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Date : 20220223


Dossier : T-664-21

Référence : 2022 CF 248

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 23 février 2022

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

BLYTH COWBELLS BREWING INC.

demanderesse

et

BELLWOODS BREWERY INC. ET BELLWOODS HOLDINGS INC.

défenderesses

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Introduction

[1] La Cour est saisie d’un appel interjeté par la demanderesse, Blyth Cowbells Brewing Inc. [Blyth], sur le fondement de l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 [la Loi]. L’appel vise la décision du 23 février 2021 par laquelle la Commission des oppositions des marques de commerce [la Commission] a rejeté la demande d’enregistrement de marque de commerce no 1755747 de la demanderesse.

II. Le contexte

[2] Les défenderesses, Bellwoods Brewery Inc. et Bellwoods Holdings Inc. [collectivement, Bellwoods], sont des brasseurs artisanaux de l’Ontario. Elles sont propriétaires de trois marques de commerce déposées, dont deux sont en cause en l’espèce :

  1. LMC859184 [la marque BELLWOODS et Bell] :

qui a été déposée le 10 mai 2011 et enregistrée le 4 septembre 2013, en liaison avec les produits et services suivants :

PRODUITS :

  • (1) Boissons fermentées, nommément bières, cidre et hydromels; boissons alcoolisées brassées; vêtements, nommément tee-shirts et pulls d’entraînement; autocollants; articles en verre.

SERVICES :

  • (1) Exploitation d’une brasserie; services de brasserie.

  • (2) Vente au détail et en gros de boissons alcoolisées brassées; vente au détail et en gros de boissons alcoolisées; vente au détail et en gros de boissons fermentées, nommément de bières, de cidre et d’hydromels.

  • (3) Exploitation d’un bistrot-brasserie.

  1. LMC878789 [la marque Bell] :

qui a été déposée le 2 janvier 2013 et enregistrée le 27 mai 2014, en liaison avec les produits et services suivants :

PRODUITS :

  • (1) Boissons fermentées, nommément bière; boissons alcoolisées brassées.

  • (2) Vêtements, nommément tee‑shirts et pulls d’entraînement; sacs, nommément fourre-tout; affiches; verrerie, nommément chopes et verres tulipe à bière.

SERVICES :

  • (1) Exploitation d’une brasserie; services de brasserie; vente en gros de boissons alcoolisées brassées; vente en gros de boissons alcoolisées; exploitation d’un bistrot‑brasserie.

  • (2) Vente au détail de boissons alcoolisées brassées; vente au détail de boissons alcoolisées.

[3] Le 19 novembre 2015, la demanderesse, également un brasseur artisanal de l’Ontario, a déposé la demande no 1755747 en vue d’enregistrer la marque de commerce suivante [la marque Cowbell] [la demande] :

sur le fondement de l’emploi projeté en liaison avec les produits et services suivants :

PRODUITS :

  • (1) Bière, ale, lager, stout, porter, boissons alcoolisées brassées.

  • (2) Vêtements tout‑aller, tee‑shirts, casquettes, chapeaux, tuques, foulards, pulls d’entraînement, pulls d’entraînement à capuchon, vestes.

  • (3) Sous-verres, verres à bière, verres, sacs isothermes, manchons pour canettes de bière, manchons pour bouteilles de bière, articles à bruit, serviettes de golf, balles de golf, parapluies de golf, enseignes, autocollants pour pare-chocs.

SERVICES :

  • (1) Services de brasserie.

  • (2) Services de restaurant et de bar.

[4] Le 12 octobre 2016, la demande a été publiée dans le Journal des marques de commerce, volume 63, numéro 3233.

[5] Le 5 janvier 2017, les défenderesses ont déposé une déclaration d’opposition à la demande de la demanderesse pour les motifs suivants :

  1. La demande, au sens de l’alinéa 38(2)a) de la Loi, ne satisfait pas aux exigences suivantes de l’article 30 de la Loi :

  1. L’alinéa 30e) de la Loi, en ce que la demanderesse n’aurait pas pu être convaincue de façon à faire une déclaration portant qu’elle avait l’intention d’employer la marque Cowbell au Canada en liaison avec les produits et services proposés, compte tenu des marques des défenderesses;

  2. L’alinéa 30i) de la Loi, en ce que la demanderesse n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque Cowbell au Canada en liaison avec les produits et services décrits dans la demande. En particulier, la demanderesse n’aurait pas pu faire cette déclaration compte tenu de l’emploi, du dépôt et de l’enregistrement par les défenderesses de leurs marques;

