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Date : 20210813


Dossier : IMM‑1068‑20

Référence : 2021 CF 841

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Fredericton (Nouveau‑Brunswick), le 13 août 2021

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

SIMRAN KAUR GILL

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS ET JUGEMENT

[1] La demanderesse, Simran Kaur Gill, citoyenne de l’Inde, conteste la décision de l’agent des visas (l’agent) qui a refusé sa demande de permis d’études. L’agent a conclu qu’elle était interdite de territoire au Canada pour fausses déclarations, conformément à l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). Les fausses déclarations concernent l’affirmation selon laquelle la demanderesse détient une maîtrise d’une université n’étant plus reconnue.

[2] Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée, car la décision de l’agent est raisonnable.

Contexte

[3] Dans la demande que la demanderesse a présentée en 2019 pour poursuivre des études en infrastructure des technologies de l’information à Kitchener, en Ontario, elle indique avoir obtenu en 2015 une maîtrise en technologie (informatique) de l’université ouverte de l’État de Karnataka, située à Mysore, en Inde. Dans des documents fournis par la demanderesse, ce diplôme est aussi présenté comme une maîtrise en ingénierie (informatique).

[4] Le 6 janvier 2020, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a communiqué par courriel avec l’université pour confirmer que la demanderesse avait obtenu ce diplôme. Le registraire de l’université a entre autres répondu à IRCC que [traduction] « les programmes qu’offre l’université par l’entremise de collaborateurs universitaires dans un cadre d’apprentissage ouvert et à distance ne sont plus reconnus par la commission des subventions aux universités, une décision qui s’applique rétroactivement aux années universitaires 2013‑14 et 2014‑15 […] ».

[5] Le 9 janvier 2020, IRCC a envoyé à la demanderesse une lettre d’équité procédurale l’informant que [traduction] « [l]e diplôme de maîtrise en ingénierie (informatique) de l’Inde et les relevés de notes de l’université ouverte de l’État de Karnataka de Mysore qui accompagnaient votre demande ont été contrôlés, et [que] leur nature frauduleuse ou non authentique a été confirmée ».

[6] Le représentant de la demanderesse a répondu le 13 janvier 2020 en joignant à son courriel une lettre rédigée par le registraire adjoint de l’université ouverte de l’État de Karnataka datée du 10 janvier 2020, dans laquelle l’auteur mentionne ce qui suit :

[traduction]

L’objet de la présente est d’attester que Mme SIMRAN KAUR GILL […] a été étudiante à la maîtrise en technologie, informatique, de 2013 à 2015, à l’université ouverte de l’État de Karnataka. Elle a suivi le programme de deux ans et réussi les examens en 2015. Cette formation était offerte par correspondance, et elle a obtenu la maîtrise en technologie (informatique), en se classant au premier niveau.

[7] La demanderesse a aussi joint un rapport de l’organisme World Education Services (WES) daté du 22 mai 2018 affirmant que l’université ouverte de l’État de Karnataka est un établissement reconnu et que le diplôme équivalent à celui de la demanderesse au Canada est la maîtrise.

La décision faisant l’objet du contrôle

[8] Dans sa décision datée du 20 janvier 2020, l’agent a conclu que la demanderesse était interdite de territoire au Canada pour fausses déclarations.

[9] L’agent expose, dans ses notes consignées au système mondial de gestion des cas (le SMGC), que la demanderesse a fait présentation erronée concernant son diplôme, car la commission des subventions aux universités avait confirmé que les programmes offerts par l’université n’étaient plus reconnus. L’agent note aussi que, dans la lettre fournie par la demanderesse qui lui aurait été transmise par l’université, [traduction] « le nom du signataire est absent, il y a seulement un titre de poste » et les règles grammaticales habituelles ne sont pas respectées. De plus, l’agent écrit qu’il est [traduction] « difficile de comprendre pourquoi l’université aurait rédigé une lettre de confirmation destinée à cette demanderesse [en] 2020, pour un diplôme, un certificat ou un relevé de notes remis après la publication de l’avis public selon lequel l’université ouverte de l’État de Karnataka de Mysore pouvait poursuivre ses activités. »

La question en litige et la norme de contrôle applicable

[10] La seule question qui se pose est de savoir si la décision de l’agent est raisonnable. Comme l’affirme la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 99, 441 DLR (4th) 1, « [l]a cour de révision doit s’assurer de bien comprendre le raisonnement suivi par le décideur afin de déterminer si la décision dans son ensemble est raisonnable. Elle doit donc se demander si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci ». [Renvois omis.]

