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Date : 20230406


Dossier : IMM-3865-22

Référence : 2023 CF 498

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 6 avril 2023

En présence de madame la juge Go

ENTRE :

Rose ONTIRI

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La demanderesse, Mme Rose Ontiri, est une citoyenne du Kenya. Elle est venue au Canada en septembre 2019 et a présenté une demande d’asile au motif qu’elle craignait d’être persécutée par le groupe Sungu Sungu, une milice voulant soumettre sa fille à la mutilation génitale féminine [MGF].

[2] La demanderesse affirme que le groupe Sungu Sungu l’a menacée lorsqu’elle a refusé de soumettre sa fille à la MGF. Elle ajoute avoir signalé les menaces en question à la police et avoir demandé l’aide d’organisations non gouvernementales locales et du chef de la région, mais en vain. Elle prétend qu’elle a pris les choses en main et qu’elle a commencé à militer contre la MGF.

[3] La demanderesse affirme qu’en raison de son militantisme, des membres du groupe Sungu Sungu ont menacé son époux de la tuer si elle ne mettait pas fin à ses activités dans le village et ne faisait pas subir la MGF à leur fille. Elle ajoute avoir quitté Keroka en février 2019 et être restée chez des amis à un autre endroit, mais avoir continué de recevoir des menaces de mort de la part du groupe Sungu Sungu avant de venir au Canada.

[4] La Section de la protection des réfugiés [la SPR] a rejeté la demande d’asile de la demanderesse en septembre 2021 pour des motifs liés à la crédibilité. Dans une décision datée du 1er avril 2022, la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a rejeté l’appel interjeté par la demanderesse de la décision de la SPR et a confirmé que la demanderesse n’avait ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni qualité de personne à protéger au titre des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la décision].

[5] La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de cette décision. Je rejetterai sa demande parce que j’estime que la décision est raisonnable.

II. Questions en litige et norme de contrôle

[6] La demanderesse soutient que la SAR a commis plusieurs erreurs :

  1. Elle n’a pas reconnu que ses problèmes de santé mentale affectaient sa capacité de témoigner.

  2. Elle a mal évalué ses éléments de preuve corroborants.

  3. Elle a tiré des conclusions défavorables générales quant à la crédibilité de son militantisme contre la MGF.

  4. Elle a conclu qu’elle n’avait pas présenté suffisamment d’éléments de preuve pour étayer ses allégations.

[7] Les parties conviennent que les questions qui précèdent sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, conformément à l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov].

[8] Une décision raisonnable est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti : Vavilov, au para 85. La question de savoir si la décision est raisonnable dépend du contexte administratif en cause, du dossier dont dispose le décideur et de l’incidence de la décision sur les personnes qui en subissent les conséquences : Vavilov, aux para 88-90, 94 et 133-135.

[9] Pour qu’une décision soit jugée déraisonnable, la demanderesse doit démontrer qu’elle comporte des lacunes qui sont suffisamment capitales ou importantes : Vavilov, au para 100. Les erreurs que comporte une décision ou les préoccupations qu’elle suscite ne justifient pas toutes une intervention. La cour de révision doit s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur et de modifier ses conclusions de fait à moins de circonstances exceptionnelles : Vavilov, au para 125. Les lacunes ou insuffisances ne doivent pas être simplement superficielles ou accessoires par rapport au fond de la décision ni être des « erreur[s] mineure[s] » : Vavilov, au para 100.

III. Analyse

A. La SAR n’a pas commis d’erreur dans son analyse de la lettre du psychothérapeute

[10] La demanderesse a présenté une lettre d’un psychothérapeute qui confirme qu’elle a reçu un diagnostic d’anxiété et de dépression et qui affirme qu’elle souffrait de problèmes de mémoire et qu’elle avait de la difficulté à suivre les instructions et les procédures [la lettre du psychothérapeute].

[11] La SPR a conclu que les difficultés décrites dans la lettre du psychothérapeute ne l’emportaient pas sur les doutes qu’elle avait quant à la crédibilité ni ne les expliquaient raisonnablement. En appel devant la SAR, la demanderesse a fait valoir que son état mental avait nui à sa capacité de présenter ses arguments à la SPR, car elle avait eu de la difficulté à expliquer les incohérences dans la preuve.