  1. La marque Cowbell de la demanderesse n’est pas enregistrable, au sens des alinéas 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec les marques des défenderesses, qui sont déposées;

  2. La demanderesse n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque Cowbell, au sens de l’alinéa 38(2)c) et du paragraphe 16(3) de la Loi, parce que, à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec les marques des défenderesses, qui ont été antérieurement employées et révélées au Canada par les défenderesses, et à l’égard desquelles une demande d’enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par les défenderesses;

  3. La marque Cowbell n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi et de l’alinéa 38(2)d) de la Loi, car elle ne distingue pas véritablement les produits et services de la demanderesse des produits ou services d’autres propriétaires, y compris des défenderesses, et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi, compte tenu de l’emploi, du dépôt et de l’enregistrement antérieurs par les défenderesses de leurs marques.

[6] La demanderesse a déposé et signifié une contre‑déclaration dans laquelle elle niait chacun des motifs d’opposition.

[7] À l’appui de leur opposition, les défenderesses ont déposé l’affidavit de Michael Clark, administrateur et dirigeant de Bellwoods, souscrit le 12 juin 2017. Dans son affidavit, M. Clark a témoigné de l’historique de Bellwoods, de leurs marques de commerce et de leur stratégie de marque, et il a affirmé que, selon lui, les marques en cause créent de la confusion. Il a joint une capture d’écran d’un gazouillis montrant la confusion alléguée entre les marques en cause.

[8] Devant la Commission, la demanderesse a déposé en preuve deux affidavits :

  1. L’affidavit de Steven Sparling, un des fondateurs de Blyth, souscrit le 4 octobre 2017. Dans son affidavit, M. Sparling a détaillé l’historique, les ventes et les activités publicitaires de l’entreprise de la demanderesse concernant la marque Cowbell;

  2. L’affidavit de Melissa Docherty, parajuriste, souscrit le 19 février 2020. Dans son affidavit, Mme Docherty a résumé les résultats des recherches effectuées sur la base de données sur les marques de commerce canadiennes, ainsi que les résultats de sa recherche en common law, relativement au terme « BELL » en liaison avec diverses boissons alcoolisées et des services connexes, afin de déterminer si un tiers employait le terme ou le dessin d’une cloche en liaison avec des produits et services similaires offerts par les parties.

[9] Aucune preuve en réponse n’a été déposée et aucun contre-interrogatoire n’a été mené.

[10] Dans sa décision, la Commission a conclu que les défenderesses avaient prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’il existe une probabilité raisonnable de confusion entre la marque Cowbell de la demanderesse et au moins la marque Bell des défenderesses, LMC878789, et l’opposition des défenderesses a été accueillie.

[11] Le 19 avril 2021, la demanderesse a interjeté appel de la décision de la Commission. La demanderesse sollicite une ordonnance :

  1. accueillant l’appel;

  2. annulant la décision de la Commission;

  3. enjoignant à la Commission d’accueillir sa demande;

  4. lui adjugeant les dépens de l’appel.

III. La décision faisant l’objet du contrôle

[12] Comme je l’ai déjà dit, les défenderesses se sont opposées à la demande de la demanderesse pour plusieurs motifs. Devant la Commission, les défenderesses ont souligné que leur motif d’opposition le plus solide était celui fondé sur les alinéas 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi, à savoir que la marque Cowbell de la demanderesse créait de la confusion avec les deux marques déposées des défenderesses, particulièrement la marque Bell.

[13] La Commission a rejeté sommairement deux motifs d’opposition : la non‑conformité (motif fondé sur les alinéas 30e) et 30i) de la Loi) et l’absence de droit à l’enregistrement (motif fondé sur l’alinéa 16(3)b) de la Loi). Trois motifs d’opposition ont été retenus : la non‑enregistrabilité (motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi), l’absence de droit à l’enregistrement (motif fondé sur l’alinéa 16(3)a) de la Loi) et l’absence de caractère distinctif (motif fondé sur l’article 2 de la Loi).

[14] Les conclusions de la Commission sur les motifs d’opposition faisant l’objet de l’appel en l’espèce sont les suivantes.

A. La non‑enregistrabilité (alinéa 12(1)d))

[15] Les défenderesses ont soutenu que la marque Cowbell de la demanderesse n’était pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec leurs deux marques. Puisqu’elle était d’avis que la marque Bell offrait aux défenderesses la meilleure chance d’obtenir gain de cause, la Commission a concentré son analyse sur cette marque.

