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Date : 20230310


Dossier : IMM‑8213‑21

Référence : 2023 CF 330

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 mars 2023

En présence de monsieur le juge Henry S. Brown

ENTRE :

LOOKMAN OLAMILEKAN AJAMOLE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du 18 octobre 2021 par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] portant que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger compte tenu de l’existence d’une possibilité de refuge intérieur [PRI] viable au Nigéria.

II. Faits

[2] Le demandeur est un citoyen nigérian de 52 ans. Sa demande d’asile se fonde sur la crainte qu’il affirme entretenir à l’endroit d’un parent et de la famille de celui-ci en raison de différends survenus après le décès de son père au sujet de propriétés. Son récit est le suivant.

[3] Le demandeur est un musulman dont le père est décédé en 2012, lui léguant, ainsi qu’aux membres de sa fratrie, des propriétés. La succession du père a été administrée par un parent. En 2017, le demandeur et les membres de sa fratrie ont demandé à récupérer les propriétés, mais le parent a refusé en invoquant l’argent dépensé pour l’entretien de celles-ci. Peu de temps après, le frère cadet du demandeur a été tué dans une attaque au cours de laquelle ses assaillants lui auraient demandé [traduction] « s’il voulait toujours les propriétés de son père ». L’attaque aurait été signalée à la police, mais aucune arrestation n’a été effectuée.

[4] Après le décès du frère cadet, le demandeur, sa mère et les membres survivants de sa fratrie ont commencé à recevoir des appels téléphoniques de menaces leur intimant de cesser de demander les propriétés de leur défunt père. Ces menaces ont également été signalées en vain à la police.

[5] Le demandeur a quitté le Nigéria en 2018 pour se rendre aux États‑Unis. Sa famille est quant à elle demeurée au Nigéria. Pendant son séjour aux États-Unis, le demandeur a appris que son autre frère cadet avait été attaqué par des « voyous » envoyés par le parent. Le frère s’est alors enfui dans une autre ville, où il a continué de recevoir des appels de menaces. À la suite de ces événements, le demandeur a décidé de ne pas retourner au Nigéria. Il est alors entré au Canada et y a demandé l’asile. Il affirme avoir appris que des membres de sa famille et d’autres inconnus avaient agressé sa femme et sa fille en bas âge alors qu’il était au Canada. La fillette a succombé à ses blessures quelques jours plus tard. Par la suite, il a également appris que des personnes associées au parent avaient vandalisé la maison de sa mère en 2021.

III. Décision faisant l’objet du présent contrôle

[6] La SAR a confirmé la conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur disposait d’une PRI viable au Nigéria. Plus particulièrement, la SPR a jugé que le demandeur n’avait pas établi que les agents du préjudice avaient les moyens et la motivation de le retrouver dans la ville proposée comme PRI et qu’il n’était donc pas objectivement déraisonnable pour lui de s’y installer.

A. Possibilité sérieuse de persécution ou risque de préjudice

[7] La SAR a conclu qu’il n’existait aucune possibilité sérieuse de persécution ni aucun risque de préjudice pour le demandeur. Elle a indiqué qu’une telle possibilité ou un tel risque n’existait que si les agents du préjudice avaient à la fois les moyens et la motivation de retrouver le demandeur.

[8] Pour commencer, la SAR a jugé que la SPR avait eu raison de conclure que l’agent du préjudice n’avait pas les moyens de retrouver le demandeur dans la ville proposée comme PRI. Plus précisément, elle a jugé que le demandeur n’avait pas présenté suffisamment d’éléments de preuve pour établir la capacité du parent à le retrouver, que ce soit par l’entremise des médias sociaux ou des relations politiques influentes de ce dernier.

[9] Le demandeur a fait valoir que la protection déficiente des données personnelles et la surveillance massive des télécommunications au Nigéria permettraient à l’agent du préjudice de le reconnaître et de découvrir où il se trouvait par l’intermédiaire de divers services sociaux. La SAR a rejeté cet argument en rappelant que l’agent du préjudice n’était pas un acteur étatique et qu’il n’avait pas les capacités de surveillance d’un gouvernement. Elle a également noté que le demandeur n’avait fourni aucun élément de preuve à l’appui de son affirmation voulant que ses « activités quotidiennes ordinaires » dans la ville proposée comme PRI auraient permis à l’agent du préjudice de le retrouver facilement dans une ville de plus de trois millions d’habitants.

