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Date : 20000731


Dossier : T-1586-98

OTTAWA (ONTARIO), LE LUNDI 31 JUILLET 2000

EN PRÉSENCE DE :      M. LE JUGE LEMIEUX


ENTRE :


     JOHN R. LAVOIE

     demandeur

     et

     LE MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT

     LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS

     LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN

     KAGIANO POWER CORPORATION

     ET LA PREMIÈRE NATION DES OJIBWAYS DE PIC RIVER

     défendeurs


     ORDONNANCE

     Pour les motifs énoncés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens.



     François Lemieux

    

     J U G E



Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.





Date : 20000731


Dossier : T-1586-98



ENTRE :

     JOHN R. LAVOIE

     demandeur

     et

     LE MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT

     LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS

     LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN

     KAGIANO POWER CORPORATION

     ET LA PREMIÈRE NATION DES OJIBWAYS DE PIC RIVER

     défendeurs

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX




[1]      Cette demande de contrôle judiciaire présentée par John Lavoie (le demandeur) porte sur les obligations qui incombent aux autorités fédérales en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCÉE) suite à deux décisions. La première, prise le 21 juillet 1998 par l'autorité responsable, le ministère des Pêches et des Océans -- Gestion des pêches et de l'habitat (MPO), conclut en vertu de la l'alinéa 20(1)a) de la LCÉE que le projet à l'étude n'était pas susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants. La deuxième décision, prise le 21 septembre 1998 par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, arrive à la même conclusion et autorise le financement du projet par l'entremise d'une subvention versée à la Première nation des Ojibways de Pic River.


[2]      Le projet, qui a d'abord été élaboré en 1988, porte sur la construction et l'exploitation sur la rivière Kagiano (la rivière) à Twin Falls d'une petite centrale hydro-électrique « au fil de l'eau » produisant 4,9 mégawatts. Twin Falls est une série de rapides, chutes, mares et îlots d'à peu près 575 mètres de long, avec une dénivellation de 55 mètres, approximativement à 23 kilomètres au nord de Manitouwadge, dans le nord de l'Ontario. La rivière est un tributaire de la rivière Pic, qu'elle rejoint à quelques kilomètres en aval de Twin Falls. La rivière Pic se jette dans le lac Supérieur.


[3]      En 1991, on a conclu que les effets environnementaux potentiels du projet, qui consistent à causer la mort de poissons ou la détérioration et destruction de l'habitat du poisson, exigeaient une autorisation en vertu du paragraphe 35(2) et de l'article 32 de la Loi sur les pêches. Dans sa décision du 21 juillet 1998, le MPO fait état des mesures d'atténuation et d'indemnisation nécessaires pour compenser la perte de production alimentaire et de l'habitat du poisson, ainsi que la perte du poisson. En même temps, un plan de contrôle et de suivi était établi.


[4]      Après avoir examiné le projet, le MPO a conclu que, compte tenu de la mise en oeuvre des mesures d'atténuation et d'indemnisation, le projet n'était pas susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants. Le MPO a déclaré que son examen était fondé sur les renseignements et conseils fournis par le promoteur du projet, par le ministère des Richesses naturelles de l'Ontario (MRNO), par le ministère de l'Environnement de l'Ontario, par Environnement Canada et par la Garde côtière canadienne.


[5]      Le demandeur, John Lavoie, réside à Manitouwadge. Il pêche, fait du canot-camping, et pratique la récolte commerciale des animaux sur la rivière depuis 31 ans. Il y possède une concession de piégeage. M. Lavoie a été l'un des premiers membres, ainsi que le secrétaire, du Comité consultatif public (CCP) de Twin Falls. Ce comité a été mis sur pied en 1992 par le promoteur du projet et le MRNO, afin d'étudier le projet proposé.

A.      LE CONTEXTE HISTORIQUE

[6]      Voici, en résumé, les étapes principales de l'évolution du projet.

     1)      La période allant de 1988 à l'été de 1992

[7]      C'est en 1988 que Rapid-Eau Technologies Inc. (Rapid-Eau), qui est par la suite devenue actionnaire de Kagiano Power Corporation (KPC) (le promoteur), a eu l'idée de construire un projet hydro-électrique dans la région de Twin Falls. En décembre de la même année, Rapid-Eau a présenté une demande au MRNO pour obtenir l'autorisation de la province de procéder. Le projet initial (version no 1) comportait une centrale électrique sur la rivière Pic, la construction d'un barrage sur la rivière Kagiano de Twin Falls jusqu'à sa confluence en aval avec la rivière Pic, ainsi qu'une conduite forcée pour l'eau nécessaire à faire tourner la centrale. Cette version no 1 a été rejetée par le MRNO, surtout à cause du dommage qui serait causé à l'habitat des poissons. Une étude réalisée en 1991 par le promoteur indiquait que la zone comprise entre Twin Falls et la rivière Pic était une aire de frai/d'alevinage pour la truite arc-en-ciel, le saumon, le doré et peut-être même l'esturgeon.

     2)      La période allant de l'été 1992 à mars 1995

[8]      Le 26 juin 1992, Rapid-Eau a changé son projet de façon substantielle (version no 2) et a présenté au MRNO une demande d'approbation de l'emplacement. Dans cette version no 2, la centrale était déménagée en amont à un endroit situé à la base de Twin Falls, plutôt que sur la rivière Pic. Aucun barrage ne serait construit sur la rivière Kagiano à l'entrée de Twin Falls, la dérivation de l'eau nécessaire étant assurée par la construction d'une brèche déversante amenant l'eau à la centrale par une conduite forcée. La fuite des eaux (l'eau qui sort de la centrale) se ferait dans la mare à la base de Twin Falls, une aire de frai pour la truite arc-en-ciel et d'autres espèces de poisson.

[9]      Il y a eu d'autres développements durant cette période. C'est Kagiano Power Corporation (KPC) qui a repris le rôle de promoteur et un Comité consultatif public (CCP) a été mis sur pied pour donner son avis sur le projet. Comme je l'ai déjà mentionné, le demandeur John Lavoie était parmi les premiers membres du CCP, ainsi que son secrétaire, poste qu'il occupe toujours. KPC a préparé une trousse d'information publique au sujet de la version no 2 du projet, qui a fait l'objet d'une séance d'information publique le 21 octobre 1992, pour ensuite être présentée formellement à une réunion publique le 15 décembre 1992.

[10]      Le 4 novembre 1992, le MRNO a officiellement envoyé la version no 2 du projet au MPO. Le surveillant régional du MRNO à Manitouwadge a déclaré à Edwin Debruyn, biologiste principal de l'habitat du poisson du MPO, en poste à Burlington (Ontario), que le projet devait être autorisé en vertu de la Loi sur les pêches puisqu'une partie du cours de Twin Falls entre la brèche déversante et la fuite des eaux serait exondée durant les périodes de débit minimum. Le MRNO a fait savoir au MPO que le projet était à l'étape de la Trousse d'information publique (TIP) prévue dans la législation ontarienne. Le MRNO était d'avis que le moment était venu pour le MPO de s'impliquer.

[11]      Le 7 décembre 1992, M. Debruyn a participé à une séance de breffage avec des fonctionnaires du MRNO et M. Stenzel, de l'Environmental Applications Group. C'est ce groupe de consultants en environnement qui avait préparé en 1991, à la demande de KPC, une analyse de l'habitat du poisson dans le cadre de la version no 1 du projet.

[12]      Le dossier démontre que le gérant de district du MRNO a reçu des commentaires au sujet de la TIP de KPC de la part de plusieurs fonctionnaires ontariens responsables de la planification et de l'ingénierie des emplacements. En juin 1993, les agents de planification des emplacements du MRNO ont exprimé leurs inquiétudes quant à l'impact du manque d'eau sur la zone de production de l'habitat des invertébrés. Ceci soulevait la question du débit d'atténuation et, si ce débit était insuffisant, la question se posait de savoir si le projet pouvait être approuvé ou si une formule d'indemnisation était envisageable au vu de la capacité de production perdue.

[13]      Durant cette période, le MPO a participé à part entière au Groupe d'étude qui examinait la version no 2 du projet. Le Groupe d'étude travaillait de concert avec le promoteur et le CCP.