[16] La Commission a conclu que la probabilité de confusion entre les marques en cause penchait tout autant du côté de la confusion que de l’absence de confusion pour les motifs suivants :

  1. La marque Cowbell et la marque Bell ont un certain degré de ressemblance dans la présentation et l’idée qu’elles suggèrent, car les deux sont des dessins de cloche.

  2. Les deux marques sont intrinsèquement distinctives principalement parce que le dessin d’une cloche n’a aucune signification par rapport aux boissons brassées ou aux services connexes. La marque Cowbell de la demanderesse revêt un caractère distinctif plus fort en raison de son dessin de battant distinctif.

  3. La marque Bell des défenderesses est devenue connue dans une mesure légèrement plus grande au Canada que la marque Cowbell de la demanderesse.

  4. Les défenderesses n’ont pas déposé de preuve d’emploi de leur marque Bell en liaison avec ses produits, et la preuve d’emploi en liaison avec leurs services était limitée. La Commission a conclu que ce facteur n’avantageait aucune des parties.

  5. Les deux parties offrent des produits et services semblables et leurs voies de commercialisation se chevauchent. La Commission a conclu que ce facteur favorisait les défenderesses.

  6. La preuve présentée par la demanderesse n’était pas suffisante pour conclure qu’un dessin de cloche est largement employé dans l’industrie des boissons alcoolisées et de la restauration, de sorte que le consommateur canadien moyen aurait l’habitude de distinguer ces marques. Par conséquent, la Commission a conclu que la preuve de la demanderesse sur l’état du registre et du marché ne l’aidait pas de façon significative.

  7. La Commission n’était pas disposée à accorder beaucoup de poids au seul cas de confusion avancé par les défenderesses dans l’affidavit de M. Clark.

  8. La Commission était d’avis qu’elle ne pouvait tirer une conclusion défavorable concernant la probabilité de confusion, car il n’y avait aucune preuve d’emploi simultané significatif.

  9. La Commission a établi une distinction entre l’espèce et la décision San Miguel Brewing International Limited c Molson Canada 2005, 2013 CF 156. Bien que dans les deux cas, la probabilité de confusion entre les dessins servant de marques de bière ait été examinée, en l’espèce, les produits et services qui sont en cause ne concernent pas que la bière et la preuve sur l’état du registre et du marché a été jugée insuffisante.

[17] Étant donné qu’il incombait à la demanderesse d’établir que, selon la prépondérance des probabilités, sa marque Cowbell ne créait pas de confusion avec la marque Bell des défenderesses, la Commission a accueilli le motif d’opposition des défenderesses fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi.

[18] Au vu de la preuve dont elle disposait et compte tenu de l’ensemble des circonstances pertinentes en l’espèce, la Commission a conclu qu’il était probable que le consommateur ordinaire plutôt pressé, qui voit la marque Cowbell de la demanderesse et qui se fonde sur sa première impression, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque Bell des défenderesses et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, serait susceptible de croire que les produits et services liés à la marque Cowbell de la demanderesse proviennent de la même source que celles des défenderesses.

B. L’absence de droit à l’enregistrement (alinéa 16(3)a))

[19] Les défenderesses ont fait valoir que la demanderesse n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement suivant l’alinéa 16(3)a) de la Loi, au motif que la marque Cowbell de la demanderesse crée de la confusion avec la marque Bell antérieurement employée et révélée au Canada par les défenderesses.

[20] La Commission a appliqué les conclusions qu’elle a tirées concernant le motif d’opposition de la non‑enregistrabilité fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi et a également accueilli ce motif.

IV. Les questions en litige

[21] Deux questions se posent en l’espèce :

  1. Quelle est la norme de contrôle applicable?

  2. Existe‑t‑il une probabilité de confusion entre la marque Cowbell de la demanderesse et les marques des défenderesses, particulièrement la marque Bell?

V. Analyse

A. Quelle est la norme de contrôle applicable?

[22] L’article 56 de la Loi confère un droit d’appel devant notre Cour à l’encontre de toute décision de la Commission. En appel, une preuve en plus de celle dont disposait la Commission peut être présentée, et la Cour peut exercer tout pouvoir discrétionnaire dont la Commission était investie.

