Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20040112

Dossier : IMM-855-02

                                                                    Référence : 2004 CF 31

Ottawa (Ontario), le 12 janvier 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SNIDER

ENTRE :              

                                    MAXIM ROUDENKO                                    

                                                                                           demandeur

                                                     et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                             défendeur

        MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE SNIDER

[1]    M. Maxim Roudenko, citoyen et résidant de la Russie, a présenté une demande de résidence permanente au Canada en tant que programmeur. À la suite d'une entrevue tenue à l'ambassade du Canada à Paris, Louise Van Winkle (l'agente des visas), par une lettre datée du 21 janvier 2002, a rejeté sa demande. Il sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.


La question en litige

[2] La seule question qui est soumise à la Cour est celle de savoir si l'agente des visas a, par une interprétation erronée des éléments de preuve dont elle disposait ou par une omission d'avoir tenu compte de ces éléments, commis une erreur de droit.

Les faits

[3] Le demandeur est citoyen de la Russie et il a présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des immigrants indépendants. La profession qu'il envisageait d'occuper était celle de programmeur selon la description faite sous le code 2163 de la Classification nationale des professions (CNP). Le demandeur a présenté sa demande à l'ambassade du Canada à Paris et il a inclus quatre lettres de recommandation d'anciens employeurs.

[4] Le 21 janvier 2002, l'agente des visas a reçu le demandeur en entrevue à l'ambassade du Canada à Paris. Le demandeur et son épouse ont choisi de se présenter à l'entrevue sans demander l'assistance d'un interprète et l'entrevue s'est déroulée en anglais. Le même jour, l'agente des visas a rendu sa décision selon laquelle, suivant l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, elle n'a attribué au demandeur aucun point d'appréciation pour les facteurs suivants :


[TRADUCTION]

Troisième facteur (expérience) : au moins un an d'expérience en tant que programmeur

Quatrième facteur (facteur professionnel) : « expérience acquise dans une profession pour laquelle ils possèdent les compétences voulues et qu'ils sont prêts à exercer au Canada."

[5]        L'agente des visas a déclaré dans sa décision que le paragraphe 11(1) du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, ne lui permettait pas de délivrer un visa d'immigrant à un demandeur auquel aucun point d'appréciation n'a été attribué pour le quatrième facteur. Puis, elle a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

Durant notre rencontre d'aujourd'hui, vous avez été incapable de décrire, sauf en termes les plus généraux, un seul des programmes que vous avez développés ou un seul des projets de programmation auxquels vous avez participé. Je ne suis pas convaincue que vous avez de l'expérience en tant que programmeur et je ne vous attribue par conséquent aucun point d'appréciation pour ce facteur.

[6]        Dans son affidavit, l'agente des visas déclare que le demandeur [TRADUCTION] « n'a pas réussi à me convaincre lors de son entrevue qu'il avait exercé un nombre substantiel des fonctions principales établies dans la CNP, dont les fonctions essentielles » .


Analyse

Norme de contrôle

[7] Le traitement de la demande présentée par le demandeur en vue d'obtenir un visa d'immigrant comportait un pouvoir discrétionnaire qui devait être exercé en fonction des critères prévus par la loi. Si ce pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, et si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, alors la Cour ne devrait pas intervenir (voir les arrêts Maple Lodge Farms Ltd. c. Canada, [1982] 2 R.C.S. 2, et To c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 696 (C.A.) (QL)). Un corollaire à ces principes est qu'une décision peut être annulée si l'agente n'a pas tenu compte de toute la documentation pertinente dont elle disposait (voir la décision Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 1940 (1re inst.) (QL)).

[8] Ce dernier point est particulièrement pertinent dans la présente affaire étant donné que le fondement principal de la prétention du demandeur est que l'agente des visas a omis de tenir compte des diverses lettres de recommandation qui lui avaient été soumises. Comme l'analyse qui suit le fera ressortir, le demandeur n'a pas réussi à convaincre la Cour que l'agente des visas a commis une erreur susceptible de contrôle.


L'agente des visas a-t-elle omis de tenir compte de la preuve dont elle disposait et a-t-elle par conséquent commis une erreur susceptible de contrôle?