[14]      Au nom du MPO, Karen McCabe-Gray a soulevé des questions portant sur la ligne de démarcation et la profondeur des mares à Twin Falls, élaboré le pour et le contre d'une décision de placer la centrale sur une île à Twin Falls plutôt que sur l'emplacement proposé à sa base, et fait valoir que la zone de fuite des eaux pourrait ne pas suffire à compenser si les mares supérieures de Twin Falls étaient asséchées. Elle a posé des questions au sujet du débit d'eau dans la mare au pied de Twin Falls, identifié les exigences en vue de la reproduction des invertébrés dans les mares de Twin Falls, et cherché à obtenir des réponses au sujet de la présence d'esturgeons et de la capacité des truites arc-en-ciel à sauter pour déterminer quel niveau elles pouvaient atteindre à Twin Falls. De plus, dans une note de service du 14 septembre 1993, le MPO a fait état d'un échantillonnage des larves de poisson obtenu lors d'une sortie du MPO le 14 juillet 1993, qui indiquait la présence de larves de poisson en haut de la « barrière infranchissable » , un endroit où l'on avait aussi trouvé 19 meuniers noirs.

     3)      La période allant du 23 décembre 1993 à novembre 1996

[15]      Le 23 décembre 1993, le consultant en habitat du poisson de KPC a fait savoir que la TIP serait modifiée suite au changement d'emplacement de la centrale et de la fuite des eaux, l'objectif étant de répondre aux inquiétudes exprimées par le MPO au sujet de la pêche. Dans la version no 3 du projet, la centrale serait située sur l'une des îles de Twin Falls, ce qui fait que la fuite des eaux se ferait aussi dans certaines des mares de la zone de Twin Falls, plutôt que seulement au pied de Twin Falls. Selon les consultants, ce changement garantirait le débit d'eau dans le chenal nord et minimiserait l'impact sur les aires d'alevinage et sur la production des invertébrés à Twin Falls.

[16]      Les 8 et 24 novembre 1993, le CCP a tenu des réunions pour discuter de la version no 3 du projet. Des représentants du MRNO, du promoteur et du MPO ont assisté à ces réunions.

[17]      En décembre 1993, KPC a présenté une nouvelle version de sa TIP initiale, pour la transformer en une TIP finale indiquant le changement d'emplacement de la centrale et de la fuite des eaux. Ce document visait à satisfaire aux exigences réglementaires de l'Ontario.

[18]      Le 24 février 1994, le CCP a fait une présentation au Groupe d'étude au sujet de la version finale (no 3) de la TIP. Selon le CCP, la TIP contenait des erreurs et des lacunes majeures, indiquant une inquiétude par rapport au fait qu'aucune étude de débit des eaux avait été conduite en 1993 sur le site de Twin Falls, alors que les études sur le milieu aquatique étaient insuffisantes. De plus, le CCP a déclaré que le nouvel emplacement de la centrale sur une île créerait d'autres problèmes liés à la fuite des eaux dans la mare au pied de Twin Falls. Tout en reconnaissant qu'il représentait le public, le CCP s'est dit d'avis que le grand public devait être saisi du dossier au vu des changements importants apportés au projet.

[19]      Les échanges se sont continués entre le MPO, le MRNO et KPC au cours de l'année 1994. Karen McCabe-Gray fait notamment état d'un appel-conférence entre les fonctionnaires du MRNO et elle-même au sujet de plusieurs aspects de la version no 3 du projet, notamment la question de la production des invertébrés et celle du débit d'atténuation.

[20]      Le 23 février 1994, Karen McCabe-Gray a résumé par écrit les résultats de son examen de la version no 3 de la TIP. Elle était d'avis que l'impact sur les poissons et sur l'habitat du poisson ne serait pas significatif et qu'on devait le considérer comme une cession mineure d'une ressource de la Couronne. Elle ajoutait que si les agences ontariennes étaient du même avis, le promoteur devrait obtenir une autorisation de construire à l'emplacement prévu. Suite à cette approbation, elle a souligné qu'il y aurait lieu d'obtenir une approbation définitive du MRNO ainsi que l'autorisation du MPO portant sur la détérioration, la destruction ou la perturbation de l'habitat du poisson.

[21]      Elle a avancé plusieurs motifs pour justifier le fait de qualifier le projet de cession mineure d'une ressource, y compris le fait que cette opération au fil de l'eau n'apporterait que des changements peu significatifs au contenu en oxygène et en nutriants de la rivière, à la chimie liée à la température de l'eau, et au débit de l'eau. Le déplacement de la centrale sur l'île permettrait le maintien d'un important habitat de poisson dans la mare principale située à côté de l'île à Twin Falls; elle était d'avis que les petites mares situées en amont de cette grande mare avaient peu d'importance. Quant à l'habitat du poisson, elle a pris note du fait que les cascades situées à Twin Falls constituaient une barrière à la migration des poissons en amont, que la production des invertébrés à Twin Falls était minime, et qu'il y avait peu de poissons pour la consommation à pêcher dans les mares et rapides qu'on y trouvait. Elle a noté que la zone de fuite des eaux constituerait une aire de frai et d'alimentation plus propice pour la truite arc-en-ciel et possiblement pour d'autres espèces de poisson.

[22]      Elle a tenu compte de l'indemnisation pour l'habitat du poisson, de la migration du poisson et des débits d'atténuation.

[23]      Le 10 mars 1994, le MRNO a écrit à KPC pour lui communiquer les résultats de la réunion du Groupe d'étude tenue le 23 février 1994. Le Groupe d'étude avait spécifiquement déterminé le débit de la fuite des eaux dans la mare principale au pied de la chute, prescrit le débit d'eau et déposé un programme de contrôle. Il a aussi déclaré qu'il y avait lieu de tenir une séance d'information ouverte au public.

[24]      Le procès-verbal de la réunion du Groupe d'étude du 30 août 1994, à laquelle assistait Karen McCabe-Gray, est consigné au dossier. À cette réunion, plusieurs questions liées aux pêches ont été discutées, notamment la comparaison entre l'habitat qui serait détruit et celui qui serait créé ou amélioré, le débit d'eau, le programme de contrôle, le temps requis pour la construction et l'autorisation demandée au MPO pour miner à la dynamite.

[25]      Le 22 septembre 1994, le consultant en environnement de KPC a préparé un plan de mesures correctives (PMC). L'objectif de ce plan était de prévoir des mécanismes précis et des engagements pour faire face aux incidences et déficiences imprévues des stratégies d'atténuation et d'indemnisation, ainsi que des options pour y faire face. L'efficacité d'un PMC est liée à l'existence d'un programme de contrôle. Par exemple, il y aurait un contrôle chaque trimestre durant la première année d'opération, au cours duquel on échantillonnerait la mare recevant la fuite des eaux en faisant des propositions quant au règlement de toute déficience. Le PMC contient aussi un résumé des pertes et des gains d'habitat et conclut que les gains nets/pertes nettes de capacité de production seraient minimes. Notamment, le PMC soulignait qu'il y aurait une perte mineure d'habitat aquatique à Twin Falls, suite au fait que 250 m2 seraient exondés en hiver lorsque le débit est réduit. On y notait aussi que les cascades constituent une barrière à la migration du poisson. Ainsi, une mare située en amont de la fuite des eaux représenterait une perte, aux dires du PMC, qui serait compensée dans la mare au pied de Twin Falls puisque cette dernière serait plus profonde et qu'elle constituerait ainsi une meilleure zone de retenue, d'élevage et de survie hiémale pour le poisson. Le PMC traite aussi de la question du passage du poisson dans la centrale. KPC a expédié le PMC au MRNO le 25 septembre 1994.

[26]      Le 9 mars 1995, le MRNO a délivré à KPC une approbation conditionnelle de l'emplacement lui permettant de situer le projet sur l'île de Twin Falls, moyennant le respect de certaines stipulations et conditions. Une des conditions portait sur l'obtention d'une autorisation du MPO pour la destruction de l'habitat du poisson et l'indemnisation y associée, la détermination des débits d'atténuation requis et l'exclusion de toute dérivation ou de tout barrage en amont de l'emplacement, que ces ouvrages soient situés dans la rivière Kagiano ou dans le lac Kagiano.