[23] Lorsque de nouveaux éléments de preuve présentés en appel auraient eu une incidence importante sur les conclusions de fait de la Commission ou sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, la Cour fédérale doit parvenir à sa propre conclusion concernant le caractère raisonnable de la décision de la Commission. Autrement, la norme de contrôle applicable est celle de la norme de la décision correcte (pour les questions de droit) et celle de l’erreur manifeste et dominante (pour les questions de fait et les questions mixtes de fait et de droit) [Caterpillar Inc. c Puma SE, 2021 CF 974 aux para 32‑35; Miller Thomson S.E.N.C.R.L., s.r.l. c Hilton Worldwide Holding LLP, 2020 CAF 134 aux para 47‑48].

[24] Pour déterminer si les nouveaux éléments de preuve sont suffisants pour justifier un nouvel examen de la décision de la Commission, la Cour examinera la nature, l’importance, la valeur probante et la fiabilité des nouveaux éléments de preuve, dans le contexte du dossier, et déterminera s’ils auraient accru la force probante du dossier de preuve ou lui auraient apporté un éclairage quelconque, de manière à avoir un effet sur les conclusions de fait tirées par la Commission ou sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, s’ils avaient été disponibles à la date de la décision.

[25] L’évaluation de l’importance constitue une étape préliminaire dans l’analyse de nouveaux éléments de preuve produits en appel; elle vise à déterminer si la Cour devra réévaluer la preuve relative à une question donnée, et non à établir si les nouveaux éléments de preuve pourraient, en définitive, modifier le résultat ou l’issue. Autrement dit, ce n’est pas forcément parce qu’elle aura jugé de nouveaux éléments de preuve importants que notre Cour ne pourra arriver à la même conclusion que celle de la Commission [AIL International Inc. c Canadian Energy Services L.P., 2019 CF 795 au para 21].

[26] À l’appui de l’appel, la demanderesse a déposé deux nouveaux affidavits :

  1. L’affidavit de Fanqui (Grace) Wang, souscrit le 19 mai 2021.

Dans son affidavit, Mme Wang vise à apporter une preuve supplémentaire sur l’état du registre et du marché en présentant les résultats de sa recherche, qui révèlent que des tiers emploient des dessins‑marques similaires ou identiques en liaison avec des boissons alcoolisées et des services connexes. De plus, sont joints à l’affidavit de Mme Wang des articles et des publications à comité de lecture portant sur le comportement et la finesse des consommateurs de bières artisanales.

  1. L’affidavit de Natasha Fritzley, dirigeante principale des opérations au sein de la demanderesse, souscrit le 19 mai 2021.

Dans son affidavit, Mme Fritzley présente des échantillons de la publicité de la demanderesse où la marque Cowbell est utilisée au Canada depuis au moins 2016, ainsi que des renseignements sur ses ventes. Mme Fritzley témoigne également de l’achalandage important acquis par la marque Cowbell grâce à sa présence en ligne, au nombre de visiteurs à sa brasserie et aux éloges de tiers.

[27] Les défenderesses ont déposé deux nouveaux affidavits en appel :

  1. L’affidavit de Luke Pestl, dirigeant et administrateur de Bellwoods, souscrit le 18 juin 2021.

Dans son affidavit, M. Pestl présente les renseignements suivants :

  • D’autres exemples de confusion des consommateurs : i) lorsqu’un client de la LCBO a confondu la marque Bell figurant sur le chandail du déposant avec la marque Cowbell de la demanderesse; ii) une preuve par ouï‑dire d’un employé, Gord Simpson, qui, lorsqu’il travaillait au magasin de détail des défenderesses, aidait les clients qui disaient avoir précédemment acheté la bière des défenderesses à la LCBO, mais qui avaient en fait acheté la bière de la demanderesse (les produits des défenderesses n’étaient pas disponibles à la LCBO à ce moment‑là); iii) une preuve par ouï‑dire d’un employé, Stephen Cleary, identique à celle figurant dans son affidavit décrit plus loin;

  • Des rapports de discussions en ligne, relatant les opinions de tiers en ce qui concerne le présent différend et la confusion entre les marques en cause;

  • Les statistiques sur leurs ventes, leurs revenus, leurs dépenses en publicité ainsi que leur cote d’évaluation;

  • La preuve que les marques des défenderesses sont employées depuis 2011, en réponse à la conclusion de la Commission selon laquelle la preuve à cet égard était insuffisante.

  1. L’affidavit de Stephen Cleary, un employé des défenderesses, souscrit le 18 juin 2021.

M. Cleary a dirigé les efforts de vente initiaux des produits des défenderesses à la LCBO en novembre 2019. Il affirme qu’il a dû expliquer les différences entre les parties et leurs produits respectifs dans ses communications avec les gérants et le personnel de la LCBO, y compris lorsqu’il portait la marchandise de la brasserie Bellwoods.

