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Date : 20230414


Dossier : IMM-6077-22

Référence : 2023 CF 551

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 14 avril 2023

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE:

PREETI

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La demanderesse est citoyenne de l’Inde. Elle sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un agent d’immigration [l’agent] a rejeté sa demande de résidence permanente présentée au titre de la catégorie des aides familiaux à domicile. L’agent a conclu que la demanderesse ne satisfaisait pas aux exigences minimales de scolarité du Programme pilote des aides familiaux à domicile [le Programme].

[2] Conformément au paragraphe 12(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], la sélection des étrangers de la catégorie « immigration économique » se fait en fonction de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada. Le Programme a été autorisé en tant que sous-catégorie de la catégorie de l’immigration économique par suite d’une instruction du ministre publiée en juin 2019 au titre de l’article 14.1 de la LIPR.

[3] Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [IRCC] a publié des lignes directrices expliquant les conditions d’admissibilité au Programme, notamment en ce qui concerne les compétences linguistiques, le type et la durée de l’expérience de travail au Canada, et le niveau minimal d’études (IRCC, « Programme pilote des gardiens d’enfants en milieu familial et Programme pilote des aides familiaux à domicile : Évaluation d’une demande en fonction des critères de sélection » [les lignes directrices du Programme]).

[4] Nul ne conteste que la demanderesse répondait à tous les critères d’admissibilité du Programme, à l’exception de ceux relatifs aux études. Les lignes directrices du Programme précisent ce qui suit :

Le demandeur doit prouver qu’il possède l’un ou l’autre des titres de compétences suivants :

un diplôme d’études postsecondaires (ou d’un niveau supérieur) obtenu au Canada à la suite d’au moins 1 an d’études ou

un diplôme d’études postsecondaires équivalant à ce qui précède et un rapport d’évaluation des diplômes d’études (EDE) délivré à des fins d’immigration par un organisme désigné par IRCC.

[5] Or, la demanderesse n’est pas titulaire d’un diplôme d’études postsecondaires (ou d’un niveau supérieur) obtenu au Canada. Elle a donc dû soumettre un rapport d’EDE, qui devait :

indiquer que le titre de compétence est équivalent à un titre de compétence d’études postsecondaires (ou de niveau supérieur) obtenu au Canada à la suite d’au moins 1 an d’études

avoir été délivré moins de 5 ans avant la date de réception de la demande

avoir été délivré après la date où l’organisme responsable de l’EDE a été désigné par IRCC

[6] La demanderesse a présenté un rapport d’EDE préparé par World Education Services [WES], une agence désignée par IRCC. Dans le rapport de WES, il est indiqué que son diplôme d’infirmière générale et de sage-femme équivalait à [TRADUCTION] « trois ans et demi d’études et de formation en milieu hospitalier » au Canada. À la rubrique « Remarques » du rapport, il est précisé que [traduction] « [l]e titre n’est pas comparable à un titre de compétence canadien ».

[7] Les notes consignées par l’agent dans le Système mondial de gestion des cas [le SMGC] font partie des motifs de la décision faisant l’objet du contrôle (Ebrahimshani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 89 au para 5). Voici un passage pertinent de ces notes :

[TRADUCTION]

Selon le rapport d’EDE de WES qui a été soumis par la demanderesse, elle a suivi des études équivalentes à « trois ans et demi d’études et de formation en milieu hospitalier ».

La demanderesse principale ne satisfait pas aux critères en matière d’études, car comme elle n’a pas terminé un programme postsecondaire, elle n’a pas obtenu de diplôme d’études postsecondaires au Canada.

La demanderesse principale ne satisfait pas aux exigences pour demander la résidence permanente au titre de la catégorie des aides familiaux à domicile.

[8] La décision de l’agent est susceptible de contrôle par la Cour selon la norme de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 10). La Cour n’interviendra que si la décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » (Vavilov, au para 100).

[9] Les critères de « justification, d’intelligibilité et de transparence » sont remplis si les motifs permettent à la Cour de comprendre le raisonnement qui a mené à la décision et d’établir si la conclusion appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Vavilov, aux para 85-86, citant Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47).

