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Date : 20230301

Dossier : IMM-4705-22

Référence : 2023 CF 285

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 1er mars 2023

En présence de monsieur le juge Andrew D. Little

ENTRE :

TERMEH ZIBADEL

ELHAM RAHIMI KESHARI

demanderesses

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La demande en l’espèce concerne deux décisions interdépendantes relatives à des demandes de permis d’études et de visa de résident temporaire présentées par une enfant de huit ans et sa mère, toutes deux citoyennes de l’Iran.

[2] La demanderesse principale dans la présente affaire est T, que j’appellerai la « demanderesse ». Elle sollicite l’annulation de la décision du 20 mars 2022 par laquelle un agent des visas a refusé de lui délivrer un permis d’études visé au paragraphe 216(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le RIPR). Le même jour, l’agent a également rejeté la demande de visa de résident temporaire présentée par la mère de T (la demande de VRT).

[3] L’agent n’était pas convaincu que les demanderesses quitteraient le Canada à la fin de leur séjour compte tenu du but de leur visite.

[4] Les demanderesses demandent à la Cour d’annuler les décisions au motif qu’elles sont déraisonnables suivant les principes énoncés dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 RCS 563. Elles font valoir également que l’agent, en rendant sa décision relative au permis d’études, a brimé leur droit à l’équité procédurale.

[5] Pour les motifs exposés ci-dessous, je conclus que la demande doit être accueillie parce que la décision relative au permis d’études était déraisonnable. Les deux décisions, soit le refus de délivrer le permis d’études et le rejet de la demande de VRT, seront annulées et les demandes seront renvoyées à un autre agent pour nouvelle décision.

I. Contexte

[6] La demanderesse d’âge mineur, T, est une citoyenne iranienne âgée de huit ans. Elle a terminé sa deuxième année à l’école primaire Masir Shenakht, en Iran, en 2022. Le 3 février 2022, elle a été acceptée en quatrième année à une école du district scolaire de North Vancouver pour l’année scolaire 2022-2023. Cette école est un établissement d’enseignement désigné au sens du paragraphe 220.1(1) du RIPR. Elle exige que tous les élèves de l’élémentaire soient accompagnés de leurs parents, qui doivent résider avec eux à North Vancouver, tout au long de l’année scolaire.

[7] Il s’agit de la deuxième demande de permis d’études de la demanderesse mineure. La première demande a été refusée le 5 août 2021.

[8] La mère de la demanderesse mineure, Mme Keshari, est la deuxième demanderesse dans la présente affaire. Elle a présenté une demande de VRT pour pouvoir accompagner sa fille au Canada. Elle a proposé de demeurer au Canada pendant quatre mois, le temps que sa fille s’installe. Les parents ont également pris des dispositions pour qu’un tuteur s’occupe de la demanderesse à West Vancouver; le nom, l’adresse et les coordonnées de cette personne ont été fournis. Le père de la demanderesse, Mehdi Zibadel, dirige une galerie et devait rester en Iran pendant les études de sa fille.

[9] La demande de permis d’études comprenait un plan d’études préparé par Mme Keshari et des documents attestant de la situation financière des parents.

[10] Le plan d’études traitait de certains sujets sous les rubriques suivantes :

[traduction]

  • Futur programme d’études

  • Études antérieures

  • Objectifs des études

  • Pourquoi avoir choisi le Canada? Pourquoi pas l’Iran ou des pays plus proches?

  • Soins et soutien

  • Mon itinéraire de voyage

  • Liens avec l’Iran

  • Fonds

[11] La demande comprenait par ailleurs six pages d’observations d’un consultant en immigration rédigées à simple interligne et datées du 14 mars 2022. Ce document visait à répondre aux motifs invoqués par l’agent pour rejeter une demande antérieure de permis d’études au Canada. L’agent saisi de la première demande de permis d’études avait apparemment jugé que le plan d’études afférent était vague et mal documenté, puis avait estimé que la famille n’était pas suffisamment bien établie pour que les études proposées constituent une dépense raisonnable.

[12] La lettre d’observations confirmait le dépôt à court terme de 33 900 $ versé conjointement par les parents dans un compte bancaire, des frais de scolarité payés d’avance de 16 000 $ et des frais de subsistance estimatifs pour la demanderesse et sa mère totalisant 14 000 $. Cette lettre contenait un tableau comparatif des droits de scolarité et des frais de subsistance pour différents parcours d’études au Canada, au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Allemagne, au Danemark, en Turquie, aux Émirats arabes unis et à Singapour. Elle expliquait les raisons pour lesquelles les parents n’avaient pas choisi une école iranienne et mentionnait aussi la jurisprudence de notre Cour, avec des extraits de décisions, qui allait dans le sens de la position des demanderesses.