[28] La preuve par affidavit présentée en l’espèce n’a pas fait l’objet d’un contre‑interrogatoire.

[29] Les deux parties soutiennent que leurs nouveaux éléments de preuve ont une incidence importante sur certains facteurs dans l’analyse relative à la confusion. Par conséquent, je dois me prononcer sur l’importance des nouveaux éléments de preuve sur la décision de la Commission et dois examiner de nouveau la probabilité de confusion. Voici mon examen et mon analyse.

(1) Le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[30] Comme je l’ai déjà indiqué, sur la foi de la preuve dont elle disposait, la Commission a seulement été en mesure de conclure que la marque Bell des défenderesses est devenue connue dans une mesure un peu plus grande au Canada que la marque Cowbell de la demanderesse. En réponse, les deux parties ont présenté des éléments de preuve concernant les ventes et la visibilité de leurs marques dans l’affidavit de Mme Fritzley et dans celui de M. Pestl.

[31] Je conclus que les nouveaux éléments de preuve figurant dans l’affidavit de Mme Fritzley et dans celui de M. Pestl concernant la mesure dans laquelle les marques des parties sont devenues connues auraient pu avoir une incidence importante sur la conclusion de la Commission au sujet de l’alinéa 6(5)a) de la Loi, puisque chaque partie a présenté une preuve qui comble les lacunes dans la preuve relevées par la Commission.

(2) La période pendant laquelle les marques ont été en usage

[32] La Commission a conclu que, bien que les marques des défenderesses aient prétendument été employées pendant une plus longue période que la marque Cowbell de la demanderesse, les défenderesses n’ont produit aucune preuve d’emploi de leurs marques de commerce en liaison avec leurs produits, et la preuve de l’emploi en liaison avec leurs services était limitée.

[33] En réponse, l’affidavit de M. Pestl fournit la preuve que les marques ont été employées dès 2011.

[34] Je conclus que certaines parties du nouvel affidavit de M. Pestl concernant la mesure dans laquelle les marques des défenderesses sont devenues connues auraient pu avoir une incidence sur la conclusion de la Commission au sujet de l’alinéa 6(5)b) de la Loi, puisque les défenderesses ont présenté une preuve qui comble les lacunes dans la preuve soulignées par la Commission.

(3) La preuve sur l’état du registre et l’état du marché

[35] La Commission a conclu que la preuve de la demanderesse n’était pas suffisante pour conclure qu’un dessin de cloche est largement employé dans l’industrie des boissons alcoolisées et de la restauration, de sorte que le consommateur canadien moyen aurait l’habitude de distinguer ces marques.

[36] Dans l’affidavit de Mme Wang, la demanderesse vise à apporter une preuve supplémentaire sur l’état du registre et du marché en présentant les résultats de sa recherche, qui révèlent que des tiers emploient des dessins‑marques similaires ou identiques en liaison avec des boissons alcoolisées et des services connexes. Aucune de ces marques de tiers ne contient un dessin de cloche pour usage en liaison avec des bières artisanales ou les services connexes. De plus, l’affidavit de Mme Wang comprend des articles et des publications à comité de lecture portant sur le comportement et la finesse des consommateurs de bières artisanales.

[37] J’estime que les nouveaux éléments de preuve sur l’état du registre présentés par la demanderesse ne sont pas importants. La preuve concernant d’autres enregistrements n’aide pas à tirer une conclusion sur la probabilité de confusion en ce qui concerne les deux marques en cause. Comme je l’ai déjà dit, les marques tirées du registre présentées par Mme Wang dans son affidavit ne sont pas semblables à celles en cause. De plus, les circonstances de leur enregistrement ne sont pas mentionnées, à savoir si un examinateur ou la Commission dans une décision d’opposition a examiné si les marques créaient de la confusion. En outre, il n’y a aucune preuve corroborant l’emploi réel de ces marques au Canada, et l’état du registre à lui seul n’est pas convaincant. Chaque demande doit être jugée sur le fond.

[38] Toutefois, les articles et les publications à comité de lecture portant sur le comportement et la finesse des consommateurs de bières artisanales présentent un intérêt pour la question de la confusion et sont admis.

