Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20230627


Dossier : IMM-7156-22

Référence : 2023 CF 896

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 27 juin 2023

En présence de madame la juge Turley

ENTRE :

CHI WAI LAWRENCE CHUNG

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le demandeur s’est vu refuser un permis de travail et a été déclaré interdit de territoire au Canada pour fausses déclarations au titre de l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. Plus précisément, le décideur a conclu que le demandeur avait [traduction] « sciemment omis de divulguer ses antécédents criminels afin d’obtenir un permis de travail au Canada ». Il a jugé que cette omission était importante parce qu’elle [traduction] « aurait pu entraîner une erreur lors de l’examen de la recevabilité de la demande et de l’admissibilité du demandeur et faire en sorte qu’un permis de travail soit délivré à tort à une personne interdite de territoire au Canada pour criminalité ».

[2] Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision et soutient qu’elle est déraisonnable pour deux motifs. Premièrement, il allègue que le décideur n’a pas tenu compte de l’exception relative à l’erreur de bonne foi qui s’applique aux fausses déclarations. Deuxièmement, il affirme que le décideur a commis une erreur lorsqu’il a conclu que le demandeur avait fait une fausse déclaration portant un fait important aux fins de l’application de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR. Pour les motifs exposés ci‑après, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Le demandeur n’a pas démontré que la décision est déraisonnable pour l’un ou l’autre de ces motifs.

II. Contexte

A. La demande de permis de travail

[3] Le demandeur, un citoyen de Hong Kong, a présenté une demande de permis de travail dans le cadre du Programme de mobilité internationale. Dans la section « Antécédents » de son formulaire de demande, le demandeur a répondu « Non » à la question : « Avez-vous déjà commis, été arrêté, accusé, ou reconnu coupable d’une infraction pénale quelconque dans un pays ou territoire? »

[4] Après avoir présenté sa demande, le demandeur a été informé qu’il devait fournir un certificat original de la police de Hong Kong pour poursuivre le traitement de sa demande. Le certificat reçu du bureau d’identification de la police de Hong Kong a révélé que le demandeur avait déjà fait l’objet de quatre déclarations de culpabilité. En 1996, le demandeur a été déclaré coupable de conduite avec facultés affaiblies et de conduite imprudente et, en 2005, il a été déclaré coupable de conduite avec facultés affaiblies et d’excès de vitesse.

[5] Après avoir reçu ces nouveaux renseignements, l’agent DL [l’agent d’examen des cas] a envoyé une lettre relative à l’équité procédurale au demandeur pour l’informer qu’il avait des doutes quant à la véracité de sa réponse à la question sur les antécédents criminels, compte tenu de ses déclarations de culpabilité multiples. Le demandeur a également été avisé que, s’il faisait de fausses déclarations, il pourrait être déclaré interdit de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR et qu’une telle conclusion le rendrait interdit de territoire au Canada pour une période de cinq ans. L’agent d’examen des cas a donné au demandeur la possibilité de dissiper ses doutes.

[6] En réponse, le demandeur a produit une lettre d’un avocat de Hong Kong, ainsi qu’un courriel dans lequel il donnait sa réponse personnelle. L’avocat a expliqué que le demandeur croyait à tort que ses déclarations de culpabilité de 1996 et de 2005 avaient été effacées en conformité avec le droit de Hong Kong. Toutefois, l’avocat a indiqué que, conformément à l’ordonnance de Hong Kong sur la réadaptation des délinquants, seules les déclarations de culpabilité de 1996 avaient été effectivement effacées, celles de 2005 ne pouvant pas l’être compte tenu des infractions antérieures. L’avocat a allégué que l’erreur du demandeur avait été commise [traduction] « purement par inadvertance ». De plus, l’avocat a affirmé que ces déclarations de culpabilité antérieures ne devraient pas avoir d’incidence négative sur la demande de permis de travail du demandeur parce qu’elles ne mettent pas en cause de la malhonnêteté ou un [traduction] « niveau élevé de criminalité ».

[7] Dans sa réponse personnelle, le demandeur a indiqué qu’il n’avait jamais eu l’intention de faire une présentation erronée ou une réticence sur des faits. Il a déclaré qu’il croyait à tort que ses déclarations de culpabilité de 1996 et de 2005 étaient considérées comme effacées et que, par conséquent, [traduction] « il n’avait plus besoin de les mentionner ». Le demandeur a reconnu qu’il aurait dû répondre « Oui » à la question, mais que, en raison de sa mauvaise compréhension du droit de Hong Kong, il avait répondu « Non ».