II. Lettres de refus et notes du Système mondial de gestion des cas

[13] Dans des lettres distinctes datées du 20 mars 2022, l’agent a rejeté les demandes de permis d’études et de VRT des demanderesses. La lettre adressée à T expliquait que l’agent n’était pas convaincu qu’elle quitterait le Canada à la fin de son séjour, comme le requiert le paragraphe 216(1) du RIPR, compte tenu du but de sa visite. La lettre adressée à la mère de T indiquait que l’agent n’était pas convaincu qu’elle quitterait le Canada à la fin de la période de séjour, comme l’exige l’alinéa 179b) du RIPR, compte tenu du but de sa visite.

[14] La note suivante, datée du 20 mars 2022, est consignée dans le Système mondial de gestion des cas (le SMGC) relativement à la demande de permis d’études :

[traduction]

J’ai examiné la demande. La demandeure mineure a l’intention de fréquenter une école du district scolaire de North Vancouver. Le but de la visite en soi ne paraît pas raisonnable, étant donné que des programmes d’études semblables sont offerts plus près du lieu de résidence de la demandeure. La motivation de celle-ci à étudier au Canada ne semble pas raisonnable, étant donné qu’un programme comparable est offert dans son pays d’origine à une fraction du coût. Le but de la visite ne paraît pas raisonnable, compte tenu de la situation socioéconomique de la demandeure. Selon les documents versés au dossier qui visent à attester du degré d’établissement économique des parents, et compte tenu du but de la visite, je suis d’avis que les études envisagées au Canada ne constituent pas une dépense raisonnable ou correspondant à la capacité financière des parents. Après avoir soupesé les facteurs applicables dans le présent dossier, je ne suis pas convaincu que la demandeure quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable. La demande est rejetée.

[15] Les présents motifs porteront principalement sur le refus de délivrer le permis d’études, puisque la note consignée dans le SMGC concernant la demande de VRT de la mère montre que la décision relative à cette demande reposait entièrement sur le rejet de la demande de permis d’études. La note figurant dans le SMGC au sujet de la demande de VRT de la mère indique ce qui suit :

[traduction]

La cliente sollicite l’entrée au Canada pour accompagner un membre de sa famille qui demande un permis d’études. Le permis d’études du membre de la famille a été refusé. Pour les motifs qui précèdent, j’ai rejeté la présente demande.

[16] Il est clair que, si le refus de délivrer le permis d’études est annulé au motif qu’il était déraisonnable, la décision relative à la demande de VRT est également invalide.

III. Norme de contrôle et cadre législatif applicable

[17] Les parties sont d’accord, à juste titre, que la norme de contrôle applicable en l’espèce est celle de la décision raisonnable : voir Iyiola c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 324 aux para 11–14; Aghaalikhani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1080 au para 11.

[18] Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable constitue un examen déférent et rigoureux par lequel la Cour détermine si la décision de l’organisme administratif est transparente, intelligible et justifiée : Vavilov, aux para 12–13, 15. Les motifs du décideur constituent le point de départ du contrôle; ils doivent être interprétés de façon globale et contextuelle et lus en corrélation avec le dossier dont disposait le décideur. Une décision raisonnable est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti : Vavilov, notamment aux para 85, 91–97, 103, 105–106, 194; Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, [2019] 4 RCS 900 aux para 2, 28–33, 61.

[19] La juge Roussel, maintenant juge à la Cour d’appel fédérale, a décrit la norme de contrôle avec concision au paragraphe 13 de la décision Lingepo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 552 :

La norme de contrôle applicable à la révision d’une décision d’un agent des visas refusant une demande de permis d’études est celle de la décision raisonnable ([Vavilov], aux para 10, 16–17 […]; Nimely c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 282 au para 5 […]; Hajiyeva c Canada (Citoyenneté et Immigration) 2020 CF 71 au para 6). Même s’il n’est pas nécessaire d’avoir des motifs exhaustifs pour que la décision soit raisonnable étant donné les pressions énormes que subissent les agents des visas pour produire un grand volume de décisions chaque jour, la décision doit tout de même être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente, rationnelle et justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles (Vavilov au para 85). Elle doit aussi posséder « les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité » (Vavilov au para 99).