[10] De même, la SAR a rejeté l’affirmation du demandeur concernant la corruption au sein des forces de l’ordre et la possibilité, pour la population, de soudoyer les policiers afin d’utiliser les ressources de l’État à des fins privées. Elle a pris acte de la preuve concernant la corruption au sein de la police nigériane, mais, en définitive, elle a jugé que le demandeur ne faisait que supposer que son parent pouvait soudoyer la police sans fournir de preuve que ce dernier l’avait déjà fait dans le passé. En outre, elle a indiqué que le spectre de la corruption policière dans l’ensemble du Nigéria et la simple possibilité que le parent ait pu soudoyer la police n’exposaient pas personnellement le demandeur à un risque de torture ou à une menace à sa vie.

[11] La SAR a également demandé pourquoi le parent du demandeur serait toujours motivé à retrouver ce dernier en dépit du fait qu’il n’avait pas demandé à ce que les propriétés lui soient rendues depuis 2017. Elle a rappelé que, dans son témoignage, le demandeur avait confirmé avoir abandonné toute tentative d’obtenir les propriétés et avoir aidé sa mère, qui habitait l’une d’elles, à déménager. Malgré tout, le demandeur n’a pas été en mesure d’expliquer pourquoi le parent serait toujours motivé à le poursuivre.

[12] Vu l’ensemble des doutes qui ont été soulevés, la SAR a conclu que les agents du préjudice n’auraient pas la motivation nécessaire pour retrouver le demandeur dans la ville proposée comme PRI et, donc, que ce dernier ne faisait face à aucune possibilité sérieuse de persécution ni à aucun risque de préjudice.

B. Caractère raisonnable du déménagement

[13] Pour commencer, la SAR a fait remarquer que la Cour d’appel fédérale avait fixé un seuil très élevé en ce qui concerne le « volet du caractère déraisonnable », en ce sens qu’il ne faut rien de moins que l’existence de conditions qui mettraient en péril la vie et la sécurité du demandeur. Il faut également une preuve réelle et concrète de l’existence de telles conditions. La SAR a conclu que, en l’espèce, le demandeur n’avait présenté aucun élément de preuve franchissant ce seuil.

[14] La SAR a reconnu que la preuve relative à la situation dans le pays faisait état de certaines difficultés que le demandeur pouvait rencontrer s’il déménageait dans la ville proposée comme PRI, mais a jugé que ces difficultés ne rendaient pas la PRI non viable pour autant. De plus, le demandeur affirmait que son incapacité de s’exprimer en anglais aurait nui à sa capacité de trouver un emploi. La SAR a cependant constaté que le demandeur avait lui-même déclaré, dans son formulaire Fondement de la demande d’asile, qu’il parlait yoruba et anglais, que son évaluation psychologique avait été effectuée en anglais et qu’il avait répondu régulièrement aux questions en anglais pendant l’audience devant la SPR. Elle a également noté que le demandeur n’avait pas précisé ce qui, dans sa situation, lui aurait causé des difficultés à trouver et à conserver un emploi dans la ville proposée comme PRI.

[15] Le demandeur a aussi fait valoir que la SPR avait commis une erreur en omettant d’examiner la question de l’identité autochtone. La SAR a indiqué que, même si les allochtones pouvaient faire l’objet de restrictions et de discrimination, la preuve donnait à penser que de telles difficultés ne s’appliquaient pas dans un grand centre urbain comme l’était la ville proposée à titre de PRI.

[16] La SAR a en outre rejeté l’argument du demandeur selon lequel la SPR n’avait pas dûment tenu compte des éléments de preuve signalant un accès limité aux services de santé mentale au Nigéria. Elle a plutôt constaté que la SPR avait expressément examiné la preuve présentée par le psychiatre du demandeur ainsi que d’autres documents démontrant que, de manière générale, les services publics étaient médiocres. Elle a reconnu l’existence de certaines difficultés, mais a mentionné que, selon la preuve relative à la situation dans le pays, le traitement de la maladie mentale était possible dans les hôpitaux publics et il n’existait aucune forme de maladie mentale pour laquelle un traitement n’était pas accessible au Nigéria.

[17] Vu l’ensemble des constats qu’elle a dressés, la SAR a conclu qu’il n’était pas objectivement déraisonnable pour le demandeur, compte tenu de sa situation, de déménager dans la ville proposée comme PRI. Cette conclusion, conjuguée à celle portant sur l’absence de risque sérieux de persécution, a amené la SAR à confirmer le fait que le demandeur disposait d’une PRI viable dans la ville proposée.

IV. Question en litige

[18] La question en litige en l’espèce est de savoir si la décision de la SAR est raisonnable. Je commencerai par examiner les nouveaux éléments de preuve produits devant la SAR.

V. Norme de contrôle

[19] La norme de contrôle applicable en l’espèce est celle de la décision raisonnable. Dans l’arrêt Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, que la Cour suprême du Canada a rendu en même temps que l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], le juge Rowe, s’exprimant au nom des juges majoritaires, explique les attributs que doit présenter une décision raisonnable et les exigences imposées à la cour de révision qui procède au contrôle de la décision selon la norme de la décision raisonnable :

[31] La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, par. 85). Par conséquent, lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, « une cour de révision doit d’abord examiner les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [l]a conclusion » (Vavilov, par. 84, citant Dunsmuir, par. 48). Les motifs devraient être interprétés de façon globale et contextuelle afin de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (Vavilov, par. 97, citant Newfoundland Nurses).

