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Date : 20000915

Dossier : IMM-2838-99

OTTAWA (ONTARIO), le 15 septembre 2000

EN PRÉSENCE DE Madame le juge Dolores M. Hansen

ENTRE :

                                           YAHYA ABDULREHIM BAHRO

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                          ORDONNANCE

VU la demande de contrôle judiciaire à l'égard de la décision d'un agent des visas datée du 5 mai 1999 qui refusait la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur,

ET VU les documents déposés et entendu les arguments des parties,

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

                                                                                                             « Dolores M. Hansen »           

                                                                                                                                   J.C.F.C.                     

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad a.


Date : 20000915

Dossier : IMM-2838-99

ENTRE :

                                           YAHYA ABDULREHIM BAHRO

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                            MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HANSEN

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de l'agent des visas Merrill Clarke du Haut-Commissariat du Canada à Londres en Angleterre, datée du 5 mai 1999, par laquelle il refusait la demande de résidence permanente présentée par le demandeur à titre d' « investisseur » .

[2]         L'agent des visas a rejeté la demande parce qu'il a estimé que le demandeur ne répondait pas à la définition d' « investisseur » parce qu'il ne se conformait pas aux conditions de l'alinéa 2(1)a) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2. L'agent des visas a déclaré ce qui suit dans sa lettre de refus :

[TRADUCTION]

En particulier, vous n'avez jamais exploité, contrôlé ou dirigé avec succès une entreprise commerciale. Vous avez de l'expérience dans le poste de directeur du Service de la charpenterie et de la décoration chez Essa Binladen, mais vous n'étiez pas chargé de contrôler les coûts ou les bénéfices de votre Service. En outre, j'ai tenu compte de votre association avec Ahmad Nashawi et Bashir Aljabri mais vous n'avez pas participé activement à cette association et vous vous êtes contenté d'y investir de l'argent. C'est pourquoi j'ai conclu que vous ne répondiez pas à la définition d'investisseur.

[3] Dans sa demande de résidence permanente, le demandeur décrit les activités qu'il a exercées entre 1958 et 1980, période au cours de laquelle il exploitait son propre commerce de détail en Syrie et de 1981 à aujourd'hui, période pendant laquelle il a travaillé comme directeur général du Service de la charpenterie et de la décoration de l'organisme Essa Binladen en Arabie saoudite. Il a décrit également les placements qu'il a faits dans d'autres entreprises en Arabie saoudite, notamment le fait qu'il est propriétaire à 50 % de la Al Hamra Medical Polyclinic et son investissement de 217 702 $ dans l'entreprise Bashir Shakib Alijabri Trading Est. Il affirme également posséder des biens valant plus de 1 000 000 $, qu'il a accumulés grâce à ses propres activités et avoir déposé 10 000 $ Can. dans le Fonds de croissance du gouvernement de la Saskatchewan.

[4] Au cours de son entrevue, le demandeur a été interrogé au sujet de son expérience et il lui a été demandé comment ses antécédents professionnels répondaient à la condition de l'alinéa 2(1)a) selon laquelle un « investisseur » doit avoir exploité, contrôlé ou dirigé avec succès une entreprise.


[5] La première question soulevée dans la présente demande est celle de savoir si l'agent des visas a commis une erreur de droit lorsqu'il a interprété la définition d' « investisseur » . Le demandeur soutient qu'il a effectivement exercé un « contrôle » sur une entreprise comme l'exige la définition d' « investisseur » , étant donné qu'il possédait la moitié de la Al Hamra Medical Polyclinic.

[6] Dans l'affidavit qu'a déposé le demandeur à l'appui de sa demande, il déclare ceci : [TRADUCTION] « [...] Je n'ai pas participé activement à l'administration de la clinique, mais je m'intéressais de près à l'entreprise en discutant avec mes associés des questions concernant la clinique. On pourrait dire que nous constituions un conseil d'administration non officiel » . Le demandeur a toutefois déclaré à l'entrevue qu'il n'était qu'un « associé passif » et qu'il ne participait pas à l'administration de la société.


