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Date : 20220608


Dossier : IMM‑7840‑21

Référence : 2022 CF 859

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 juin 2022

En présence de monsieur le juge Roy

ENTRE :

VITALIS MBAH NANKOBE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés (la SAR) a conclu que le demandeur n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni qualité de personne à protéger. La demande de contrôle judiciaire est présentée au titre de l’article 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi].

[2] Selon la SAR, le demandeur n’a pas droit à la qualité de réfugié par application de l’article 98 de la Loi, qui prévoit ce qui suit :

Exclusion par application de la Convention sur les réfugiés

Exclusion – Refugee Convention

98 La personne visée aux sections E ou F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés ne peut avoir la qualité de réfugié ni de personne à protéger.

98 A person referred to in section E or F of Article 1 of the Refugee Convention is not a Convention refugee or a person in need of protection.

[3] La section E de l’article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés prévoit ce qui suit :

E Cette Convention ne sera pas applicable à une personne considérée par les autorités compétentes du pays dans lequel cette personne a établi sa résidence comme ayant les droits et les obligations attachés à la possession de la nationalité de ce pays.

E This Convention shall not apply to a person who is recognized by the competent authorities of the country in which he has taken residence as having the rights and obligations which are attached to the possession of the nationality of that country.

I. Les faits

[4] Le demandeur est un citoyen du Cameroun. Il prétend qu’il a été persécuté en tant que membre du Congrès national du Cameroun du Sud en raison de ses opinions politiques. Il s’est enfui en Italie, où il a obtenu l’asile en 2008. Il est retourné au Cameroun en 2011 après avoir appris que son agent de persécution était mort. Il est demeuré dans son pays de nationalité jusqu’en 2014, lorsqu’il s’est rendu en Suède, où il a résidé jusqu’en juin 2018. Il semble qu’il ait fait des études et travaillé en Suède.

[5] Il est retourné au Cameroun en juin 2018 où il prétend que la police l’a harcelé et l’a arrêté en raison de ses activités politiques. Accusé de sécession en 2018, il s’est enfui aux États‑Unis en septembre 2018 et il a franchi la frontière pour entrer au Canada le 13 septembre 2018. Il a demandé l’asile le 17 septembre 2018.

[6] Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile est intervenu et a soutenu que, par application de la section E de l’article premier de la Convention, le demandeur ne pouvait pas obtenir l’asile.

II. La décision faisant l’objet du contrôle

[7] La Section de la protection des réfugiés (la SPR) et la SAR ont estimé que la section E de l’article premier de la Convention s’appliquait. C’est la décision de la SAR que doit examiner la Cour en contrôle judiciaire.

[8] Avant de trancher la présente demande, il importe de comprendre la décision à l’égard de laquelle le demandeur a interjeté appel auprès de la SAR.

[9] La SPR a conclu que le demandeur n’avait pas le droit de demander l’asile par application de la section E de l’article premier de la Convention parce qu’il avait le statut de résident permanent en Italie, pays où il s’était réfugié en 2008. Elle a aussi conclu qu’un réfugié en Italie jouit essentiellement des mêmes droits qu’un citoyen italien (à l’exception du droit de vote et du droit d’être élu à une charge publique).

[10] De plus, l’expiration d’une carte renouvelable, comme celles que les autorités italiennes ont délivrées au demandeur, ne met pas fin au statut. Par conséquent, lorsque le demandeur est entré au Canada, en septembre 2018, il détenait un permis de résident valide en Italie. Le permis de séjour qui a été délivré au demandeur en 2014, et qui était valide jusqu’en 2019, confirme que le statut du demandeur en Italie restait en vigueur bien après que celui‑ci a quitté le pays en 2011.

[11] La SPR a conclu qu’il incombait au demandeur de renouveler son statut en Italie ou d’établir que celui‑ci ne pouvait pas être renouvelé. Elle estimait qu’une carte n’est que l’illustration du statut juridique en Italie. En fait, le fait de vouloir abandonner la protection de l’Italie n’entraîne pas la perte du statut de résident permanent. La SPR soutient plutôt que les éléments de preuve montrent que la révocation du statut n’est pas automatique en cas d’une absence prolongée du pays. Il semble y avoir un processus par lequel l’intéressé peut être entendu avant que son statut ne puisse être révoqué. Il aurait incombé au demandeur de démontrer qu’un tel processus a eu lieu dans son cas. Il n’y a pas de preuve que de telles démarches aient jamais été entreprises.

