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Date : 20220714


Dossier : IMM-5443-21

Référence : 2022 CF 1048

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 14 juillet 2022

En présence de monsieur le juge Ahmed

ENTRE :

CHRISTIAN FABIAN BUITRAGO SALAZAR

CRISTHIAN FERNANDO LOPEZ HENAO

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Les demandeurs, Christian Fabian Buitrago Salazar (demandeur principal) et Cristhian Fernando Lopez Henao (codemandeur, sollicitent le contrôle judiciaire de la décision du 22 juillet 2021 par laquelle la Section d’appel des réfugiés (la SAR) a confirmé la décision de la Section de protection des réfugiés (la SPR) selon laquelle les demandeurs n’avaient ni la qualité de réfugiés au sens de la Convention ni celle de personnes à protéger aux termes de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR).

[2] Les demandeurs craignent d’être persécutés en Colombie par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (les FARC). Ils soutiennent que la SAR a commis une erreur en examinant de manière sélective les éléments de preuve qu’ils ont présentés sur la situation des FARC en Colombie et en s’attendant à ce qu’ils produisent une preuve des tentatives récentes faites par ces derniers pour contacter la famille du demandeur principal. Les demandeurs soutiennent également que la conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur principal n’est pas désigné comme une cible militaire est déraisonnable.

[3] Pour les motifs qui suivent, j’estime que la SAR a rendu une décision déraisonnable parce qu’elle n’a pas effectué d’examen valable de la preuve versée au dossier quant à l’influence que les FARC exercent en Colombie. J’accueille donc la présente demande de contrôle judiciaire.

II. Faits

A. Les demandeurs

[4] Le demandeur principal est un citoyen de la Colombie âgé de 30 ans. Son conjoint, le codemandeur, est un citoyen de la Colombie âgé de 32 ans.

[5] Les demandeurs allèguent que, depuis plusieurs années, les FARC ciblent la famille du demandeur principal, qui possède plusieurs plantations de café, des ranchs de bétail et d’autres entreprises en Colombie. De 1990 à 2008, la famille du demandeur principal a été victime d’actes d’extorsion, d’enlèvements et de meurtres.

[6] Le demandeur principal affirme qu’en 2005, il a été enlevé par les FARC. Six mois plus tard, ceux‑ci ont tué son ami qui avait été enlevé en même temps que lui. En février 2008, le demandeur principal a reçu un message texte l’informant que son cousin et lui avaient été désignés comme [traduction] « cibles militaires ». Son cousin a été tué en juillet 2008. Selon le demandeur principal, à la même époque, une personne a appelé sa mère pour lui demander quelle somme elle serait prête à payer pour que son fils ne soit pas tué.

[7] En décembre 2014, les FARC ont tenté d’extorquer de l’argent à la famille du demandeur principal. Comme elle n’a pu les payer, les FARC ont pris mille bêtes de ses troupeaux.

[8] Le demandeur principal affirme que, le 22 septembre 2018, quelqu’un a tiré sur le camion dans lequel il se trouvait avec son cousin. Selon lui, le tireur était un membre des FARC. Vu cet incident, les demandeurs ont déménagé à Medellín le 3 octobre 2018.

[9] En janvier 2019, le codemandeur aurait reçu des menaces téléphoniques parce qu’il était avec le demandeur principal et qu’il l’avait aidé. En mars 2019, les demandeurs ont présenté des demandes de visas pour entrer au Canada, qu’ils ont reçus en septembre 2019. Ils sont arrivés au Canada en novembre 2019.

B. La décision de la SPR

[10] Dans une décision du 25 janvier 2021, la SPR a rejeté les demandes d’asile des demandeurs au motif que ces derniers manquaient de crédibilité et qu’ils disposaient d’une possibilité de refuge intérieur (la PRI) à Bogota, en Colombie.

[11] Selon la SPR, les démêlés que la famille du demandeur principal avait eus avec les FARC n’étaient pas suffisants pour corroborer l’allégation du demandeur principal selon laquelle il était toujours recherché par les FARC en tant que « cible militaire ». La SPR doutait que le demandeur principal eût été désigné comme cible militaire, puisqu’il avait passé neuf ans en Colombie sans incident et qu’il n’avait été victime, présumément, que d’une seule tentative de meurtre en 2018. Toujours selon la SPR, la conviction exprimée par le demandeur principal, selon laquelle un membre des FARC aurait tiré sur son camion en septembre 2018, reposait sur des suppositions. Elle a rejeté l’explication selon laquelle il croyait que le tireur était un membre des FARC en raison de sa tenue.