[12] La SAR a souscrit à l’analyse de la SPR concernant la lettre du psychothérapeute, mentionnant l’absence de papier à en-tête, de date ou de détails, comme la méthode d’évaluation et la nature du plan de traitement. Elle a établi qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour conclure que les facteurs liés à la santé mentale étaient toujours présents et expliquaient les divergences ou les omissions dans le témoignage de la demanderesse. Elle a confirmé la décision de la SPR d’accorder peu de poids à la lettre du psychothérapeute.

[13] Devant la Cour, la demanderesse soutient que la SAR a commis une erreur en accordant peu de poids à la lettre du psychothérapeute et, par le fait même, en accordant peu de poids à son état mental à titre d’explication des autres incohérences soulevées.

[14] Premièrement, la demanderesse fait valoir qu’en critiquant la lettre parce qu’elle n’était pas datée et qu’elle n’était pas imprimée sur du papier à en-tête, la SAR a fait fi de certaines caractéristiques, comme la signature du psychothérapeute, son numéro de téléphone et de télécopieur, ainsi que la présence d’un timbre indiquant son numéro d’enregistrement. Elle s’appuie sur la décision Paxi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 905 [Paxi], dans laquelle la Cour a conclu que la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada avait commis une erreur susceptible de contrôle en remettant en question la validité d’un document ayant une importance centrale pour la situation des demandeurs sans se renseigner davantage à cet égard alors qu’elle disposait des coordonnées appropriées pour le faire : au para 52.

[15] Deuxièmement, la demanderesse soutient que la SAR a commis une erreur en accordant trop d’importance à la brièveté de la lettre et à l’absence de renseignements secondaires, comme le fait que le document ne précisait pas à quel moment elle avait été aiguillée vers le psychothérapeute, la façon dont l’évaluation avait été menée et le plan de traitement établi. Elle fait valoir que la SAR aurait dû examiner la lettre en fonction de son contenu, y compris le nom du médecin qui l’a aiguillé, plutôt que de s’en tenir à ce qu’elle ne contenait pas : Mahmud c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] ACF no 729 (CF) au para 11 [Mahmud].

[16] Les arguments de la demanderesse ne me convainquent pas. Je souligne d’abord que les faits de l’affaire Paxi se distinguent de ceux de l’espèce. Dans l’affaire Paxi, la lettre en question avait été rédigée par un pasteur de l’église sur du papier à en-tête et elle était datée et signée. La Cour a rejeté la conclusion de la SPR selon laquelle la lettre devait être notariée ou des pièces d’identité étaient requises. C’est dans un tel contexte que le juge Russell a fait remarquer avec désapprobation que la SPR n’a « pas saisi l’occasion d’utiliser les coordonnées figurant sur le papier à en-tête avant d’exiger des documents notariés et d’autres documents d’identification objectifs » : au para 52.

[17] En outre, je conviens avec le défendeur que les conclusions de la SAR concernant la lettre du psychothérapeute concernaient le poids à accorder et la valeur probante plutôt que l’authenticité. Par conséquent, j’estime que l’affaire citée par le défendeur est pertinente : Gao c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 271 [Gao]. Dans la décision Gao, la Cour a établi que la SAR « n’a pas conclu que la lettre de soutien du demandeur “aurait pu être écrite par n’importe qui” », mais plutôt que « la lettre [n’était pas] fiable et qu’elle [n’était pas] un élément de preuve probante » en raison d’un manque de détails : au para 36. Une conclusion semblable peut être tirée en l’espèce.

[18] De même, j’estime que la décision Mahmud ne s’applique pas, étant donné que la SAR s’est concentrée sur la suffisance des renseignements contenus dans la lettre du psychothérapeute, plutôt que sur son authenticité.

[19] La demanderesse invoque également la décision Kashyap c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 961 [Kashyap], une affaire portant sur une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, pour faire valoir qu’il était déraisonnable d’établir un « critère arbitraire » en vue d’accorder une valeur probante à la lettre sans « expliquer pourquoi tel ou tel détail était important ou nécessaire, et devait donc être inclus » : au para 35-36.