[12] Les arguments présentés par le demandeur devant la SAR étaient entièrement axés sur son statut en Italie. Il prétend qu’il avait le statut de résident temporaire en Italie. Dans des observations comptant plus de vingt pages, l’ancien avocat du demandeur a soutenu que son client était résident temporaire. La totalité de son argument semblait tenir dans le passage qui suit et qui est extrait du paragraphe 5 de son mémoire présenté à la SAR :

[traduction]

5 […] Étant donné qu’il n’a jamais été résident permanent de l’Italie, mais seulement résident temporaire, il ne peut pas être exclu de la protection accordée aux réfugiés par application de l’article 98 de la LIPR et de la section E de l’article premier de la Convention à moins que le tribunal n’ait indiqué clairement qu’il analysait les droits et les obligations d’un « détenteur de permis temporaire » en Italie et/ou les droits d’un réfugié au sens de la Convention en Italie – dans l’optique d’établir si ces droits équivalent aux droits d’un citoyen et qu’il n’ait analysé les éléments de preuve s’y rapportant. Le tribunal n’a jamais examiné cette question comme il se devait étant donné qu’il croyait à tort que le demandeur avait affirmé qu’il avait le statut de résident permanent et il n’a jamais examiné la réponse à une demande d’information ITA 104045.EF dont il disposait portant sur la différence entre les détenteurs du statut de résident temporaire et les détenteurs du statut de résident permanent, puisque le tribunal semble avoir omis de lui attribuer un numéro de pièce même s’il a affirmé que tous les documents qui ont été produits devant lui étaient admis en preuve. De plus, le tribunal n’a jamais analysé les documents se rapportant à la question de la différence entre le statut de réfugié au sens de la Convention en Italie et le statut de résident permanent en Italie.

Je constate que le demandeur a fait valoir devant la SAR qu’il n’avait pas de statut en Italie qui lui accorde des droits essentiellement semblables à ceux dont jouissent les citoyens italiens.

[13] Par conséquent, il est entendu que la décision faisant l’objet du contrôle, soit la décision de la SAR, répondait exclusivement aux arguments présentés par le demandeur.

[14] Une grande partie des observations qui ont été formulées devant la SAR (la SAR procède sans tenir d’audience (paragraphe 110(3) de la Loi, sauf dans les circonstances décrites au paragraphe 110(6)) avait trait à la RDI ITA 104045.EF (RDI ITA 104045.EF) qui, selon le demandeur, confirmait sa position selon laquelle le permis de résident qu’il avait reçu en tant que réfugié en Italie était temporaire.

[15] La SAR a conclu que la SPR aurait dû examiner plus en détail la RDI ITA 104045.EF. Toutefois, elle a aussi conclu qu’elle était en mesure de corriger l’erreur dans sa propre décision. Par conséquent, la SAR estime que « la SPR a conclu à juste titre que le [permis de séjour] conférait à l’appelant un statut de résident permanent et essentiellement les mêmes droits que ceux d’un citoyen italien, à l’exception du vote ou de l’élection à une fonction publique » (décision de la SAR, au para 6).

[16] En fait, la SAR a pris en compte une autre RDI, qui avait été diffusée trois ans après la RDI ITA 104045.EF, pour confirmer que le permis de séjour qui avait été délivré au demandeur équivalait à la carte de résident de longue durée de la Commission européenne (CE), qui a une durée indéterminée. Cette RDI porte le numéro ITA 105009.EF et a été publiée le 6 mars 2015.

[17] La SAR dit préférer l’information qui a été fournie en 2015 dans ce qui est devenu la RDI ITA 105009.EF par rapport à l’information invoquée par le demandeur (ITA 104045.EF en date du 23 avril 2012). Les deux RDI concernent les permis de résidence délivrés en Italie, mais celle qui a été publiée en 2015 est considérée comme une mise à jour obtenue d’un responsable de l’ambassade de l’Italie à Ottawa.

