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Date : 20000526


Dossier : T-629-99


Ottawa (Ontario), le 26 mai 2000

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

     CHEN JUNG KUO

demanderesse


     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION


intimé



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE


[1]      Il s'agit d'un appel interjeté par Chen Jung Kuo (la demanderesse) contre une décision du juge de la citoyenneté Wicks, datée du 15 février 1999, dans laquelle la demande de citoyenneté canadienne de la demanderesse a été rejetée au motif que la demanderesse n'avait pas satisfait aux exigences relatives à la résidence en vertu de l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, 1974-75-76, ch. 108 (la Loi).

[2]      La demanderesse, qui est originaire de Taïwan, est devenue une résidente permanente canadienne le 28 janvier 1994. Elle tient son droit d'établissement du fait qu'elle était enfant à charge de son père qui lui, tenait son droit d'établissement en vertu du Programme d'immigration des gens d'affaires. Les deux autres enfants de la famille tenaient leur droit d'établissement du même fondement.

[3]      Le 24 février 1994, la demanderesse est retournée à Taïwan pour terminer ses études de baccalauréat, comme elle avait obtenu un permis de retour pour résident permanent qui était valide pour une durée d'un an. Après avoir terminé son baccalauréat, la demanderesse a été acceptée à l'Université de NewYork et a débuté des études à New York à l'automne de l'année 1996.

[4]      La demanderesse était absente du Canada pour les périodes suivantes :


De

j/m/a

À

j/m/a

Destination

Raison

Nombre de jours

absente

24/02/94

30/06/94

Taïwan

Études à l'Université nationale de Taïwan

126

24/07/94

25/05/95

Taïwan /

États-Unis

Études à l'Université nationale de Taïwan

305

17/06/95

20/09/95

Taïwan/Japon/

États-Unis

Vacances

95

09/12/95

06/01/96

Taïwan /

États-Unis

Funérailles d'une grand-mère

28

10/04/96

20/04/96

États-Unis

Études à l'Université de New York

10

05/09/96

18/12/96

États-Unis

Études à l'Université de New York

104



De

j/m/a

À

j/m/a

Destination

Raison

Nombre de jours absente

27/12/96

13/02/97

Taïwan/

États-Unis

Vacances

48

18/02/97

21/02/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

3

24/02/97

14/03/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

18

18/03/97

27/03/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

9

09/05/97

13/05/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

4

06/09/97

09/10/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

33

14/10/97

30/10/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

16

03/11/97

07/11/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

4

12/11/97

27/11/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

15

30/11/97

19/12/97

États-Unis

Études à l'Université de New York

20

06/01/98

26/01/98

États-Unis

Études à l'Université de New York

20

Total

848

[5]      La demanderesse est également retournée au Canada pour les périodes suivantes :



j/m/a

j/m/a

28/01/94

23/02/94

01/07/94

23/07/94

26/05/95

16/06/95

21/09/95

08/12/95

07/01/96

09/04/96

11/04/96

28/08/96

11/09/96

15/09/96

25/10/96

27/10/96

28/11/96

01/12/96

19/12/96

26/12/96

14/02/97

17/02/97

14/03/97

23/03/97

11/05/97

05/09/97

10/10/97

13/10/97

01/11/97

02/11/97

28/11/97

29/11/97

20/12/97

05/01/98

27/01/98

aujourd'hui

[6]      Les absences du Canada énumérées au paragraphe 4 ont eu lieu pendant que la demanderesse étudiait à l'Université de New York.


[7]      La demanderesse habitait un appartement qu'elle louait à New York pendant qu'elle allait à l'université.


[8]      Les parents de la demanderesse se sont procuré une maison, une automobile, des permis de conduire et ont apporté leurs effets d'immigrant au Canada. La mère de la demanderesse a constitué une société au Canada. De fait, le père et la soeur de la demanderesse sont devenus des citoyens canadiens au mois de décembre 1997, et sa mère, au mois d'octobre 1998.


[9]      Les parents de la demanderesse ont des investissements au Canada.


[10]      Il y avait une chambre désignée dans la maison familiale dont la demanderesse pouvait se servir et dans laquelle elle gardait ses effets personnels lorsqu'elle allait à l'université à New York.