[27]      Le 15 avril 1995, le ministère de l'Environnement et de l'Énergie de l'Ontario a conclu qu'il n'y avait pas lieu de procéder à une évaluation environnementale spécifique et que le projet ne serait donc pas soumis à la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario.

     4)      La période allant de novembre 1996 à novembre 1997

[28]      Après que l'approbation de l'emplacement ait été accordée par le MRNO, rien d'important ne s'est produit avant le 8 novembre 1996 alors que KPC a présenté au MPO une demande d'autorisation de procéder à des travaux ayant un impact sur l'habitat du poisson. Cette demande était appuyée par un document de 200 pages, où l'on trouve des études générales, l'état des consultations publiques et gouvernementales, une description de la situation existante ainsi que les stratégies d'atténuation et d'indemnisation prévues. Ces études avaient déjà été préparées par KPC pour présentation au MRNO.

[29]      Durant cette période, une nouvelle question s'est posée dans le contexte de l'obtention de l'autorisation définitive du MRNO pour la construction et l'exploitation. Le 15 janvier 1997, le MRNO a présenté ses commentaires au sujet du rapport de KPC sur les questions environnementales liées au contrôle du niveau de l'eau du lac Kagiano. La lettre du MRNO à KPC soulevait certains problèmes liés au fait que le programme de gestion du niveau des eaux proposé prévoyait une augmentation du débit durant l'hiver et jusqu'à la fin du printemps. Ceci exigeait une accumulation d'eau dans le lac Kagiano par la remise en service du barrage du lac Kagiano, ce qui aurait pour résultat que le débit d'eau de la rivière Kagiano diminuerait d'à peu près dix mètres cubes par seconde au printemps. Le MRNO demandait qu'on fasse des études additionnelles et il a informé KPC que le MPO n'autoriserait pas la destruction de l'habitat du poisson avant que toutes ces études aient été réalisées.

[30]      Le 21 janvier 1997, le MPO a accusé réception de la demande d'autorisation de KPC et fait savoir que son examen de l'impact sur le poisson et sur l'habitat du poisson se poursuivait. Le MPO déclarait aussi que la demande de KPC et les documents qui l'accompagnaient seraient versés au registre public prévu à la LCÉE et que le public pourrait y avoir accès sur demande.

[31]      Le 5 mai 1997, le MPO a écrit au MRNO au sujet de la proposition de KPC de réguler le débit de la rivière en amont du lac Kagiano. Le MPO faisait état des inquiétudes sérieuses que lui causait cette proposition, étant donné les changements prévus de débit d'eau sur une étendue d'à peu près 40 kilomètres en amont de Twin Falls, les changements du niveau normal du lac Kagiano (le lac), ainsi que du débit normal de la rivière. Le MPO demandait donc qu'on procède à une étude approfondie d'impact, couvrant la zone en amont de la centrale et le lac lui-même, ainsi que la zone en aval de la centrale.

[32]      Dans une lettre datée du 18 juin 1997, le MRNO indiquait à KPC qu'il avait examiné avec le MPO la proposition de réguler le débit d'eau à la sortie du lac Kagiano et faisait état des inquiétudes du MPO. Le MRNO conseillait à KPC de ne pas donner suite à ce projet.

[33]      Le projet a été inscrit auprès de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, le début de l'examen préalable était fixé au 8 octobre 1997. À l'automne de 1997, KPC a présenté au MRNO une série de plans et devis ainsi qu'un plan de protection de l'environnement, afin d'obtenir l'approbation du MRNO à la construction et à l'exploitation de la centrale électrique. Le 7 octobre 1997, le CCP a rencontré les représentants du MRNO pour examiner ces documents qui, selon le CCP, contenaient des changements majeurs par rapport à la demande antérieure de KPC. Le 4 novembre 1997, le CCP a été breffé sur ces changements et une réunion publique d'information à ce sujet a été tenue le 5 novembre 1997.

     5)      La période allant du 29 novembre 1997 à juillet 1998

[34]      Les échanges entre le CCP et le MRNO sont devenus plus fréquents en novembre et décembre 1997, ainsi qu'en janvier 1998.

     a)      Le 29 novembre 1997, le président du CCP, Ron Fairservice, a écrit au MRNO demandant la tenue d'une consultation sur ce qu'il a décrit comme la nouvelle proposition (5 novembre 1997) visant le développement de Twin Falls pour la production d'hydro-électricité. Il soulignait les changements majeurs suivants : le fait que le barrage sur le lac Kagiano devenait un élément essentiel de la nouvelle proposition; le changement d'emplacement de la centrale, qui la plaçait à quelques mètres à l'intérieur du site prévu sur l'île; l'impact de la construction au printemps et à l'été; l'impact de la nouvelle route provisoire prévue jusqu'au pied de Twin Falls; et le fait qu'il devait y avoir de nouvelles consultations publiques.
     b)      Le CCP a rencontré les représentants du MRNO le 22 décembre 1997. Le procès-verbal préparé par le MRNO indique que toutes les questions mises de l'avant par le CCP dans sa lettre du 29 novembre 1997 avaient fait l'objet de discussions. Ce procès-verbal indique que le MRNO avait exprimé l'avis que les changements n'étaient pas de grande importance. Lors de cette réunion, le CCP a demandé qu'on lui communique les plans et devis présentés avant l'approbation finale du MRNO. Ce dernier a suggéré au CCP de s'adresser à KPC à ce sujet.
     c)      Durant la période de Noël 1997, KPC a communiqué au CCP ses plans et devis, ce qui a permis au CCP de présenter des commentaires détaillés.
     d)      Le 9 janvier 1998, le CCP a fait une longue présentation au MRNO au sujet des changements apportés en novembre 1997, ainsi que du plan de protection de l'environnement.
     e)      Le 19 janvier 1998, le CCP a rencontré les représentants du MRNO. Les commentaires du CCP au sujet des plans et devis de KPC ont fait l'objet d'une discussion. De plus, le MRNO devait examiner la possibilité que le CCP étudie les rapports pertinents sur la question des pêches ainsi que l'autorisation définitive portant sur la destruction de l'habitat du poisson. Le MRNO a parlé des rapports sur les pêches et précisé que l'autorisation du MPO n'avait pas encore été accordée. John Lavoie a demandé qu'on envoie une copie de la documentation au MPO, ce que le MRNO s'est engagé à faire. Ce fut fait dès le lendemain. Le 13 février 1998, le CCP a écrit à KPC pour lui transmettre ses commentaires et suggestions.
     f)      Le 18 février 1998, le surveillant régional du MRNO a rencontré le demandeur. Le 27 février 1998, il a écrit une longue lettre au président du CCP faisant état de toutes les questions qui avaient fait l'objet de discussion depuis novembre 1997.
B.      LE MPO DEVIENT L'ACTEUR PRINCIPAL
         a)      La lettre du 24 février 1998

[35]      Le 17 février 1998, John Lavoie a écrit à Virginia Thompson du MRNO, au nom du CCP, lui disant que les dernières conversations du CCP avec les représentants du MPO lui suggéraient que le MPO procédait à son évaluation sur la base de données erronées ou incomplètes. Il a déclaré à Virginia Thompson que le MPO ne pouvait fournir au CCP des copies de la documentation utilisée dans le cadre de sa prise de décision, à moins que le CCP ne fasse une demande dans le cadre du Système d'accès à l'information et de protection des renseignements. Il indiquait que le MPO lui avait suggéré que le CCP obtienne les renseignements en question de KPC ou du MRNO, afin d'éviter des délais et des frais. Il ajoute que le surveillant régional du MRNO l'avait assuré le 16 février que le MRNO fournirait ces renseignements au CCP. Il déclarait que les renseignements les plus récents en possession du CCP étaient ceux de la version de 1994 de la TIP. Il a déclaré que le CCP avait besoin des renseignements à jour qui avaient été fournis au MPO, ainsi que des renseignements à jour au sujet du plan d'atténuation et d'indemnisation pour l'impact sur les pêches. Il précisait que le CCP avait présenté une demande semblable à KPC.