[18] La SAR a conclu que le « titre de séjour permanent (permesso di soggiorno illimitata) » était la même chose que la « carte de résident de longue durée de la CE », comme il est mentionné dans la RDI 105099.EF. La carte de résidence de la CE est censée être valide pour une période indéterminée. La SAR expose son raisonnement aux paragraphes 20 à 22 de sa décision. Je préfère les reproduire ci‑après plutôt que de les paraphraser :

[20] Il est mentionné au point 3.7 que le représentant de l’ambassade « a précisé que la carte de résident de longue durée de la CE était la même chose que le titre de séjour permanent (permesso di soggiorno illimitata) ». Il y est mentionné plus loin « [qu’] il y a eu deux versions de cette carte; sur la première, qui a été délivrée initialement en 2007, le terme illimitata n’était pas inscrit ».

[21] Par conséquent, j’estime que tous les éléments de preuve concernant la carte de résident de longue durée de la CE sont pertinents en ce qui a trait à la situation de l’appelant, car, malgré le fait que le terme illimitata n’était pas inscrit sur sa carte de Permesso di Soggiorno, celle‑ci lui confère les mêmes droits.

[22] Il est mentionné plus loin au point 3.7 : « Le représentant de l’ambassade de l’Italie à Ottawa a souligné que la carte de résident de longue durée de la CE constituait un document permanent; il ne vient jamais à échéance (Italie 24 févr. 2015). D’ailleurs, dans le document intitulé Staying in Italy Legally, le ministère de l’Intérieur de l’Italie affirme qu’elle est à temps indéterminé, mais précise que, pour pouvoir servir de pièce d’identité personnelle, elle doit être renouvelée à l’aide d’une nouvelle photo tous les cinq ans ».

[19] Par conséquent, la SAR a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’avait pas perdu le statut de durée indéterminée qu’il avait en Italie. La carte qui lui a été remise ne portait pas le terme « illimitata » (illimité), mais, en s’appuyant sur la RDI ITA 105099.EF, la SAR était convaincue qu’il n’était pas nécessaire qu’il y soit. Cela amène la SAR à affirmer que, puisque le demandeur n’a jamais reçu l’avis requis par la procédure italienne pour entreprendre la révocation du statut de réfugié, celui‑ci bénéficie toujours de l’équivalent de la carte de résident de longue durée de la CE. Ce statut lui confère essentiellement les mêmes droits que ceux d’un citoyen italien.

III. Arguments et analyse

[20] Nul ne conteste que la norme de contrôle applicable en l’espèce est la norme de la décision raisonnable (Obumuneme c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 59; Tesfay c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 497). Je souscris à l’affirmation du défendeur selon laquelle l’application de la norme de contrôle de la décision raisonnable entraîne des conséquences pour le demandeur. En tout premier lieu, sans doute, il incombe au demandeur de démontrer que la décision faisant l’objet du contrôle est déraisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 100). On dit que les caractéristiques d’une décision raisonnable sont la justification, la transparence et l’intelligibilité, et qu’il faut établir « si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci » (Vavilov, au para 99). Les cours de révision doivent faire montre de retenue judiciaire et adopter une attitude de respect (Vavilov, aux para 13 et 14).

[21] Par ailleurs, le contrôle selon la norme de la décision raisonnable tient compte du résultat de la décision administrative ainsi que du raisonnement qui a mené à la décision. Comme l’a affirmé la Cour suprême dans l’arrêt Vavilov, les décideurs administratifs doivent adhérer à une culture de la justification.

[22] En l’espèce, le demandeur, qui se représente lui‑même devant la Cour, a formulé des observations qui étaient, pour l’essentiel, des variations sur un seul thème, soit qu’il n’était que résident temporaire en Italie. Il répète que le décideur administratif a [traduction] « supposé » qu’il était résident permanent. Pour contester la décision, il invoque son affidavit ainsi que son témoignage devant la SPR.

[23] Le demandeur semble croire qu’une cour de révision peut substituer son appréciation du bien‑fondé de son dossier à celle du décideur administratif. Bien entendu, ce n’est pas le cas. En fait, le demandeur devait analyser la décision afin de démontrer qu’elle était déraisonnable, au lieu de prétendre qu’il avait raison de croire que son statut en Italie était temporaire. Au lieu de prétendre, le demandeur devait démontrer, ce qu’il n’a pas fait.