[32] La cour de révision devrait se demander si la décision dans son ensemble est raisonnable : « ce qui est raisonnable dans un cas donné dépend toujours des contraintes juridiques et factuelles propres au contexte de la décision particulière sous examen » (Vavilov, par. 90). Elle doit se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci » (Vavilov, par. 99, citant Dunsmuir, par. 47 et 74, et Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 R.C.S. 5, par. 13).

[33] Lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, par. 100). La partie qui conteste la décision doit convaincre la cour de justice que « la lacune ou la déficience [invoquée] [. . .] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] déraisonnable » (Vavilov, par. 100).

[Non souligné dans l’original.]

[20] Par ailleurs, dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a clairement indiqué que, à moins de « circonstances exceptionnelles », le rôle de la Cour n’est pas d’apprécier à nouveau la preuve. De telles circonstances n’existent pas en l’espèce. La Cour suprême du Canada nous enseigne ceci :

[125] Il est acquis que le décideur administratif peut apprécier et évaluer la preuve qui lui est soumise et qu’à moins de circonstances exceptionnelles, les cours de révision ne modifient pas ses conclusions de fait. Les cours de révision doivent également s’abstenir « d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur » : CCDP, par. 55; voir également Khosa, par. 64; Dr Q, par. 41‑42. D’ailleurs, bon nombre des mêmes raisons qui justifient la déférence d’une cour d’appel à l’égard des conclusions de fait tirées par une juridiction inférieure, dont la nécessité d’assurer l’efficacité judiciaire, l’importance de préserver la certitude et la confiance du public et la position avantageuse qu’occupe le décideur de première instance, s’appliquent également dans le contexte du contrôle judiciaire : voir Housen, par. 15‑18; Dr Q, par. 38; Dunsmuir, par. 53.

[Non souligné dans l’original.]

[21] En outre, la Cour d’appel fédérale a récemment réitéré, dans l’arrêt Doyle c Canada (Procureur général), 2021 CAF 237, que le rôle de notre Cour n’est pas d’apprécier à nouveau la preuve :

[3] La Cour fédérale avait tout à fait raison d’agir ainsi. Selon ce régime législatif, le décideur administratif, en l’espèce le directeur, examine seul les éléments de preuve, tranche les questions d’admissibilité et d’importance à accorder à la preuve, détermine si des inférences doivent en être tirées, et rend une décision. Lorsqu’elle effectue le contrôle judiciaire de la décision du directeur en appliquant la norme de la décision raisonnable, la cour de révision, en l’espèce la Cour fédérale, peut intervenir uniquement si le directeur a commis des erreurs fondamentales dans son examen des faits, qui minent l’acceptabilité de la décision. Soupeser à nouveau les éléments de preuve ou les remettre en question ne fait pas partie de son rôle. S’en tenant à son rôle, la Cour fédérale n’a relevé aucune erreur fondamentale.

[4] En appel, l’appelant nous invite essentiellement dans ses observations écrites et faites de vive voix à soupeser à nouveau les éléments de preuve et à les remettre en question. Nous déclinons cette invitation.

VI. Analyse

A. Nouveaux éléments de preuve

1) Preuve d’une présumée attaque contre le domicile de l’épouse du demandeur

[22] Le demandeur a présenté des éléments de preuve supplémentaires au sujet d’une présumée attaque contre le domicile de son épouse qui aurait eu lieu en 2012. Ces éléments comprenaient un rapport de police, des messages texte et des photographies. La SAR ne les a pas jugé crédibles. Premièrement, elle a fait remarquer que le rapport de police était considérablement différent de l’exemple de rapport de police contenu dans la preuve relative à la situation dans le pays. Plus précisément, elle a relevé tout un assortiment de différences dans la taille des caractères, l’espacement et le nom réel du formulaire. Elle a également constaté des différences dans la bannière rubanée qui est présente sur le côté du rapport et dans les logos de la police. Elle a noté que, d’après la preuve relative à la situation dans le pays, les formulaires de la police nigériane présentaient des différences mineures d’un endroit à l’autre du pays, mais que les éléments essentiels du logo demeuraient les mêmes. Or, à ses yeux, les logos du rapport de police fourni par le demandeur comportaient des éléments visuels nettement différents. Vu les doutes qui avaient été soulevés, la SAR a conclu que le rapport de police n’était pas authentique. Pour les mêmes motifs, elle a conclu que le rapport de police fourni à la SPR au sujet de l’attaque contre le frère du demandeur n’était pas authentique lui non plus.