B. La décision faisant l’objet du contrôle

[8] Après avoir examiné la réponse du demandeur et les éléments de preuve à sa disposition, l’agent d’examen des cas a conclu que le demandeur n’avait pas [traduction] « suffisamment dissipé » ses doutes selon lesquels le demandeur avait fait une fausse déclaration. En ce qui concerne l’ordonnance de Hong Kong, il lui a accordé peu de poids, car il a conclu qu’elle ne [traduction] « s’appliqu[ait] pas aux demandes de visa pour entrer et travailler dans un territoire situé à l’extérieur de Hong Kong ». De plus, l’agent d’examen des cas n’était pas d’accord pour dire que la divulgation des déclarations de culpabilité n’aurait pas eu d’incidence sur la demande du demandeur. Il a affirmé que [traduction] « les déclarations de culpabilité antérieures du demandeur sont un facteur important dans le cadre de l’évaluation de ses antécédents criminels et de la décision relative à son interdiction de territoire, quelle que soit la sévérité de la peine ». La demande a été transmise à un agent désigné pour qu’il rende une décision.

[9] Après avoir examiné la demande, l’agent KL [le décideur] a déclaré le demandeur interdit de territoire au Canada au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR pour avoir fait une fausse déclaration portant sur ses antécédents criminels. Voici son raisonnement :

[traduction]

D’après mon examen du dossier et des observations, le demandeur n’a pas fourni d’explication raisonnable pour justifier son omission de déclarer son casier judiciaire dans sa demande. Le demandeur savait qu’il avait déjà été reconnu coupable de conduite en état d’ébriété le 7 novembre 1996 et le 30 décembre 2005; toutefois, il ne l’a pas déclaré. Même si les accusations et les déclarations de culpabilité du client étaient « effacées », le demandeur aurait dû les déclarer dans sa demande. J’estime déraisonnable qu’une personne qui a été reconnue coupable d’un crime à deux reprises au cours de sa vie ne juge pas approprié de répondre honnêtement à la question statistique suivante : « Avez-vous déjà commis, été arrêté, accusé, ou reconnu coupable d’une infraction pénale quelconque dans un pays ou territoire? » Il incombe au demandeur de s’assurer que tous les renseignements contenus dans sa demande sont exacts et véridiques. D’après les renseignements au dossier, il semble que l’omission de divulguer ses antécédents criminels dans sa demande était intentionnelle, d’après la réponse à la lettre relative à l’équité procédurale de l’agent. Ces renseignements sont importants, car ils auraient pu entraîner une erreur lors de l’examen de la recevabilité de la demande et de l’admissibilité du demandeur et faire en sorte qu’un permis de travail soit délivré à tort à une personne interdite de territoire au Canada pour criminalité.

Je suis un agent désigné en vertu de la Loi pour rendre une décision en vertu de l’article 40. Selon la prépondérance des probabilités, je suis convaincu que le demandeur a sciemment omis de divulguer ses antécédents criminels afin d’obtenir un permis de travail au Canada. Par conséquent, je suis convaincu que le demandeur a fait une fausse déclaration portant sur un fait important qui, s’il avait été accepté, aurait entraîné une erreur dans l’application de la LIPR. Par conséquent, le demandeur est déclaré interdit de territoire au titre de l’article 40 pour fausses déclarations et demeurera interdit de territoire pendant cinq ans.

III. Les questions en litige et la norme de contrôle

[10] Le demandeur allègue que le décideur a commis les deux erreurs suivantes : i) il n’a pas tenu compte de l’exception relative à l’erreur de bonne foi qui s’applique aux fausses déclarations; ii) il a conclu que le demandeur avait fait une fausse déclaration portant sur un fait important parce qu’elle aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR.

[11] Nul ne conteste que la norme de contrôle qui s’applique à ces deux questions est celle de la décision raisonnable. Conformément à l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (au para 85). Les motifs du décideur ne doivent pas être jugés au regard d’une norme de perfection (au para 91). Les motifs doivent être interprétés de façon globale et contextuelle. L’objectif est de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (au para 97). La décision doit posséder « les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité » (au para 99).