[20] Pour intervenir dans la présente affaire, la Cour doit relever dans la décision une erreur qui est suffisamment capitale ou importante pour rendre la décision déraisonnable : Vavilov, au para 100.

[21] La partie 12 du RIPR régit la façon dont les « Étudiants », en tant que catégorie réglementaire de personnes, peuvent devenir résidents temporaires du Canada. Selon l’article 213 du RIPR, l’étranger qui cherche à étudier au Canada doit, préalablement à son entrée au Canada, faire une demande de permis d’études. Selon le paragraphe 216(1), l’agent délivre un permis d’études à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, certains éléments sont établis. Il s’agit notamment des suivants : l’étranger quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable (alinéa 216(1)b)); l’étranger remplit les exigences prévues à la partie 12 (alinéa 216(1)c)); l’étranger a été admis à un programme d’études par un établissement d’enseignement désigné (alinéa 216(1)e)). Il incombe au demandeur de convaincre l’agent qu’il ne restera pas au Canada après l’expiration de son visa : Solopova c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 690 au para 10.

[22] Le législateur énonce de la même façon, à l’alinéa 179b) du RIPR, que l’agent doit être convaincu que la personne visée quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable.

IV. Analyse

[23] Les demanderesses ont fait valoir que les motifs invoqués par l’agent pour refuser de délivrer le permis d’études étaient arbitraires ou inintelligibles, car l’agent n’a relevé aucun élément de preuve ou document appuyant son raisonnement. À leur avis, les notes du SMGC étaient vagues en raison des termes utilisés, par exemple [traduction] « la visite en soi ne semble pas raisonnable », [traduction] « dépense raisonnable ou correspondant à la capacité financière des parents » et [traduction] « situation socioéconomique ». Selon les demanderesses, les notes du SMGC ne permettaient pas de connaître le processus de réflexion de l’agent, passaient sous silence les éléments de preuve qui contredisaient les conclusions de fait importantes et ne précisaient pas le fondement rationnel sous-tendant les conclusions qui ont été tirées.

[24] Je ne suis pas d’accord pour dire que, de façon générale, les motifs de l’agent sont arbitraires ou inintelligibles pour l’une ou l’autre de ces raisons. Je ne suis pas convaincu non plus que les mots et les expressions figurant dans les notes du SMGC sont si intrinsèquement vagues qu’ils portent à croire que la décision ne repose sur aucun fondement rationnel.

[25] Je passe aux arguments de la demanderesse selon lesquels, compte tenu de la jurisprudence applicable et du dossier, un ou plusieurs éléments de la décision de l’agent relative au permis d’études étaient déraisonnables.

[26] Les motifs consignés dans le SMGC se scindent essentiellement en deux conclusions, que l’agent a toutes deux liées au but de la visite proposée au Canada. Les demanderesses ont contesté les deux conclusions et présenté des observations supplémentaires soulignant les raisons pour lesquelles la décision ne possédait pas les caractéristiques d’une décision raisonnable.

[27] Afin de statuer sur la demande en l’espèce, j’analyserai successivement trois questions.

[28] Premièrement, la demanderesse contestait la partie suivante des notes du SMGC :

[traduction]

Le but de la visite ne paraît pas raisonnable, compte tenu de la situation socioéconomique de la demanderesse. Selon les documents versés au dossier qui visent à attester du degré d’établissement économique des parents, et compte tenu du but de la visite, je suis d’avis que les études envisagées au Canada ne constituent pas une dépense raisonnable ou correspondant à la capacité financière des parents.

[29] Les demanderesses ont soutenu que l’agent avait mal interprété la preuve montrant que les études proposées constituaient une dépense raisonnable compte tenu du [traduction] « degré d’établissement économique » de la famille de la demanderesse. Elles ont fait valoir que les parents avaient les moyens financiers de payer pour l’année d’études de leur fille au Canada et s’appuyaient à cet égard sur des éléments de preuve qui ne sont pas mentionnés expressément dans les motifs consignés dans le SMGC, soit : les frais de scolarité de 16 000 $ entièrement payés à l’avance; le solde de 33 900 $ dans le compte bancaire des parents de la demanderesse une fois les frais de scolarité payés; le fait que les parents étaient propriétaires d’un immeuble d’appartements en Iran qui avait été acheté pour plus de 1,2 million de dollars en 2021; le revenu combiné des parents, qui dépassait 8 000 $ par mois. S’appuyant sur cette preuve, les demanderesses affirmaient qu’il était déraisonnable pour l’agent de conclure que les études proposées ne constituaient pas une dépense raisonnable ou correspondant à la capacité financière des parents.