[12] La SPR a en outre conclu que, même si les événements antérieurs étaient pertinents quant au risque éventuel, ils l’étaient moins puisqu’il s’était écoulé beaucoup de temps depuis leur survenue et que la menace que présentaient les agents de persécution n’était plus la même, tout comme les conditions dans le pays et le pouvoir des FARC.

C. La décision faisant l’objet du contrôle

[13] Les demandeurs ont interjeté appel de la décision de la SPR à la SAR. Par décision du 22 juillet 2021, la SAR a rejeté l’appel des demandeurs et a confirmé la décision de la SPR selon laquelle ceux‑ci n’avaient ni la qualité de réfugiés au sens de la Convention ni celle de personnes à protéger. Pour elle, la question déterminante était celle de la crédibilité.

[14] La SAR a reconnu que les FARC avaient commis des actes de violence envers la famille du demandeur principal, compte tenu de l’emplacement des plantations de café de la famille et de la preuve qui démontrait que les FARC exploitaient les familles riches afin de financer leurs activités. Toutefois, la question principale pour la SAR était celle de savoir si les démêlés de la famille du demandeur principal avec les FARC constituaient un risque éventuel pour les deux demandeurs. Après avoir examiné la preuve sur les conditions dans le pays, la SAR a conclu que, depuis la conclusion de l’accord de paix de 2016 entre le gouvernement colombien et les FARC, la zone d’influence des FARC s’était considérablement réduite et se concentrait en grande partie dans le Sud du pays. Compte tenu de ces changements, la SAR a jugé qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour conclure que les demandeurs seraient exposés à un risque éventuel et que le risque auquel ils seraient exposés dans la ville proposée comme PRI, soit à Bogota, serait moindre.

[15] De plus, la SAR a souscrit à la conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur principal n’avait pas été désigné comme cible militaire en 2008, puisqu’il avait passé neuf ans à étudier et à travailler dans l’entreprise familiale, et ce, sans incident. La SAR a conclu que si le demandeur principal avait été désigné comme cible militaire, des mesures auraient été prises contre lui, en particulier compte tenu des actes de violence commis envers les membres de sa famille au cours de la même période. La SAR a fait une distinction entre le cas du demandeur principal et celui d’un journaliste qui a été tué après le retrait de la protection policière dont il faisait l’objet, expliquant que le journaliste écrivait au sujet de la corruption du gouvernement à l’intention d’un large public et qu’il avait reçu de nombreuses menaces de mort. La SAR a également conclu que la preuve sur les conditions dans le pays indiquait que les personnes qui sont habituellement désignées comme cibles militaires sont des défenseurs des droits de la personne et des politiciens.

[16] Enfin, la SAR a estimé, comme la SPR, que la preuve ne permettait pas de conclure que la personne qui avait tiré sur le demandeur principal en septembre 2018 était membre des FARC. Le demandeur principal a indiqué qu’il avait parlé aux FARC en 2014 après que sa famille eut été victime d’extorsion, et qu’il n’avait pas subi de préjudice. Étant donné que les dernières menaces faites par les FARC à l’endroit du demandeur principal avaient eu lieu en 2014, la SAR a jugé que la tenue du tireur n’était pas une preuve suffisante de l’allégeance de celui‑ci aux FARC. De plus, aucun élément de preuve n’établissait que les FARC avaient contacté la famille du demandeur principal depuis 2018. Selon la SAR, il s’agissait là d’un autre facteur qui indiquait que les demandeurs seraient exposés à un risque éventuel moindre.

III. La question en litige et la norme de contrôle

[17] La seule question en litige en l’espèce est celle de savoir si la décision de la SAR est raisonnable.

[18] Les deux parties conviennent que la norme de contrôle qui s’applique à la décision de la SAR est celle de la décision raisonnable. Je suis d’accord (Adelani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 23 aux para 13-15; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 SCS 65 (Vavilov) aux para 10, 16-17).