IV. Analyse

A. L’exception relative à l’erreur de bonne foi ne s’applique pas

[12] Pour déclarer un demandeur interdit de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR, deux conditions s’appliquent : i) il doit y avoir une fausse déclaration; ii) la fausse déclaration doit porter sur un fait important en ce sens qu’elle entraîne ou risquer d’entraîner une erreur dans l’application de la Loi : Malik c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 1004 [Malik] au para 11; Gill c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 1441 [Gill] au para 14; Kazzi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 153 [Kazzi] au para 32.

[13] La jurisprudence reconnaît une exception restreinte lorsqu’un demandeur peut démontrer qu’il croyait sincèrement et raisonnablement ne pas avoir dissimulé de renseignements importants : Alalami c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 328 [Alalami] au para 15; Gallardo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1304 [Gallardo] au para 19; Ram c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 795 [Ram] au para 19; Kataria c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 210 au para 45.

[14] Le demandeur soutient que la décision est déraisonnable parce que le décideur n’a pas tenu compte de l’exception relative à l’erreur de bonne foi. Toutefois, selon la jurisprudence établie, dans les cas où l’agent des visas n’accepte pas l’explication fournie par un demandeur pour justifier l’omission, il n’est pas tenu d’examiner cette exception : Alalami, au para 16; Malik, aux para 35‑36; Gallardo, aux para 25‑26; Pal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 502 au para 26; Ram, au para 20. Comme l’a expliqué le juge Southcott dans la décision Alalami, « l’exception n’a aucune application potentielle en l’absence d’une conclusion selon laquelle l’erreur avait effectivement été commise de bonne foi » (au para 16).

[15] Ce raisonnement s’applique également en l’espèce. Dans la présente affaire, il ressort des notes dans le Système mondial de gestion des cas (le SMGC) que le décideur n’a pas accepté l’explication du demandeur au sujet des fausses déclarations : [traduction] « D’après mon examen du dossier et des observations, le demandeur n’a pas fourni d’explication raisonnable pour justifier son omission de déclarer son casier judiciaire dans sa demande » [non souligné dans l’original].

[16] De plus, le décideur a exposé la raison pour laquelle il n’avait pas accepté l’explication du demandeur en ces termes :

[traduction]

Le demandeur savait qu’il avait déjà été reconnu coupable de conduite en état d’ébriété le 7 novembre 1996 et le 30 décembre 2005; toutefois, il ne l’a pas déclaré. Même si les accusations et les déclarations de culpabilité du client étaient « effacées », le demandeur aurait dû les déclarer dans sa demande. J’estime déraisonnable qu’une personne qui a été reconnue coupable d’un crime à deux reprises au cours de sa vie ne juge pas approprié de répondre honnêtement à la question statistique suivante : « Avez-vous déjà commis, été arrêté, accusé, ou reconnu coupable d’une infraction pénale quelconque dans un pays ou territoire? » [Non souligné dans l’original.]

[17] En fin de compte, le décideur a conclu que les fausses déclarations étaient délibérées : [traduction] « Selon la prépondérance des probabilités, je suis convaincu que le demandeur a sciemment omis de divulguer ses antécédents criminels afin d’obtenir un permis de travail au Canada. »

[18] Je comprends que le demandeur ne souscrit pas à l’évaluation du décideur, mais je ne puis conclure que la décision est déraisonnable. Conformément à l’arrêt Vavilov, j’estime que la décision appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (au para 86).

[19] Le décideur n’a tout simplement pas accepté l’explication du demandeur selon laquelle ses fausses déclarations découlaient d’une mauvaise compréhension du droit de Hong Kong, de sorte qu’il [traduction] « n’avait plus besoin de […] mentionner » ses déclarations de culpabilité en réponse à la question sur les antécédents criminels. Il s’agit d’une conclusion raisonnable au regard des faits et du droit. La question en litige consiste à se demander si le demandeur a « déjà commis, été arrêté, accusé, ou reconnu coupable d’une infraction pénale quelconque dans un pays ou territoire? » [Non souligné dans l’original.]