[23] Avec égards, la conclusion de la SAR repose entièrement sur son appréciation de la crédibilité de la preuve documentaire. Dans la mesure où cette question est contestée, je refuse de me livrer à ce qui, à mon avis, ne relève pas du rôle de la Cour dans le cadre d’un contrôle judiciaire, conformément à ce que prescrivent les arrêts Vavilov et Doyle précités. La conclusion selon laquelle le demandeur a produit un rapport de police inauthentique est raisonnable, et elle est maintenue. Quoi qu’il en soit, cette conclusion appelle à la retenue dont la Cour doit faire preuve à l’égard de la SAR, et, dois-je ajouter, de la SPR.

2) Photographies et messages tirés de l’application WhatsApp

[24] De l’avis du tribunal, les conclusions quant à l’inauthenticité avaient une incidence directe sur la crédibilité des messages texte et des photographies fournis par le demandeur au sujet de la présumée attaque contre le domicile de son épouse. La SAR a donc conclu que, selon la prépondérance des probabilités, l’attaque ne s’était pas produite. À cet égard, le demandeur soutient que la SAR n’a pas dûment appliqué les bons critères juridiques pour déterminer l’admissibilité des nouveaux éléments de preuve qu’étaient les photographies et les messages texte tirés de l’application WhatsApp au sujet de l’attaque présumée contre le domicile de son épouse.

[25] Le demandeur avance que, lorsqu’elle a examiné les photographies et les messages tirés de WhatsApp, la SAR s’était indûment imprégnée de sa conclusion défavorable quant à la crédibilité du rapport de police, ce qui l’a menée à conclure que l’attaque n’avait pas eu lieu et à refuser d’admettre les documents en preuve. À son avis, le fait que la SAR n’ait pas tenu compte de ces éléments de preuve de manière significative constitue une erreur susceptible de contrôle. Il conteste également le fait que la SAR n’a pas effectué d’analyse approfondie des photographies et des messages tirés de WhatsApp, alors que le rapport de police avait fait l’objet d’un examen détaillé. En somme, le demandeur fait valoir que l’appréciation, par la SAR, des photographies et des messages tirés de WhatsApp se situe bien en deçà de la norme d’intelligibilité, de transparence et de justification établie dans l’arrêt Vavilov. À ce sujet, il renvoie aux décisions Nur c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 1444, et Lin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 157.

[26] En tout respect, je ne suis pas convaincu. La Cour d’appel fédérale a défini le droit à cet égard dans l’arrêt Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 96 (CanLII), [2016] 4 RCF 230 :

[38] Le véritable nœud du problème, dans le cadre de la présente affaire, consiste à déterminer si les conditions implicites d’admissibilité qu’a déduites la juge Sharlow de l’alinéa 113a) dans l’arrêt Raza sont également applicables dans le cadre du paragraphe 110(4). Parce qu’il est au cœur des représentations qui nous ont été soumises par les avocats des deux parties et de l’intervenante, il importe de reproduire ici l’extrait pertinent de cet arrêt [aux paragraphes 13 à 15] :

Selon son interprétation de l’alinéa 113a), cet alinéa repose sur l’idée que l’agent d’ERAR doit prendre acte de la décision de la SPR de rejeter la demande d’asile, à moins que des preuves nouvelles soient survenues depuis le rejet, qui auraient pu conduire la SPR à statuer autrement si elle en avait eu connaissance. L’alinéa 113a) pose plusieurs questions, certaines explicitement et d’autres implicitement, concernant les preuves nouvelles en question. Je les résume ainsi :

1. Crédibilité : Les preuves nouvelles sont‑elles crédibles, compte tenu de leur source et des circonstances dans lesquelles elles sont apparues? Dans la négative, il n’est pas nécessaire de les considérer.

[…]

[27] À mon avis, la SAR était en droit d’évaluer la crédibilité des messages texte et des photographies au regard de ses conclusions concernant les rapports de police. Il n’y a aucun fondement aux affirmations du demandeur voulant qu’une quelconque erreur entache l’évaluation de la crédibilité, ou qu’il aurait dû recevoir un avis l’informant des doutes exprimés par la SAR, ou qu’une audience aurait dû être convoquée au titre du paragraphe 110(6) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. Dans sa jurisprudence, la Cour s’est prononcée à l’encontre de toutes les questions invoquées par le demandeur. C’est le cas notamment dans la décision Marquez Obando c Canada (Citoyenneté et Immigration) 2022 CF 441, dans laquelle le juge McHaffie résume la situation en ces mots :

[25] Les demandeurs prétendent que la SAR aurait dû leur accorder une audience avant de rejeter leurs nouveaux documents et leur demande d’asile. Ils soutiennent que le fait que la SAR ne l’ait pas fait équivaut à un bris d’équité procédurale.