[20] En l’espèce, contrairement à la décision Kashyap, la SAR a expliqué pourquoi les renseignements manquants étaient nécessaires en mentionnant ce qui suit :

[21] En appel, [la demanderesse] a mentionné que son anxiété, sa dépression et ses problèmes de mémoire ont nui à sa capacité de présenter ses arguments à la SPR et qu’elle a souvent eu de la difficulté à expliquer les incohérences avancées entre son témoignage et ses éléments de preuve documentaire. Toutefois, selon son témoignage, elle a vu ce psychothérapeute pendant trois semaines, soit environ un an et demi avant de présenter sa demande d’asile. À l’instar de la SPR, j’estime que la lettre ne précise pas comment un problème de santé mentale ou un symptôme ressenti par la demandeure d’asile à une certaine époque aurait pu nuire à la capacité de l’appelante de présenter ses arguments.

[21] En conclusion, je ne relève aucune erreur susceptible de contrôle en ce qui concerne le traitement par la SAR de la lettre du psychothérapeute. Je rejette également l’affirmation de la demanderesse selon laquelle la SAR a mis en doute sa crédibilité en raison de son piètre rendement dans le cadre d’un test de mémoire. Pour les motifs exposés ci-dessous, j’estime que les conclusions de la SAR quant à la crédibilité étaient raisonnablement fondées sur son évaluation des incohérences constatées dans les allégations de la demanderesse.

B. L’évaluation par la Section d’appel des réfugiés des éléments de preuve corroborants de la demanderesse était raisonnable

[22] La demanderesse soutient que la SAR a commis une erreur en accordant peu de poids aux éléments de preuve corroborants qui suivent et que les conclusions défavorables tirées quant à la crédibilité ont fait en sorte que la SAR n’a pas examiné par la suite les éléments de preuve à l’appui de la crédibilité des documents en question :

  1. un rapport médical produit par l’hôpital du district de Keroka [le rapport médical];

  2. un rapport de police pour établir le fond de ses allégations de persécution par le groupe Sungu Sungu [le rapport de police];

  3. des affidavits de son époux, de sa mère et de deux amis au Kenya [les affidavits].

[23] En ce qui concerne le rapport médical, les divergences relevées par la SPR et la SAR concernent la date du rapport médical, qui contredit l’exposé circonstancié de la demanderesse quant au moment où elle a fui Keroka et au moment où le rapport médical a été obtenu et produit de nouveau et la façon dont cela s’est fait. La demanderesse a également modifié son témoignage entre la première et la deuxième séance de l’audience de la SPR au sujet de la divergence concernant la date du rapport médical.

[24] Pour ce qui est du rapport de police, les divergences relevées comprenaient, entre autres, l’endroit où se trouvait la demanderesse lorsqu’elle a reçu un appel téléphonique de menaces du groupe Sungu Sungu et la teneur des menaces. Le rapport de police mentionne que la demanderesse s’est fait dire que sa maison serait incendiée, mais la demanderesse a dit durant son témoignage devant la SPR qu’elle avait été menacée de se faire couper la tête.

[25] Enfin, en ce qui concerne les affidavits, la demanderesse a présenté les versions originales des documents datées du 11 février 2020 avant la première séance de l’audience de la SPR, puis, durant la deuxième séance, elle a présenté ce qu’elle prétendait être des versions modifiées, qui n’étaient pas signées et qui étaient également datées du 11 février 2020.

[26] Devant la Cour, la demanderesse affirme que la SAR a formulé des hypothèses au sujet de ce qui doit figurer dans un rapport médical et un rapport de police produits au Kenya et que de telles hypothèses ne satisfont pas aux normes rigoureuses à respecter pour tirer des conclusions d’invraisemblance; elle fait également valoir que la SAR n’a pas tenu compte de ses explications concernant l’authenticité des affidavits.

