Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20011009

Dossier : IMM-4613-00

Référence neutre : 2001 CFPI 1103

ENTRE :

                                                              SABYR TELEMICHEV

                                                          SVETLANA TELEMISHEV

                                                               ALAN TELEMISHEV

                                                                                                                             Partie demanderesse

                                                                              - ET -

                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                               Partie défenderesse

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX:

A.        INTRODUCTION

[1]                 La question centrale soulevée par cette demande de contrôle judiciaire est de savoir si la Section du statut de réfugié (le "tribunal") dans sa décision du 21 août 2000 refusant aux requérants la reconnaissance comme réfugié, a bien appliqué les principes énoncés dans l'arrêt Vasquez c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 1340, rendu le 24 septembre 1998, avec motifs supplémentaires [1998] A.C.F. no 1769, rendus le 26 novembre 1996, décision du juge Rothstein alors juge de la Division de première instance.

[2]                 L'arrêt Vasquez est engagé parce que les requérants en sont à leur deuxième revendication du statut de réfugié au Canada, leur première demande ayant été rejetée par le tribunal en novembre 1998.

[3]                 Les revendicateurs forment une famille. Le père, Sabyr Telemichev, est de nationalité kirghize et sa religion est musulmane. La mère, Svetlana Telemishev est juive et son passeport interne de l'État d'Israël se réfère à elle comme étant de nationalité juive. L'enfant Alan âgé de sept ans est né au Kirghistan.

[4]                 La famille a vécu en Israël du mois d'août 1994 à mars 1996 avant de venir au Canada le 23 mars 1996 pour revendiquer le statut de réfugié. Les requérants sont citoyens d'Israël.

[5]                 Leur première revendication échouée, les requérants quittent le Canada et se rendent au Mexique où ils soumettent une demande d'immigration au gouvernement du Québec, mais en vain. En janvier 2000, la famille retourne au Canada où madame accoucha en avril 2000.

B.        LA DÉCISION DU TRIBUNAL

[6]                 Le tribunal note que dans le cas du père il n'y avait aucun fait nouveau soulevé par rapport à sa première revendication. En ce qui concerne la mère, le tribunal écrit ceci à la page 2:


Quant à madame Svetlana, elle a eu l'honnêteté intellectuelle d'admettre que pour elle-même, elle ne craignait pas un retour en Israël, mais qu'elle craignait pour l'enfant, Alan; monsieur Sabyr, de même, a exprimé ses craintes pour Alan qui aurait des problèmes à l'école et en société, étant désormais âgé de sept ans.

[7]                 Le tribunal cite un extrait des motifs supplémentaires dans l'arrêt Vasquez comme fondement de sa décision de ne pas reconnaître les requérants comme réfugiés au sens de la Convention:

[TRADUCTION] Le principe veut qu'une partie, après avoir reçue une décision définitive, ne peut porter de nouveau une affaire en justice, même si elle a trouvé des arguments supplémentaires qu'elle aurait pu invoquer à l'époque du litige initial. C'est ce que le demandeur a tenté de faire devant la SSR. Cependant, le tribunal, chargé de statuer sur le minimum de fondement a conclu que la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention déposée par le demandeur n'avait pas le minimum de fondement requis. Il a essentiellement conclu que le demandeur ne pouvait obtenir le statut de réfugié au sens de la Convention au Canada, soit la même question dont était saisi la SSR en 1997. De nouveaux arguments concernant le paragraphe 2(3) auraient pu être présentés au tribunal chargé de statuer sur le minimum de fondement, mais ils ne l'ont pas été. Cela n'en fait pas pour autant des arguments pouvant convenablement être présentés devant la SSR. La SSR a examiné les arguments du demandeur fondé sur le paragraphe 2(3), mais ceux-ci ne l'ont pas convaincu. À mon avis, ces arguments n'auraient pas dû être examinés par la SSR. Quoiqu'il en soit, le résultat est le même. [je souligne]

[8]                 Le dispositif du tribunal se lit:

Vu que les revendicateurs n'ont pas démontré une crainte bien fondée de persécution advenant leur retour en Israël;

Vu qu'il y a autorité de la chose jugée;

Vu qu'il n'y a pas de faits nouveaux soulevés qui n'auraient pu être invoqués lors de l'audition de la première demande d'asile;

Vu, dans le cas spécifique de la revendicatrice, qu'il y a aveu judiciaire ou admission comme quoi elle n'éprouve pas de crainte de persécution si elle devait réintégrer Israël;


Le tribunal ne reconnaît pas monsieur Sabyr TELEMICHEV, madame Svetlana TELEMISHEV et leur fils Alan TELEMICHEV comme « réfugiés au sens de la Convention » tout tel que défini par la Loi.

