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Date : 20050415

 

Dossier : IMM-8297-04

 

Référence : 2005 CF 511

 

Ottawa (Ontario), le 15 avril 2005

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

 

 

ENTRE :

 

                                    ANDRES ALEJANDRO RAMIREZ CEVALLOS

                                       CARMEN GERARDA RAYGADA TRELLES

                                       DANIELA EUGENIA RAMIREZ RAYGAGA

                                           DIEGO ANDRES RAMIREZ RAYGAGA

 

                                                                                                                         Partie demanderesse

 

                                                                             et

 

 

                                                           LE MINISTRE DE LA

                                        CITOYENNETÉ ET DE L=IMMIGRATION

                                                                             

                                                                                                                           Partie défenderesse

 

 

 

                               MOTIFS DE L=ORDONNANCE  ET ORDONNANCE

 

 

 


[1]               Il s=agit d=un demandeur principal et sa famille, tous ressortissants du Pérou.  La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l=immigration et du statut de réfugié (* le tribunal +) a déterminé que les demandeurs n=étaient ni réfugiés au sens de la Convention selon l=article 96, ni des personnes à protéger selon l=article 97 de la Loi sur l=Immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001) c. 27.

 

CONTEXTE FACTUEL

[2]        M. Cevallos et sa famille allèguent avoir une crainte de persécution en raison de leurs opinions politiques et de leur appartenance à un groupe social, la famille.

 

[3]               Andres, le demandeur principal, était le président d=un comité de quartier à Talarita, dans la ville de Piura au Pérou.  Il allègue que parce qu=il a défendu les droits des habitants du quartier et qu=il a dénoncé un député pour détournement de fonds et abus de pouvoir, il est persécuté par ce dernier et par la police qui collabore avec lui.  Le député aurait promis de l=argent au comité pour des améliorations dans la communauté et il aurait gardé cet argent pour des fins personnels.

 

[4]               Il allègue être menacé par le député, détenu et torturé par la police du 17 au 19 décembre 2002 sous faux chefs d=accusation.  Craignant pour sa vie et pour celle de sa famille, le demandeur obtient des passeports pour ses enfants et la famille part pour Lima au mois de janvier 2003.  Ayant été retracés par les autorités, les demandeurs décident de quitter le Pérou.  Il se dirigent vers les États-Unis et arrivent à la  frontière canadienne le 19 mars 2003 où ils réclament l=asile.    

 

 


DÉCISION CONTESTÉE

[5]        Lors de l=audience devant le tribunal, il a été déterminé qu=il y avait trop d=incohérences dans le témoignage oral du demandeur pour croire au bien fondé de son histoire.

 

[6]               Le tribunal a déterminé que les explications du demandeur au sujet des activités qu=il avait organisées dans sa communauté en tant que président de comité de quartier à Talarita, avaient été  * difficile, vague et hésitant +

 

[7]               Ces explications de fonds octroyés par les autorités étaient invraisemblables.   Selon le tribunal il serait invraisemblable que les autorités versent une aide financière à un comité de quartier contre lequel elles-mêmes n=ont cessé de dresser des obstacles pour l=empêcher d=avoir une existence légale.

 

[8]               Certaines entreprises versaient des dons à son comité pour aider avec le matériel nécessaire pour entreprendre les services offerts.  Demandé à expliquer pourquoi les entreprises donneraient des dons à un organisme qui n=est pas légalement enregistré, le demandeur a témoigné que les entreprises voulaient aider la communauté et qu=elles recevaient probablement des exemptions d=impôts.  Le tribunal trouvait que son explication du système d=impôt n=était pas satisfaisante.

 

[9]               Le tribunal ne croyait non plus au témoignage du demandeur qu=il aurait fait signer une pétition par 200 personnes du quartier pour donner au député en appuie de sa demande d=aide financière, et qu=il n=aurait gardé aucune copie pour ses dossiers.

 

[10]           L=avocat du demandeur au Pérou s=était présenté au bureau de la DIRCOTE (unité spéciale antiterroriste) une première fois en tant qu=ami pour s=informer de la détention du demandeur et une deuxième fois en tant qu=avocat pour recevoir de l=information au sujet de son dossier.  Le tribunal a jugé qu=il était incohérent que l=avocat se présente au poste de police sans s=identifier en tant qu=avocat et que, de plus, le demandeur n=avait présenté aucune lettre ou rapport indiquant le fruit des démarches de son avocat, laissant le tribunal à croire qu=il n=avait pas été détenu, ni torturé par la DIRCOTE.