[36]      Le 24 février 1998, John Lavoie écrivait à Karen McCabe-Gray du MPO, au nom du CCP. Dans le deuxième paragraphe de cette lettre, il indiquait que le MPO semblait ne pas pouvoir ou vouloir fournir au CCP la documentation de base qu'il utilisait dans sa prise de décision. Il ajoutait ceci :

[traduction]
Les conversations que nous avons eues avec vous et avec les biologistes du Ministère des Richesses naturelles de l'Ontario ... semblent confirmer que vous utilisez des données erronées ou incomplètes obtenues du promoteur KPC. Comme vous nous l'avez suggéré, nous avons discuté avec le consultant en pêches du promoteur et il est clair qu'il utilise lui aussi les mêmes données erronées et incomplètes. Ces lacunes importantes ont été portées plusieurs fois à l'attention du personnel du MRN dans le district de Wawa, mais ils n'en ont jamais tenu compte, non plus qu'ils les ont étudiées ou corrigées. [le souligné est de moi]

[37]      Dans les deux pages suivantes de sa lettre, M. Lavoie fait état des questions liées au fait que le chenal nord de Twin Falls et des mares importantes dans le secteur proposé pour la fuite des eaux seraient exondés durant les périodes où le débit est naturellement réduit. M. Lavoie parle de Twin Falls comme d'une aire de frai pour l'esturgeon, de la rivière Kagiano où l'on trouve de la truite mouchetée, et du fait qu'on n'a ni documenté ni même reconnu la présence de ces espèces. Il parle du fait qu'on a pêché des alevins d'esturgeon de la grosseur du pouce ainsi que des adultes à Twin Falls, dans une zone beaucoup plus élevée que le site proposé pour la fuite d'eau. Or, ces mares seront exondées si l'on donne suite au projet actuel. Il déclare que le promoteur n'a pas identifié les aires de frai et d'alevinage, non plus que les autres habitats utilisés par l'esturgeon et la truite mouchetée.

[38]      Au sujet de la consultation publique, il déclare ceci :

[traduction]
Vous avez déclaré au CCP que les exigences de consultation publique de l'évaluation environnementale fédérale ont été satisfaites par l'entremise du ministère des Richesses naturelles de l'Ontario. Nous ne sommes pas convaincus que les exigences fédérales de consultation publique ont été satisfaites. Le CCP procède actuellement à documenter les lacunes des exigences de consultation publique du ministère des Richesses naturelles. Le MRN n'a pas respecté les exigences de participation et de consultation du public que l'on trouve dans leurs propres Waterpower Guidelines ou Public involvement/public consultation Guidelines. [le souligné est de moi]

[39]      M. Lavoie ajoute ceci :

[traduction]
Votre conversation téléphonique du 19 février avec le Comité consultatif public de Twin Falls ne nous rend pas confiants que les inquiétudes sur les pêches à Twin Falls feront l'objet d'un examen adéquat. La déclaration portant que vous avez l'intention de signer la lettre d'intention aussitôt que vous la recevrez, puisque vous savez déjà ce qu'elle contient, ainsi que le fait que vous avez l'intention d'annexer une note à cette lettre recommandant que l'on rejette la demande du CCP pour une participation du public vient confirmer que le processus fédéral d'évaluation environnementale ne sera pas sérieux. [le souligné est de moi]

[40]      M. Lavoie déclare ensuite que le CCP demande que l'on prenne les mesures suivantes :

[traduction]
1) Accorder immédiatement au public l'accès aux documents, comme prévu à l'article 55. (Il n'y a pas de documents dans le registre public... sauf quelques renseignements de base.)
2) Assurer une réelle participation du public, comme l'exige le paragraphe 18(3) de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, ou de préférence
3) Procéder à une évaluation plus détaillée par une commission ou par un processus de médiation, et
4) Procéder à un examen conjoint fédéral-provincial du projet de Twin Falls.

[41]      Le même jour, il a écrit au ministre fédéral des Pêches et des Océans et au ministre fédéral des Affaires indiennes et du Nord canadien.

         b)      Les tentatives d'obtenir les documents au registre public

[42]      À la page 46 de son dossier, le demandeur fait la chronologie des tentatives du CCP pour obtenir des documents par le biais du registre public. Il fait d'abord état d'un appel téléphonique à Karen McCabe-Gray le 16 février 1998, dont l'objet était d'obtenir la liste des documents. Un autre appel date du 19 février 1998.

[43]      Le 3 mars 1998, il a parlé avec Wayne Hyatt, biologiste principal au MPO, en poste à Burlington (Ontario). Il a noté que M. Hyatt ne semblait pas savoir comment fonctionnait le registre public. Il a demandé la liste des documents.

[44]      La demande qui suit dans la chronologie date du 21 avril 1998. M. Lavoie a alors laissé un message au répondeur de Wayne Hyatt réitérant sa demande pour obtenir la liste de documents, ainsi qu'une réponse aux lettres envoyées au MPO. M. Lavoie fait état d'une conversation téléphonique le 29 avril 1998, dans laquelle il a demandé la liste des documents à Karen McCabe-Gray. Dans sa note, il indique que cette dernière lui a dit qu'elle ne savait pas si la liste était disponible. Elle a souligné à M. Lavoie qu'il était nécessaire d'obtenir l'autorisation de l'Accès à l'information.

[45]      Le 11 juin 1998, M. Lavoie a eu une conversation téléphonique avec Wayne Hyatt. Dans sa note, il indique que M. Hyatt l'a informé que la liste des documents lui avait été envoyée par la poste le 28 mai. Il en a obtenu une télécopie le jour même. M. Lavoie a ensuite téléphoné à Karen McCabe-Gray, notant qu'elle lui aurait dit de lui faire parvenir directement une demande pour les documents et qu'elle en ferait le suivi auprès de la coordonnatrice de l'Accès à l'information du MPO.

[46]      Le lendemain de la réception de la liste des documents, M. Lavoie a présenté une demande à Karen McCabe-Gray visant 79 documents, pour un total de 380 pages. Il a eu une conversation téléphonique avec Lynn Desjardins, la coordonnatrice de l'Accès à l'information du MPO, au cours de laquelle cette dernière lui a décrit brièvement le système d'accès à l'information et de protection des renseignements (AIPR).

[47]      Le 16 juin, M. Lavoie a fait un suivi en téléphonant à Karen McCabe-Gray, pour lui demander si elle avait envoyé les documents requis à l'AIPR. Le 18 ou le 19 juin, Karen McCabe-Gray a laissé un message au répondeur de M. Lavoie, lui disant qu'elle n'avait pas envoyé les documents à l'AIPR.

[48]      Le 26 juin, M. Lavoie a écrit au Commissaire à l'accès à l'information pour demander l'ouverture d'une enquête. Le 9 juillet, l'enquêteur désigné a déclaré à M. Lavoie que les droits de CCP n'avaient pas été enfreints puisqu'il n'avait pas présenté de requête formelle à la l'AIPR pour obtenir les documents. L'enquêteur a déclaré que la demande de documents présentée par le CCP se situait sous la couverture du registre public ajoutant que s'il voulait obtenir la suspension de l'autorisation du MPO il devait s'adresser à la Cour fédérale.

[49]      Le 20 avril 1998, Karen McCabe-Gray a écrit une très longue lettre à John Lavoie suite à leur conversation téléphonique du 25 février et après avoir reçu la lettre du CCP datée du 24 février 1998. Cette lettre porte sur toutes les questions soulevées par le CCP, y compris les inquiétudes portant sur les données erronées ou incomplètes se trouvant à la TIP de 1994 de KPC, les renseignements incorrects qu'on trouvait dans cette TIP sur le débit d'eau et la possibilité que le chenal nord soit exondé, le manque d'information sur les esturgeons et les truites de ruisseau, le fait que les mares situées en amont de la fuite d'eau proposée n'étaient portées sur aucune carte et qu'il n'existait aucun plan précis ou détaillé, non plus que de la documentation, sur les caractéristiques physiques des mares. Il y était aussi question de carences en matière de consultation publique.