[30] Selon le défendeur, les notes du SMGC précisaient que l’évaluation de l’agent était fondée sur [traduction] « les documents au dossier concernant le degré d’établissement économique des parents et [tenait compte] du but de la visite ». Le défendeur a souligné que, dans la demande, les frais de subsistance avaient été estimés à 10 000 $ ou à 14 000 $ pour l’année (créant une fourchette entre ces deux chiffres), ce qui signifiait qu’ils représenteraient plus du tiers des économies des parents. Le défendeur s’est reporté au raisonnement décrit au paragraphe 18 de la décision Jafari c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1761, qui concernait le refus de délivrer un permis d’études à une élève ayant presque le même âge que la demanderesse T en l’espèce :

[18] Les demanderesses soutiennent également que la décision de l’agent est déraisonnable au motif qu’il n’a pas tenu compte des moyens financiers et des autres éléments d’actif disponibles pour les études de Mlle Jafari. Je ne suis pas de cet avis. Le défendeur a fait valoir que ce programme d’études, d’une durée d’un an seulement, engloutirait plus du tiers des économies combinées des parents de Mlle Jafari. Le défendeur est généreux lorsqu’il mentionne [traduction] « plus du tiers »; comme je le mentionne plus haut, le coût est en fait plus proche de la moitié de leurs économies actuelles. Les notes de l’agent révèlent qu’il [traduction] « [a] soupesé les facteurs dans la demande », y compris la documentation versée au dossier pour appuyer le niveau d’établissement économique des parents de Mlle Jafari. Cette observation, combinée aux remarques du défendeur sur la part d’économies qui serait consacrée à cette année d’études, montre que l’agent s’est penché sur la question de la faisabilité financière de ce programme pour une mineure de 7 ans faisant sa deuxième année du primaire dans un pays étranger situé à plus de dix mille kilomètres de chez elle. Dans les circonstances, eu égard à l’âge de Mlle Jafari, au coût du voyage en Iran pour rendre visite à son père, au coût de la vie au Canada et aux futurs droits de scolarité, la décision de l’agent possède les caractéristiques d’une décision raisonnable : elle est justifiée, transparente et intelligible.

[31] Même si les observations des demanderesses en l’espèce s’apparentaient à des arguments sur le fond de la question en litige, il reste que le contrôle judiciaire ne vise pas à déterminer si la Cour pourrait tirer une conclusion différente de celle de l’agent en fonction de la preuve qui a été présentée. La cour de révision doit en fait s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur. Elle ne doit pas non plus trancher elle-même la question qui était soumise au décideur et doit respecter le rôle ainsi que l’expertise de ce dernier : Vavilov, aux para 75, 83, 125.

[32] Par conséquent, la question est plutôt de savoir si l’agent a rendu sa décision en respectant les contraintes factuelles rattachées au dossier. À mon avis, les demanderesses n’ont pas démontré l’existence d’une telle erreur. Bien qu’un demandeur puisse avancer des raisons valables pour expliquer son choix d’étudier au Canada malgré un coût comparativement plus élevé, il était loisible à l’agent de tirer une conclusion sur cet aspect à partir de la preuve et des observations présentées. Le dossier des demanderesses comportait deux estimations différentes de leurs frais de subsistance au Canada, soit 10 000 $ et 14 000 $. Ces chiffres représentent environ de 30 à 40 % de leurs économies en espèces. La demande ne contenait aucun détail supplémentaire, notamment les dépenses ou les dettes des parents, que ce soit en lien avec leur revenu mensuel ou leur immeuble d’appartements (y compris les revenus tirés de cet immeuble). Je ne peux pas conclure que l’agent s’est fondamentalement mépris sur la preuve ou encore qu’il a fait abstraction ou n’a pas tenu compte d’un élément de preuve essentiel allant à l’encontre de sa conclusion : Vavilov, aux para 101, 125–126; Gordillo c Canada (Procureur général), 2022 CAF 23 au para 62; Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, art 18.1(4)d).

