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                                                                                                                               Date : 20050930

                                                                                                                    Dossier : IMM-1451-05

                                                                                                               Référence : 2005 CF 1290

ENTRE :

                                             HENRI JEAN-CLAUDE SEYOBOKA

                                                                                                                                      Demandeur

                                                                          - et -

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                         ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                        Défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire afin d'obtenir un bref de mandamus, ordonnant au défendeur de statuer et rendre une décision définitive sur la demande de résidence permanente présentée par le demandeur en date du 12 août 1996, au Canada.

[2]         Henri Jean-Claude Seyoboka (le demandeur) est de citoyenneté rwandaise. Il est arrivé au Canada le 17 janvier 1996, date à laquelle il a revendiqué le statut de réfugié.

[3]         Le 25 octobre 1996, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la CISR) a reconnu au demandeur le statut de réfugié au sens de la Convention.


[4]         Le 12 août 1996, le demandeur a déposé une demande de résidence permanente. Jusqu date, le défendeur n'a toujours pas fait suite à cette demande.

[5]         À plusieurs occasions, le demandeur a cherchéà connaître ltat de sa demande. Le défendeur a toujours répondu que les recherches en matière de sécurité se poursuivaient.

[6]         Le demandeur soumet que l'alinéa 9(1)a) et le paragraphe 21(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27, et les alinéas 70(1)a) et 70(2)c) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, obligent Citoyenneté et Immigration Canada à faire droit à une demande de résidence permanente dès que les conditions requises sont rencontrées. Le demandeur soumet qu'il a rempli toutes les conditions pour que sa demande de résidence puisse être émise. Pour sa part, le défendeur soumet qu'il existe encore des recherches en matière de sécurité à compléter et que le demandeur doit subir un nouvel examen médical.

[7]         Lmission d'un bref de mandamus est un recours extraordinaire en équité. La Cour d'appel fédérale a établi les conditions selon lesquelles un bref de mandamus doit être accordé dans Apotex Inc. c. Canada (Procureur général et al.), [1994] 1 C.F. 742 :

1.         Il doit exister une obligation légale d'agir qui ait un caractère public.

2.        L'obligation doit exister envers le requérant.

3.         Il doit exister un droit clair d'obtenir l'exécution de cette obligation.

4.         Lorsque l'obligation dont on demande l'exécution forcée est discrétionnaire, il faut prendre en considération la nature du pouvoir discrétionnaire et la manière dont il doit être exercé.

5.         Le requérant n'a aucun autre recours.

6.         Le bref sollicité aura une incidence sur le plan pratique.


7.         Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le tribunal estime que rien ne l'empêche, en vertu de l'equity, d'accorder la réparation demandée.

8.         Compte tenu de la « prépondérance des inconvénients » , le bref de mandamus devrait être accordé.

[8]         Bien qu première vue neuf ans constituent une longue période de temps pour quelqu'un qui attend lmission du statut de résident permanent, les demandes de mandamus doivent être appréciées en fonction des faits particuliers de la cause, la jurisprudence ne servant qu établir des paramètres (Mohamed c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [2000] A.C.F. no 1677, au paragraphe 15). En l'espèce, des ajouts significatifs ont été faits par le demandeur à son dossier au cours de ces neuf ans. Ce dernier a d'abord modifié son formulaire original de demande de résidence permanente en mai 1998, y ayant ajouté à la main qu'il avait fait des études à lcole supérieure militaire et qu'il avait été employé par les forces armées du Rwanda, rectifiant ainsi deux fausses déclarations antérieures sur le sujet. Plus tard, le 1er novembre 2004, le demandeur a fourni deux documents qui font référence à sa participation dans le génocide au Rwanda.

[9]         À mon avis, compte tenu des faits présentés par le demandeur depuis sa demande initiale de résidence permanente, le défendeur est justifié de compléter son enquête de sécurité. Lorsqu'il est question de sécurité, la Cour ne doit pas émettre une ordonnance de mandamus qui aurait comme résultat une enquête avortée ou asphyxiée (Bouhaik c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [2001] A.C.F. no 155 (QL)).


[10]       De plus, le ministre de la Sécurité publique a ensuite demandé à la CISR d'annuler le statut de réfugié du demandeur. Cette demande, bien que tardive, n'est certes pas frivole. Si elle est accordée, tout droit de résidence permanente accordé au demandeur serait annulé. En attendant, donc, que la demande du ministre de la Sécurité publique ne soit décidée, je suis d'avis qu'il n'est pas utile dmettre un bref de mandamus (voir, par exemple, Kang c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [2001] A.C.F. no 1544 (QL), Chaudhry c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [1998] A.C.F. no 1695 (QL) et Singh c. ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration, [1998] A.C.F. no 585 (QL)).

[11]       Pour tous ces motifs, compte tenu des exigences énoncées dans l'arrêt Apotex Inc., supra, pour lmission d'un bref de mandamus, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                    

       JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 30 septembre 2005


                                                              COUR FÉDÉRALE

                                               AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-1451-05

INTITULÉ :                                                       HENRI JEAN-CLAUDE SEYOBOKA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                               Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                             Le 12 septembre 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                 Le juge Pinard

DATE DES MOTIFS :                                   Le 30 septembre 2005        

COMPARUTIONS :

Me Rock Séguin                                              POUR LE DEMANDEUR

Me Richard Casanova                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rock Séguin                                                   POUR LE DEMANDEUR

Vaudreuil-Dorion (Québec)

John H. Sims, c.r.                                           POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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