[24] Au lieu de démontrer que la RDI ITA 105099.EF avait été interprétée de façon déraisonnable, le demandeur s’est écarté de ses observations selon lesquelles il n’avait qu’un statut temporaire en Italie pour faire valoir, sur la foi d’un rapport de l’organisation Médecins Sans Frontières, que les conditions étaient inhumaines et dégradantes pour les réfugiés en Italie. Il ne s’agit pas d’une question qu’une cour de révision peut et devrait prendre en compte puisque la SAR n’en avait pas été saisie et, bien évidemment, ne pouvait pas la trancher, en supposant, bien entendu, qu’elle pouvait être pertinente eu égard à une décision fondée sur l’article 98 de la Loi parce qu’elle pourrait montrer que les services de base aux réfugiés sont déficients. Je crois comprendre que le demandeur fait valoir pour la première fois, non pas que les réfugiés en Italie ne jouissent pas essentiellement des mêmes droits que les citoyens italiens, mais bien que les services destinés aux réfugiés laissent beaucoup à désirer en Italie. Étant donné que cet élément n’a pas été soulevé devant la SAR, il ne s’agit pas d’une question dont a été dûment saisie une cour de révision. Quoi qu’il en soit, je fais remarquer que les questions de cette nature, étayées par des éléments de preuve, peuvent être soumises à d’autres instances dans la procédure d’immigration si le demandeur cherche à obtenir d’autres réparations.

[25] Dans la même veine, le demandeur a soulevé des arguments dans son mémoire écrit à la Cour qui pourraient cadrer dans une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Par conséquent, il a informé la Cour de son degré d’établissement au Canada, où il a des liens plus solides que ceux qu’il avait en Italie. Ces éléments ne sont pas pertinents dans une instance visant à établir si le demandeur est exclu du régime de protection des réfugiés au Canada. Quoi qu’il en soit, la SAR n’en a pas été saisie, et la Cour non plus. Comme la Cour a tenté de l’expliquer pendant l’audience, les cours de révision doivent se limiter à la décision rendue par le décideur administratif. En raison des limites propres au contrôle judiciaire, les questions qui sont différentes de celles abordées dans l’instance précédente et les questions nouvelles sont exclues.

[26] Les critères qui régissent l’application de la norme de la décision raisonnable ne sont pas remplis. Il m’est impossible de conclure que la Cour peut intervenir. Le demandeur n’a tout simplement pas démontré que la décision de la SAR était déraisonnable, ce qui lui incombait. Se borner à répéter que son statut en Italie était temporaire ne suffit pas pour contester avec succès le raisonnement du décideur.

IV. Conclusion

[27] Cela ne veut pas dire que l’affaire était claire et limpide. Aucune preuve d’expert n’a été produite en l’espèce après que le ministre a choisi d’intervenir. Les parties ont invoqué des RDI dont le contenu laissait beaucoup à désirer en raison de son ambiguïté et de ses lacunes probables. Il n’y avait pas de description des permis de séjour en Italie de sorte que puisse être tracé un portrait plus complet de la situation. En fait, il ne ressort pas clairement pourquoi l’ambassade canadienne en Italie n’a pas été mise à contribution. L’absence de renseignements clairs sur les différents permis de séjour en Italie fait en sorte que la Cour ne peut pas conclure que la SAR a commis une erreur déraisonnable, faute d’un argument, voire d’un argument convaincant, de la part de celui à qui incombe le fardeau de la preuve. Donc, le demandeur ne s’est pas acquitté de son fardeau consistant à démontrer qu’il n’avait pas de statut, ce qui doit entraîner le rejet de la demande de contrôle judiciaire.

[28] Le demandeur a proposé une question à certifier au titre de l’article 74 de la Loi. La question proposée est la suivante :

La section E de l’article premier de la Convention devrait‑il s’appliquer aux réfugiés qui sont exposés à un risque de préjudice ou de persécution dans leur premier pays d’asile?