[33] Deuxièmement, les demanderesses ont remis en question le caractère raisonnable des énoncés suivants dans les notes du SMGC :

[traduction]

Le but de la visite en soi ne paraît pas raisonnable, étant donné que des programmes d’études semblables sont offerts plus près du lieu de résidence de la demandeure. La motivation de celle-ci à étudier au Canada ne semble pas raisonnable, étant donné qu’un programme comparable est offert dans son pays d’origine à une fraction du coût.

[34] Les demanderesses ont soutenu que cet énoncé était [traduction] « tout simplement inintelligible », en raison d’éléments de preuve insuffisants à l’appui de cette conclusion de fait (faisant référence à la décision Aghaalikhani, au para 20) et de l’absence d’explications (faisant référence à la décision Yuzer c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 781 au para 21). Elles ont fait valoir que l’agent n’avait mentionné aucune autre solution accessible localement en Iran ni les coûts qui y seraient associés.

[35] L’appréciation du caractère raisonnable de cette question repose sur « les motifs particuliers donnés par l’agent des visas, compte tenu des observations et des éléments de preuve particuliers présentés par la demanderesse » : Afuah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 596, aux para 13–14.

[36] Même si l’agent déclare expressément avoir examiné la demande et précise que [traduction] « [l]a demandereure mineure a l’intention de fréquenter une école du district scolaire de North Vancouver », les motifs consignés dans le SMGC semblent être constitués essentiellement d’énoncés types. Les mêmes énoncés ont été utilisés dans d’autres décisions relatives à des permis d’études qui ont fait l’objet d’un contrôle devant la Cour : voir Jafari, au para 8; Hassanpour c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1738 au para 5; Torkestani c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2022 CF 1469 au para 5; Soltaninejad c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1343 au para 4.

[37] Dans la décision Ekpenyong c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 1245, le juge Pamel a reconnu qu’il est permis d’utiliser un gabarit dans les décisions relatives aux permis d’études. Cependant, il a également souligné que, « lorsqu’ils utilisent des gabarits, les agents des visas devraient y apporter les modifications nécessaires ou rendre des motifs qui révéleraient leur raisonnement de manière intelligible, et ils devraient traiter des éléments de preuve pouvant contredire d’importantes conclusions factuelles » : Ekpenyong, aux para 22–23. Je suis d’accord.

[38] Les principaux motifs avancés par les parents de la demanderesse pour justifier qu’elle étudie au Canada étaient fondés sur le manque de similitude entre le programme d’études offert à son école de Téhéran et l’éducation qu’elle recevrait au Canada. Dans le plan d’études, la mère de la demanderesse a déclaré que l’expérience acquise par sa fille à l’école de North Vancouver lui permettrait de se forger une identité d’une manière qui pourrait avoir une incidence sur ses futures études en Iran et que la fréquentation d’une école à Vancouver l’aiderait à certains égards :

  • La demanderesse pourrait faire ses apprentissages au moyen d’expériences et de projets concrets qui lui permettront de développer ses habiletés pratiques et sa créativité. [traduction] « Cette possibilité n’est pas offerte en Iran non plus, puisque l’accent est mis sur les livres et la théorie dans l’enseignement ».

· Elle pourrait [traduction] « avoir accès aux technologies de pointe et aux meilleures installations », ce qui est rare en Iran, et elle pourrait se familiariser avec la technologie appliquée à des fins éducatives.

· Elle pourrait participer à diverses activités parascolaires, ce qui est impossible en Iran parce que l’enseignement accorde là-bas trop d’attention aux matières principales et ne valorise pas les activités parascolaires.

· Elle pourrait bénéficier d’un environnement multiculturel et axé sur la collaboration. La population étudiante diversifiée de l’école, composée d’élèves locaux et internationaux, en fait un endroit riche et passionnant pour apprendre, étudier, jouer et créer des souvenirs et des amitiés pour la vie.

[Non souligné dans l’original.]

[39] Le plan d’études mentionnait également qu’une école [traduction] « sûre et multiculturelle » serait profitable à la demanderesse et que [traduction] « la fréquentation d’une école mixte la préparerait aux interactions du monde réel, ce qui n’est pas le cas des écoles non mixtes en Iran » [non souligné dans l’original].

[40] De même, le consultant en immigration a expliqué dans ses observations les raisons pour lesquelles les parents n’avaient pas choisi une option accessible localement pour leur fille et a comparé le contexte scolaire en Iran et au Canada :

  • Les « activités parascolaires comme les sports, les arts et la musique ne sont pas grandement valorisées dans les écoles iraniennes alors qu’elles peuvent permettre à la demanderesse de définir sa propre identité et de s’épanouir socialement ».