[39] Parmi les onze articles joints à l’affidavit de Mme Wang, cinq sont des publications à comité de lecture. Ces publications semblent porter principalement sur la façon d’entrer sur un marché qui est actuellement un marché à créneaux et de l’élargir, sur la croissance d’un marché qui était auparavant un marché à créneaux, ainsi que sur l’expérience sensorielle de consommateurs de bières (et de vin). Ces publications ne semblent pas pertinentes en l’espèce. Les marques en cause sont associées à des produits et services qui sont vendus et offerts au grand public, et pas uniquement à des consommateurs raffinés ou de produits‑créneaux. De plus, il semblerait qu’une partie des publications de la demanderesse présente des études sur la façon d’élargir le marché de la bière artisanale, un produit‑créneau, au public en général.

(4) La preuve d’une confusion réelle

[40] La Commission a conclu que la preuve présentée par les défenderesses était fondée sur du ouï‑dire et a accordé peu de poids au cas de confusion énoncé dans l’affidavit de M. Clark.

[41] Selon les défenderesses, les deux affidavits qu’elles ont déposés en l’espèce fournissent la preuve d’autres cas de confusion. Toutefois, l’affidavit de M. Cleary n’offre aucune preuve de confusion réelle fondée sur l’emploi des dessins‑marques de cloche des parties, comporte du ouï‑dire et devrait être écarté. Les paragraphes 10 à 15 de l’affidavit de M. Pestl, qui portent sur la confusion réelle, sont fondés en grande partie sur du ouï‑dire et ne sont pas fiables ni nécessaires, et la Cour ne leur accorde aucun poids.

[42] Je conclus que les nouveaux éléments de preuve concernant les cas de confusion réelle, fondés sur du ouï‑dire, n’auraient pas eu d’incidence importante sur la conclusion de la Commission.

(5) Conclusion sur les nouveaux éléments de preuve

[43] Les nouveaux éléments de preuve soumis à l’examen de notre Cour, c’est‑à‑dire ceux qui se trouvent dans l’affidavit de Mme Fritzley présenté par la demanderesse et l’affidavit de M. Pestl présenté par les défenderesses, auraient pu mener la Commission à une conclusion différente sur la mesure dans laquelle les marques en cause sont devenues connues, la période pendant laquelle les marques ont été en usage, ainsi que les circonstances liées à la probabilité de confusion. Par conséquent, j’examinerai de nouveau la preuve en tenant compte des nouveaux éléments de preuve admis, puis j’évaluerai la prépondérance globale des facteurs énoncés au paragraphe 6(5), de même que les circonstances liées à la probabilité de confusion.

B. Existe‑t‑il une probabilité de confusion entre la marque Cowbell de la demanderesse et les marques des défenderesses, particulièrement la marque Bell?

[44] L’alinéa 12(1)d) de la Loi prévoit qu’une marque de commerce est enregistrable si elle ne crée pas de la confusion avec une marque de commerce déposée. La date pertinente pour évaluer la confusion conformément à cette disposition est la date de la décision du juge des faits. Lorsque les nouveaux éléments de preuve déposés en appel sont importants, de sorte qu’un nouvel examen doit être effectué, la date pertinente est la date du jugement de notre Cour.

[45] Le paragraphe 6(2) de la Loi définit la notion de confusion :

(2) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[46] Le critère pour déterminer s’il y a probabilité de confusion a été énoncé par le juge Rothstein dans l’arrêt Masterpiece Inc. c Alavida Lifestyles Inc., 2011 CSC 27 au paragraphe 40 [Masterpiece] :

Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue [de la marque], alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce [antérieures] et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.

[47] Le paragraphe 6(5) de la Loi énumère une liste non‑exhaustive de facteurs que le tribunal doit prendre en considération lorsqu’il applique le critère pour déterminer s’il y a probabilité de confusion.

[48] Le degré de ressemblance est le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion. Si les marques ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire. Ainsi, les autres facteurs ne deviennent importants que si les marques sont jugées identiques ou très similaires [Masterpiece, au para 49].

[49] Dans le cadre d’une procédure d’opposition, il incombe à la partie qui sollicite l’enregistrement de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’aucune confusion n’est susceptible de survenir [Mattel Inc. c 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22 au para 54]. La partie opposante a le fardeau initial de prouver les faits sur lesquels reposent ses allégations.

(1) Le degré de ressemblance

[50] Dans l’analyse du degré de ressemblance entre deux marques de commerce, celles‑ci doivent être examinées dans leur ensemble, et non faire l’objet d’une comparaison côte à côte. Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23 au para 20].

