, nous ne sommes pas devant un cas où, à l’instar de l’affaire Brouillette & Associés c Constellation Brands US Operations, Inc., 2016 COMC 159, « du fait de sa taille et de sa couleur contrastante, la Marque verbale se démarque des autres éléments nominaux et figuratifs » et conserverait ainsi son identité propre (au para 14). Je crois que cette conclusion s’applique particulièrement au logo central dépeint au paragraphe 59, dans lequel les mots BREWING et COMPANY sont présentés isolément du mot NORTH accolé au dessin d’étoile ou de boussole, et dans une autre couleur. Ces logos me semblent beaucoup plus chargés que le logo reconnu figurant sur le chapeau à la ligne 12 de l’annexe B. Qui plus est, l’élément qui ressort de ces logos – leur trait dominant – est le dessin d’étoile ou de boussole auquel se superpose le mot NORTH placé dans un ovale : Universal Protein, précitée, aux para 58-59.

[63] L’un des chandails présentés à la ligne 11 de l’annexe B arbore une image de licorne, où les mots NORTH BREWING COMPANY apparaissent en surimpression dans un nuage placé sous la licorne. À mon avis, ce logo composite souffre des mêmes failles que celles mentionnées au paragraphe 61, c’est-à-dire que les mots NORTH BREWING n’en constituent pas le trait dominant.

[64] En plus du logo en noir et blanc présenté au paragraphe 59 (celui de droite), les mots « North Brewing Company » figurent sur les reçus d’achat, en caractères gras placés au-dessus de l’adresse et du numéro de téléphone de NBCL. À mon avis, cet exemple correspond parfaitement à un emploi du nom commercial tel que décrit dans la décision 88766 Canada Inc c Phillips, 2008 CarswellNat 2206 (COMC) au para 19, cité dans la décision Hortilux Schreder B.V. c Iwasaki Electric Co. Ltd., 2011 CF 967 au para 62, conf par 2012 CAF 321.

VI. Conclusion

[65] Pour les motifs qui précèdent, je conclus que, par la preuve qu’elle a présentée, NBCL a démontré l’emploi de la marque dans sa pratique courante du commerce en liaison avec les boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager, ainsi qu’avec les articles promotionnels, nommément grandes tasses, ouvre-bouteilles, chaînes porte-clés et vêtements, nommément chapeaux, au cours de la période pertinente. La marque ne s’apparente donc pas à du « bois mort » : Hilton Worldwide, précité, au para 9.

[66] Par conséquent, le présent appel est accueilli. La décision du registraire datée du 12 octobre 2021 est annulée. L’enregistrement est maintenu au registre en liaison avec les boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale et lager, ainsi qu’avec les articles promotionnels, nommément grandes tasses, ouvre-bouteilles, chaînes porte-clés et vêtements, nommément chapeaux. Par souci de clarté, les produits spécifiques suivants seront supprimés de l’enregistrement : liqueur de malt, verres à bière, chandails, pantalons et vestes.


JUGEMENT dans le dossier T-1881-21

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. L’appel de l’appelante est accueilli en partie.

  2. La décision du registraire des marques de commerce datée du 12 octobre 2021 est annulée.

  3. L’enregistrement numéro LMC900498 de la marque North Brewing est maintenu pour les produits suivants : 1) Boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager; 2) articles promotionnels, nommément grandes tasses, ouvre-bouteilles, chaînes porte-clés, vêtements, nommément chapeaux.

  4. L’enregistrement numéro LMC900498 est modifié de manière à supprimer les produits spécifiques suivants : liqueur de malt, verres à bière, chandails, vestes et pantalons.

« Janet M. Fuhrer »

Juge

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer


Annexe A : Dispositions applicables

Loi sur les marques de commerce (LRC 1985, c T-13)

Trademarks Act (R.S.C., 1985, c. T-13)

Quand une marque de commerce est réputée employée

When deemed to be used

4 (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4 (1) A trademark is deemed to be used in association with goods if, at the time of the transfer of the property in or possession of the goods, in the normal course of trade, it is marked on the goods themselves or on the packages in which they are distributed or it is in any other manner so associated with the goods that notice of the association is then given to the person to whom the property or possession is transferred.

Le registraire peut exiger une preuve d’emploi

Registrar may request evidence of use

45 (1) Après trois années à compter de la date d’enregistrement d’une marque de commerce, sur demande écrite présentée par une personne qui verse les droits prescrits, le registraire donne au propriétaire inscrit, à moins qu’il ne voie une raison valable à l’effet contraire, un avis lui enjoignant de fournir, dans les trois mois, un affidavit ou une déclaration solennelle indiquant, à l’égard de chacun des produits ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement ou que l’avis peut spécifier, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier et la raison pour laquelle elle ne l’a pas été depuis cette date. Il peut cependant, après trois années à compter de la date de l’enregistrement, donner l’avis de sa propre initiative.

45 (1) After three years beginning on the day on which a trademark is registered, unless the Registrar sees good reason to the contrary, the Registrar shall, at the written request of any person who pays the prescribed fee — or may, on his or her own initiative — give notice to the registered owner of the trademark requiring the registered owner to furnish within three months an affidavit or a statutory declaration showing, with respect to all the goods or services specified in the registration or to those that may be specified in the notice, whether the trademark was in use in Canada at any time during the three-year period immediately preceding the date of the notice and, if not, the date when it was last so in use and the reason for the absence of such use since that date.