[19] La norme de la décision raisonnable est une norme de contrôle empreinte de déférence, mais rigoureuse (Vavilov, aux para 12-13). La cour de révision doit décider si la décision faisant l’objet du contrôle est transparente, intelligible et justifiée, notamment en ce qui concerne le résultat obtenu et le raisonnement suivi (Vavilov, au para 15). Une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et être justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti (Vavilov, au para 85). La question de savoir si une décision est raisonnable dépend du contexte administratif, du dossier soumis au décideur et de l’incidence de la décision sur les personnes concernées (Vavilov, aux para 88-90, 94, 133-135).

[20] Pour qu’une décision soit jugée déraisonnable, le demandeur doit démontrer que les lacunes qu’elle contient sont suffisamment capitales ou importantes (Vavilov, au para 100). Ce ne sont pas toutes les erreurs ou préoccupations au sujet des décisions qui justifieront une intervention. La cour de révision doit s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur et, à moins de circonstances exceptionnelles, elle ne doit pas modifier les conclusions de fait de celui‑ci (Vavilov, au para 125). Les lacunes ou insuffisances reprochées ne doivent pas être simplement superficielles ou accessoires par rapport au fond de la décision, ou constituer une « erreur mineure » (Vavilov, au para 100; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Mason, 2021 CAF 156 au para 36).

IV. Analyse

A. La preuve sur les conditions dans le pays

[21] Les demandeurs soutiennent que la SAR a commis une erreur en examinant de manière sélective la preuve sur la situation des FARC dans le pays et qu’elle a, de manière déraisonnable, privilégié certains documents au détriment d’autres sans fournir d’explication. Bien que la SAR ait pris acte des observations présentées en appel par les demandeurs, selon lesquelles les FARC représentaient toujours une menace et que cette menace était en fait de plus en plus grande, elle n’en a pas vraiment tenu compte. Elle a aussi écarté des renseignements importants contenus dans le cartable national de documentation (le CND) qui démontrent que, malgré l’accord de paix de 2016, les FARC sont toujours actifs et que les groupes dissidents des FARC sont toujours en expansion et exercent leurs activités partout en Colombie. Ainsi, la SAR n’a pas examiné des éléments de preuve qui contredisaient sa conclusion et n’a pas expliqué pourquoi elle n’en avait pas tenu compte et tiré une conclusion différente, comme elle avait l’obligation de le faire (Cetinkaya c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 8 (Cetinkaya) au para 66; Adeoye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 680 (Adeoye) au para 13).

[22] Le défendeur fait valoir que les arguments des demandeurs reviennent à exprimer un simple désaccord avec la façon dont la SAR a apprécié la preuve et ne révèlent aucune erreur susceptible de contrôle. La SAR a expressément mentionné les observations présentées par les demandeurs en appel à propos de la preuve sur les conditions dans le pays et de celle tirée du CND, et elle a souligné que « [l]es appelants citent la preuve sur les conditions dans le pays, qui mentionne que, après l’accord de paix de 2016, d’anciens membres des FARC se sont remobilisés et ont poursuivi leurs activités de production de drogues illicites, d’exploitation minière illégale et de passage de clandestins, pour n’en nommer que quelques‑unes ». La SAR a apprécié la preuve documentaire citée par les demandeurs en plus d’autres documents tirés du CND. Cela étant, elle a raisonnablement conclu que la zone d’influence des FARC était considérablement réduite et concentrée en grande partie dans le Sud de la Colombie.

[23] J’accepte l’observation du défendeur selon laquelle la SAR a cité les arguments écrits des demandeurs au sujet de la menace croissante que représentent les FARC et qu’elle a pris acte d’un élément tiré du CND sur les conditions dans le pays qui contredisait sa conclusion. Cependant, je ne suis pas convaincu que la SAR a véritablement tenu compte de la preuve sur l’influence qu’exercent les FARC en Colombie, non plus qu’elle l’a analysée ou expliqué pourquoi cet élément n’avait pas infléchi sa conclusion. Dans sa décision, la SAR a tiré les conclusions suivantes :

La preuve sur les conditions dans le pays contient de nombreux autres documents montrant que les groupes dissidents des FARC comptaient beaucoup moins de membres que les FARC au moment de la conclusion de l’accord de paix [de 2016]. Le gouvernement signale que les dissidents des FARC sont responsables d’un petit pourcentage d’attaques contre la population. La zone d’influence des FARC est aussi considérablement réduite et est concentrée en grande partie dans le Sud.