C.        LA POSITION DES REQUÉRANTS

[9]                 Le conseiller des requérants ne conteste pas la conclusion du tribunal à l'effet que:

(1)        la deuxième revendication du père, Sabyr Telemichev, était basée sur les mêmes faits dont était saisi le premier tribunal. Son formulaire de renseignements personnels était essentiellement le même dans les deux cas; il n'y avait aucun nouveau fait;

(2)        La mère, Svetlana Telemichev, n'a aucune crainte de retour en Israël.

[10]            Selon Me Lebrun, la preuve devant le tribunal qui étudiait la deuxième revendication des requérants était fondamentalement différente de la première puisqu'elle était axée sur la crainte de persécution de l'enfant Alan, crainte émanant du fait qu'il devait maintenant s'inscrire à l'école.


[11]            Les requérants prétendent qu'ils étaient en droit de présenter une preuve complémentaire à jour afin d'établir cette possibilité raisonnable de persécution d'autant plus que la Section du statut n'avait pas, lors de la première revendication, étudié celle de l'enfant de manière spécifique compte tenu de son jeune âge à ce moment.

[12]            Selon les revendicateurs, le tribunal ne pouvait faire abstraction de la preuve relative à l'enfant Alan et au fait que le passage des ans le plaçait maintenant dans une situation entièrement différente de celle qui prévalait lors de la première audition, c'est-à-dire, son entrée à l'école en Israël.

[13]            Les requérants disent que le deuxième tribunal a écarté la preuve documentaire suivante:

(1)        un document de la Direction générale de la documentation, de l'information et de la recherche de la Commission de l'immigration et du Statut de réfugié en date de février 1993, intitulé "Israël: Les juifs de l'ancienne Union soviétique et;

(2)        une information émanant de l'agence France-Presse en date du 23 juillet, 1997, intitulée "Les jeunes israéliens racistes vis-à-vis des Arabes et des immigrés".

[14]            Les requérants soulèvent un deuxième point relié à l'interprétation de la Loi sur l'immigration qui, à l'article 46.01, reconnaît la possibilité de présenter plusieurs revendications et ils prétendent que l'arrêt Vasquez a un effet supra législatif de nature à nullifier ce droit reconnu par le Parlement.


D.        LA LÉGISLATION

[15]            Les dispositions pertinentes de la Loi sur l'immigration (la "Loi") sont:


46.01 (1) La revendication de statut n'est pas recevable par la section du statut si l'intéressé se trouve dans l'une ou l'autre des situations suivantes_:

a) il s'est déjà vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention par un autre pays dans lequel il peut être renvoyé;

b) il est arrivé au Canada, directement ou non, d'un pays -- autre que celui dont il a la nationalité ou, s'il n'a pas de nationalité, que celui dans lequel il avait sa résidence habituelle -- qui figure dans la liste établie en vertu des règlements d'application de l'alinéa 114(1)s);

c) depuis sa dernière venue au Canada, il a fait l'objet_:

(i) soit d'une décision de la section du statut lui refusant le statut de réfugié au sens de la Convention ou établissant le désistement de sa revendication,

(ii) soit d'une décision d'irrecevabilité de sa revendication par un agent principal;

d) le statut de réfugié au sens de la Convention lui a été reconnu aux termes de la présente loi ou des règlements;

                                 . . .

46.01(5) Séjour à l'étranger

(5) La rentrée au Canada de l'intéressé après un séjour à l'étranger d'au plus quatre-vingt-dix jours n'est pas, pour l'application de l'alinéa (1)c), prise en compte pour la détermination de la date de la dernière venue de celui-ci au Canada.

