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Date : 20040624

Dossier : T-1513-03

Référence : 2004 CF 908

Ottawa (Ontario), jeudi le 24 juin 2004

Présent(e) : L'honorable juge François Lemieux

ENTRE :

                                                            AMRAM ELKAYAM

                                                                                                                                      Demandeur

                                                                            et

                                          PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                        Défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                 [Prononcés sur le banc à Montréal le 10 mai 2004 et modifiés]

[1]                Ces motifs sont ceux que j'ai prononcés sur le banc à Montréal le 10 mai 2004 quoique modifiés légèrement pour raison de style.


[2]                Je vais accueillir la requête du défendeur que cette demande de contrôle judiciaire soit rejetée au motif que celle-ci est devenue académique ou théorique et que, dans les circonstances, je ne vois aucun motif pour exercer la discrétion de la Cour de permettre cette demande d'être entendue et décidée nonobstant qu'elle est devenue caduque. Voici le contexte.

[3]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire déposée en vertu de l'article 7.1 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique par le demandeur à l'encontre d'une décision rendue le 13 juin 2003, par M. Gérald Leblanc, Agent d'enquête, de la médiation et de la conciliation, rejetant la plainte de M. Elkayam alléguant que le jury de sélection responsable pour le concours 00-DND-0C-MTL-933601, tenu dans le but de pourvoir les postes d'électriciens de GL-EIM-10, à la base de Longue Pointe, a manipulé l'évaluation des candidats de façon à les faire échouer dans ce concours.

[4]                Effectivement, vous avez posé votre candidature au concours public en vue d'effectuer une ou des nominations de durée déterminée. Le 8 mai 2000, vous avez participé à un examen écrit de vos connaissances.

[5]                Le 17 mai 2000, le demandeur a été informé qu'il n'avait pas atteint la note minimale de passage et c'est suite à cette communication que vous avez déposé votre plainte auprès de la Commission de la fonction publique.

[6]                Avant que M. Leblanc soit saisit de l'enquête, nous savons que votre plainte avait été portée devant l'agent de recours Garceau et que le juge Martineau a cassé, sur consentement, sa décision.


[7]                Le 13 juin 2003, M. Leblanc a conclu, après analyse des faits, que votre plainte n'était pas fondée et qu'il n'y avait pas lieu que la Commission s'implique davantage dans votre dossier.

[8]                Le défendeur soulève comme question préliminaire le caractère théorique de votre demande de contrôle judiciaire au motif qu'aucune nomination a été effectuée à partir de la liste d'admissibilité établie suite au concours public dans lequel vous avez posé votre candidature. Cette constatation se retrouve dans les motifs de M. Leblanc (dossier du défendeur, volume 1, page 13).

[9]                Les deux candidats inscrits sur la liste d'admissibilité suite au concours public avaient aussi réussi dans une autre compétition pour les postes d'électriciens à terme indéterminé à la base de Longue Pointe.

[10]            C'est l'absence de nomination au poste de durée déterminée dans le cadre du concours public 00-DND-0C-MTL-93360 conjuguée au fait que la liste d'éligibilité, résultat de ce concours, est périmée depuis le 7 juillet 2002, qui rend caduque votre demande de contrôle judiciaire. Cette liste d'éligibilité était valide seulement pour une période de deux ans.

[11]            Donc, advenant ces faits, aucun remède efficace recherché par vous peut découler de votre demande de contrôle judiciaire.

[12]            Cette conclusion rencontre les exigences de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342, où le juge Sopinka écrit au paragraphe 15:

¶ 15       La doctrine relative au caractère théorique est un des aspects du principe ou de la pratique générale voulant qu'un tribunal peut refuser de juger une affaire qui ne soulève qu'une question hypothétique ou abstraite. Le principe général s'applique quand la décision du tribunal n'aura pas pour effet de résoudre un litige qui a, ou peut avoir, des conséquences sur les droits des parties. Si la décision du tribunal ne doit avoir aucun effet pratique sur ces droits, le tribunal refuse de juger l'affaire. Cet élément essentiel doit être présent non seulement quand l'action ou les procédures sont engagées, mais aussi au moment où le tribunal doit rendre une décision. En conséquence, si, après l'introduction de l'action ou des procédures, surviennent des événements qui modifient les rapports des parties entre elles de sorte qu'il ne reste plus de litige actuel qui puisse modifier les droits des parties, la cause est considérée comme théorique. Le principe ou la pratique général s'applique aux litiges devenus théoriques à moins que le tribunal n'exerce son pouvoir discrétionnaire de ne pas l'appliquer. J'examinerai plus loin les facteurs dont le tribunal tient compte pour décider d'exercer ou non ce pouvoir discrétionnaire.

[13]            Je vous ai posé la question « qu'est-ce que vous voulez que la Cour décide » , vous avez répondu deux choses: premièrement, de casser l'ordonnance de M. Leblanc et, deuxièmement, de vous permettre de poursuivre en dommages et intérêts la Commission de la fonction publique.


[14]            Je vais vous dire qu'à l'intérieur d'une demande de contrôle judiciaire, vous ne pouvez pas demander des dommages et intérêts. Ça, c'est une jurisprudence qui est très bien connue, depuis longtemps; dans un contrôle judiciaire, dommages et intérêts, ne sont pas possibles. Ce que vous devez faire, c'est prendre une action en vertu de l'article 17 de la Loi sur la Cour fédérale, une action contre le Gouvernement fédéral, au motif que vous invoquez.

[15]            Casser la décision de M. Leblanc n'aurait aucune utilité pratique, je le répète, parce qu'aucune nomination n'a été effectuée pour les postes visés par le concours public et que la liste d'éligibilité est périmée et n'est plus valide. En autres mots, si le ministère de la Défense nationale voulait combler les postes d'électriciens pour durée déterminée à Longue Pointe, le ministère serait obligé d'ouvrir un nouveau concours.

[16]            Pour ces motifs, je pense que votre demande de contrôle judiciaire est devenue académique et je ne vois aucune raison, d'après les critères établis par le juge Sopinka dans Borowski, précité, justifiant l'exercice de ma discrétion pour continuer les présentes procédures. Ces trois critères sont bien connus.

                                        ORDONNANCE

Cette demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens, au motif qu'elle est devenue théorique.

                                                                              "François Lemieux"              

                                                                                                                                                                              

                                                                                                J U G E                       


                                     COUR FÉDÉRALE

                     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :               T-1513-03

INTITULÉ :               Amram Elkayam c. PGC

LIEU DE L'AUDIENCE :                             Montréal

DATE DE L'AUDIENCE :                           10 mai 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE:                le juge Lemieux

DATE DES MOTIFS :                                  le 25 juin 2004

COMPARUTIONS:

Amram Elkayam                                            POUR LE DEMANDEUR

Mariève Sirois-Vaillancourt                                      POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

M. Elkayam (lui-même)

64, rue Gauthier

Longueuil, Qc

J4L 1Y1

(450) 674-4257                                              POUR LE DEMANDEUR

Ministère de la justice

Complexe Guy-Favreau

200, boul. René-Lévesque ouest

Tour est, 5e étage

Montréal, Qc

H2Z 1X4

(514) 496-9234

fax (514) 283-3856                                        POUR LE DÉFENDEUR


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