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Date : 20011001

Dossier : IMM-88-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1077

ENTRE :

                                                          SALMAN AHMED BABER

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE TREMBLAY-LAMER

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 82.1(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C., ch. I-2, et ses modifications, qui vise la décision de l'agente des visas Heidi Hanf, du haut-commissariat du Canada à Islamabad, au Pakistan, de refuser la demande de résidence permanente déposée par Salman Ahmed Baber à titre de demandeur indépendant.

[2]                 Le demandeur a aussi présenté une requête pour outrage au tribunal fondée sur l'alinéa 466c) des Règles de la Cour fédérale (1998).

[3]                 Le demandeur est un citoyen du Pakistan. Il a obtenu une maîtrise ès sciences en psychologie appliquée de l'université du Penjab en 1990. Il est propriétaire d'une entreprise de consultation (le Mian Atta Ullah Psychic-Care Centre), créée en 1991. Il a aussi été, à compter de 1993, professeur de psychologie au Government College Jhang, où il se consacrait principalement à l'enseignement et à la recherche.

[4]                 La demande de résidence permanente qui fait l'objet de la présente instance n'est pas la première que le demandeur présente. Une première demande a été refusée par une lettre datée du 1er avril 1997. Le demandeur a ensuite présenté une nouvelle demande le 28 août 1997, dans laquelle il faisait part de son intention de travailler comme psychologue au Canada, profession définie au chapitre 4151.0 de la Classification nationale des professions (CNP). Cette demande a été refusée par une lettre datée du 2 juin 1999 en raison du manque d'expérience du demandeur. Au mois de septembre suivant, le demandeur a demandé la réouverture de la demande afin qu'elle fasse l'objet d'un nouvel examen. Cette demande a été accordée. Le demandeur a participé à une entrevue avec l'agente des visas Heidi Hanf le 6 septembre 2000. Cette entrevue avait pour but de vérifier si le demandeur satisfaisait aux exigences de la profession de psychologue indiquées au chapitre 4151.0 de la CNP et, plus précisément, de déterminer si le demandeur est simplement un professeur ou s'il effectue des recherches et donne des conseils (dossier du défendeur, onglet B, à la p. 137). L'agente des visas a rejeté la demande par une lettre datée du 19 septembre 2000. C'est cette décision qui fait l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

[5]                 Le demandeur a été apprécié en fonction des exigences prévues par le chapitre 4151.0 de la CNP pour la profession de psychologue. Voici ces exigences :

Les psychologues évaluent les troubles mentaux et affectifs des clients, leur donnent des conseils et les traitent, effectuent des recherches et mettent en pratique des théories relatives au comportement et aux processus mentaux. Les psychologues travaillent en pratique privée et dans des établissements tels que les cliniques, les établissements correctionnels, les hôpitaux, les centres de réadaptation, les écoles et les universités.

Exemples d'appellations d'emploi

Psychologue, psychologue clinicien/psychologue clinicienne, psychologue en psychologie expérimentale, psychologue en recherches

Fonctions principales

Les psychologues remplissent une partie ou l'ensemble des fonctions suivantes :

                 - examiner les comportements des clients, évaluer leurs troubles mentaux et affectifs, leur donner des conseils et les traiter;

                 - donner des conseils à des individus et à des groupes afin de les aider à se développer et à mieux s'adapter sur les plans personnel, social, éducatif et professionnel;

                 - appliquer des théories et des principes psychologiques concernant le comportement et les processus mentaux tels que l'apprentissage, la mémoire, la perception et le développement du langage;

                 - formuler des hypothèses et des plans expérimentaux, réviser la documentation, effectuer des études et les publier.

Les psychologues peuvent se spécialiser en psychologie clinique ou en recherche expérimentale. Ils peuvent aussi se spécialiser dans des domaines particuliers tels que la psychologie du comportement, la pédopsychologie, la psychologie cognitive, génétique, éducative ou industrielle, la psycho-neurophysiologie, la psychologie sociale ou la psychologie des sports.

Conditions d'accès à la profession

                 - Un doctorat en psychologie est exigé à l'Île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse, en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique.

                 - Une maîtrise en psychologie est exigée à Terre-Neuve, au Nouveau-Brunswick, au Québec, en Alberta et dans les Territoires du Nord-Ouest.


                 - Un stage d'expérience pratique supervisé est habituellement exigé.

                 - La réussite des examens provinciaux, écrits ou oraux, est habituellement requise.

                 - Un certificat provincial d'affiliation est exigé dans toutes les provinces et dans les territoires.

                 - Au Québec, l'appartenance à la corporation professionnelle des psychologues est obligatoire.

                 - Les psychologues se spécialisent dans des domaines particuliers de leur discipline grâce à la formation et au cumul de l'expérience.

[6]                 Le demandeur a obtenu les points d'appréciation suivants pour chacun des critères de sélection :

Âge :                                            10

Facteur professionnel : 00

F.E.F. :                           18

Expérience :                                 06

Facteur démographie :              08

Éducation :                                  15

Anglais :                                      06

Français :                                     03

Point supplémentaire :    00

Personnalité :                               02

Total :                                           68

  

[7]                 L'agente des visas n'a accordé aucun point au demandeur pour le facteur professionnel parce qu'il ne possédait pas les qualités énumérées dans la CNP. Elle a conclu que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences de la profession de psychologue qui sont énoncées dans la CNP compte tenu du fait qu'il avait l'intention de s'installer à Toronto (un doctorat en psychologie est exigé en Ontario). Elle a aussi dit que les renseignements fournis par le demandeur ne l'avaient pas convaincue que ce dernier avait exercé en grand nombre les fonctions principales décrites dans la CNP. Finalement, l'agente des visas a aussi évalué le demandeur à titre de professeur en fonction du chapitre 4121 de la CNP. Dans ce cas également, le demandeur devait détenir un doctorat, ce qu'il n'avait pas. L'agente des visas a rejeté la demande pour ces motifs et en se fondant sur l'article 11 du Règlement sur l'immigration de 1978 (DORS/78-172, et ses modifications).