[26] Je rejette cet argument. En ce qui concerne le rejet des documents, selon les paragraphes 110(3), (4) et (6) de la LIPR, la SAR ne peut tenir une audience que si elle a déjà déterminé que les nouveaux documents déposés répondent aux critères du paragraphe 110(4), y compris le critère de la crédibilité. Cette Cour a conclu à plusieurs reprises que la SAR n’est pas obligée de tenir une audience pour déterminer si un document présenté comme nouvelle preuve est crédible : AB c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 61 au para 17; Mohamed c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1145 aux para 19‑21; Sunday c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 266 aux para 42‑44.

[27] Ceci n’est pas pour dire que la SAR ne peut pas inviter des prétentions écrites d’un appelant si elle a des questions au sujet des nouveaux documents. Elle a toujours cette discrétion même si l’appelant a déjà l’obligation de présenter « des observations complètes et détaillées » concernant la façon dont les nouveaux documents sont conformes aux exigences du paragraphe 110(4) : Règles de la SAR, art 3(3)g)(iii). Par contre, je conclus que la SAR n’avait pas l’obligation de donner un avis écrit aux demandeurs que la crédibilité des nouveaux documents était en cause pour se conformer aux principes d’équité procédurale. Sans vouloir définir les situations dans lesquelles la SAR pourrait avoir une telle obligation, s’il y en a, dans le cas en l’espèce, la SAR a basé ses conclusions de crédibilité directement sur la forme et le contenu de la lettre déposée par les demandeurs elle-même, dans une affaire où la crédibilité de M. Marquez était déjà en cause. L’équité procédurale n’exigeait pas à la SAR de donner une autre occasion aux demandeurs, en plus de celle déjà prévue par les Règles de la SAR, de répondre aux questions à l’égard de la crédibilité.

[28] Ayant rejeté les nouveaux documents, la SAR était tenue par la LIPR de déterminer l’appel sur le fond sans tenir d’audience : LIPR, art 110(3). Même si la SAR a tiré des conclusions sur la crédibilité du narratif de M. Marquez, ce n’est pas un bris de l’équité procédurale pour la SAR de suivre les procédures prévues par la Loi : Singh aux para 51‑52; Mohamed au para 22; Malambu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 763 aux para 29‑36.

[Non souligné dans l’original.]

[28] Je prends également note de la décision du juge Kelen dans l’affaire Osayande c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 368, où il a été déterminé il y a de nombreuses années qu’une conclusion selon laquelle un témoin a gravement miné sa propre crédibilité, par exemple en fournissant un faux document (comme le demandeur l’a fait en l’espèce), peut se répercuter sur d’autres conclusions en matière de crédibilité :

[21] En l’espèce, le faux journal, sa fausseté n’étant pas en cause devant notre Cour, a été pris en considération par la SSR en même temps que d’autres éléments de preuve disponibles, et le tribunal en est venu à la conclusion que le demandeur n’était pas crédible. Lorsque la SSR conclut qu’un témoin qui a déposé devant elle a gravement endommagé sa propre crédibilité dans un cas précis, tel que la production d’un faux document à la SSR, cela peut avoir des répercussions sur d’autres conclusions relatives à sa crédibilité.

[22] Il ressort clairement de la décision que la SSR a évalué la crédibilité du demandeur, qu’elle a examiné la preuve qui lui avait été soumise et qu’elle a rendu une décision éclairée et raisonnable selon laquelle le demandeur n’était pas crédible.

[29] Selon le demandeur, en refusant d’admettre des documents non authentiques sans tenir d’audience, la SAR s’est soustraite à l’application du paragraphe 110(6) de la LIPR ou a privé celui-ci de son objet. Je suis d’avis qu’un tel argument, s’il était retenu, mènerait à un résultat pernicieux en ce sens qu’un demandeur pourrait produire des documents falsifiés ou autrement inauthentiques – comme l’a fait le demandeur en l’espèce – et s’en voir récompensé par la tenue d’une audience. Ni la jurisprudence ni la LIPR n’appuient un tel résultat.

3) Articles de presse

[30] Le demandeur souhaitait produire quatre articles de presse devant la SAR; trois portaient sur la situation en matière de sécurité dans la ville proposée comme PRI et le dernier, sur l’interdiction de la plateforme Twitter par le gouvernement nigérian. À mon avis, la SAR a raisonnablement refusé d’admettre ces éléments de preuve, car ils n’étaient pas pertinents à la demande sous-jacente. Le demandeur était d’avis que l’interdiction lui aurait causé des difficultés à réseauter ou à obtenir un emploi. Cependant, la SAR n’a trouvé aucun élément de preuve démontrant que le demandeur avait déjà utilisé Twitter à des fins personnelles ou professionnelles. Elle ne disposait pas non plus d’éléments de preuve indiquant que d’autres tailleurs nigérians utilisaient cette plateforme pour obtenir des contrats. Compte tenu de ces lacunes dans la preuve, la SAR a estimé que l’interdiction de Twitter n’était pas pertinente à la demande d’asile du demandeur. Toutes ces conclusions commandent une retenue, puisqu’il est question de l’appréciation du dossier. Elles ne seront donc pas modifiées.