[20] Comme l’a expliqué le juge Barnes dans la décision Bundhel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 1147, la question sur les antécédents criminels « n’admet aucune ambiguïté » — elle exige non seulement des renseignements sur les déclarations de culpabilité antérieures, mais aussi sur les arrestations et les accusations (au para 7). De plus, comme l’a souligné le défendeur, la question ne comporte pas de limite temporelle étant donné l’emploi du mot « déjà ».

[21] Même si la décision aurait pu être formulée en des termes plus clairs, ce point de vue se reflète, à mon avis, dans les notes du décideur dans le SMGC : [TRADUCTION] « Même si les accusations et les déclarations de culpabilité du client étaient “effacées”, le demandeur aurait dû les déclarer dans sa demande. J’estime déraisonnable qu’une personne qui a été reconnue coupable d’un crime à deux reprises au cours de sa vie ne juge pas approprié de répondre honnêtement à la question statistique ». Conformément à l’arrêt Vavilov, les décideurs administratifs ne devraient pas être assujettis « à des contraintes formalistes ou aux normes auxquelles sont astreints des logiciens érudits ». Je suis convaincu, en l’espèce, que le raisonnement du décideur « se tient » (au para 104).

[22] À mon avis, la décision est raisonnable en ce qui concerne l’exception relative à l’erreur de bonne foi. Le décideur n’a manifestement pas accepté l’explication du demandeur au sujet des fausses déclarations et, par conséquent, il n’était pas tenu de procéder à une analyse de l’exception relative à l’erreur de bonne foi.

B. La fausse déclaration porte sur un fait important

[23] Pour qu’un demandeur soit interdit de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR, il doit avoir fait une fausse déclaration qui porte sur un fait important et qui « entraîn[e] ou risqu[e] d’entraîner une erreur dans l’application » de la Loi : Malik, au para 11; Gill, au para 14; Kazzi, au para 27. En l’espèce, le décideur a conclu que l’omission du demandeur de divulguer ses antécédents criminels dans sa demande de permis de travail constituait une fausse déclaration qui porte sur un fait important parce qu’elle [TRADUCTION] « aurait pu entraîner une erreur lors de l’examen de la recevabilité de la demande et de l’admissibilité du demandeur et faire en sorte qu’un permis de travail soit délivré à tort à une personne interdite de territoire au Canada pour criminalité ».

[24] Bien que le demandeur reconnaisse qu’il [traduction] « ne fait aucun doute que les antécédents criminels du demandeur seraient pertinents pour évaluer une demande de permis de travail », il soutient que la conclusion du décideur quant à l’importance des renseignements était déraisonnable en l’espèce. Selon le demandeur, le fait qu’il se soit conformé à l’exigence de fournir un certificat de police atténue l’importance des renseignements. Sa fausse déclaration [traduction] « n’a pas empêché les enquêtes ou les examens nécessaires » étant donné que les renseignements exacts ont finalement été divulgués au moyen du certificat de police. Je ne souscris pas aux arguments du demandeur pour les motifs qui suivent.

[25] Selon l’interprétation du demandeur, une fausse déclaration au sujet des antécédents criminels ne rendrait jamais un demandeur interdit de territoire lorsqu’un certificat de police est un document exigé dans le cadre du processus de demande, car la vérité serait toujours découverte avant qu’une décision ne soit rendue. Toute fausse déclaration au sujet des antécédents criminels serait effectivement corrigée par les renseignements exacts figurant dans le certificat de police, de sorte que la fausse déclaration serait sans importance aux fins de l’application de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR. Cette interprétation est totalement incompatible avec l’objectif expressément visé par l’article 40 et avec la jurisprudence établie.

[26] L’objectif général de l’article 40 est de préserver l’intégrité du processus d’immigration en dissuadant quiconque de faire de fausses déclarations. À cet égard, le fardeau de vérifier l’intégralité et l’exactitude de la demande incombe au demandeur : Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 747 [Singh] au para 28; Goburdhun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 971 [Goburdhun] au para 28; Kazzi, au para 38; Gill, au para 15.