[8]                 Le demandeur, qui se représentait lui-même, n'a pas pu assister à l'audience et a demandé à la Cour de prendre en considération seulement ses observations écrites.

[9]                 Le demandeur fait référence aux trois décisions rendues par les agents des visas dans sa demande. Il est vrai qu'il semble y avoir quelques contradictions entre les trois décisions, mais c'est uniquement celle du 19 septembre 2000, qui a été rendue par Heidi Hanf, qui fait l'objet du présent contrôle judiciaire. Bien qu'il soit reconnu qu'un agent des visas puisse consulter des décisions antérieures (Shahwan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 785, aux par. 20 et 21 (QL)), l'agente des visas n'était pas liée par les décisions rendues précédemment, et elle devait rendre sa décision en fonction de la preuve qui lui avait été présentée. De cette façon, il est certain que la demande du demandeur fait l'objet d'un examen indépendant et que l'agent qui consulte les notes ne prend pas sa décision avant de rencontrer le demandeur dans le cadre d'une entrevue.

[10]            Je rappellerai d'abord qu'il est bien établi que la détermination du nombre de points d'appréciation qu'il convient d'attribuer au regard des facteurs énumérés à l'annexe I du Règlement est une question de fait qui relève de l'expertise de l'agent des visas, et qu'il faut faire montre d'une grande retenue à l'égard de cette détermination.

[11]            Il appartient au demandeur de démontrer qu'une décision discrétionnaire prise par un agent des visas est illégale. C'est à lui qu'il incombe de présenter des éléments de preuve ou d'invoquer des moyens expliquant pourquoi la décision est illégale (Williams c. Canada, [1997] 2 C.F. 646 (C.A.), à la p. 675).

[12]            Comme l'intimé l'a fait remarquer au sujet du Règlement :

[Traduction]

a) Aux termes de l'alinéa 11(2)b), un agent des visas ne délivre un visa que si l'immigrant a un emploi réservé au Canada. Or, en l'espèce, le demandeur n'a pas prouvé qu'il avait un emploi au Canada.

b) Aux termes de l'alinéa 11(2)a), un agent des visas ne délivre un visa que si l'immigrant a obtenu au moins un point d'appréciation pour le facteur visé à l'article 4 de la colonne I de l'annexe I, soit le facteur professionnel. Le demandeur ne satisfait pas aux exigences professionnelles prévues par la CNP et n'a, en conséquence, obtenu aucun point pour ce facteur.                                                                                                                     (Dossier du défendeur, vol. II, à la p. 10)

[13]            Le demandeur ne respectait pas les exigences prévues aux chapitres 4151 et 4121 de la CNP puisqu'il n'était pas titulaire d'un doctorat en psychologie.

[14]            Le demandeur n'a donc obtenu aucun point pour le facteur professionnel. Même si une erreur a été commise dans l'attribution des points pour la langue et la personnalité, l'alinéa 11(2)a) empêchait de toutes façons l'agente des visas de délivrer un visa.

[15]            Le fait que l'intimé n'ait pas parlé au demandeur de l'obligation de détenir un doctorat ne fait pas de la décision de l'agente des visas une décision inéquitable. Il appartenait au demandeur de prouver qu'il satisfaisait aux critères énoncés dans les règles et le Règlement (Yu c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1990), 36 F.T.R. 296).

[16]            Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

REQUÊTE POUR OUTRAGE AU TRIBUNAL

[17]            Le demandeur soutient que l'agente des visas Heidi Hanf s'est parjurée aux paragraphes 12 et 17 de son affidavit et que, de ce fait, elle a porté atteinte à la dignité de la Cour.

[18]            L'agente des visas déclare simplement, aux paragraphes 12 et 17 de son affidavit, qu'elle a pris en considération tous les renseignements fournis par le demandeur.

[19]            Les articles 466 à 472 des Règles de la Cour fédérale (1998) traitent de l'outrage au tribunal.


[20]            Une allégation d'outrage au tribunal a une dimension criminelle ou quasi criminelle et la déclaration de culpabilité dans le cas d'outrage au tribunal doit être fondée sur une preuve hors de tout doute raisonnable (art. 469 des Règles) (Lyons Partnership, L.P. c. MacGregor) (2000), 186 F.T.R. 241, à la p. 245).

[21]            Les éléments constitutifs de l'outrage sont les suivants : a) le défendeur a une connaissance personnelle réelle de l'ordonnance du tribunal; b) il est l'acteur principal, soit parce qu'il commet l'acte lui-même, soit parce qu'il a expressément ou implicitement autorisé sa perpétration; c) le degré nécessaire de mens rea (Ibid.).

[22]            En l'espèce, le demandeur n'a pas réussi à prouver ces éléments.

[23]            La requête est rejetée.

                                                                    « Danièle Tremblay-Lamer »

      Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 1er octobre 2001.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :                                                         IMM-88-01

INTITULÉ :                                                     SALMAN AHMED BABER c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                              Le 1er octobre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :                                    Le 1er octobre 2001

COMPARUTIONS :

Personne n'a comparu                                                                              POUR LE DEMANDEUR

Ritu Banerjee                                                                                                POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Salman Ahmed Baber                                                                                  POUR LE DEMANDEUR

(se représentant lui-même,

venant du Pakistan mais ayant

une adresse à Calgary (Alberta))

Morris Rosenberg                                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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