[51] La Commission a conclu que les marques des parties ont un certain degré de ressemblance dans la présentation et l’idée qu’elles suggèrent, car les deux sont des dessins de cloche. La demanderesse soutient que la conclusion de la Commission est erronée et que celle‑ci aurait dû accorder plus de poids au [traduction] « battant surdimensionné original en forme de houblon ».

[52] La marque Cowbell de la demanderesse et la marque Bell des défenderesses sont toutes les deux des cloches représentées par un dessin noir illustrant une poignée, une cloche et un battant :

[53] La marque Cowbell de la demanderesse comporte un battant distinctif en forme de houblon. Toutefois, ce n’est qu’un seul des aspects du dessin de cloche dans son ensemble, qui prédomine les deux marques.

[54] Lorsque les marques en cause sont examinées dans leur ensemble, j’estime qu’elles ont un certain degré de ressemblance et que la différence entre les deux est susceptible de créer de la confusion quant à la source chez le consommateur ordinaire qui se fonderait sur sa première impression et n’aurait qu’un vague souvenir des marques en question.

(2) La période pendant laquelle les marques ont été en usage

[55] La Commission a conclu que les défenderesses n’avaient fourni aucune preuve pour démontrer qu’elles employaient leurs marques depuis 2012. Comme je l’ai déjà dit, les défenderesses ont démontré dans l’affidavit de M. Pestl qu’elles employaient leurs marques depuis 2011 en liaison avec leurs produits et services. De plus, bien que la preuve n’indique pas clairement la pleine mesure de l’usage et des ventes de bières et de marchandises portant la marque Bell, la preuve démontre l’usage et les ventes de bières portant cette marque i) sur des bouteilles de bière, ii) sur des enseignes et iii) à la brasserie, depuis au moins 2012.

[56] Par conséquent, j’estime que le facteur énoncé à l’alinéa 6(5)b) favorise les défenderesses.

(3) Le genre de produits, de services et de commerce

[57] Nul ne conteste que les parties vendent des produits similaires et offrent des services semblables. De plus, les parties exploitent toutes deux leurs brasseries artisanales en Ontario. Il existe un chevauchement clair dans ce cas. Ce facteur favorise les défenderesses.

(4) Le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[58] La Commission a conclu que les deux marques sont intrinsèquement distinctives, principalement parce que le dessin d’une cloche n’a pas de signification par rapport aux boissons brassées ou aux services connexes. De plus, la Commission a conclu que la marque Cowbell de la demanderesse revêt un caractère distinctif inhérent plus fort en raison de son dessin de battant distinctif.

[59] Cela dit, la demanderesse a créé la marque Cowbell, malgré qu’elle connaissait déjà l’existence de la marque déposée Bell des défenderesses – elle a choisi un dessin de cloche similaire à celui utilisé par son compétiteur, dans le même marché ontarien, pour essentiellement les mêmes marchandises et services. Elle a choisi de prendre ce risque en toute connaissance de cause. Ni l’une ni l’autre des parties ne conteste cette conclusion, et les nouveaux éléments de preuve n’ont aucune incidence sur ce facteur dans mon examen de la probabilité de confusion.

[60] Comme je l’ai déjà indiqué, sur la foi de la preuve dont elle disposait, la Commission a seulement été en mesure de conclure que la marque Bell des défenderesses est devenue connue dans une mesure un peu plus grande au Canada que la marque Cowbell de la demanderesse. En réponse, les deux parties ont présenté des éléments de preuve concernant les ventes et la visibilité de leurs marques dans l’affidavit de Mme Fritzley et dans celui de M. Pestl. La preuve se résume comme suit :

  1. Les défenderesses exploitent leur entreprise et emploient leurs marques depuis environ cinq ans de plus que la demanderesse;

  2. Les ventes brutes des deux parties sont comparables, les défenderesses ayant fait des recettes brutes d’environ 4 M$ de plus en 2021;

  3. Les deux parties sont très bien cotées et ont figuré dans de multiples publications;

  4. La demanderesse a présenté d’autres éléments de preuve de sa visibilité sur Google et les médias sociaux, ce que les défenderesses n’ont pas fourni;

  5. La demanderesse a dépensé environ deux fois plus d’argent en publicité que les défenderesses, ces dernières affirmant dépendre en grande partie du bouche-à-oreille.

[61] Je conclus que le caractère distinctif inhérent est équivalent, tandis que les défenderesses sont connues dans une plus grande mesure depuis plus longtemps. Par conséquent, ce facteur favorise les défenderesses.