[27] De plus, conformément au paragraphe 16(1) de la LIPR, le demandeur a une obligation de franchise et est tenu de fournir des renseignements complets, honnêtes et véridiques lorsqu’il présente une demande pour entrer au Canada : Singh, au para 28; Goburdhun, au para 28; Malik, au para 10. Comme l’a exprimé le juge Little au paragraphe 28 de la décision Singh : « L’exigence de franchise est un principe prépondérant de la LIPR qui aide à l’interprétation de diverses dispositions, dont l’article 40. »

[28] Plus important encore, le fait d’accepter l’interprétation du demandeur aurait pour effet de le libérer de son obligation de franchise imposée par la LIPR. Le demandeur qui ne répond pas honnêtement aux questions sur ses antécédents criminels pourrait éviter d’être déclaré interdit de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) simplement parce qu’un certificat de police requis révèle la vérité au sujet de ses antécédents criminels.

[29] La Cour a invariablement conclu que le fait que les agents d’immigration peuvent avoir le moyen de découvrir les renseignements exacts avant qu’une décision définitive ne soit rendue ne rend pas une fausse déclaration sans importance : Vahora c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 778 au para 44; Hasham c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 880 au para 40; Goburdhun, aux para 43‑44; Alalami, au para 21. La conclusion de la juge Strickland dans la décision Goburdhun est particulièrement pertinente :

[43] […] En conséquence, les demandeurs qui font de fausses déclarations dans le cadre de leurs demandes en espérant ne pas se faire prendre ou, s’ils le sont, en espérant échapper à une sanction en raison du manque d’importance du renseignement non communiqué, le font à leurs risques et périls. [traduction] [Le fait que les autorités de l’immigration puissent avoir la capacité de déceler une fausse déclaration n’atténue pas l’importance de ce renseignement.] [Non souligné dans l’original]

[30] Selon ce raisonnement, le fait qu’un certificat de police puisse être exigé pour permettre aux autorités de l’immigration de corroborer ou de confirmer d’une quelconque manière les antécédents criminels d’un demandeur afin d’établir si celui-ci est interdit de territoire ne peut diminuer l’importance des fausses déclarations faites par un demandeur au sujet de ses antécédents criminels au titre de la LIPR.

[31] Enfin, j’estime sans fondement l’argument du demandeur selon lequel le décideur a commis une erreur en compartimentant sa demande et en omettant de prendre en compte l’ensemble de la preuve. À l’appui de cet argument, le demandeur fait valoir qu’il [traduction] « a facilité l’obtention de son certificat de police » et qu’il [traduction] « s’est conformé à l’obligation de fournir son certificat de police indiquant ses antécédents criminels ». Malgré l’affirmation du demandeur, je ne puis conclure qu’il s’agit d’une situation où, à l’instar de l’affaire Lamsen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 815, ou de l’affaire Berlin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1117, le demandeur a divulgué les renseignements exacts dans une autre partie de sa demande.

[32] La présente affaire ressemble plutôt à l’affaire Alalami. Dans cette décision, le juge Southcott a conclu que l’importance des fausses déclarations n’était pas touchée par le fait que les bons renseignements avaient été découverts « par d’autres moyens, indépendamment du demandeur » (au para 23). En l’espèce, la vérité au sujet des antécédents criminels du demandeur a été découverte au moyen du certificat de police, un document préparé, certifié et fourni par un tiers, le bureau d’identification de la police de Hong Kong. Le fait que le demandeur a [traduction] « facilité » l’obtention du certificat de police en demandant à la police de Hong Kong de l’envoyer aux autorités de l’immigration n’a aucune incidence sur la conclusion quant à l’importance des renseignements. Ce n’est tout simplement pas comparable au fait de fournir ou de divulguer autrement les renseignements exacts ailleurs dans un formulaire de demande que le demandeur a effectivement rempli et signé.

[33] Compte tenu de ce qui précède, j’estime que le décideur a raisonnablement conclu que l’omission par le demandeur de divulguer ses antécédents criminels dans sa demande de permis de travail constituait une fausse déclaration portant sur un fait important aux fins de l’application de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR.

V. Conclusion

[34] Étant donné que j’ai conclu que le décideur n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle en déclarant le demandeur interdit de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les parties n’ont proposé aucune question à certifier, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-7156-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a pas de question à certifier.

« Anne M. Turley »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-7156-22

INTITULÉ :

CHI WAI LAWRENCE CHUNG c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 19 juin 2023

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE TURLEY

DATE DES MOTIFS :

Le 27 juin 2023

COMPARUTIONS :

Athena Portokalidis

Pour le demandeur

Aleksandra Lipska

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bellissimo Law Group PC

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Ministère de la Justice Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.