[27] Je conviens avec le défendeur que la demanderesse n’a soulevé aucune erreur susceptible de contrôle dans l’évaluation par la SAR des éléments de preuve corroborants. Dans chaque cas, la SAR a tenu compte des explications de la demanderesse concernant les divergences et a fourni des motifs pour justifier leur rejet. La SAR a procédé à sa propre évaluation indépendante de chacun des documents et a expliqué son choix de confirmer les conclusions de la SPR.

[28] À mon avis, la demanderesse n’a pas établi que le raisonnement de la SAR ne repose pas sur une analyse rationnelle à la lumière de la preuve dont elle disposait.

[29] À l’audience, la demanderesse a admis l’existence d’incohérences, mais elle a fait valoir que seules des incohérences qui ne peuvent être expliquées de façon raisonnable peuvent justifier une conclusion défavorable quant à la crédibilité. En l’espèce, elle s’appuie sur la lettre du psychothérapeute qui, si elle avait été admise, aurait poussé la SAR à évaluer son témoignage d’une autre façon.

[30] Encore une fois, je rejette l’argument de la demanderesse. Comme il a été mentionné précédemment, j’estime qu’il était loisible à la SAR de conclure que les problèmes de santé mentale de la demanderesse – aussi insuffisamment documentés fussent-ils – n’expliquaient pas les diverses incohérences. En l’absence d’éléments de preuve, je rejette également la simple affirmation de la demanderesse selon laquelle ses problèmes de santé mentale devaient toujours être présents après trois semaines de traitement en 2020, puisqu’elle ne prenait pas de médicaments au moment de l’audience de la SPR.

[31] Il incombait à la demanderesse de présenter ses arguments et de produire suffisamment d’éléments de preuve concernant toute difficulté qu’elle a pu avoir à cet égard. La SAR n’a pas remis en question l’authenticité de la lettre du psychothérapeute. Elle a noté l’absence de lien probant entre les problèmes de santé mentale antérieurs de la demanderesse et leur effet sur sa capacité de présenter ses arguments. Je ne vois aucune raison de modifier la conclusion de la SAR à cet égard.

[32] La demanderesse présente deux autres arguments par écrit, mais elle ne les a pas abordés à l’audience. Je les examine néanmoins ci-dessous.

C. La Section d’appel des réfugiés n’a pas commis d’erreur en tirant des conclusions défavorables générales quant à la crédibilité du militantisme de la demanderesse contre la mutilation génitale féminine

[33] À l’audience de la SPR, il a été demandé à la demanderesse ce qu’elle avait fait en tant que militante lorsqu’il avait été décidé que sa fille devait subir une MGF. La demanderesse a expliqué qu’en novembre 2018, elle s’était opposée à la MGF durant une assemblée scolaire réunissant des élèves et des parents. Elle a dit durant son témoignage qu’elle n’avait pas mentionné cet événement dans l’exposé circonstancié contenu dans son formulaire Fondement de la demande d’asile [le formulaire FDA] parce qu’elle ne voulait pas [traduction] « y repenser » et qu’elle savait que l’information figurait dans un rapport de police.

[34] La SPR a tiré une conclusion défavorable en raison de l’omission au sujet du premier plaidoyer de la demanderesse contre la MGF, et, en appel, la demanderesse a fait valoir que la conclusion de la SPR n’était pas étayée par la preuve. La SAR a confirmé les conclusions de la SPR quant à la crédibilité, mentionnant qu’elles étaient également fondées sur les divergences dans le reste de la preuve, y compris le témoignage changeant de la demanderesse concernant les éléments de preuve corroborants décrits ci-dessus. Elle a conclu que l’omission était importante, car elle concernait un événement à l’origine des menaces formulées contre la demanderesse.

[35] La demanderesse soutient que la SAR a commis une erreur en tirant une conclusion défavorable quant à la crédibilité de ses allégations de militantisme contre la MGF simplement en raison de l’omission d’un acte de militantisme. Elle affirme que l’accent mis par la SAR sur cet acte de militantisme en tant que « premier plaidoyer » était fondé sur les normes occidentales ou l’opinion subjective selon laquelle le militantisme était associé au fait de prendre la parole publiquement. Elle ajoute que sa résistance personnelle fait également partie de son militantisme.