[50]      Le 10 juillet 1998, John Lavoie a écrit au nom du CCP au ministre des Pêches et des Océans, Karen McCabe-Gray l'ayant avisé la veille que le MPO avait l'intention de délivrer une autorisation de destruction de l'habitat du poisson. Il se plaignait d'avoir dû faire des démarches à répétition pour obtenir des documents par le biais du registre public, ainsi que du manque de consultation publique valable. Une lettre semblable a été envoyée au ministre de l'Environnement.

[51]      Le 5 juillet 1998, M. Lavoie a envoyé un chèque en blanc à Karen McCabe-Gray. Ce chèque, libellé au nom de Revenu Canada, se voulait un paiement pour les documents demandés le 12 juin 1998. À cette liste de documents, M. Lavoie avait ajouté la lettre d'intention finale, le rapport d'examen préalable dans le cadre de l'évaluation environnementale, et tous les autres documents qui n'étaient pas compris sur la liste que lui avait envoyée le MPO le 28 mai 1998.

[52]      Le 9 juillet 1998, M. Lavoie a écrit à nouveau à Karen McCabe-Gray pour lui demander de lui envoyer sans délai ceux des documents demandés qui étaient disponibles. Il a fait un suivi de cette lettre le 16 juillet 1998.

[53]      Comme je l'ai déjà noté, le MPO a délivré une autorisation à KPC le 21 juillet 1998.

[54]      Le 21 juillet 1998, Karen McCabe-Gray a envoyé les documents demandés à la coordonnatrice de l'Accès à l'information du MPO, pour qu'elle les examine dans le cadre de l'AIPR. Elle a déclaré qu'à ce moment-là, personne dans la région n'avait la formation requise en AIPR pour pouvoir décider s'il y avait lieu de divulguer les documents demandés.

[55]      M. Lavoie a reçu les documents demandés le 10 août 1998, lorsqu'ils ont été transmis à ses avocats.

         c)      La réponse fédérale en l'instance

[56]      La réponse fédérale en provenance du MPO se trouve dans l'affidavit souscrit par Edwin Debruyn.

[57]      Il déclare qu'en novembre 1992, ou vers cette date, le MPO a été informé de l'existence du projet par le MRNO, ainsi que du fait qu'une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches pourrait être nécessaire plus tard. Il déclare que depuis lors le MRNO a tenu le MPO au courant de l'évolution du projet. Il reconnaît que KPC a présenté une demande en novembre 1996 visant à obtenir l'autorisation d'exécuter des travaux ayant un impact sur l'habitat du poisson et il renvoie à la documentation annexée, en provenance des consultants en habitat du poisson de KPC, la firme AGRA. Il a confirmé qu'on avait conclu qu'une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches serait requise pour causer la mort des poissons et pour détériorer, détruire ou perturber leur habitat. C'est ce qui a déclenché le processus prévu à la LCÉE, le MPO devenant alors l'autorité responsable.

[58]      Il mentionne la question soulevée au sujet du barrage sur le lac Kagiano, indiquant que le MPO avait informé le MRNO le 5 mai 1997 que tout projet de réguler le débit de la rivière en utilisant le barrage du lac Kagiano viendrait changer de façon importante la nature du projet. En ce cas, il y aurait lieu de procéder à une évaluation en vertu de la LCÉE.

[59]      Il déclare que durant la période allant de novembre 1996 à la mi-janvier 1997, le MPO a continué d'examiner le projet au jour le jour et, notamment, qu'il était constamment informé par le MRNO et les autres agences au sujet des questions qui étaient de leur compétence. À ce moment-là, les discussions entre les autorités provinciales et KPC portaient essentiellement sur l'utilisation du barrage. Il renvoie à une lettre du 17 février 1998, envoyée par AGRA au nom de KPC, demandant un examen d'un projet de minage en surface à la dynamite ainsi que l'autorisation prévue à l'article 32 de la Loi sur les pêches.

[60]      Au sujet de la consultation du public, il déclare qu'un programme complet de consultation avait été réalisé par le promoteur du projet en coopération avec le MRNO, ce qui constitue une étape pour obtenir l'approbation environnementale de la province. Dans ce cas, on a mis sur pied le CCP qui a examiné le projet pendant plusieurs années. Il déclare qu'on a conclu qu'il n'était pas nécessaire d'obtenir une participation additionnelle du public dans la préparation du rapport d'examen préalable. Ceci est conforme aux paragraphes 18(2) et (3) de la LCÉE, ainsi qu'avec l'un des objectifs avoués de la LCÉE, savoir d'éviter tout double emploi dans le processus d'évaluation environnementale. Il ajoute que le rapport d'examen préalable prévu à la LCÉE, fondé sur tous les renseignements disponibles, a été rédigé conformément au paragraphe 18(1) de la LCÉE. On y conclut qu'étant donné les mesures d'atténuation et d'indemnisation prévues, le projet n'était pas susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants.

[61]      Dans son affidavit, M. Debruyn déclare qu'avant de délivrer les autorisations, la politique du MPO portant sur la gestion de l'habitat du poisson a été respectée. Dans le cadre de cette politique, le MPO a obtenu un engagement de KPC portant sur les mesures d'atténuation et d'indemnisation prises pour assurer qu'il n'y aurait pas de perte nette de capacité de production de l'habitat du poisson en cause. Ces mesures ont été inscrites dans la lettre d'intention fournie par KPC.

[62]      M. Debruyn déclare que le MPO n'autorise aucune activité pouvant causer la mort des poissons et détériorer, détruire ou perturber leur habitat à moins que des mesures d'indemnisation soient prises pour compenser la perte de capacité de production de l'habitat du poisson, ou lorsque la perte est considérée être inacceptable. Il a déclaré qu'en cette matière, il fallait faire usage de bon sens et de jugement professionnel.

[63]      Au paragraphe 29 de son affidavit, il déclare que les inquiétudes de M. Lavoie au sujet de l'impact potentiel du projet sur le poisson et sur l'habitat du poisson n'étaient pas nouvelles et que le MPO en avait tenu compte lors de la prise de décision menant à la délivrance d'une autorisation.

[64]      M. Debruyn a ensuite abordé la question des documents au registre public, aux paragraphes 33 à 47 de son affidavit.

[65]      Il déclare que sur réception du projet à l'appui de la demande, il a été intégré à la base de données du Ministère. Après qu'on eut déterminé qu'il y avait lieu de procéder à une évaluation environnementale en vertu de la LCÉE, le projet a été inscrit auprès de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. Par la suite, une liste de documents portant sur les décisions d'accorder des autorisations en vertu de la LCÉE a été préparée dans la base de données du Ministère par le biologiste évaluateur. Cette liste de documents comprend tous les documents remis au MPO dans le cadre de la demande d'autorisation et d'examen en vertu de la LCÉE, y compris ceux qui sont décrits au paragraphe 55(3) de la LCÉE. Il déclare que les documents en question étaient conservés dans les dossiers du MPO, l'objectif étant la mise sur pied du registre public prévue à l'article 55.

[66]      Il ajoute que les employés de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale sont responsables de l'index fédéral des évaluations environnementales, où l'on trouve les renseignements les plus importants fournis par l'agence responsable au sujet de l'évaluation environnementale, y compris le nom d'une personne-ressource pouvant donner accès à la documentation. Les membres du public désirant obtenir plus de renseignements au sujet d'une évaluation environnementale donnée peuvent demander les documents se trouvant sur la liste qui portent sur cette évaluation, en s'adressant à la personne-ressource. À partir de la liste des documents, ils peuvent alors choisir quels documents ils désirent examiner et demander à la personne-ressource copie de ces documents.

[67]      Il ajoute qu'à l'époque, il était informé qu'en cas de demande pour obtenir des documents sur la liste, la procédure du MPO exigeait qu'on tienne compte de la Loi sur l'accès à l'information, notamment des articles 27, 28 et 44.