[10] La demanderesse invoque la décision de la juge Lobat Sadrehashemi dans l’affaire Lakhanpal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 694 [Lakhanpal], aux paragraphes 21 et 23 :

En dépit du fait que l’agent renvoie à la conclusion figurant dans le rapport de WES selon laquelle Mme Lakhanpal a suivi trois ans et demi d’études et de formation en milieu hospitalier, il n’explique pas pourquoi le tout ne correspond pas à l’exigence de l’équivalent d’un diplôme d’études secondaires canadien. L’agent n’a pas expliqué à la demanderesse pourquoi sa formation postsecondaire, qui avait été évaluée comme l’équivalent de trois ans et demi de formation et d’études en milieu hospitalier au Canada, ne démontrait pas qu’elle avait une scolarité suffisante pour remplir la condition minimale de l’équivalent d’un diplôme d’études secondaires canadien.

[...]

L’agent omet d’apprécier les trois ans et demi d’études et de formation en milieu hospitalier eu égard à la condition d’admissibilité concernant les études secondaires. C’est là une lacune fondamentale dans le raisonnement qui oblige la demanderesse à se livrer à des conjectures quant aux raisons pour lesquelles ses diplômes d’études étrangers ne sont pas considérés comme suffisants. [...]

[11] La décision Lakhanpal concernait une demande de résidence permanente présentée au titre du programme Voie d’accès provisoire pour les aides familiaux. Ce programme exigeait des demandeurs qu’ils présentent un diplôme d’études étranger équivalant à un diplôme d’études secondaires canadien (IRCC, « Évaluation de la demande par rapport aux critères de sélection (Voie d’accès provisoire pour les aides familiaux) »).

[12] Cette exigence peut être comparée à celle du Programme, selon laquelle les demandeurs doivent présenter un titre de compétence étranger qui est équivalent à un titre de compétence d’études postsecondaires (ou de niveau supérieur) obtenu au Canada à la suite d’au moins un an d’études. La décision Lakhanpal se distingue donc de la présente espèce.

[13] La demanderesse renvoie à une entrée faite dans les notes du SMGC par un autre agent d’immigration le 30 avril 2022, soit environ deux mois avant que sa demande ne soit refusée. L’entrée est ainsi rédigée :

[traduction]

ÉTUDES

ÉTUDES : 1

Identificateur unique de client : 1111628515

Lien :

Du : 2020-10-01

Au : 2022-04-01

Pays : Inde

Niveau d’études au Canada :

Établissement : Conseil d’inscription des infirmières du Pendjab

Résultat : Certificat/diplôme

Titre de compétence canadien : Non

Temps plein/temps partiel :

État : Reçu

Source : SMGC

Niveau d’études aux fins de l’EDE : Baccalauréat ou 3 ans d’études supérieures

Mise à jour par : IT26367

Date de la mise à jour : 2022-04-30

[14] La demanderesse affirme que l’agent d’immigration qui a rédigé cette entrée dans le SMGC [traduction] « a vu juste » en reconnaissant qu’aux termes de l’EDE, son titre de compétence correspondait à « un baccalauréat ou 3 ans d’études supérieures ».

[15] La preuve dont dispose la Cour ne lui permet pas de tirer une conclusion au sujet de ce que l’agent a pu vouloir dire dans son entrée au SMGC datée du 30 avril 2022. En outre, les lignes directrices du Programme sont claires. Un demandeur qui n’a pas obtenu un titre de compétence d’études postsecondaires (ou de niveau supérieur) au Canada à la suite d’au moins un an d’études doit démontrer qu’il détient un titre de compétence étranger équivalent. L’information doit être confirmée dans un rapport d’EDE délivré par un organisme désigné par IRCC.

[16] Le rapport de WES que la demanderesse a présenté ne démontre pas que son titre de compétence est équivalent à un titre de compétence d’études postsecondaires (ou de niveau supérieur) obtenu au Canada à la suite d’au moins un an d’études. L’agent n’avait donc d’autre choix que de la déclarer non admissible à la résidence permanente au titre du Programme.

[17] La présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant : La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Simon Fothergill »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6077-22

 

INTITULÉ :

PREETI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 16 mars 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 14 avril 2023

 

COMPARUTIONS :

Malvin J. Harding

POUR LA DEMANDERESSE

Jocelyne Mui

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Malvin J. Harding

Avocat

Surrey (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour le défendeur

 

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