  • Les parents de la demanderesse « rejettent la ségrégation entre les garçons et les filles qui existe dans les écoles iraniennes; ils veulent que leur fille bénéficie de cette ouverture pendant ses études et considèrent que sa scolarisation au Canada lui permettra d’apprendre à avoir un esprit libre et d’acquérir des compétences sociales cruciales ».

  • Le système éducatif iranien est « davantage axé sur les notes que sur le développement des habiletés et des talents des élèves ».

  • « Les programmes scolaires sont de nature théorique et répondent à des normes malheureusement peu élevées ».

  • « Les options accessibles localement ne sont pas dotées d’installations enviables et de laboratoires bien équipés ».

[Non souligné dans l’original.]

[41] L’agent a conclu, sans autre explication, que les cours ou les programmes offerts en Iran étaient semblables ou comparables à ceux du Canada. Dans des décisions antérieures où les motifs ne comportaient pas d’explications détaillées, la Cour a conclu que l’absence d’éléments de preuve au dossier sur les options accessibles localement, conjuguée à l’omission de tenir compte de la preuve concernant les raisons pour lesquelles un demandeur souhaite étudier au Canada, constituait une erreur susceptible de contrôle et/ou soulevait de sérieuses préoccupations quant à la justification ou à la transparence des motifs de l’agent : voir Torkestani, aux para 10–14; Afuah, au para 15; Aghaalikhani, au para 20; Yuzer, aux para 21–22. En l’espèce, l’absence de toute explication dans les notes du SMGC porte à croire que l’agent n’a pas tenu compte d’un aspect fondamental du projet d’études envisagé dans la demande de permis d’études en cause, à savoir les différences entre l’Iran et le Canada pour ce qui est des possibilités d’éducation offertes à la demanderesse. Lorsqu’il a déclaré que les cours ou les programmes étaient similaires ou comparables et qu’il a tiré sur cette question une conclusion défavorable à la demande de permis d’études, l’agent n’a pas reconnu ni pris en compte les éléments de preuve qui contredisaient sa conclusion, et il ne s’est pas attaqué de façon significative aux principaux arguments formulés par les parents de la demanderesse : Vavilov, aux para 125–128. Il était nécessaire de donner certaines explications, même brèves, dans les circonstances. La décision n’en contient aucune et n’a donc pas fourni de motifs transparents et justifiés à l’appui de la conclusion qui est tirée.

[42] Contrairement à ce qu’affirme le défendeur, les observations concernant les avantages des études internationales qui ont été déposées relativement à la demande de permis d’études n’étaient pas vagues au point qu’il était justifié pour l’agent de simplement les ignorer. Contrairement à la décision Farnia, sur laquelle s’appuie le défendeur, les notes du SMGC en l’espèce ne qualifient pas le plan d’études de vague et l’agent ne considère pas non plus qu’il s’agit de commentaires généraux élogieux ou de généralisations catégoriques : Farnia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 511 au para 16.

[43] Le défendeur s’est reporté également à l’arrêt de la Cour d’appel fédérale Zeifmans LLP c Canada, 2022 CAF 160, pour justifier le raisonnement de l’agent, faisant valoir que le contenu du dossier étayait la décision. Dans cette affaire, un cabinet comptable soutenait que le ministre, en n’ayant jamais fourni une interprétation explicite de la disposition dans sa décision, « n’avait jamais réfléchi à l’interprétation » de l’article en cause, ce qui rendait la décision déraisonnable. La Cour d’appel fédérale n’était pas de cet avis. Dans les motifs rendus à l’audience, elle a déclaré ce qui suit :

[9] Nous ne pouvons accepter cet argument. L’arrêt Vavilov ne s’arrête pas là. Il nous enseigne que les cours de révision ne doivent pas insister pour que les motifs soient aussi explicites, longs et détaillés que si elles les avaient elles‑mêmes rédigés si on les avait saisies de cette tâche (Vavilov aux para. 91 à 94). Exiger qu’il en soit ainsi pourrait miner l’intention du législateur qui était de rendre les processus administratifs efficaces, efficients et diligents.