[24] La SAR renvoie à des documents contenus dans la version la plus récente du CND qui existait au moment de sa décision (le CND du 16 avril 2021). Toutefois, comme l’ont souligné les demandeurs, cette version contient plusieurs autres documents qui appuient leur position selon laquelle les FARC et les groupes dissidents ont refusé de se démobiliser, malgré l’accord de paix de 2016. Le CND du 16 avril 2021 indique que les dissidents des FARC ont commencé leurs activités pendant les négociations de paix de 2016, et qu’ils ont refusé de se démobiliser pour « garder les sources de revenus venant d’activités illicites comme la culture du coca et l’exploitation minière illégale ». En dépit de l’accord de paix, les groupes paramilitaires poursuivent leurs activités, et la Colombie [traduction] « éprouve encore des difficultés » avec « des acteurs non étatiques armés : les groupes ayant succédé aux paramilitaires ». Les données du CND indiquent en outre que, malgré l’accord de paix, la situation en Colombie reste [traduction] « précaire » et marquée par l’« angoisse et un sentiment accru d’insécurité », et que « les niveaux de violence en Colombie sont suffisants pour que la situation soit encore considérée comme un conflit ».

[25] Bien que la SAR ait inclus dans sa décision des notes de bas de page qui renvoient à des articles du CND du 16 avril 2021 qui appuient sa conclusion que les FARC comptaient beaucoup moins de membres, elle n’a pas tenu compte des autres documents contenus dans ce CND qui contredisaient cette conclusion et révélaient que le risque de violence des FARC et des groupes dissidents demeurait élevé en Colombie. La SAR devait apprécier la preuve sur les conditions dans le pays qui contredisait ses conclusions et expliquer pourquoi cette preuve n’infléchissait pas sa conclusion. La SAR a pris acte des éléments de preuve mis en évidence par les demandeurs, mais elle ne les a pas analysés dans sa décision. Puisqu’elle a de toute évidence consulté le CND du 16 avril 2021, elle avait l’obligation d’examiner sérieusement les éléments qui contredisaient sa conclusion, et d’expliquer pourquoi ils n’infléchissaient pas sa conclusion selon laquelle l’influence des FARC avait diminué en Colombie (Cetinkaya, au para 66; Adeoye, au para 13, citant Kovacs c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1003 aux para 57-61 et Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 8667 (CF) aux para 15-17). Comme l’a souligné à juste titre l’avocat des demandeurs au cours de l’audience, la SAR a fait, au mieux, un examen superficiel des éléments de preuve contradictoires.

[26] Au paragraphe 16 de la décision Vargas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 543, la Cour fait l’observation suivante : « Il est raisonnable de s’attendre à ce que les éléments importants de la preuve soient mentionnés, analysés et examinés, surtout lorsqu’ils semblent carrément contredire une conclusion de la Commission ». En l’espèce, la SAR n’a pas mentionné, analysé et examiné adéquatement les éléments de preuve contradictoires, si bien que sa décision n’est pas raisonnable. Sa conclusion ne prend pas sa source dans l’analyse effectuée (Vavilov, au para 103).

[27] Comme j’ai conclu que la SAR avait commis une erreur dans son appréciation de la preuve sur les conditions dans le pays, il n’est pas nécessaire, à mon avis, de traiter des autres questions soulevées par les demandeurs.

V. Conclusion

[28] Pour les motifs ci-dessus, je conclus que la SAR a commis une erreur dans son appréciation de la preuve sur les conditions dans le pays et que, par conséquent, sa décision est déraisonnable. La demande de contrôle judiciaire est donc accueillie. Aucune question n’a été soumise aux fins de certification, et je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-5443-21

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Shirzad A. »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude De Angelis


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5443-21

 

INTITULÉ :

CHRISTIAN FABIAN BUITRAGO SALAZAR ET CRISTHIAN FERNANDO LOPEZ HENAO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 1er juin 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE AHMED

 

DATE DES MOTIFS :

Le 14 juillet 2022

 

COMPARUTIONS :

Nicholas Woodward

 

Pour les demandeurs

 

Asha Gafar

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Battista Smith Migration Law Group

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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