[68]      Il déclare qu'afin d'assurer le respect de la Loi sur l'accès à l'information en divulguant des documents aux membres du public, la pratique du MPO consistait à envoyer toutes les demandes pour des documents se trouvant au registre public au Bureau de l'accès à l'information et de la protection des renseignements (AIPR) afin qu'un agent d'accès à l'information qualifié examine les documents et s'assure qu'on n'enfreignait pas les dispositions de la Loi sur l'accès à l'information. Il déclare que cette procédure était utilisée en février 1988.

[69]      Il déclare que le 29 avril 1998, M. Lavoie a présenté une demande au nom du CCP pour obtenir copie de la liste des documents au registre public et qu'on l'a informé que cette liste était présentement mise à jour avant d'être envoyée à l'AIPR pour examen. Il confirme que le MPO a envoyé à M. Lavoie, le 28 mai 1998, une copie d'une liste de documents se trouvant au registre public, liste qui ne portait aucune date. Par la même occasion, on lui conseillait d'adresser toute demande de document au bureau régional de l'Ontario, l'informant que tous les documents demandés devraient d'abord être envoyées au bureau de l'AIPR pour examen. Il confirme que l'AIPR du MPO a autorisé la divulgation des documents au CCP le 30 juillet 1998, ou vers cette date. Le bureau régional de l'Ontario a ensuite dû entrer en communication avec les tiers pouvant avoir un intérêt afin d'obtenir leur consentement avant la divulgation. Il confirme qu'on a livré les documents en question aux avocats de M. Lavoie le 10 août 1998.

[70]      La réponse fédérale au nom du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC) se trouve à l'affidavit de Roy Smallion. Ce dernier, un analyste des politiques, est responsable de l'analyse des projets présentés au MAINC par les Premières nations, dans le cadre de la promotion économique et du développement des ressources.

[71]      En avril 1998, on lui a demandé d'examiner le plan d'affaires présenté par la Première Nation des Ojibways de Pic River, dont la réserve est située sur Heron Bay dans le nord de l'Ontario. Il déclare que cette Première nation détient 40 p. 100 des actions de KPC et qu'elle sollicitait entre 200 000 $ et 500 000 $ comme contribution en capital au projet.

[72]      Il déclare avoir examiné le plan d'affaires, un document de 100 pages où l'on trouve une présentation détaillée du projet, y compris toutes les autorisations obtenues, des détails quant au financement et des renseignements au sujet du financement additionnel que la Première nation cherchait à obtenir. À ce moment-là, KPC avait obtenu un financement de 7,2 millions de dollars d'une institution financière, à appliquer aux 8 millions de dollars requis pour la construction, le solde provenant d'un prêt obtenu auprès d'une banque commerciale ainsi que d'une contribution du Fonds pour la création de possibilités économiques du MAINC.

[73]      Se fondant sur son analyse, il a fait savoir à la Première nation qu'il était disposé à recommander une aide financière de 300 000 $, ce qui a été jugé acceptable. Il a préparé un rapport en ce sens en date du 12 mai 1998.

[74]      Dans une lettre datée du 15 juillet 1998, adressée au chef de la Première nation Roy Michano, le ministre informe ce dernier que le Ministère est disposé à autoriser le financement demandé. Dans son affidavit, M. Smallion déclare qu'avant le versement de la subvention il était nécessaire de procéder à une évaluation environnementale de l'impact du projet en vertu de l'alinéa 5(1)b) de la LCÉE.

[75]      M. Smallion indique que conformément à l'article 55 de la LCÉE, le projet a été inscrit au registre public (l'Index fédéral des évaluations environnementales (IFÉE)) à la mi-septembre 1998.

[76]      Il déclare que l'évaluation environnementale a été terminée le 21 septembre 1998 par Bruce Boles, agent environnemental au MAINC. Ce dernier a conclu que le projet n'aurait pas d'incidences environnementales significatives.

[77]      M. Smallion termine son affidavit en indiquant que le MAINC a fourni les 300 000 $ à la Première nation dans le cadre du projet le 26 avril 1999.

C.      LES QUESTIONS EN LITIGE

[78]      M. Lavoie fonde sa demande de contrôle judiciaire sur ce qu'il considère être le non-respect de certaines dispositions de la LCÉE par le MPO et le MAINC, ainsi que sur une violation de l'obligation d'équité en common law. Il pose les cinq questions suivantes :

     1)      Le MPO a-t-il enfreint l'article 55 de la LCÉE en ne lui fournissant pas un accès facile aux documents se trouvant dans le registre public et en exigeant qu'il utilise la Loi sur l'accès à l'information pour les obtenir;
     2)      Le MPO a-t-il enfreint son obligation d'équité en common law en ne lui fournissant pas les documents demandés, ainsi que la possibilité de présenter ses commentaires, avant que le MPO accorde son autorisation;
     3)      Le MPO et le MAINC ont-ils enfreint le paragraphe 15(3) de la LCÉE en ne conduisant pas une évaluation environnementale de la régulation du niveau d'eau dans le lac Kagiano, dans le cadre du projet de Twin Falls;
     4)      Le MPO et le MAINC ont-ils enfreint les dispositions de l'alinéa 16(1)a) de la LCÉE a) en ne conduisant pas une évaluation environnementale des effets cumulatifs de la régulation du niveau de l'eau dans le lac Kagiano et du projet d'hydro-électricité à Twin Falls et b) en ne tenant pas compte des renseignements disponibles au sujet des incidences environnementales; et
     5)      Le MAINC a-t-il enfreint l'alinéa 5(1)b) et l'article 11 de la LCÉE en ne conduisant pas un examen préalable avant d'autoriser le financement?
D.      ANALYSE
     1)      La question préliminaire

[79]      Les avocats de KPC et de la Première nation des Ojibways de Pic River m'ont fortement encouragé à rejeter la demande de M. Lavoie au motif qu'il n'avait pas qualité pour agir. Ils soutiennent qu'il n'a pas cette qualité à titre personnel puisque ses relations avec le MPO et le MAINC étaient menées en sa qualité de membre et de secrétaire du CCP. Ils soutiennent donc que c'est le CCP et non M. Lavoie qui devait présenter la demande qui m'est soumise.

[80]      Bien que cet argument soit intéressant, je ne peux l'accepter pour les motifs énoncés par mon collègue M. le juge MacKay, dans Citizen's Mining Council of Newfoundland and Labrador c. Canada (Ministre de l'Environnement), [1999] J.C.F. no 273, où il a rejeté un argument semblable.

[81]      Il a conclu que la question soulevée par le demandeur au sujet de l'application de l'article 15 de la Loi était une question sérieuse. Cette question m'est aussi posée en l'instance, mais plusieurs autres aspects sont en cause. M. Lavoie satisfait au critère du véritable intérêt. Ses inquiétudes quant aux questions environnementales en cause à Twin Falls sont très sérieuses, comme on le voit dans sa participation au CCP.

[82]      M. le juge MacKay était d'avis qu'on pouvait constater la qualité pour agir en vertu de la doctrine de l'intérêt public lorsque le demandeur a un véritable intérêt et si rien ne démontre qu'une autre personne ou que d'autres personnes ayant un intérêt peuvent raisonnablement engager des procédures.

[83]      En l'instance, on soutient que cette autre personne est le CCP. Toutefois, le juge MacKay a conclu que le fait que d'autres personnes pourraient partager les préoccupations du demandeur sans avoir intenté d'action en justice ne peut justifier qu'on lui refuse la qualité pour agir. Je conclus donc que M. Lavoie a qualité pour agir en vertu de la doctrine de l'intérêt public.

[84]      Les mêmes avocats soutiennent aussi que l'affaire est devenue théorique, mais je considère que cet argument a été réglé par l'arrêt Oldman River Society, 1992 1 R.C.S. 3. Dans cette affaire, tout comme ici, le projet était à peu près complété. Toutefois, la Cour suprême du Canada a rejeté l'argument voulant que l'affaire soit devenue théorique, considérant qu'une ordonnance d'application aurait un certain effet sur les mesures susceptibles d'être prises pour atténuer toute incidence environnementale néfaste que pourrait avoir le projet.

     2)      Vue d'ensemble

[85]      Il est admis que le projet de KPC à Twin Falls a donné lieu à une évaluation environnementale par le MPO et le MAINC en vertu des dispositions de la LCÉE (l'alinéa 5(1)d) pour le MPO et l'alinéa 5(1)b) pour le MAINC).

