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     T-918-88

Entre :

     JOE PAL,

     demandeur,

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE RICHARD

     Il s'agit d'un appel de l'ordonnance en date du 12 mai 1997 par laquelle le protonotaire a rejeté l'appel de l'appelant (demandeur) pour défaut de poursuivre. L'ordonnance est ainsi libellée :

     [TRADUCTION] Comme la défenderesse a démontré l'existence d'un retard excessif et la probabilité d'un grave préjudice, et que le demandeur n'a pas démontré que le retard était excusable, l'action est rejetée pour défaut de poursuivre. Comme la défenderesse n'a pas demandé l'attribution des dépens, la Cour n'en adjuge pas.         

     Les événements qui sont à l'origine de cette ordonnance sont les suivants :

     1)      L'avis de cotisation dont le demandeur a initialement interjeté appel se rapportait à l'année d'imposition 1981 du demandeur et était daté du 23 mars 1984.         
     2)      La question en litige dans l'appel était de savoir si un montant déclaré comme une dépense d'intérêt était une dépense engagée en vue de tirer un revenu d'entreprise ou de biens. Les événements pertinents se rapportent à une transaction immobilière, l'achat et la vente ayant eu lieu respectivement en 1976 et en 1979.         
     3)      La Cour canadienne de l'impôt a rejeté l'appel du demandeur dans un jugement en date du 2 février 1988.         
     4)      Le demandeur a déposé une déclaration auprès du greffe de la Cour fédérale du Canada le 17 mai 1988.         
     5)      La défense a été déposée le 23 juin 1988.         
     6)      Il y a eu contestation liée le 8 juillet 1988.         
     7)      Par lettre en date du 2 février 1995 adressée au demandeur, la défenderesse a donné au demandeur l'avis prévu aux règles 331A et 440(2) de son intention de déposer un avis de requête en rejet de l'appel pour défaut de poursuivre le 4 avril 1995.         
     8)      Par lettre en date du 21 avril 1995 adressée au demandeur, la défenderesse a donné son consentement à la demande du demandeur en vue d'obtenir un délai supplémentaire. Elle a également avisé le demandeur que si elle n'avait pas reçu sa réponse à la fermeture des bureaux le 1er mai 1995, elle demanderait par voie de requête le rejet de l'appel pour défaut de poursuivre.         
     9)      Par lettre en date du 19 février 1997 adressée au demandeur, la défenderesse a donné au demandeur l'avis prévu aux règles 331A et 440(2) de son intention de déposer un avis de requête le 24 mars 1997 en vue du rejet de l'appel pour défaut de poursuivre.         
     10)      Il n'y a pas eu d'interrogatoire ou de communication préalable.         
     11)      La défenderesse n'a reçu aucun avis de l'instruction ni aucune demande d'ordonnance fixant la date de l'instruction.         

     L'appel est instruit comme un procès de novo.

     Le demandeur déclare :

     [TRADUCTION] [...] le retard dans la présente action est attribuable au fait que j'ai été très pris par des engagements financiers et professionnels, et à mon ignorance quant aux absences de réponse de l'avocate de la défenderesse et à la façon de procéder pour poursuivre l'appel correctement.         

     Le mémoire en date du 25 mars 1997 de la défenderesse est ainsi libellé :

     [TRADUCTION]

     25)      Dans la présente espèce, le demandeur forme un appel relativement à son années d'imposition 1981, et la question en litige se rapporte à des événements qui se sont produits entre 1976 et 1979. La défenderesse soutient qu'elle aura plus de mal à défendre les cotisations du ministre à cause du temps qui s'est écoulé, soit seize ans depuis l'année d'imposition en question et vingt ans depuis le début des événements pertinents.         
     26)      La défenderesse soutient que le retard du demandeur a gravement nuit à la capacité de la défenderesse de présenter une défense dans la présente action.         

     Comme il est indiqué dans l'affaire Aqua-Gem1 :

     [...] le juge saisi de l'appel contre l'ordonnance discrétionnaire d'un protonotaire ne doit pas intervenir sauf dans les deux cas suivants :         
         a) l'ordonnance est entachée d'erreur flagrante, en ce sens que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu d'un mauvais principe ou d'une mauvaise appréciation des faits,                 
         b) l'ordonnance porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l'issue du principal.                 
     Si l'ordonnance discrétionnaire est manifestement erronée parce que le protonotaire a commis une erreur de droit (concept qui, à mon avis, embrasse aussi la décision discrétionnaire fondée sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits) ou si elle porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l'issue du principal, le juge saisi du recours doit exercer son propre pouvoir discrétionnaire en reprenant l'affaire depuis le début.         

     L'ordonnance du protonotaire n'est pas entachée d'une erreur manifeste. Le protonotaire a correctement examiné les facteurs dont il fallait tenir compte. Dans le cadre de l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire suprême vu l'influence déterminante de la question soulevée sur l'issue du principal, je conclus en outre que l'appel devrait être rejeté pour défaut de poursuivre. La défenderesse a démontré qu'il existe un retard excessif, que ce retard est inexcusable et qu'il risque de lui causer un grave préjudice.

     Dans le cadre du présent appel, l'appelant a également contesté la constitutionnalité, l'applicabilité ou l'effet des principes de common law ayant trait au retard excessif et inexcusable, et la probabilité d'un grave préjudice comme des motifs suffisants pour le priver de son droit à un procès équitable. À l'audience, il a invoqué les articles 7, 11 et 15 de la Charte. Il n'y a pas eu d'atteinte aux droits ou aux libertés que la Charte garantit à l'appelant, ni de négation de ces droits ou libertés. La règle 440 autorise un défendeur à demander par voie de requête le rejet de l'action pour défaut de poursuivre si le demandeur manque de diligence dans la poursuite de l'action. C'est la propre inaction du demandeur qui est à l'origine de la demande. De plus, un défendeur doit donner au demandeur un avis de son intention de demander le rejet. Enfin, la Cour applique un critère en trois volets semblable à celui qui est mentionné plus haut pour rejeter l'appel.

     De surcroît, l'intérêt de l'appelant a un caractère pécuniaire. L'appelant n'a pas prouvé qu'il a été privé de son droit à la vie, à la liberté et à la sécurité. De plus, il n'a pas démontré qu'il a été privé de droits à l'égalité. La procédure en cause n'est pas une affaire criminelle ou pénale.

     Par conséquent, l'appel est rejeté.

                                 (signature)

                                 " John D. Richard "

                                         Juge

Le 19 septembre 1997

Vancouver (Colombie-Britannique)

Traduction certifiée conforme             

                                 Marie Descombes, LL.L.

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

INTITULÉ DE LA CAUSE :          JOE PAL

                         - et -

                         SA MAJESTÉ LA REINE

NO DU GREFFE :                  T-918-88

LIEU DE L'AUDIENCE :          Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :          Le 15 septembre 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE RICHARD en date du 19 septembre 1997

ONT COMPARU :

     M. Joe Pal                      pour le demandeur
     Mme Victoria Bryan                  pour la défenderesse

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

     George Thomson                  pour la défenderesse
     Sous-procureur général
     du Canada
__________________

     1      La Reine c. Aqua-Gem Investments Limited, [1993] 2 C.F. 425, à la p. 463.

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