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Date : 20011206

Dossier : T-806-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1340

ENTRE :

                                                        FAITH S. BRADLEY-SHARPE

                                                                                                                                                  demanderesse

                                                                                   et

                  LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

                                                                                                                                                   défenderesse

                                                                                   et

                                                 LA BANQUE ROYALE DU CANADA

                                                                                                                                                   défenderesse

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]                 Il s'agit d'une requête de Mme Faith Bradley-Sharpe qui est fondée sur les règles 392(2) et 399(2) des Règles de la Cour fédérale [ci-après appelées les Règles].

[2]                 Voici le libellé de la règle 392(2) :



(2) Sauf disposition contraire de l'ordonnance, celle-ci prend effet au moment où elle est consignée et signée par le juge ou le protonotaire qui préside ou, dans le cas d'une ordonnance rendue oralement en audience publique dans des circonstances telles qu'il est en pratique impossible de la consigner, au moment où elle est rendue.

392.(2) Unless it provides otherwise, an order is effective from the time that it endorsed in writing and signed by the presiding judge or prothonotary or, in the case of an order given orally from the bench in circumstances that render it impracticable to endorse a written copy of the order, at the time it is made.      


[3]                 La règle 399(2) des Règles énonce ce qui suit :


(2) La Cour peut, sur requête, annuler ou modifier une ordonnance dans l'un ou l'autre des cas suivants :

a) des faits nouveaux sont survenus ou ont été découverts après que l'ordonnance a été rendue;

b) l'ordonnance a été obtenue par fraude.

399.(2) On motion, the Court may set aside or vary an order

(a) by reason of a matter that arose or was discovered subsequent to the making of the order; or

(b) where the order was obtained by fraud.


[4]                 Dans l'ouvrage de D. Sgayias et al intitulé Federal Court Practice 2000 (Toronto : Carswell, 2001), les commentaires suivants figurent à la page 756, sous la règle 399 :

[TRADUCTION]

La règle 399 permet à la Cour d'infirmer ou de modifier une ordonnance dans trois cas :

-              lorsque l'ordonnance a été rendue en l'absence d'une autre partie;

-              lorsqu'un fait nouveau est survenu;

-              lorsque l'ordonnance a été obtenue par fraude.

[5]                 La demanderesse, qui se représente elle-même, demande par la présente requête l'annulation de l'ordonnance que le juge Denault a rendue le 22 août 2001.

[6]                 Dans l'ordonnance en question, le juge Denault a accordé la réparation suivante à la défenderesse, La Banque Royale du Canada :

[TRADUCTION] La défenderesse dispose d'un délai de 15 jours suivant la date à laquelle elle recevra les documents de la Commission canadienne des droits de la personne pour déposer son affidavit.

CARACTÈRE DÉFINITIF D'UNE ORDONNANCE


[7]                 Il importe de souligner que les règles de droit favorisent nettement la reconnaissance du caractère définitif des ordonnances rendues par les tribunaux afin d'assurer la certitude des transactions en litige et l'intégrité de la procédure judiciaire, ainsi qu'il en a été décidé dans les arrêts Nu-Pharm Inc. c. Canada (procureur général), [2000] 1 C.F. 463 (C.A.F.), et Zolfiqar c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [1998] A.C.F. n ° 1790 (C.F. 1re inst.). La demanderesse confirme elle-même cette règle lorsqu'elle écrit ce qui suit à la page 4 de son dossier de requête :

[TRADUCTION] [...] dans le passé, les tribunaux se sont montrés réticents à modifier une ordonnance ou un jugement en raison du caractère définitif de celui-ci [...]

[8]                 De plus, toute demande visant à infirmer un jugement est exceptionnelle et doit être présentée avec diligence raisonnable, comme la Cour en a décidé dans Moutisheva c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. n ° 988.

[9]                 Par ailleurs, dans l'arrêt Zeneca Pharma Inc. c. Canada (ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2000), 196 D.L.R. (4th) 299 (C.A.F.), le juge Strayer a statué comme suit :

[par. 6 ] [...] La règle 399 ne saurait permettre la réforme d'un jugement chaque fois qu'un changement se produit sur le plan factuel.