[31] La SAR a jugé que les autres articles, qui portaient sur les manifestations au Nigéria, ne contenaient pas de nouveaux éléments de preuve et n’établissaient pas une situation qui se serait produite après l’audience de la SPR. À ses yeux, ces articles faisaient en outre référence à un phénomène d’insécurité qui était antérieur à la décision de la SPR. Avec égards, c’est aussi mon avis.

4) Statut des agents du préjudice

[32] Le demandeur a cherché à présenter des éléments de preuve très récents concernant l’installation présumée de son parent comme chef dans la ville que la SPR venait tout juste de proposer comme PRI, et ce, même si celui-ci résidait ailleurs au Nigéria. Les éléments de preuve comprenaient un échange de courriels entre le demandeur et un ami qui l’aurait informé de ce soi-disant fait nouveau. La SAR a indiqué que le demandeur n’avait jamais mentionné que son parent était en lice pour devenir chef ou que quiconque dans sa famille avait déjà joué un tel rôle, ni produit de preuve à cet effet. De plus, elle a émis des réserves quant au fait que le demandeur souhaitait présenter de nouveaux éléments de preuve prétendant établir que son parent avait été installé comme chef un peu moins de deux mois après que la SPR avait conclu qu’il disposait d’une PRI viable dans la même ville. À mon avis, après avoir également tenu compte de la preuve objective sur la situation dans le pays selon laquelle les rôles de chefferie étaient des questions locales et avoir précisé que rien ne laissait supposer qu’une personne puisse accéder à un tel rôle dans un État ou district autre que le sien, la SAR a raisonnablement conclu que le moment du couronnement était une coïncidence qui le rendait suspect et non crédible. Je ne suis pas disposé à soupeser à nouveau la preuve à cet égard.

5) Articles de journaux

[33] Le demandeur a également présenté d’autres articles de presse qui mettaient en évidence l’augmentation des activités criminelles et de la corruption dans la ville proposée comme PRI. À son avis, il aurait été déraisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il eût présenté ces éléments de preuve avant le rejet de sa demande d’asile. Selon lui, il n’était pas en mesure de prévoir que, aux yeux de la SPR, la situation dans la ville proposée comme PRI constituait une exception par rapport à celle qui, de manière générale, avait cours dans l’ensemble du Nigéria.

[34] Cet argument est sans fondement. La SPR a désigné la ville proposée comme PRI lors de son audience. Il est évident que le demandeur a été informé lorsque cette PRI a été mise de l’avant. Le demandeur était alors représenté par un conseil (qui ne le représente plus devant notre Cour). Aucune objection n’a été soulevée. Le demandeur a témoigné et a été interrogé. Il avait pleinement le droit d’être contre-interrogé au sujet de la PRI. Fait important, le conseil du demandeur n’a pas demandé à déposer d’éléments de preuve ou d’observations au sujet de la PRI après l’audience.

B. Possibilité de refuge intérieur

1) Premier volet : Possibilité sérieuse de persécution ou risque de préjudice

[35] La SAR a confirmé la conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur disposait d’une PRI viable au Nigéria. Plus particulièrement, la SPR a jugé que le demandeur n’avait pas établi que les agents du préjudice avaient les moyens ou la motivation de le retrouver dans la ville proposée comme PRI et qu’il n’était donc pas objectivement déraisonnable pour lui de s’y installer.

[36] Je dois dire d’emblée que le demandeur souhaitait ardemment voir les conclusions précédemment mentionnées infirmées au vu de ses éléments de preuve présumément nouveaux, à la suite de quoi ses arguments à l’encontre des conclusions relatives à la PRI seraient, croyait‑il, accueillis. Comme on vient de le voir, ces arguments ont été rejetés.

[37] J’estime que la SAR a établi le cadre juridique adéquat et raisonnable pour effectuer son analyse et rendre sa décision concernant la PRI en l’espèce, ce que le demandeur ne conteste pas.

[38] L’analyse du critère à deux volets repose presque entièrement sur l’appréciation de la preuve par la SAR. Je ne suis pas convaincu qu’il y a lieu de modifier la conclusion de la SAR sur cette question.

[39] Je note également ce qui suit.