[10] L’arrêt Vavilov nous en dit davantage. Selon l’arrêt, une décision administrative doit être maintenue si la cour de révision peut discerner à partir du dossier les raisons motivant la décision et que cette décision est par ailleurs raisonnable (Vavilov aux para.120 à 122; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Mason, 2021 CAF 156 aux para. 38 à 42). En d’autres termes, il n’est pas nécessaire que les motifs fassent référence à tous les points essentiels. Ces motifs peuvent être implicites ou sous-entendus. En examinant l’ensemble du dossier, la cour de révision doit avoir la certitude que le décideur administratif était bien au fait des questions litigieuses importantes, notamment des questions d’interprétation législative, pour en arriver à ses décisions, en vérifiant ce qui est explicite dans les motifs ou ce qui est implicite ou sous-entendu dans le dossier.

[44] Dans l’arrêt Zeifmans, la Cour d’appel fédérale a affirmé que, « pour obtenir cette certitude », il suffisait d’examiner le dossier dont disposait le ministre et la décision du ministre : la cour pouvait ainsi connaître le point de vue du ministre, le ministre était conscient de la disposition en cause, il a adopté de façon implicite ou sous-entendue une interprétation de cette disposition qui était conforme à plusieurs arrêts contraignants de la Cour d’appel fédérale et il a appliqué raisonnablement cette interprétation aux faits de l’espèce : Zeifmans, au para 11.

[45] Le contexte juridique et factuel dans lequel s’inscrivait la décision du ministre dans l’arrêt Zeifmans et celui qui entourait la décision de l’agent en l’espèce relativement au permis d’études présentent de grandes différences. Cependant, comme le laisse entendre le défendeur en s’appuyant sur le raisonnement de la Cour d’appel fédérale, l’approche adoptée dans l’arrêt Zeifmans ne se limite pas à l’examen de décisions ministérielles et s’applique plus largement aux instances de contrôle judiciaire. Elle concerne le rôle de la cour de révision et le processus que suit cette dernière lorsqu’elle examine les motifs d’un décideur en fonction du contexte et du dossier dont disposait le décideur, par exemple dans les cas où la décision est brève ou reprend peut-être des gabarits sans exposer de raisonnement explicite sur un point quelconque.

[46] Il est clair que la cour de révision peut examiner le contenu du dossier dont disposait le décideur pour déterminer si la décision est justifiée : Vavilov, aux para 91–96. Selon l’arrêt Zeifmans, la cour de révision doit avoir une certaine confiance qu’une lacune possible ou un aspect du raisonnement qui « ne ressort pas à l’évidence des motifs eux-mêmes » (Vavilov, au para 94) peuvent être comblés par quelque chose de sous-entendu ou d’implicite : Zeifmans, aux para 10–11. De même, dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a confirmé que la cour de révision peut « relier les points sur la page quand les lignes, et la direction qu’elles prennent, peuvent être facilement discernées » : Vavilov, au para 97, citant Komolafe c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 431 au para 11 (non souligné dans l’original). Cette confiance confirme le bien-fondé de l’importance accordée à une justification adéquate de la part du décideur et permet de faire en sorte que le tribunal exerce son pouvoir de surveillance limité : Vavilov, au para 96; Alexion Pharmaceuticals Inc c Canada (Procureur général), 2021 CAF 157, aux para 8–10.

[47] Le tribunal peut obtenir la confiance nécessaire à partir du contexte institutionnel et du dossier dont disposait le décideur, c’est-à-dire par exemple les transcriptions de l’audience, les observations des parties, les décisions antérieures du décideur, ainsi que les politiques et les bulletins : Vavilov, aux para 94, 96, 103, 303; Yu v Richmond (City), 2021 BCCA 226 aux para 99–102. Il semble particulièrement important pour le tribunal d’avoir un degré de confiance élevé avant de conclure, sur la seule base de la preuve factuelle, qu’un élément qui n’apparaît pas dans les motifs du décideur est implicite ou sous-entendu.

[48] En l’espèce, le raisonnement suivi dans l’arrêt Zeifmans n’aide pas le défendeur. Les notes de l’agent consignées dans le SMGC confirment qu’il y a eu un examen de « la demande ». Cependant, le reste des notes ne mentionne pas expressément ou implicitement le plan d’études ou les observations, ni leur contenu (c.-à-d. les raisons avancées par les demanderesses pour justifier les études proposées pour T au Canada). Après avoir lu les notes du SMGC de concert avec le dossier, je ne suis pas convaincu que l’agent a tenu compte du plan d’études et qu’il s’est attaqué de façon significative aux observations correspondantes qui figurent dans la lettre du consultant en immigration. En d’autres termes, je doute sérieusement que l’agent ait été conscient des principales préoccupations soulevées par la demanderesse dans ces documents au sujet des différences entre l’Iran et le Canada qui y sont mises en lumière en ce qui concerne les possibilités d’éducation. Je ne peux pas imposer ma propre conclusion en l’espèce, élaborer mes propres motifs pour appuyer la décision ou deviner ce que l’agent doit avoir pensé. Je ne me livrerai pas non plus à une forme de paréidolie judiciaire à partir du contenu du dossier factuel présenté à l’agent.