Question en litige


[11]      Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur de droit et de fait en décidant que la demanderesse ne satisfaisait pas aux exigences relatives à la résidence prévues au paragraphe 5(1) de la Loi?


Dispositions législatives


[12]      Le paragraphe 5(1) de la Loi prévoit ce qui suit :

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

     (a) makes application for citizenship;
     (b) is eighteen years of age or over;
     (c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:
     (i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and
     (ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;
     (d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

     (e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and
     (f) is not under a deportation order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.
     5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois_:
     a) en fait la demande;
     b) est âgée d'au moins dix-huit ans;
     c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante_:
     (i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,


     (ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;


     d) a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada;
     e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;
     f) n'est pas sous le coup d'une mesure d'expulsion et n'est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l'article 20.

Analyse et décision

[13]      Cet article de la Loi pose comme exigence qu'un demandeur de la citoyenneté ait résidé pendant au moins trois ans (1095 jours) au Canada dans les 4 ans qui précèdent immédiatement la date à laquelle le demandeur présente sa demande de citoyenneté.

[14]      La jurisprudence de la Cour veut que dans certaines circonstances, des périodes passées à l'extérieur (absences) du Canada puissent être incluses dans le calcul des 1095 jours de résidence requis.

[15]      En l'espèce, la demanderesse a été absente du Canada pendant 848 jours pendant la période pertinente et physiquement présente au Canada pendant 612 jours, ce qui la laisse donc à court de 483 jours des 1095 jours de résidence requis par la loi.

[16]      Les absences du Canada ne sont incluses dans le calcul des 1095 jours de résidence requis que si le demandeur avait centralisé son mode de vie au Canada préalablement aux absences.

[17]      Le juge Dubé de la Cour a énoncé dans l'affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté c. Lo (22 janvier 1999), Dossier T-1082-98, à la page 2 :

         La présence physique au Canada tout au long de la période est moins essentielle lorsqu'une personne s'y est établie en pensée et en fait, ou y a conservé ou centralisé son mode vie habituel. C'était le cas de l'étudiant dans l'affaire Papadogiorgakis (précitée), qui s'était établi en Nouvelle-Écosse avant d'aller étudier aux États-Unis.
         [4]      Malheureusement, ce n'est pas le cas de l'intimée en l'espèce qui, de toute évidence, ne peut s'être établie au Canada en seulement sept jours.
         [5]      Par conséquent, sa demande était prématurée. Maintenant qu'elle a complété ses études et qu'elle s'est établie à Vancouver, elle pourra, au moment opportun, présenter une nouvelle demande de citoyenneté canadienne qui sera sans doute accueillie.
         [6]      L'appel du ministre est accueilli.

[18]      Je suis d'avis que la demanderesse en l'espèce n'a pas fait la démonstration qu'elle a centralisé son mode de vie au Canada au cours des 28 jours pendant lesquels elle était au Canada préalablement à sa première absence, par conséquent, je ne suis pas disposé à inclure ses périodes d'absence du Canada au calcul de la période de résidence exigée. Il en résulte que le juge de la citoyenneté a jugé à bon droit que la demanderesse n'avait pas satisfait les exigences posées par l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

[19]      Dit simplement, la demande de la demanderesse est prématurée et je n'ai aucun doute qu'elle deviendra un jour une citoyenne canadienne.

[20]      Par conséquent, j'ordonne le rejet de la demande (appel).


     ORDONNANCE

[21]      LA COUR ORDONNE le rejet de la demande (appel).



                         « John A. O'Keefe »

                                 J.C.F.C.

Ottawa (Ontario)

Le 26 mai 2000




Traduction certifiée conforme


Kathleen Larochelle, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :              T-629-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Chen Jung Kuo c. Le ministre de la Citoyenneté et de                      l'Immigration                     

                                

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 11 avril 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE O'KEEFE     

EN DATE DU :              26 MAI 2000

ONT COMPARU :

Michael Clifton              Pour la demanderesse

Martin Anderson              Pour le défendeur


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Baker and Associates

Toronto (Ontario)              Pour la demanderesse

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)              Pour le défendeur                 

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