[40] Essentiellement, le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en faisant fi d’éléments de preuve pertinents et objectifs importants démontrant que la ville proposée ne constituait pas une PRI et que celle-ci ne pouvait donc pas être viable.

[41] Par exemple, le demandeur affirme que la SAR n’a pas expliqué pourquoi elle avait mis en doute la présomption de véracité à l’égard de son témoignage. Il affirme que son témoignage constituait une preuve du manque de sécurité dans la ville proposée comme PRI et que la SAR aurait dû le considérer comme tel. Il ajoute que la SAR a commis une erreur en fondant largement son évaluation du premier volet de l’analyse de la PRI sur l’argument général concernant la motivation et le désir de l’agent de persécution de le retrouver. Sur ce point, je ne suis pas convaincu, car l’affirmation du demandeur n’est pas étayée par le dossier. La SAR a expressément tenu compte du témoignage du demandeur, par exemple en ce qui concerne l’allégation selon laquelle le parent entretenait des relations influentes. De plus, comme le souligne le défendeur, même s’il invoque la présomption de véracité, comme en l’espèce, le demandeur ne peut pas pour autant se soustraire à la nécessité de fournir suffisamment d’éléments de preuve pour convaincre le décideur des éléments centraux d’une demande. Autrement dit, une preuve véridique peut s’avérer insuffisante pour permettre au demandeur de s’acquitter du fardeau qui lui incombe d’établir le bien-fondé de sa demande.

[42] Le demandeur soutient également que la protection déficiente des données personnelles et la surveillance massive des télécommunications au Nigéria permettraient à l’agent du préjudice de le reconnaître et de découvrir où il se trouve par l’intermédiaire de divers services sociaux. La SAR a rejeté cet argument en rappelant que l’agent du préjudice n’était pas un acteur étatique et qu’il n’avait pas les capacités de surveillance d’un gouvernement. Elle a également noté que le demandeur n’avait fourni aucun élément de preuve à l’appui de son affirmation voulant que ses « activités quotidiennes ordinaires » dans la ville proposée comme PRI auraient permis à l’agent du préjudice de le retrouver facilement dans une ville de plus de trois millions d’habitants. Le demandeur conteste l’affirmation selon laquelle il pourrait limiter certains aspects de sa présence sur les médias sociaux s’il souhaitait éviter que les présumés agents de persécution obtiennent ses coordonnées. Par ailleurs, comme le fait valoir le défendeur, la SAR n’a trouvé aucun élément de preuve indiquant que le demandeur avait déjà utilisé Twitter, et encore moins pour du réseautage à des fins professionnelles. Le défendeur ajoute que la SAR ne disposait pas non plus d’éléments de preuve indiquant que d’autres Nigérians travaillant dans le même secteur d’activité que le demandeur utilisaient Twitter pour obtenir des contrats. La SAR a tiré ses conclusions à bon droit.

[43] La SAR a également rejeté l’affirmation du demandeur concernant la corruption au sein des forces de l’ordre et la possibilité, pour la population, de soudoyer les policiers afin d’utiliser les ressources de l’État à des fins privées. Elle a pris acte des éléments de preuve concernant la corruption au sein de la police nigériane, mais, en définitive, elle a jugé que le demandeur ne faisait que supposer que le parent pouvait soudoyer la police sans fournir de preuve que ce dernier l’avait déjà fait dans le passé. En outre, la SAR a indiqué que l’ombre de la corruption policière dans l’ensemble du Nigéria et la simple possibilité que son parent ait pu soudoyer la police n’exposaient pas personnellement le demandeur à un risque de torture ou à une menace à sa vie dans la ville proposée comme PRI.

[44] La SAR a aussi raisonnablement demandé pourquoi le parent du demandeur serait toujours motivé à retrouver ce dernier en dépit du fait qu’il n’avait pas demandé à ce que les propriétés lui soient rendues depuis 2017. Elle a rappelé que, dans son témoignage, le demandeur avait confirmé avoir abandonné toute tentative d’obtenir les propriétés et avoir aidé sa mère, qui habitait l’une d’elles, à déménager. Malgré tout, le demandeur n’a pas été en mesure d’expliquer pourquoi son parent serait toujours motivé à le poursuivre.

[45] Vu l’ensemble des doutes qui ont été soulevés, la SAR a conclu que les agents du préjudice n’auraient pas les moyens ou la motivation nécessaires de retrouver le demandeur dans la ville proposée comme PRI; il s’ensuivait donc que ce dernier ne faisait face à aucune possibilité sérieuse de persécution ni à aucun risque de préjudice. L’évaluation de la SAR n’est pas déraisonnable et ne comporte aucun vice fondamental.