[je souligne]

46.01 (1) A person who claims to be a Convention refugee is not eligible to have the claim determined by the Refugee Division if the person

(a) has been recognized as a Convention refugee by a country, other than Canada, that is a country to which the person can be returned;

(b) came to Canada, directly or indirectly, from a country, other than a country of the person's nationality or, where the person has no country of nationality, the country of the person's habitual residence, that is a prescribed country under paragraph 114(1)(s);

(c) has, since last coming into Canada, been determined

(i) by the Refugee Division not to be a Convention refugee or to have abandoned the claim, or

(ii) by a senior immigration officer not to be eligible to have the claim determined by the Refugee Division;

                                 . . .

46.01(5) Last coming to Canada

(5) A person who goes to another country and returns to Canada within ninety days shall not, for the purposes of paragraph (1)(c), be considered as coming into Canada on that return.



E.        ANALYSE

(1)       La portée de l'arrêt Vasquez

[16]            Le juge Rothstein dans l'arrêt Vasquez, supra, rendue le 24 septembre 1998, interprète l'article 46.01 de la Loi et, plus particulièrement, le paragraphe 46.01(1)(c) et l'alinéa 46.01(5) cités plus haut. L'interprétation que le juge Rothstein donne à ces dispositions législatives est la suivante:

[TRADUCTION]

[4] Il est manifeste que l'alinéa 46.01(1)(c) est la formulation légale du principe de la res judicata. Une fois qu'il a été statué qu'une personne n'était pas un réfugié au sens de la Convention, ses demandes ultérieures sont irrecevables.

[5] Le paragraphe 46.01(5) crée une exception à l'irrecevabilité des demandes ultérieures. Je conviens avec la section du statut que l'exception semble avoir été incorporée à la Loi pour tenir compte du changement de situation dans un pays. Un demandeur ne serait pas empêché de présenter une nouvelle revendication du statut de réfugié en s'appuyant sur une nouvelle preuve ayant trait au changement de situation dans son pays, même après le rejet de sa première revendication. [je souligne]

[17]            En l'espèce devant lui, le juge Rothstein était saisi d'une revendication fondée sur le paragraphe 2(3) de la Loi s'appuyant sur une preuve relative aux faits qui se sont produits en 1980, faits connus lors de la première revendication en 1992. Cette situation de fait soulève une question préliminaire, c'est-à-dire la question de savoir si la Commission avait compétence pour examiner la revendication du demandeur fondée sur le paragraphe 2(3) dans les circonstances. Le juge raisonne dans sa décision du 24 septembre 1998:

[TRADUCTION]


[11] De nouveau, la question de la res judicata se pose. Le demandeur ne peut, après que sa revendication du statut de réfugié au sens de la Convention ait été refusée, présenter une nouvelle demande, même en vertu du paragraphe 2(3), en s'appuyant sur la preuve qu'il a produite pour sa première revendication. C'est au moment où il a présenté cette première revendication qu'il devait soulever cette question. Il ne peut avoir gardé cette preuve en réserve pour fonder une deuxième revendication du statut de réfugié au sens de la Convention.

[12] Je ne doute nullement que si la section du statut avait conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention le 23 avril 1992, celui-ci ne pourrait plus s'appuyer sur la preuve qui était disponible à cette époque pour présenter une nouvelle revendication du statut de réfugié au sens de la Convention, même si cette preuve a trait à une revendication fondée sur le paragraphe 2(3)... . [je souligne]

[18]            Dans l'arrêt Vasquez, le juge Rothstein rend des motifs supplémentaires le 26 novembre 1998, dans lesquels il dit que la seule question en litige est de savoir si l'appréciation de la revendication du demandeur doit être fondée sur des éléments de preuve ultérieurs à la date du rejet pour manque de fondement de sa revendication initiale, soit le 23 avril 1992. Le juge Rothstein note que certains des faits et arguments sur lesquels il voulait se fonder ont été soumis au tribunal chargé de statuer sur le minimum de fondement, mais certains des autres faits et arguments qui auraient pu être soumis à ce tribunal, comme les arguments fondés sur le paragraphe 2(3), ne l'ont pas été.