[49] Comme je l’ai mentionné, les termes utilisés dans les notes du SMGC semblent provenir d’un gabarit. Conformément aux décisions de la Cour relatives aux permis de travail, je ne trouve rien de déraisonnable en soi au fait de recourir à un libellé concis ou à un gabarit dans le contexte d’une demande de permis d’études : voir Vahora c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 778 au para 38; Bagga c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 454 au para 20; Ekpenyong, aux para 22–23. Cependant, l’utilisation d’un gabarit ou d’un libellé standard n’enlève rien à la nécessité d’être attentif aux éléments de preuve et aux observations spécifiques qui résident au cœur de chaque demande : Vavilov, au para 127; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Mason, 2021 CAF 156 au para 34; Hashemi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1562, aux para 3, 14, 35 (qui mentionne les décisions Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 77 au para 17 et Motlagh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1098 au para 22). Les préoccupations soulevées dans la présente affaire mettent en lumière les dangers de recourir à un libellé standard, sans ajout adapté à la demande de permis d’études en cause, dans la rédaction des motifs d’une décision.

[50] À mon avis, ces réserves liées à un des deux principaux motifs énoncés dans les notes du SMGC jettent un doute sur le caractère raisonnable du refus.

[51] Troisièmement, les demanderesses ont présenté des plaidoiries générales écrites au sujet de l’omission, par l’agent, de tenir compte des liens personnels de la demanderesse avec l’Iran (y compris avec son père, qui serait demeuré en Iran pendant toute la durée de son séjour, et sa grand-mère) ainsi que des liens financiers et d’emploi des parents avec l’Iran (dont la longue et fructueuse carrière de la mère chez un seul employeur). Les liens des demanderesses avec l’Iran sont manifestement pertinents quant à la question de savoir si les demanderesses quitteraient le Canada à la fin de leur séjour, comme le soulignent les deux lettres de refus.

[52] Même s’il ne s’agissait pas d’un élément important des observations présentées à l’audience devant la Cour, l’absence de toute mention des liens avec l’Iran dans les notes du SMGC – ce qui aurait vraisemblablement été un facteur positif pour la demanderesse – contribue à la perte de confiance de la Cour envers la décision.

[53] L’analyse qui précède mène à la conclusion que la décision relative au permis d’études doit être annulée parce qu’elle est déraisonnable. Comme je l’ai déjà mentionné, la même conclusion s’ensuit concernant le rejet de la demande de VRT.

[54] Il est inutile de commenter l’observation des demanderesses selon laquelle l’agent n’a pas examiné les documents de la demande en raison de son parti pris et du fait qu’il soupçonnait, sans fondement, que la demanderesse n’était pas véritablement une élève, ni non plus les plaidoiries relatives au manquement à l’équité procédurale.

V. Conclusion

[55] Pour les motifs exposés ci-dessus, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie. Les deux décisions seront annulées et les demandes seront renvoyées pour nouvelle décision.

[56] Aucune des parties n’a proposé de question à certifier en vue d’un appel, et aucune question ne sera énoncée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-4705-22

  1. Les décisions du 20 mars 2022 par lesquelles l’agent a refusé de délivrer un permis d’études à la demanderesse mineure et un visa de résident temporaire à la demanderesse adulte sont toutes deux annulées.

  2. Les deux demandes sont renvoyées à un décideur différent pour nouvelle décision.

  3. Aucune question n’est certifiée aux fins d’un appel aux termes de l’alinéa 74d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

« Andrew D. Little »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4705-22

INTITULÉ :

TERMEH ZIBADEL et ELHAM RAHIMI KESHARI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 JANVIER 2023

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE A.D. LITTLE

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 1ER MARS 2023

COMPARUTIONS :

Alireza Eftekhardadkhah

POUR LES DEMANDERESSES

Mary Murray

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Alireza Eftekhardadkhah

Infinity Law Corporation

Victoria (Colombie‑Britannique)

 

POUR LES DEMANDERESSES

Kimberly Sutcliffe

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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