[29] Les conditions qui s’appliquent à la présentation d’une question à certifier à une cour d’appel ne sont pas remplies. Plusieurs arrêts de la Cour d’appel fédérale établissent les conditions à remplir pour qu’une question soit certifiée au titre de l’article 74. Dans l’arrêt Lewis c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CAF 130, [2018] 2 RCF 229, la Cour énonce en un paragraphe l’essentiel des conditions en question :

[36] La jurisprudence de notre Cour enseigne que, pour qu’une question soit dûment certifiée aux termes de l’article 74 de la LIPR, et que la Cour ait compétence pour entendre l’appel, la question certifiée par la Cour fédérale doit être déterminante quant à l’issue de l’appel, transcender les intérêts des parties au litige et porter sur des questions ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale. En corollaire, la question doit avoir été discutée par la Cour fédérale et elle doit découler de l’affaire elle‑même, et non des motifs du juge (ou de la manière dont la Cour fédérale peut avoir tranché l’affaire) : Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CAF 168, au paragraphe 9, [2014] 4 R.C.F. 290; Varela c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 145, aux paragraphes 28 et 29, [2010] 1 R.C.F. 129; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Zazai, 2004 CAF 89, aux paragraphes 11 et 12 [Zazai]; Liyanagamage c. Canada (Secretary of State), 176 N.R. 4, au paragraphe 4, [1994] A.C.F. no 1637 (C.A.F.).

En l’espèce, la question proposée par le demandeur n’est pas susceptible de permettre de trancher la présente affaire, et elle n’a pas été abordée, et n’aurait pas pu l’être, d’ailleurs, dans le cadre de l’affaire elle‑même.

[30] L’élément qui ferait l’objet de la question proposée n’a jamais été soulevé devant la SAR. Il s’agissait de l’exclusion du demandeur de la possibilité de présenter une demande de statut de réfugié ou de personne à protéger par application de l’article 98 de la Loi. Il s’ensuit que la nouvelle question ne peut pas être dûment soulevée en contrôle judiciaire puisque la Cour se penche sur la légalité de la décision rendue par le tribunal administratif. Il ne s’agit pas d’une question que la Cour devrait prendre en considération, et elle n’a pas été prise en considération (Delios c Canada (Procureur général), 2015 CAF 117 aux para 41‑42).

[31] La Cour d’appel fédérale a statué en ce sens dans une récente décision. Dans l’arrêt Goodman c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2022 CAF 21, 95 Admin. L.R. (6e) 180, la Cour a écrit ce qui suit :

[4] Les questions relatives à l’alinéa 2e) de la Déclaration canadienne des droits n’auraient pas dû être examinées par la Cour fédérale puisqu’elles étaient juridiquement irrecevables. D’ailleurs, la Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654, nous avise de ne pas accepter d’examiner des questions, dans le cadre du contrôle judiciaire, qui n’ont pas été soulevées devant le décideur administratif. Par conséquent, les questions portant sur l’alinéa 2e) devaient être soulevées devant le décideur administratif (Okwuobi c. Commission scolaire Lester‑B.‑Pearson; Casimir c. Québec (Procureur général); Zorrilla c. Québec (Procureur général), 2005 CSC 16, [2005] 1 R.C.S. 257; Landau c. Canada (Procureur général), 2022 CAF 12), qui est le juge du fond dans le cadre de ce régime législatif. Toutefois, même si ces questions n’ont pas été soulevées devant le décideur administratif, nous sommes tous d’avis qu’elles n’avaient aucun fondement juridique essentiellement pour les mêmes motifs exprimés par la Cour fédérale. L’intervention de notre Cour n’est donc pas justifiée.

[Non souligné dans l’original.]

[32] L’avocat du défendeur n’a pas proposé de question à certifier. Par conséquent, il n’y a pas de question à certifier au titre de l’article 74 de la Loi.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑7840‑21

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a pas de question à certifier au titre de l’article 74 de la Loi.

« Yvan Roy »

Juge

Traduction certifiée conforme

Line Niquet, trad. a


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑7840‑21

 

INTITULÉ :

VITALIS MBAH NANKOBE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

le 16 mai 2022

 

JUGeMENT et motifs :

LE JUGE ROY

 

DATE DES MOTIFS :

LE 8 JuIN 2022

 

COMPARUTIONS :

Vitalis Mbah Nankobe

 

LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Edward Burnet

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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