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     Date : 19980821

     Dossier : IMM-1712-96

Ottawa (Ontario), le 21 août 1998

En présence de Monsieur le juge Pinard

Entre :

     LEIB WALDMAN,

     demandeur,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     défendeur.

     ORDONNANCE

         La demande de contrôle judiciaire de la décision rendue en vertu du paragraphe 44(1) de la Loi sur l"immigration par Citoyenneté et Immigration Canada le 1er mai 1996, de ne pas traiter la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par le demandeur, est rejetée.

     YVON PINARD

     ___________________________________

     JUGE

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes

     Date : 19980821

     Dossier : IMM-1712-96

Entre :

     LEIB WALDMAN,

     demandeur,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     défendeur.

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]      Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire d"une décision rendue par Citoyenneté et Immigration Canada en vertu du paragraphe 44(1) de la Loi sur l"immigration le 1er mai 1996, de ne pas traiter la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par le demandeur. Le paragraphe 44(1) est rédigé comme suit:

44. (1) Any person who is in Canada, other than a person against whom a removal order has been made but not executed, unless an appeal from that order has been allowed, and who claims to be a Convention refugee may seek a determination of the claim by notifying an immigration officer.


44. (1) Toute personne se trouvant au Canada peut revendiquer le statut de réfugié au sens de la Convention en avisant en ce sens un agent d'immigration, à condition de ne pas être frappée d'une mesure de renvoi qui n'a pas été exécutée, à moins que la mesure n'ait été annulée en appel.

[2]      Le demandeur sollicite la réparation suivante :

a)      un jugement rendu en vertu de l"article 52 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) déclarant inconstitutionnel et inopérant le paragraphe 44(1) de la Loi sur l"immigration (la Loi) dans la mesure de son incompatibilité avec l"article 7 de la Charte ;
b)      subsidiairement, une ordonnance rendue en vertu de l"article 24 de la Charte statuant que l"application du paragraphe 44(1) de la Loi viole les droits du demandeur garantis par l"article 7 et que, par conséquent, une exemption constitutionnelle est nécessaire;
c)      subsidiairement encore, une ordonnance que le paragraphe 44(1) contrevient aux alinéas 1b) et 2e) de la Déclaration canadienne des droits;
d)      une ordonnance annulant la décision de l"agent d"immigration de ne pas traiter la demande du statut de réfugié présentée par le demandeur;
e)      une ordonnance enjoignant au défendeur de traiter la demande du statut de réfugié du demandeur.

[3]      Vu l"observation du défendeur selon laquelle les arguments constitutionnels du demandeur ne reposent pas sur les faits, j"ai demandé aux avocats des deux parties de présenter une argumentation complète sur cette observation précise, les autres questions en litige devant être examinées à un stade ultérieur si cela s"avérait nécessaire.

[4]      Après avoir entendu les avocats des deux parties et examiné la preuve, la Cour rejette la demande au motif que le demandeur n"a pas réussi à démontrer que ses arguments constitutionnels et quasi constitutionnels ont un fondement factuel suffisant.

[5]      Dans l"arrêt MacKay c. Manitoba , [1989] 2 R.C.S. 3571, la Cour suprême du Canada a statué aux pages 361 et 362:

         Les décisions relatives à la Charte ne doivent pas être rendues dans un vide factuel. Essayer de le faire banaliserait la Charte et produirait inévitablement des opinions mal motivées. La présentation des faits n"est pas, comme l"a dit l"intimé, une simple formalité; au contraire, elle est essentielle à un bon examen des questions relatives à la Charte . [...] Les décisions relatives à la Charte ne peuvent pas être fondées sur des hypothèses non étayées qui ont été formulées par des avocat enthousiastes.                 

et à la page 366 :

         Un contexte factuel est d"une importance fondamentale dans le présent pourvoi. On ne prétend pas que c"est l"objet visé par la loi qui viole la Charte , mais ses conséquences. Si les conséquences préjudiciables ne sont pas établies, il ne peut y avoir de violation de la Charte ni même de cause. Le fondement factuel n"est donc pas une simple formalité qui peut être ignorée et, bien au contraire, son absence est fatale à la thèse présentée par les appelants.                 

[6]      En l"espèce, il n"y a aucune preuve que le demandeur, né en Roumanie et apatride, est renvoyé ou sera vraisemblablement renvoyé en Roumanie. Les faits montrent que le demandeur n"est pas expulsé; au contraire, conformément à une ordonnance de la Cour, il doit rester au Canada et a donc remis ses documents de voyage. La décision quant à l"endroit où renvoyer le demandeur n"a pas été prise. En outre, vu les documents de voyage déposés en preuve et les admissions faites lors du contre-interrogatoire, il appert que le demandeur est un réfugié au sens de la Convention tant en Belgique qu"au Royaume-Uni, et qu"il est résident permanent en Angleterre. Par conséquent, la situation du demandeur, que ce soit en Belgique ou au Royaume-Uni, affaiblit clairement sa prétention selon laquelle il craint d"être persécuté à son retour en Roumanie, étant donné que le demandeur ne sera très vraisemblablement pas renvoyé en Roumanie, en vertu de l"article 52 de la Loi.

[7]      Par conséquent, vu toutes les incertitudes entourant ces spéculations, le fondement factuel approprié à une décision rendue en vertu de la Déclaration canadienne des droits et de la Charte n"a pas été présenté à la Cour. Il n"y a tout simplement aucune preuve d"une probabilité d"empiétement sur les droits garantis à l"appelant par la Charte ou la Déclaration canadienne des droits.

[8]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Je ne statue donc pas quant à savoir si la Cour a la compétence, dans le contexte d"une demande de contrôle judiciaire d"une décision rendue par un agent principal, pour trancher une contestation mettant en question la validité constitutionnelle d"un article de la Loi.

[9]      Vu les arrêts de la Cour suprême du Canada Danson et MacKay, précités, je suis d"accord avec l"avocat du défendeur que la présente affaire ne soulève aucune question de portée générale aux fins d"une certification.

     IVON PINARD

     ____________________________________

     JUGE

OTTAWA (ONTARIO),

21 août 1998.

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DE DOSSIER :                          IMM-1712-96         
INTITULÉ DE LA CAUSE :                  Leib Waldman c. M.C.I.
LIEU DE L'AUDIENCE :                      Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :                      11 août 1998
MOTIFS D"ORDONNANCE PRONONCÉS PAR :      le juge Pinard
DATE :                              21 août 1998

ONT COMPARU :

M. Mendel M. Green                          pour le demandeur
Mme Marissa Beata Bielski                      pour le défendeur

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

Green and Spiegel                          pour le demandeur

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                          pour le défendeur

Sous-procureur général

du Canada

__________________

1      Voir également Danson c. Ontario (Procureur général) , [1990] 2 R.C.S. 1086.

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