Effet du non-usage

Effect of non-use

(3) Lorsqu’il apparaît au registraire, en raison de la preuve qui lui est fournie ou du défaut de fournir une telle preuve, que la marque de commerce, soit à l’égard de la totalité des produits ou services spécifiés dans l’enregistrement, soit à l’égard de l’un de ces produits ou de l’un de ces services, n’a été employée au Canada à aucun moment au cours des trois ans précédant la date de l’avis et que le défaut d’emploi n’a pas été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l’enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de radiation ou de modification en conséquence.

(3) Where, by reason of the evidence furnished to the Registrar or the failure to furnish any evidence, it appears to the Registrar that a trademark, either with respect to all of the goods or services specified in the registration or with respect to any of those goods or services, was not used in Canada at any time during the three year period immediately preceding the date of the notice and that the absence of use has not been due to special circumstances that excuse the absence of use, the registration of the trademark is liable to be expunged or amended accordingly.

Avis au propriétaire

Notice to owner

(4) Lorsque le registraire décide ou non de radier ou de modifier l’enregistrement de la marque de commerce, il notifie sa décision, avec les motifs pertinents, au propriétaire inscrit de la marque de commerce et à la personne à la demande de qui l’avis visé au paragraphe (1) a été donné.

(4) When the Registrar reaches a decision whether or not the registration of a trademark ought to be expunged or amended, he shall give notice of his decision with the reasons therefor to the registered owner of the trademark and to the person at whose request the notice referred to in subsection (1) was given.

Mesures à prendre par le registraire

Action by Registrar

(5) Le registraire agit en conformité avec sa décision si aucun appel n’en est interjeté dans le délai prévu par la présente loi ou, si un appel est interjeté, il agit en conformité avec le jugement définitif rendu dans cet appel.

(5) The Registrar shall act in accordance with his decision if no appeal therefrom is taken within the time limited by this Act or, if an appeal is taken, shall act in accordance with the final judgment given in the appeal.

Appel

Appeal

56 (1) Appel de toute décision rendue par le registraire, sous le régime de la présente loi, peut être interjeté à la Cour fédérale dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l’avis de la décision ou dans tel délai supplémentaire accordé par le tribunal, soit avant, soit après l’expiration des deux mois.

56 (1) An appeal lies to the Federal Court from any decision of the Registrar under this Act within two months from the date on which notice of the decision was dispatched by the Registrar or within such further time as the Court may allow, either before or after the expiration of the two months.

Preuve additionnelle

Additional evidence

(5) Lors de l’appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi.

(5) On an appeal under subsection (1), evidence in addition to that adduced before the Registrar may be adduced and the Federal Court may exercise any discretion vested in the Registrar.


Annexe B : Exemples des emplois allégués de la marque

Exemples

Produits visés par l’enregistrement

1.

(sur la photo d’une canette – pièce PB‑7)

boissons alcoolisées brassées, nommément bière

2.

(sur la photo d’une canette – pièce PB‑8)

boissons alcoolisées brassées, nommément ale

3.

(sur la photo d’une canette – pièce PB‑9)

boissons alcoolisées brassées, nommément lager

4.

(sur la photo de boîtes de canettes vendues et expédiées à la Société des alcools de la Nouvelle-Écosse – pièce PB‑11)

boissons alcoolisées brassées, nommément ale

5.

(sur les photos de verres de bières et de grandes tasses dans lesquels NBCL sert ses boissons à la clientèle sur place – pièces PB‑12 et PB‑12a)

boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager

6.

(sur des captures d’écran de la page d’accueil de la version archivée du site Web récupérée par l’entremise du site Wayback Machine [site d’archives] – pièce PB‑14)

boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager

7.

(selon la description de l’affidavit de M. Burbridge [au para 66], image coiffant les pages du site Web que la clientèle pouvait voir au moment de commander des boissons alcoolisées brassées sur le site Web)

boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager

8.

(enseigne extérieure des boutiques des rues Portland et Ochterloney, à Halifax, en Nouvelle‑Écosse – pièces PB‑5 et PB-6)

boissons alcoolisées brassées, nommément bière, ale, lager

9.

(comme le montre la pièce PB‑17)

articles promotionnels, nommément, ouvre-bouteilles

10.

(comme le montre la pièce PB‑18)

articles promotionnels, nommément, chaînes porte‑clés

11.

(comme le montre la pièce PB‑19)

vêtements, nommément chandails

12.

(comme le montre la pièce PB‑20)

vêtements, nommément chapeaux


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1881-21

 

INTITULÉ :

NORTH BREWING COMPANY LTD. c DLA PIPER (CANADA) S.E.N.C.R.L.

 

REQUÊTE PRÉSENTÉE PAR ÉCRIT EXAMINÉE À OTTAWA (ONTARIO), CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE FUHRER

 

DATE DES MOTIFS :

Le 31 août 2023

 

COMPARUTIONS :

Bayo Odutola

Julie Daet

 

POUR L’APPELANTE

 

Sangeetha Punniyamoorthy

Christina Mihalceanu

 

POUR L’INTIMÉ

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bayo Odutola

Julie Daet

OLLIP P.C.

Ottawa (Ontario)

 

POUR L’APPELANTE

 

DLA Piper (Canada) S.E.N.C.R.L.

Toronto (Ontario)

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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