[9]        Bien que le demandeur prétende que l'agente des visas n'a pas tenu compte de la preuve dont elle disposait, rien au dossier n'appuie cette prétention. On peut constater, en lisant ses notes de l'entrevue qui sont consignées au Système de traitement informatisé des dossiers d'immigration (STIDI), que l'agente des visas a effectivement examiné la preuve documentaire dont elle disposait et a pris en compte les réponses du demandeur à ses questions. Le fondement des questions posées au demandeur provient clairement des renseignements soumis, y compris des lettres de recommandation.


[10]      En outre, je remarque le manque de détails dans les lettres et les documents en question. La seule lettre contenant des détails à l'égard des fonctions exercées par le demandeur était la lettre du directeur général du StroyPolimerKermaika portant la date du 10.11.1999. Même cette lettre de recommandation décrivait l'expérience du demandeur en termes généraux. Ce n'est que par une entrevue que l'agente des visas pouvait déterminer l'étendue de l'expérience du demandeur. Sa conclusion, fondée sur les réponses du demandeur aux questions qu'elle lui posait, était que le demandeur ne lui avait pas fourni suffisamment de renseignements détaillés pour démontrer qu'il avait de l'expérience en tant que programmeur. Il répondait aux questions en [TRADUCTION] « utilisant les termes les plus généraux » . L'agente des visas, dans son appréciation de la question de savoir si le demandeur était un programmeur, a entièrement agi dans les limites de son mandat et s'est penchée sur la question appropriée (voir l'arrêt Lim c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 121 N.R. 241, à la page 243 (C.A.F.)).

[11]       Le demandeur prétend que la décision Wang, précitée, est applicable aux faits de la présente affaire. Cependant, je remarque plusieurs différences entre la décision Wang et l'affaire qui m'est soumise. Dans la décision Wang, l'agente des visas a apprécié l'étudiant sans l'avoir reçu en entrevue, seulement sur le fondement de la documentation. Il n'y avait eu aucune entrevue. En plus de ne pas avoir tenu compte de la preuve dont elle disposait, elle avait également pris en compte des considérations non pertinentes et elle n'avait pas énoncé de motifs quant aux raisons pour lesquelles elle mettait en doute la validité ou l'authenticité de certains documents. En l'espèce, la validité des documents n'est pas contestée. Il s'agit simplement d'une affaire dans laquelle les documents, en eux-mêmes, n'établissaient pas l'expérience requise. Par conséquent, une entrevue a eu lieu afin que l'agente puisse évaluer l'expérience du demandeur. À la suite de cette entrevue, l'agente des visas n'était pas convaincue que le demandeur avait l'expérience requise. Je ne vois pas d'erreur.


[12]       Le demandeur n'a pas prétendu que l'agente a agi de mauvaise foi, que les principes de justice fondamentale ont été violés ou que l'agente a pris en compte des considérations non pertinentes dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. En effet, le demandeur semble s'opposer à la façon selon laquelle l'agente des visas a apprécié la preuve dont elle disposait. La façon selon laquelle la preuve a été appréciée ne peut pas constituer le fondement d'une erreur susceptible de contrôle dans le contexte d'une décision rendue suivant un pouvoir discrétionnaire. Comme il l'a été déclaré dans l'arrêt Maple Lodge Farms Ltd., précité, la Cour ne peut pas annuler une décision simplement parce qu'elle aurait tiré une conclusion différente de celle tirée par le décideur.

[13]      Pour ces motifs, la présente demande sera rejetée.

[14]      Ni l'une ni l'autre des parties n'a proposé une question aux fins de la certification. Aucune question ne sera certifiée.

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2. Aucune question de portée générale n'est certifiée.

« Judith A. Snider »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                               IMM-855-02

                                                     

INTITULÉ :                                              MAXIM ROUDENKO c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                        TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                      LE 8 JANVIER 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :         LA JUGE SNIDER

DATE DES MOTIFS :                             LE 12 JANVIER 2004

COMPARUTIONS :

John Grice                                                   POUR LE DEMANDEUR

Mary Matthews                                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :            

Davis & Grice                                             POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.