[86]      La LCÉE prévoit divers mécanismes de tenue d'évaluation environnementale, que l'on trouve à l'article 14. Selon le cas, il peut s'agir d'un examen préalable ou d'une étude approfondie et de l'établissement d'un rapport d'examen préalable ou d'un rapport d'étude approfondie; d'une médiation ou d'un examen par une commission et de l'établissement d'un rapport; et de l'élaboration et de l'application d'un programme de suivi.

[87]      En l'instance, tant le MPO que le MAINC ont opté pour un examen préalable en vertu de l'article 18 de la LCÉE. Cet article est rédigé comme suit :


18. (1) Where a project is not described in the comprehensive study list or the exclusion list, the responsible authority shall ensure that

(a) a screening of the project is conducted; and

(b) a screening report is prepared.

18(2) Source of information

(2) Any available information may be used in conducting the screening of a project, but where a responsible authority is of the opinion that the information available is not adequate to enable it to take a course of action pursuant to subsection 20(1), it shall ensure that any studies and information that it considers necessary for that purpose are undertaken or collected.

18(3) Consideration of public comments

(3) Where the responsible authority is of the opinion that public participation in the screening of a project is appropriate in the circumstances, or where required by regulation, the responsible authority shall give the public notice and an opportunity to examine and comment on the screening report and on any record that has been filed in the public registry established in respect of the project pursuant to section 55 before taking a course of action under section 20.

18. (1) Dans le cas où le projet n'est pas visé dans la liste d'étude approfondie ou dans la liste d'exclusion, l'autorité responsable veille_:

a) à ce qu'en soit effectué l'examen préalable;

b) à ce que soit établi un rapport d'examen préalable.

18(2) Information

(2) Dans le cadre de l'examen préalable qu'elle effectue, l'autorité responsable peut utiliser tous les renseignements disponibles; toutefois, si elle est d'avis qu'il n'existe pas suffisamment de renseignements pour lui permettre de prendre une décision en vertu du paragraphe 20(1), elle fait procéder aux études et à la collecte de renseignements nécessaires à cette fin.

18(3) Participation du public

(3) Avant de prendre sa décision aux termes de l'article 20, l'autorité responsable, dans les cas où elle estime que la participation du public à l'examen préalable est indiquée ou dans le cas où les règlements l'exigent, avise celui-ci et lui donne la possibilité d'examiner le rapport d'examen préalable et les documents consignés au registre public établi aux termes de l'article 55 et de faire ses observations à leur égard. [le souligné est de moi]


[88]      Selon la définition de l'article 2 de la Loi, l'examen préalable est une évaluation environnementale qui, à la fois, est effectuée de la façon prévue à l'article 18 et prend en compte les éléments énumérés au paragraphe 16(1) de la LCÉE.

[89]      En vertu du paragraphe 18(3) de la LCÉE, l'autorité responsable ne peut prendre sa décision aux termes de l'article 20 qu'après qu'il y ait eu la participation du public prescrite.

[90]      Le paragraphe 18(3) renvoie aussi à l'article 55 de la LCÉE, où l'on trouve les dispositions concernant le registre public. Les paragraphes 55(1) à 55(3) sont rédigés comme suit :


55. (1) For the purpose of facilitating public access to records relating to environmental assessments, a public registry shall be established and operated in a manner to ensure convenient public access to the registry and in accordance with this Act and the regulations in respect of every project for which an environmental assessment is conducted.

55(2) Public registry established

(2) The public registry in respect of a project shall be maintained

(a) by the responsible authority from the commencement of the environmental assessment until any follow-up program in respect of the project is completed; and

(b) where the project is referred to a mediator or a review panel, by the Agency from the appointment of the mediator or the members of the review panel until the report of the mediator or review panel is submitted to the Minister.

55(3) Contents of public registry

(3) Subject to subsection (4), a public registry shall contain all records produced, collected, or submitted with respect to the environmental assessment of the project, including

(a) any report relating to the assessment;

(b) any comments filed by the public in relation to the assessment;

(c) any records prepared by the responsible authority for the purposes of section 38;

(d) any records produced as the result of the implementation of any follow-up program;

(e) any terms of reference for a mediation or a panel review; and

(f) any documents requiring mitigation measures to be implemented.

55. (1) Est tenu, conformément à la présente loi et aux règlements, un registre public pour chacun des projets pour lesquels une évaluation environnementale est effectuée afin de faciliter l'accès aux documents relatifs à cette évaluation.

55(2) Établissement du registre

(2) Le registre public est tenu_:

a) par l'autorité responsable dès le début de l'évaluation environnementale et jusqu'à ce que le programme de suivi soit terminé;

b) par l'Agence, dans les cas où une médiation ou un examen par une commission est effectuée, dès la nomination du médiateur ou des membres de la commission jusqu'au moment de la remise du rapport au ministre.

55(3) Contenu du registre

(3) Sous réserve du paragraphe (4), le registre public contient tous les documents produits, recueillis ou reçus relativement à l'évaluation environnementale d'un projet, notamment:

a) tout rapport relatif à l'évaluation environnementale du projet;

b) toute observation du public à l'égard de l'évaluation;

c) tous les documents que l'autorité responsable a préparés pour l'application de l'article 38;

d) tous les documents produits par l'application d'un programme de suivi;

e) le mandat du médiateur ou d'une commission;

f) tous les documents exigeant l'application de mesures d'atténuation.

     3)      Coopération fédérale-provinciale

[91]      En 1992, la Cour suprême du Canada a rendu l'arrêt intitulé Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3. À cette époque, le processus d'évaluation environnementale était prescrit au Décret fédéral sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement (le Décret sur les lignes directrices), adopté en 1984 en vertu de l'article 6 de ce qui était alors la Loi sur le ministère de l'Environnement.

[92]      M. le juge La Forest a traité de la question constitutionnelle visant à savoir si le Décret sur les lignes directrices contrevenait aux articles 92 et 92(A) de la Loi constitutionnelle de 1867. Je tire les principes suivants de ses motifs de jugement sur cette question, que l'on trouve aux pages 62 à 76 du fascicule du recueil :

     a)      la Loi constitutionnelle de 1867 n'a pas conféré le domaine de l' « environnement » comme tel aux provinces ou au Parlement. L'environnement, dans son sens générique, englobe l'environnement physique, économique et social touchant plusieurs domaines de compétence attribués aux deux paliers de gouvernement. (page 63, par. (f) à (h))
     b)      L'environnement n'est pas un domaine distinct de compétence législative en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867, et « c'est, au sens constitutionnel, une matière obscure qui ne peut être facilement classée dans le partage actuel des compétences, sans un grand chevauchement et une grande incertitude » . (page 64, par. (e))
     c)      Dans l'exercice de leurs pouvoirs respectifs, les deux paliers de gouvernement peuvent toucher l'environnement, « tant par leur action que par leur inaction » . (page 65, par. (b))
     d)      « Il importe de déterminer quel palier de gouvernement peut légiférer. Un palier peut légiférer à l'égard des aspects provinciaux et l'autre, à l'égard des aspects fédéraux. Bien que les projets de nature locale relèvent généralement de la compétence provinciale, ils peuvent exiger la participation du fédéral dans le cas où le projet empiète sur un domaine de compétence fédérale... » . (page 69, par. (a))

[93]      Un principe bien reconnu en droit constitutionnel canadien est qu'une des façons de tourner les difficultés liées aux compétences partagées est l'utilisation des mécanismes de coopération fédérale-provinciale. Les techniques pour ce faire sont bien connues : coopération sans délégation, délégation, ententes fédérales-provinciales et organismes conjoints.

[94]      La LCÉE prend ces techniques en compte. Je veux renvoyer notamment aux paragraphes 12(4) et (5) de la Loi qui traitent de la coopération fédérale-provinciale. Ils sont rédigés comme suit :


12.(4) Where a screening or comprehensive study of a project is to be conducted and a jurisdiction has a responsibility or an authority to conduct an assessment of the environmental effects of the project or any part thereof, the responsible authority may cooperate with that jurisdiction respecting the environmental assessment of the project.