[10]            La demanderesse invoque l'arrêt Annacis Auto Terminals (1997) Ltd. c. Cali (Le), [1999] A.C.F. n ° 1579 (C.F. 1re inst.), où le protonotaire Hargrave a défini le critère à trois volets rigoureux à établir pour obtenir la modification ou l'annulation d'une ordonnance:

[par 20] [...] La règle 399 prévoit une exception, mais la partie qui présente la requête doit satisfaire un critère très rigoureux pour obtenir la modification ou l'annulation d'une ordonnance. Le critère est à trois volets : premièrement, il doit y avoir de nouveaux faits établis ou découverts après le prononcé de l'ordonnance; deuxièmement, la partie qui présente la requête doit démontrer que les nouveaux faits n'auraient pu être découverts plus tôt malgré qu'elle ait exercé une diligence raisonnable; et, troisièmement, il faut établir que si les nouveaux faits avaient été mis en preuve dans l'action, l'ordonnance aurait probablement été différente : voir Re Saywack c. Canada (M.E.I.), [1986] 3 C.F. 189 (C.A.F.), à la p. 201 et suivantes, approuvant Dumble v. Cobourg and Peterbrough R.W. Co. (1881), 29 Gr. 121 (Ont. Ch.) et Canada c. Palmier (1998), 137 F.T.R. 71, à la page 73.


[11]            La demanderesse a scindé son dossier de requête en trois parties correspondant aux trois volets du critère énoncé ci-dessus. Toutefois, les arguments de la demanderesse ne sont pas clairs et il est difficile d'en saisir la portée. Si la demanderesse invoque l'alinéa 399(2)a) des Règles, elle doit prouver l'existence d'un nouveau fait. Toutefois, si elle se fonde sur l'alinéa 399(2)b) des Règles, elle doit énoncer une allégation de fraude claire.

[12]            À mon avis, la demanderesse invoque le critère pertinent qui est énoncé dans l'arrêt Annacis pour demander la modification ou l'annulation d'une ordonnance en application de la règle 399(2)a) des Règles; toutefois, elle ne démontre « aucun fait nouveau qui est survenu ou qui a été découvert après que l'ordonnance a été rendue » en l'espèce. Il semble que la demanderesse a réuni trop de questions différentes et a tenté de jumeler chacune d'elles avec l'un ou l'autre des volets du critère applicable. Cette façon de procéder n'est tout simplement pas acceptable et ne permet pas de satisfaire au critère.

[13]            À mon avis, l'objet de la requête est confus. La demanderesse n'indique aucune raison pour laquelle l'ordonnance du juge Denault devrait être infirmée. Or, une demande visant à infirmer un jugement est une demande très sérieuse qui ne doit être accueillie que dans des circonstances exceptionnelles.


                                                                     ORDONNANCE

[14]            En conséquence, la requête est rejetée.

                  « Pierre Blais »                                                                                                                                                      Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 6 décembre 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


                                                    COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                              T-806-01

INTITULÉ DE LA CAUSE :                          Faith S. Bradley-Sharpe c. La Commission canadienne des droits de la personne et al

REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE

SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET

ORDONNANCE PAR :                                   Monsieur le jugeBlais

DATE DES MOTIFS :                                     le 6 décembre 2001

OBSERVATIONS ÉCRITES PAR :

Mme Faith S. Bradley-Sharpe                               POUR LA DEMANDERESSE en son propre nom

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mme Faith S. Bradley-Sharpe                               POUR LA DEMANDERESSE en son propre nom

Services juridiques de la

Commission canadienne des                                 POUR LA DÉFENDERESSE

droits de la personne                                             (Commission canadienne des droits de la personne)

Ottawa (Ontario)

Stewart McKelvey Stirling Scales                       POUR LA DÉFENDERESSE

Halifax (Nouvelle-Écosse)                                   (Banque Royale du Canada)

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