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Date : 19991015


Dossier : T-1491-99



ENTRE :


PETER GINTER


demandeur



et



PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA


défendeur



MOTIFS D"ORDONNANCE ET ORDONNANCE


M. JOHN A. HARGRAVE,

PROTONOTAIRE

[1]      Le défendeur cherche à obtenir, par voie d"une requête écrite, que deux types de preuve documentaire, de même que les paragraphes qui y ont trait, soient radiés des affidavits que le demandeur a déposés à l"appui de la présente demande de contrôle judiciaire. Certains des documents que le défendeur cherche à faire radier n"ont pas, selon toute probabilité, été soumis au décideur. En fait, l"un des documents n"existait même pas quand la décision a été prise. Le demandeur reconnaît tout cela, mais il soutient que les documents constituent, du moins dans la plus grande partie, des renseignements sur le contexte.

[2]      Le défendeur souligne que seuls les éléments de preuve dont disposait le décideur doivent être considérés dans le cadre du contrôle judiciaire. Il fonde cet argument sur la proposition que le contrôle judiciaire vise à examiner des erreurs que le tribunal aurait commises : voir, par exemple, Franz c. M.E.I. (1995), 80 F.T.R. 79, à la p. 80. En ce qui concerne la proposition générale, je renvoie à Lemiecha c. M.E.I. (1994), 72 F.T.R. 49, à la p. 51 :

Il est bien établi en droit que le contrôle judiciaire d'une décision que rend un office, une commission ou un autre tribunal d'instance fédérale doit être fondé sur les éléments de preuve dont le décisionnaire était saisi.
Cependant, je n"ai pas l"intention de modifier les affidavits.

[3]      La Cour consacre du temps et des efforts disproportionnés par rapport aux résultats obtenus dans la plupart des cas où elle doit traiter de différends préliminaires concernant le contenu d"affidavits dont le juge traitera, selon toute probabilité, de manière expéditive et appropriée à l"audition. En ce qui concerne cette question, j"ai fait remarqué, dans Yazdanian c. M.E.I. (1999) 150 F.T.R. 297, à la p. 298 :

[2]      Par souci d'efficacité et à titre d'exercice pratique du pouvoir discrétionnaire judiciaire, les parties ne devraient pas être autorisées à radier les affidavits de chacune d'entre elles. Cette généralité est, bien entendu, sujette à des circonstances spéciales, savoir par exemple qu'un affidavit est abusif ou clairement dénué de pertinence, qu'une partie a obtenu l'autorisation d'admettre des éléments de preuve qui se révèlent manifestement inadmissibles, ou que la cour est convaincue que la question d'admissibilité devrait être tranchée à une date prochaine pour qu'une audition puisse se dérouler de façon ordonnée. Il existe des décisions à cet égard qui comprennent la décision Home Juice Company v. Orange Maison Ltd., [1968] 1 R.C.É. 163, à la page 166 (le président Jackett), et la décision Unitel Communications Co. c. MCI Communications Corporation (1997), 119 F.T.R. 142, à la page 143. Dans cette affaire, le juge Richard (tel était alors son titre) a noté que le juge de première instance serait mieux placé pour apprécier le poids et l'admissibilité de tels affidavits (pages 143 et 145). Bien entendu, la conjecture, la spéculation et l'avis juridique ne doivent pas figurer dans un affidavit.
[3]      En l'espèce, l'avocat du défendeur soutient que les affidavits contiennent de nouveaux éléments de preuve, . . .
[4]      L'avocat des demandeurs soutient que les documents sont des éléments de preuve accessoires . . .
[5] . . . Entre autres, les paragraphes de l'affidavit de Shirin Drudian soulèvent la question de savoir, d'une part, si des documents pertinents, qui figuraient dans la documentation dont l'agente des visas disposait en fait, sont de nouveaux éléments de preuve et sont donc exclus de la procédure de contrôle judiciaire ou, d'autre part, s'ils représentent la tentative de saisir la Cour de l'information publique. Il serait prématuré de se pencher sur ces questions, car les documents peuvent être examinés de plusieurs façons, tâche que le juge saisi d'un contrôle, une fois qu'il a apprécié l'ensemble de la demande, sera mieux placé pour accomplir.
[6] . . . Il s'agit de questions qui devraient être tranchées par le juge de première instance car, comme le juge en chef adjoint Richard l'a dit dans Unitel Communications (supra), devant une demande de radiation d'un affidavit :
"...je conclus qu'il ne conviendrait pas de faire droit à la requête en radiation des demanderesses. Il s'agit d'une question qui doit être entendue et tranchée, si nécessaire, par le juge présidant le procès, en fonction de la force probante et de l'admissibilité des éléments en cause. Cette décision ne porte aucunement atteinte au droit des parties de présenter, en temps opportun, leurs arguments au juge qui sera désigné pour présider l'instruction accélérée." (p. 145)

Voir également Walker c. Randall, une décision non publiée que M. le juge Teitelbaum a rendue le 24 août 1999 dans le dossier no T-1103-98, dans laquelle il a également considéré Prajapati c. Canada (1996), 103 F.T.R. 37.

[4]      Toute requête visant à faire radier des affidavits ou éliminer des documents d"affidavits ne sera accueillie que s"il existe des circonstances exceptionnelles. Il peut s"agir de documents conjecturaux ou trompeurs qui posent des hypothèses, d"avis juridiques, ou encore de documents non pertinents manifestement inadmissibles dont le rejet hâtif permettra à l"éventuelle audience de se dérouler de façon ordonnée. Or, il n"y a pas de telles circonstances exceptionnelles dans la présente affaire. Le juge qui entendra la présente demande de contrôle judiciaire, ayant une vue d"ensemble de l"instance, sera beaucoup mieux placé pour apprécier le poids qu"il convient d"accorder aux éléments de preuve et déterminer s"ils sont admissibles.

ORDONNANCE :

1.      La requête est rejetée. Les affidavits demeureront inchangés, sans préjudice du droit du défendeur de faire des observations similaires devant le juge qui entendra la présente demande de contrôle judiciaire. Des dépens taxables, fixés à 350 $, devront être payés par le défendeur au demandeur, peu importe l"issue de la cause.

" John A. Hargrave "

                                         protonotaire


Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 15 octobre 1999.










Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :                  T-1491-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :          PETER GINTER

                         c.

                         PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA


REQUÊTE TRAITÉE SANS COMPARUTION DES AVOCATS CONFORMÉMENT À LA RÈGLE 369

ORDONNANCE ET MOTIFS D"ORDONNANCE RENDUS PAR M. JOHN A. HARGRAVE

EN DATE DU :                  15 octobre 1999



OBSERVATIONS ÉCRITES PAR :

M. Craig Paterson                  pour le demandeur

Mme Nicole Gendron                  pour le défendeur



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Paterson & Associates

Vancouver (C.-B.)                  pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureuer général du Canada          pour le défendeur

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