 

[11]           Invité à expliquer pourquoi la nouvelle présidente du comité aurait mentionné les incidents qui s=étaient passés avec le député dans une lettre adressée au demandeur après son arrivée au Canada, le demandeur n=aurait offert aucune explication.  

 

[12]           Le demandeur avait aussi témoigné de décider de partir du Pérou au mois de février 2003, tandis qu=il avait obtenu des passeports pour ses enfants au mois de janvier, indiquant qu=il n=avait aucune peur subjective.

 

[13]           Ces conclusions de la part du tribunal sont clairement des erreurs.

 


ANALYSE

[14]      La Cour peut accepter l=argument que quelques erreurs non-importantes ou non-déterminantes ne peuvent pas vicier la décision au complet (Miranda v. Canada (Minister of Employment and Immigration), [1993] F.C.J. No. 437 (QL)). 

 

[15]           Il est cependant difficile pour la Cour d=accepter que toute conclusion soumise par le tribunal pour supporter son refus d=une application de réfugié soit incohérente avec la preuve au dossier.  La Cour doit intervenir dans un tel cas, comme énoncé dans l=arrêt Kathirkamu c. Canada (Ministre de la citoyenneté et de l=immigration), [2003] A.C.F. No. 592 (QL), * la décision de la Commission contient tellement d'erreurs et tellement peu de conclusions au sujet de la crédibilité étaient fondées, qu'elle doit être renvoyée à un tribunal composé d'autres membres pour qu'il procède à une nouvelle audition +.

 


[16]           Quelques exemples d=incohérences qui n=étaient pas appuyés par la preuve sont comme suit : (1) le demandeur a témoigné que le comité offrait de temps en temps des petits déjeuners gratuits aux enfants démunis les dimanches, contrairement à ce que le tribunal a cru comprendre, que les petits déjeuners étaient offerts les matins avant l=école; (2) le demandeur a aussi témoigné que son comité organisait des grillades dans la rue auxquelles venaient les familles du quartier et que les profits qui en étaient tirés allaient à des familles dans le même quartier.  Le demandeur n=a pas dit par contre, que les familles qui participaient aux grillades étaient les mêmes familles qui étaient aidées par les levées de fonds. (3) Le demandeur a témoigné avoir reçu les passeports pour ses enfants un mois avant son départ du Pérou parce qu=il planifiait partir, mais a décidé de déménager au Lima pour voir si la situation s=améliorerait.  Il a donné une explication claire pour le délai d=un mois avant son départ pour le Canada. (4) Enfin, poussé à répondre pourquoi des entreprises versaient des dons à son comité, il a expliqué qu=elles voulaient aider la communauté et qu=elles recevaient probablement des exemptions d=impôts.  Le tribunal semblait avoir oublier que la demande était une demande de réfugié et non un examen du système d=impôt au Pérou.

 

[17]           Non seulement doit‑on présumer qu'un demandeur dit la vérité (Maldonado c. Canada (Ministre de l'emploi et de l'immigration), [1980] 2 C.F. 302 (C.A.), mais il n'existe pas un seul élément de preuve pour justifier le refus du tribunal de croire M. Cevallos. Lorsqu'une décision est rendue en l'absence d'éléments de preuve à son soutien, il s'agit d'une erreur manifestement déraisonnable.

 

                                                                ORDONNANCE               

La Cour ordonne que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie.  La décision de la Commission est rejetée et l=affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué pour que celui-ci procède à une nouvelle audition et statue de nouveau sur l=affaire.  Aucune question grave de portée générale n=est certifiée.

 

* Sean Harrington +

                                                                                                                                                     Juge                 


                                                             COUR FÉDÉRALE

 

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

                                                                             

 

DOSSIER :                                       IMM-8297-04

 

INTITULÉ :                                      ANDRES ALEJANDRO RAMIREZ CEVALLOS

CARMEN GERARDA RAYGADA TRELLES

DANIELA EUGENIA RAMIREZ RAYGAGA

DIEGO ANDRES RAMIREZ RAYGAGA       ET

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L=IMMIGRATION

 

LIEU DE L'AUDIENCE :               MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L'AUDIENCE :              LE 6 AVRIL 2005

 

MOTIFS DE L=ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                     LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                    LE 15 AVRIL 2005

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Geneviève Clermont                            POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

 

Ian Demers                                         POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Geneviève Clermont                            POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

 

John H. Sims, c.r.,                               POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada


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