Analyse

[11] La demanderesse affirme que l’agent n’a pas raisonnablement examiné sa réponse à la lettre d’équité procédurale. Elle affirme aussi que la prise de décision très rapide de l’agent après qu’elle eut fourni les renseignements supplémentaires donne à penser qu’il n’a pas adéquatement examiné les documents additionnels.

[12] En règle générale, il incombe au demandeur de fournir à l’agent tous les renseignements pertinents pour le convaincre qu’il répond aux exigences de la LIPR (Tabari c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1046 au para 24, 308 ACWS (3d) 824).

[13] Il est bien établi que les notes que l’agent consigne dans le SMGC font partie des motifs de la décision faisant l’objet d’un contrôle (Coube De Carvalho c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1485 au para 9, 312 ACWS (3d) 815). Selon les notes consignées dans le SMGC, l’agent s’est fondé sur les renseignements du registraire de l’université selon lesquels il était impossible de confirmer le diplôme ou le relevé de notes de la demanderesse, parce que [traduction] « les programmes offerts par l’université ne sont plus reconnus par la University Grants Commission […]. »

[14] L’agent a raisonnablement remis en question la fiabilité de la lettre fournie par la demanderesse qui aurait été rédigée par le registraire adjoint de l’université ouverte de l’État de Karnataka et qui contredit les renseignements obtenus par l’agent auprès du registraire de l’université. L’agent a aussi fait part de préoccupations concernant l’authenticité de la lettre en raison de l’absence du nom du registraire adjoint et d’erreurs grammaticales. Tout bien considéré, l’agent n’était pas convaincu que l’université produirait une telle lettre alors que l’avis public au sujet de l’autorisation pour l’université de décerner des diplômes n’avait pas encore été retiré.

[15] De plus, bien que la demanderesse présente la lettre de WES à titre de preuve de l’obtention de la maîtrise, celle‑ci porte sur l’équivalence scolaire : elle ne permet pas de réfuter l’élément de preuve direct qu’est la réponse du registraire de l’université au sujet de l’autorisation de décerner des diplômes pour le programme de la demanderesse.

[16] D’après les notes consignées dans le SMGC, il est manifeste que l’agent a examiné les pièces justificatives fournies par la demanderesse, mais qu’il n’a pas jugé les renseignements fiables. La lettre d’équité procédurale envoyée à la demanderesse indique clairement que le problème est la fiabilité [traduction] « du diplôme de 2015 et des relevés de notes de l’université Karnataka State Open ». Dans ces circonstances, la demanderesse était suffisamment informée des préoccupations de l’agent concernant la [traduction] « nature frauduleuse ou non authentique » alléguée des documents. L’agent a conclu que la réponse à la lettre d’équité procédurale ne constituait pas une preuve que la demanderesse possède le diplôme indiqué dans sa demande.

[17] L’obligation de l’agent des visas au titre de l’équité procédurale se situe vers le bas de l’échelle. En l’occurrence, la demanderesse a été informée de la nature des préoccupations de l’agent concernant son diplôme de l’université ouverte de l’État de Karnataka et s’est vu accorder l’occasion de répondre. Dans les circonstances, elle savait ce qu’elle devait réfuter et a eu une occasion suffisante de le faire (Talpur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 25 au para 21) et, par conséquent, aucun problème d’équité procédural ne se pose.

[18] Le refus par l’agent des visas d’accorder un permis d’étude à la demanderesse est raisonnable et appartient aux issues possibles et acceptables.

[19] Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM‑1068‑20

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire de la décision de l’agent des visas est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée.

« Ann Marie McDonald »

Juge

Traduction certifiée conforme

M. Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑1068‑20

 

INTITULÉ :

SIMRAN KAUR GILL c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 1ER JUIN 2021

 

mOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA JUGE MCDONALD

 

DATE DES MOTIFS :

LE 13 AOÛT 2021

 

COMPARUTIONS :

Ash Duvadie

POUR LA DEMANDERESSE

Alexandra Pullano

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Duvadie Law Office

Barristers & Solicitors

Ottawa (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Ministère de la Justice du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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