2) Caractère raisonnable du déménagement

[46] La SAR s’est ensuite penchée sur le deuxième volet du critère relatif à la PRI. En ce qui concerne la jurisprudence contraignante, la SAR souligne, à juste titre, et les deux parties en conviennent, que la Cour d’appel fédérale a fixé un seuil très élevé en ce qui concerne le « critère du caractère déraisonnable », en ce sens qu’il ne faut rien de moins que l’existence de conditions qui mettraient en péril la vie et la sécurité du demandeur. Il faut également une preuve réelle et concrète de l’existence de telles conditions. En l’espèce, la SAR a jugé que le demandeur n’avait pas fourni de preuve réelle et concrète de telles conditions de manière à franchir ce seuil élevé.

[47] Encore une fois, il est question d’appréciation de la preuve et d’inférences, des éléments que la Cour, en l’absence de circonstances exceptionnelles (comme je juge que c’est le cas en l’espèce), ne doit pas écarter.

[48] La SAR a reconnu que la preuve relative à la situation dans le pays faisait état de certaines difficultés que le demandeur pouvait rencontrer s’il déménageait dans la ville proposée comme PRI, mais a jugé que ces difficultés ne rendaient pas la PRI non viable pour autant.

[49] La SAR n’a pas accepté l’argument du demandeur selon lequel son incapacité de s’exprimer en anglais aurait nui à sa capacité de trouver un emploi. Elle a plutôt constaté qu’il avait lui-même déclaré, dans son formulaire Fondement de la demande d’asile, qu’il parlait yoruba et anglais, que son évaluation psychologique avait été effectuée en anglais et qu’il avait répondu régulièrement aux questions en anglais pendant l’audience devant la SPR. Elle a également noté que le demandeur n’avait pas précisé ce qui, dans sa situation, lui aurait causé des difficultés à trouver et à conserver un emploi dans la ville proposée comme PRI. Le demandeur a aussi fait valoir que la SPR avait commis une erreur en omettant d’examiner la question de l’identité autochtone. La SAR a indiqué que, même si les allochtones pouvaient faire l’objet de restrictions et de discrimination, la preuve relative à la situation dans le pays donnait à penser que de telles difficultés ne s’appliquaient pas dans un grand centre urbain tel que la ville proposée comme PRI. Je ne vois aucune raison d’intervenir à ces égards.

[50] La SAR a en outre rejeté l’argument du demandeur selon lequel la SPR n’avait pas dûment tenu compte des éléments de preuve signalant un accès limité aux services de santé mentale au Nigéria. Elle a plutôt constaté que la SPR avait expressément examiné la preuve présentée par le psychiatre du demandeur ainsi que d’autres documents démontrant que, de manière générale, les services publics étaient médiocres. Elle a reconnu l’existence de telles difficultés, mais a mentionné que, selon la preuve relative à la situation dans le pays, le traitement de la maladie mentale était possible dans les hôpitaux publics et qu’il n’existait aucune forme de maladie mentale pour laquelle un traitement n’était pas accessible au Nigéria. L’affirmation voulant que cet argument n’ait pas été pris en compte est sans fondement.

[51] Le demandeur soutient que la SAR n’a pas tenu compte des parties de son témoignage portant sur l’entreprise du parent dans la ville proposée comme PRI et le fait que ce parent est membre du parti au pouvoir au Nigéria. En tout respect, ces affirmations ont été examinées et, à supposer qu’elles ne l’aient pas été, il est bien établi que la SAR est présumée avoir examiné l’ensemble des observations et éléments de preuve à sa disposition et qu’elle n’est pas tenue de mentionner et d’examiner tous les aspects des affirmations d’un demandeur.

[52] Vu l’ensemble des constats qui ont été dressés et l’éventail de plaintes soulevées, qui ne sont pas toutes examinées dans les présents motifs, j’en viens à la conclusion que la SAR a raisonnablement conclu que la ville proposée comme PRI n’était pas objectivement déraisonnable compte tenu de la situation du demandeur.

[53] Cette conclusion, conjuguée à celle portant sur l’absence de risque sérieux de persécution, a amené la SAR à confirmer le fait que le demandeur disposait d’une PRI viable dans la ville proposée.

VII. Conclusion

[54] N’ayant rien observé de déraisonnable dans ce qui précède, je rejetterai la présente demande de contrôle judiciaire.

VIII. Question à certifier

[55] Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale à certifier, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑8213‑21

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant : La demande de contrôle judiciaire est rejetée, aucune question de portée générale n’est certifiée et aucuns dépens ne sont adjugés.

« Henry S. Brown »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑8213‑21

 

INTITULÉ :

LOOKMAN OLAMILEKAN AJAMOLE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 MARS 2023

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BROWN

DATE DES MOTIFS :

LE 10 MARS 2023

COMPARUTIONS :

Ariel Hollander

POUR LE DEMANDEUR

James Todd

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lewis & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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