[7]         Le demandeur soutient que sa participation de 50 % dans la Al Hamra Medical Polyclinic Company suffit à elle seule à démontrer qu'il exerçait le « contrôle » exigé. Il se base sur l'arrêt Ho c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (1997) A.C.F. no 1074, au paragraphe 11, dans lequel le juge Heald a déclaré : « [...] À mon avis, l'affirmation selon laquelle le demandeur ne possédait aucune action de l'entreprise touche directement la question de savoir si ce dernier contrôlait l'entreprise... » pour soutenir que la notion de contrôle s'appuie sur celle de propriété et non pas sur la notion de participation active. Le fait d'être propriétaire s'accompagne habituellement d'un certain contrôle, mais celui d'être propriétaire passif et de détenir une participation minoritaire ne constitue pas, d'après moi, en l'absence d'autres éléments, la preuve que l'on contrôle une entreprise.

[8]         Il n'est pas nécessaire d'avoir seul le contrôle opérationnel d'une entreprise pour répondre à la définition d' « investisseur » de l'alinéa 2(1)a), mais il devrait exister des éléments montrant que la personne concernée ne s'est pas contentée de faire un placement financier. Dans ce contexte, le mot contrôle fait référence à la capacité d'influencer, d'exercer un pouvoir, de prendre des décisions, seul ou avec d'autres, au sujet de la façon dont l'entreprise est exploitée. Compte tenu des éléments que possédait l'agent des visas concernant la participation du demandeur aux activités de la Al Hamra Medical Polyclinic, je ne suis pas convaincu que l'agent des visas ait commis une erreur lorsqu'il a conclu que le demandeur ne répondait pas à la définition d' « investisseur » .

[9]         Le demandeur soutient également que l'agent des visas a commis une erreur lorsqu'il a conclu que les responsabilités qu'exerçait le demandeur au sein de la Essa Binladen Organization ne démontraient pas qu'il avait « dirigé » une entreprise. Au cours de l'entrevue, le demandeur a déclaré qu'il était le directeur administratif du Service de la charpenterie de cette société. Ses tâches consistaient à consigner les heures d'arrivée et de départ des ouvriers, et le nombre des heures de travail, et à surveiller le travail effectué dans l'atelier. Progressivement, le nombre des employés qu'il supervisait dans l'atelier et dans l'entreprise est passé de 30 ou 40 à 200.


[10]       Dans Cheng c. Canada (Secrétariat d'État) (1994), [1995] 83 A.C.F. 259, à la p. 260, le juge Cullen a déclaré que la catégorie des « investisseurs » était [TRADUCTION] « [...] conçue pour viser des personnes qui ont détenu un poste accompagné de responsabilités importantes, comme celui de directeur d'un service ou d'un département d'une grande entreprise » . Dans Kwok c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1997), [1998] 138 A.C.F. 221, à la p. 224, la Cour a jugé que [TRADUCTION] « [...] Le titre du poste n'est pas un élément pertinent, sauf dans le cas où il reflète bien les responsabilités exercées... » . Au sein de l'entreprise Essa Binladen, le titre du poste qu'occupait le demandeur dans l'entreprise était celui de directeur administratif mais, d'après la description qu'a donnée le demandeur de ses responsabilités au cours de l'entrevue, l'agent des visas était justifié de conclure que ces responsabilités ne permettaient pas d'affirmer qu'il avait dirigé ou exploité une entreprise.

[11]       La dernière question soulevée par le demandeur est celle de savoir si l'agent des visas a commis une erreur en ne donnant pas au demandeur une autre possibilité de fournir des éléments concernant son commerce de détail en Syrie.


[12]       Au cours de l'entrevue, le demandeur a déclaré qu'il ne possédait aucun document concernant son commerce de détail. Cela est également confirmé par son affidavit dans lequel il déclare qu'à cause de son déménagement en Arabie saoudite et du temps écoulé depuis, il n'est pas en mesure de fournir de documents à ce sujet. Étant donné qu'on lui a demandé au cours de l'entrevue s'il pouvait fournir des documents et qu'il a répondu qu'il n'en possédait aucun, il aurait été futile de lui donner une autre possibilité d'en présenter. En l'espèce, il n'y a pas eu violation de l'obligation d'équité.

[13]       Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[14]       Aucune des parties n'a présenté de question pour certification.

                                                                         « Dolores M. Hansen »           

                                                                                               J.C.F.C.                     

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DE GREFFE :                                  IMM-2838-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :    YAHYA ABDULREHIM BAHRO c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                     TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                   LE 4 AVRIL 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MME LE JUGE HANSEN

EN DATE DU                          15 SEPTEMBRE 2000

ONT COMPARU :

Samuel R. Baker                                               POUR LE DEMANDEUR

Lori Hendriks                                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Baker & Associates                                          POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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