[36] J’estime que l’argument de la demanderesse n’est pas fondé. Durant la première séance de l’audience de la SPR, il a été demandé à la demanderesse pourquoi elle n’avait pas mentionné qu’elle avait dénoncé la MGF durant une assemblée scolaire. La demanderesse a répondu qu’elle pensait que l’information figurait dans un rapport de police. Elle s’est de nouveau fait poser la même question à la deuxième séance, et elle a donné une explication différente :

[traduction]
Oui, vous savez, je ne croyais pas que… en fait, en tant que militante, je faisais simplement mon devoir en tant qu’enseignante, vous savez… en tant qu’enseignante, parfois, lorsqu’on enseigne, on peut soulever quelque chose et conseiller les élèves, alors c’était simplement une obligation en tant qu’enseignante; je ne le savais pas que c’était… qu’ils pouvaient considérer qu’il s’agissait d’un acte de militantisme à l’école… c’était simplement mon obligation en tant qu’enseignante.

[37] Lorsqu’elle a confirmé la conclusion de la SPR selon laquelle l’information omise était importante, la SAR a mentionné que, selon l’exposé circonstancié de la demanderesse, celle-ci avait été prise pour cible par le groupe Sungu Sungu et les aînés du village non seulement parce qu’elle refusait de faire subir une MDG à sa fille, mais aussi en raison de son militantisme contre cette pratique dans la collectivité. C’est dans un tel contexte que la SAR a conclu que la « première fois que [la demanderesse] dénonçait publiquement la pratique devant un vaste auditoire de 45 élèves et leurs parents [n’est pas] une question accessoire ».

[38] La demanderesse tente de faire valoir que, dans sa conclusion, la SAR confond la première fois qu’elle s’est exprimée ouvertement avec son premier acte de militantisme. Je ne vois rien dans la décision qui indique que c’est le cas. La SAR a plutôt évalué l’importance de l’acte omis en question à la lumière du fait que la demanderesse a allégué être victime de persécution parce qu’elle militait contre la MGF.

[39] Étant donné que le militantisme de la demanderesse contre la MGF constituait un aspect central de sa demande d’asile, je rejette également l’argument de la demanderesse selon lequel l’omission de cet événement dans l’exposé circonstancié de son formulaire FDA et la divergence qui en a découlé avec son témoignage sont accessoires à sa crédibilité générale.

D. La conclusion de la Section d’appel des réfugiés selon laquelle la demanderesse n’avait pas produit suffisamment d’éléments de preuve pour étayer ses allégations était raisonnable

[40] La demanderesse a présenté une lettre manuscrite du chef de la région, qui lui rappelait la manifestation contre la MGF dans son village en décembre 2018 [la lettre du chef de la région]. Dans sa lettre, le chef de la région a également conseillé à la demanderesse de rester au Canada parce que la collectivité était amère en raison de la manifestation. La demanderesse soutient que la SAR a commis une erreur en n’examinant pas de façon indépendante la lettre du chef de la région qui, selon elle, était très probante à l’égard de ses allégations et aurait dû se voir accorder un poids important.

[41] En tout respect, contrairement à ce que la demanderesse prétend, la SAR a examiné de façon indépendante la lettre du chef de la région et a explicitement conclu « qu’elle est insuffisante pour surmonter les préoccupations en matière de crédibilité qui existent dans cette affaire ».

[42] Je conviens avec le défendeur qu’il était loisible à la SAR de conclure que les autres éléments de preuve de la demanderesse n’étaient pas suffisants pour établir le bien-fondé de ses allégations de persécution par le groupe Sungu Sungu découlant de son militantisme contre la MGF. L’argument de la demanderesse équivaut à demander à la Cour d’apprécier à nouveau la preuve.

IV. Conclusion

[43] La demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

[44] Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-3865-22

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Avvy Yao-Yao Go »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3865-22

 

INTITULÉ :

ROSE ONTIRI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 20 mars 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE GO

 

DATE DES MOTIFS :

LE 6 avril 2023

 

COMPARUTIONS :

Alison Pridham

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Aleksandra Lipska

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jacqueline Lewis

Lewis & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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