[19]            Le juge Rothstein, par la suite, aborde la question de la chose jugée et s'exprime:

[TRADUCTION]


[6] Le fait qu'une détermination avait déjà été faite par le tribunal chargé de statuer sur le minimum de fondement soulève la question de la chose jugée. Voici les conditions de l' « issue estoppel » (ce que le juge Dickson considérait, dans l'arrêt Angle c. le Ministre du Revenu national, [1975] 2 R.C.S. 248, comme une deuxième forme du principe de la chose jugée, l'autre étant le "cause of action estoppel"):

1) la même question a été décidée.

2) la décision etait finale.

3) les parties aux deux instances sont les mêmes.

J'estime que ces conditions sont réunies en l'espèce.

[7] Le principe pertinent est bien connu. Dans Town of Grandview v. Doering (1975), 61 D.L.R. (3d) 455, à la page 458, le juge Ritchie s'exprimant au nom des juges majoritaires, a renvoyé avec approbation à la décision Fenerty v. The City of Halifax (1920), 50 D.L.R. 435, aux pp. 437 et 438, dans laquelle la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a dit:

[TRADUCTION] La doctrine de la chose jugée se fonde sur le concept de l'ordre public de façon à pouvoir mettre fin à un litige et empêcher qu'un individu soit poursuivi une deuxième fois au regard d'une même affaire. Selon moi, la jurisprudence a établi la règle qu'un jugement entre les mêmes parties est final et concluant, non seulement à l'égard des questions examinées, mais également à l'égard des questions que les parties auraient pu soulever. Il est clairement établi que le demandeur doit faire toute sa preuve dans la première action puisqu'il ne lui sera pas permis, en cas d'échec, d'intenter une deuxième action fondée sur une preuve additionnelle. Pour intenter une deuxième action, il doit être en mesure d'affirmer: "je vais vous démontrer que ce fait modifie entièrement l'aspect du litige, et je vais également vous démontrer que je ne le connaissais pas et qu'il m'était impossible, malgré l'exercice d'une diligence raisonnable, de connaître l'existence de ce fait plus tôt". [je souligne]

[20]            Le juge Rothstein conclut son analyse: (ce que le tribunal a cité dans ses motifs de décision):

[TRADUCTION]

[8] Le principe veut qu'une partie, après avoir reçu une décision définitive, ne peut porter de nouveau une affaire en justice, même si elle a trouvé des arguments supplémentaires qu'elle aurait pu invoquer à l'époque du litige initial. C'est ce que le demandeur a tenté de faire devant la SSR... . De nouveaux arguments concernant le paragraphe 2(3) auraient pu être présentés au tribunal chargé de statuer sur le minimum de fondement, mais ils ne l'ont pas été... .


[9] Aucune circonstance spéciale ne justifie la production d'éléments de preuve qui étaient auparavant disponibles.

[21]            Je souscris entièrement aux principes énoncés par le juge Rothstein dans les deux motifs de jugement qu'il a rédigés dans l'affaire Vasquez. Ces principes découlent de la jurisprudence de la Cour suprême du Canada citée par lui.

[22]            En matière de revendication du statut de réfugié, le principe de l' « issue "estoppel » , deuxième élément du principe de res judicata ou de la chose jugée, découle directement du texte de la Loi et a sa source dans le paragraphe 46.01(1)(c)(i) dont l'alinéa 46.01(5), permettant, dans une circonstance prescrite, une deuxième revendication, constitue une exception.

[23]            L'interprétation d'un texte législatif est toujours la recherche de l'intention du Parlement en appliquant de la méthode décrite par Elmer Driedger dans son ouvrage intitulé Construction of Statutes (2e édition), 1983, méthode privilégiée par le juge Iacobucci dans l'arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27 à la page 41:

[TRADUCTION] Aujourd'hui il n'y a qu'un seul principe ou solution: il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur.


[24]            En autorisant le dépôt d'une deuxième revendication, il me semble évident que le législateur n'avait pas l'intention d'écarter complètement une décision antérieure de la Section du statut de non reconnaissance et ceci pour plusieurs raisons.

[25]            L'effet d'une telle interprétation serait de minimiser le paragraphe 46.01(1)(c) de la Loi.

[26]            De plus, une telle interprétation serait, à mon avis, contraire à l'objet de la Loi et de la Convention qui veut que seuls ceux qui sont persécutés méritent la protection internationale. À mon avis, une interprétation qui écarterait le principe de la chose jugée sanctionnerait de nombreux abus et mènerait à une reconnaissance de facto de la protection du Canada pour une personne qui n'est pas vraiment réfugiée.