(5) Les autres circonstances

a) L’état du registre et du marché

[62] Comme je l’ai déjà dit, l’affidavit de Mme Wang présenté par la demanderesse sur l’état du registre et du marché n’est pas pertinent en l’espèce. Même s’il était admis en preuve, la Cour n’y accorderait aucun poids.

[63] Par conséquent, je conviens avec la Commission que la preuve de la demanderesse n’était pas suffisante pour conclure qu’un dessin de cloche est largement employé dans l’industrie des boissons alcoolisées et de la restauration, de sorte que le consommateur canadien moyen aurait l’habitude de distinguer ces marques, et que cette preuve n’aide pas la demanderesse.

b) La preuve d’une confusion réelle

[64] Les défenderesses ont présenté deux autres récits directs relatant la confusion entre leurs marques et la marque Cowbell de la demanderesse, une preuve par ouï‑dire d’un autre employé qui aurait été témoin de confusion entre les marques, ainsi que des discussions au sujet de la confusion sur les réseaux sociaux et des blogues.

[65] Je conclus que la preuve par ouï‑dire des défenderesses au sujet de l’expérience de son employé, Gord Simpson, figurant dans l’affidavit de M. Pestl, est inadmissible. Aucune exception à la règle du ouï‑dire n’a été demandée, et je ne vois pas pourquoi cette preuve n’aurait pas pu être présentée par preuve directe. De même, comme je l’ai déjà dit, l’affidavit de M. Cleary n’a aucune valeur en appel.

[66] Par conséquent, la preuve d’une confusion réelle n’est essentiellement pas admissible.

(6) Conclusion sur l’analyse relative à la confusion

[67] La question à laquelle doit répondre la Cour consiste à savoir si, à la lumière des facteurs pertinents énoncés au paragraphe 6(5) de la Loi et des autres circonstances de l’espèce, comme l’a affirmé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Masterpiece, il existe un degré de ressemblance suffisant entre les marques des parties pour que le consommateur ordinaire plutôt pressé, qui se fonde sur sa première impression et qui n’a qu’un vague souvenir de la marque Bell des défenderesses, confondrait vraisemblablement la source des produits et services que vend la demanderesse [Masterpiece, au para 41].

[68] Je conclus qu’il existe une probabilité de confusion à la date pertinente. Les facteurs énoncés au paragraphe 6(5), lorsqu’ils sont examinés séparément et dans leur ensemble, conjointement avec les autres circonstances de l’espèce, sont neutres ou militent en faveur d’une conclusion de probabilité de confusion :

  • Il existe un certain degré de ressemblance entre les marques en cause;

  • Les défenderesses emploient leur marque depuis plus longtemps;

  • Le chevauchement qui existe quant au genre de produits et à la nature du commerce favorise les défenderesses;

  • La marque Bell des défenderesses et la marque Cowbell de la demanderesse sont toutes les deux distinctives, mais les marques des défenderesses sont connues dans une plus grande mesure;

  • La preuve de l’état du registre et du marché n’aide pas la demanderesse;

  • La preuve d’une confusion réelle est sans conséquence, et je ne lui accorde que peu ou pas de poids.

[69] Les facteurs énumérés précédemment étayent la conclusion qu’il existe une probabilité de confusion. Par conséquent, la marque Cowbell de la demanderesse n’est pas enregistrable par application de l’alinéa 12(1)d) de la Loi.

[70] Compte tenu de mes conclusions, la demanderesse n’a pas droit à l’enregistrement de la marque Cowbell conformément à l’article 2 et à l’alinéa 16(2)a) de la Loi.

[71] Pour mes motifs qui précèdent, la demande est rejetée. Les dépens sont adjugés aux défenderesses.


JUGEMENT dans le dossier T-664-21

LA COUR STATUE :

  1. L’appel est rejeté.

  2. Les dépens sont adjugés aux défenderesses et calculés selon la colonne III du tarif B.

« Michael D. Manson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-664-21

 

INTITULÉ :

BLYTH COWBELLS BREWING INC. c BELLWOODS BREWERY INC. ET BELLWOODS HOLDINGS INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 FÉVRIER 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 23 féVRIER 2022

COMPARUTIONS :

SCOTT MILLER

DEBORAH MELTZER

 

POUR La demanderesse

 

JONATHAN MESIANO-CROOKSTON

 

POUR LES DÉFENDERESSES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

MBM INTELLECTUAL PROPERTY LAW LLP

OTTAWA (ONTARIO)

 

POUR La demanderesse

 

GOLDMAN HINE LLP

TORONTO (ONTARIO)

 

POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

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