[27]            En conséquence, c'est à juste titre que le tribunal a invoqué les principes de l'arrêt Vasquez.

(2)        Application en l'espèce

[28]            À l'égard de la revendication d'Alan, ses parents témoignent devant le deuxième tribunal de ce qu'il a vécu comme garçon de trois ans en Israël durant les années 1994 à 1996:


(1)        À cause de son apparence, il sera victime de persécution et sera battu "il pourra pas aller dans une école normale où les enfants ils étudient ... il pourra pas parce que on allait se moquer de lui, même l'expérience précédente où il n'allait même pas encore à l'école, où tout le monde le regardait qui il était, s'il était juif pourquoi vous habitez ici, tout le monde s'étonnait" (transcription, pages 23 et 24).

(2)        Le témoignage de la mère d'Alan que les enfants à l'école sont cruels, qu'Alan sera insulté, harcelé, et qu'il sera séparé de la société et ne grandira pas normalement.

(3)        Le jeune Alan a dès cette époque, c'est-à-dire à l'âge de trois ans, vécu la persécution.

(4)        Le témoignage de Svetlana Telemichev d'un appel téléphonique de sa mère en Israël qui lui conseille de ne pas retourner parce que rien n'a changé et qu'elle considère que c'est très dangereux là pour son enfant à l'école.

(5)        Le membre du tribunal lui pose cette question: "... Alors si je vous ai bien compris, de la dernière audition jusqu'à maintenant, vous dites que vous personnellement ne connaissez pas les changements, que tout est resté pareil". Réponse: "Oui". (procès verbal page 39)

[29]            C'est avec raison, à mon avis, que le tribunal a conclu chose jugée à l'égard de la revendication du jeune Alan; le fait qu'il s'inscrira à l'école à son retour en Israël ne constitue aucun nouvel élément de fait qui n'était pas connu au temps de l'étude de sa première revendication. Aussi, les revendicateurs s'appuient sur une preuve documentaire datant de 1993 et de 1997, une preuve qui existait alors que leur première revendication fut étudiée par la Section du statut de réfugié le 27 novembre 1998.

[30]            Je conclus, après lecture du procès-verbal, que l'inscription à l'école pour Alan est simplement un nouvel argument qui aurait dû être présenté durant la première revendication.

[31]            J'ajoute que le premier tribunal a invoqué un deuxième motif pour rejeter leur revendication à la page 3:

De plus, le tribunal a noté que les revendicateurs n'ont pas recherché de manière suffisante à obtenir la protection de leur pays avant de demander la protection internationale du Canada. Le tribunal ne croyant pas a l'histoire de persécution telle qu'alléguée par les revendicateurs ne touchera que brièvement le sujet de la protection mais il veut quant même indiquer que la preuve documentaire sur Israël montre que ce pays s'est doté de divers et nombreux recours qui sont tous à la disposition de ses citoyens et ce, indépendamment de leur nationalité.

Les revendicateurs à cet effet n'ont pu, dans leur témoignage et leur récit, démontrer au moyen d'une preuve "claire et convaincante", critère énoncé par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Ward que l'État d'Israël avait failli à sa mission.

[32]            Dans leur deuxième revendication et leur témoignage devant le deuxième tribunal, les revendicateurs n'ont pas touché cette question.

F.         DISPOSITION

[33]            Pour tous ces motifs, cette demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[34]            Me Lebrun formule deux questions à être certifiées se rattachant au droit d'un revendicateur à une audience complète au sens de l'arrêt Singh c. Le Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1985] 1 R.C.S. 177, et dans ce contexte, une deuxième question, se rattachant à l'obligation de la Section du statut d'examiner l'ensemble des preuves déposées, anciennes et nouvelles. Je n'accepte pas l'invitation de Me Lebrun car je n'ai aucune hésitation de conclure que le principe de la chose jugée est un principe fondamental d'ordre public et s'applique à une deuxième revendication.

                                                                                                                           "François Lemieux"     

                                                                                                                                                                                                                         

                                                                                                                                               J u g e                

Ottawa (Ontario)

le 9 octobre 2001

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.