12(5) Definition of "jurisdiction"

(5) In this section, "jurisdiction" means

(a) the government of a province;

(b) an agency or a body that is established pursuant to the legislation of a province and that has powers, duties or functions in relation to an assessment of the environmental effects of a project;

(c) a body that is established pursuant to a land claims agreement referred to in section 35 of the Constitution Act, 1982 and that has powers, duties or functions in relation to an assessment of the environmental effects of a project; or

(d) a governing body that is established pursuant to legislation that relates to the self-government of Indians and that has powers, duties or functions in relation to an assessment of the environmental effects of a project.

12.(4) L'autorité responsable peut, dans le cadre de l'examen préalable ou de l'étude approfondie d'un projet, coopérer, pour l'évaluation environnementale de celui-ci, avec l'instance qui a la responsabilité ou le pouvoir d'effectuer l'évaluation des effets environnementaux de tout ou partie d'un projet.

12(5) Définition d' « _instance_ »

(5) Dans le présent article, « _instance_ » s'entend_:

a) du gouvernement d'une province;

b) d'un organisme établi sous le régime d'une loi provinciale ayant des attributions relatives à l'évaluation des effets environnementaux d'un projet;

c) d'un organisme, constitué aux termes d'un accord sur des revendications territoriales visé à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, ayant des attributions relatives à l'évaluation des effets environnementaux d'un projet;

d) d'un organisme dirigeant, constitué par une loi relative à l'autonomie gouvernementale des Indiens, ayant des attributions relatives à l'évaluation des effets environnementaux d'un projet. [le souligné est de moi]

[95]      Dans l'arrêt L'Association canadienne du droit de l'environnement c. Le ministre de l'Environnement, dossier A-327-99, le 5 juin 2000, la Cour d'appel fédérale a fait état de cette coopération en l'approuvant.

     4)      Les questions de la participation du public et de l'équité

[96]      L'analyse de deux des questions soulevées par le demandeur doit se fonder sur le paragraphe 18(3) de la LCÉE. Comme je l'ai indiqué, l'article 18 traite de l'utilisation d'un examen préalable à titre d'évaluation environnementale. J'ai déjà fait remarquer que c'est ce mécanisme que le MPO et le MAINC ont choisi pour satisfaire à leurs obligations en vertu de l'article 5 de la Loi au vu de ce projet.

[97]      Je partage l'avis de l'avocate des ministres que le paragraphe 18(3) de la LCÉE donne à l'autorité responsable le pouvoir discrétionnaire de décider si la participation du public à l'examen préalable du projet est indiquée. Le Parlement a laissé cette décision à l'autorité responsable, qui doit déterminer ce qui est indiqué dans les circonstances. Rien en l'instance ne porte sur le fait que la participation du public aurait été prescrite par règlement.

[98]      L'avocate du demandeur n'a pas contesté de façon significative l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire. Elle a plutôt axé son argument sur l'existence d'un devoir indépendant d'équité en common law que les autorités fédérales responsables auraient envers M. Lavoie, y compris l'obligation de répondre à ses objections et de lui donner l'occasion de réagir à leur rejet. Ce point de vue est fondé sur la décision rendue en 1986 par M. le juge Collier dans Crestpark Realty Ltd. c. Directeur général, Aides et voies navigables, au nom du ministre des Transports, 1 C.E.L.R. (N.S.) 121.

[99]      La doctrine de l'équité en common law peut être utilisée de diverses façons en vertu de la LCÉE. Toutefois, je ne peux accepter le point de vue de l'avocate du demandeur quant au fait qu'elle s'appliquerait de façon indépendante dans les domaines de la participation du public, du droit d'obtenir les documents pertinents et de pouvoir commenter avant que l'autorisation ne soit donnée. Il y a une raison très simple à cela, c'est que le Parlement a légiféré sur le contenu de l'équité en cette matière en 1992 et a ainsi remplacé la common law.

[100]      Ceci ne veut pas dire qu'une autorité responsable peut de façon arbitraire exclure toute participation du public dans une évaluation environnementale. Une telle proposition serait contraire au quatrième paragraphe du préambule de la LCÉE, ainsi qu'à l'objectif énoncé à l'alinéa 4d) qui est « de veiller à ce que le public ait la possibilité de participer au processus d'évaluation environnementale » .

[101]      Toutefois, le Parlement a accordé à l'autorité responsable, par le paragraphe 18(3), le pouvoir de décider, au vu des circonstances de l'affaire, si la participation à l'examen préalable d'un projet est indiquée.

[102]      L'exercice de ce pouvoir discrétionnaire est soumis à des principes de droit bien établis, que l'on trouve dans les arrêts de la Cour suprême du Canada Maple Lodge Farms Ltd. c. Le gouvernement du Canada, [1982] 2 R.C.S. 2 et, plus récemment, dans Baker c. Canada, [1999] 2 R.C.S. 817.

[103]      Selon moi, la décision des autorités responsables de ne pas pousser plus loin la participation du public au projet était fondée sur les bons principes juridiques. Un des aspects très importants en l'instance est la coopération fédérale-provinciale sur les aspects environnementaux du projet, ainsi que la participation très importante du public par l'entremise du CCP. Les faits que je présente dans ces motifs démontrent amplement que la participation du public était significative. Sa contribution à l'évaluation environnementale des aspects fédéraux du projet et de toutes ses phases a eu un impact important, comme on peut le constater au vu des changements apportés en novembre 1997. La participation du public et le rôle du MPO, en collaboration avec le MRNO, ont mené à des changements importants qui ont amélioré le projet.

[104]      Je note aussi que la lettre par laquelle M. Lavoie soulevait plusieurs questions, et qu'il a expédiée au MPO le 24 février 1998, a fait l'objet d'une longue réponse datée du 20 avril 1998. Le MRNO a fait de même dans sa réponse datée du 27 février 1998 à M. Fairservice, le président du CCP, où l'on trouve des commentaires sur toutes les questions soulevées.

     5)      La violation du paragraphe 15(3)

[105]      L'avocate du demandeur soutient que le MPO a enfreint les dispositions du paragraphe 15(3) de la LCÉE du fait que sa description du projet ne traite pas du contrôle du niveau de l'eau dans le lac Kagiano. Elle soutient que dans ces circonstances, le paragraphe 15(3) exigeait qu'on étende la portée de l'évaluation environnementale pour tenir compte de l'incidence environnementale du contrôle du niveau de l'eau dans le lac Kagiano et de la régulation du débit dans la rivière Kagiano, à partir du lac jusqu'à Twin Falls, soit sur une distance de 40 kilomètres.

[106]      En fait, le dossier indique que le MPO et le MAINC n'ont pas procédé à une telle évaluation environnementale. La question à trancher est celle de savoir si les dispositions du paragraphe 15(3) exigeaient qu'une telle évaluation soit réalisée. Le demandeur s'appuie surtout sur la décision de M. le juge Gibson dans Friends of the West Country Association c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans) (1998), 4 C.F. 340, décision qui avait été portée en appel. Peu de temps après la conclusion de l'audience en l'instance, l'avocate du demandeur m'a informé que la Cour d'appel fédérale avait rendu son jugement dans l'appel interjeté par le ministre. Cet arrêt se trouve au Recueil sous l'intitulé Le ministre des Pêches et des Océans, le directeur, programmes maritimes, Garde côtière canadienne c. The Friends of the West Country Association, [2000] 2 C.F. 263. La décision de la Cour d'appel fédérale, rédigée par le juge Rothstein, J.C.A., n'appuie pas la thèse du demandeur à ce sujet.

[107]      Selon moi, M. le juge Rothstein énonce les principes suivants dans cette affaire :

     1)      L'interprétation et l'application des articles 15, 16 et 55 de la LCÉE mettent en cause des questions de droit, la norme de contrôle étant celle de la décision correcte. Il ne s'est pas prononcé sur la question de la norme de contrôle appropriée à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire, que M. le juge Gibson avait jugé être celle du caractère raisonnable de la décision plutôt que celle de la décision manifestement déraisonnable.
     2)      Le paragraphe 15(3) n'oblige pas l'autorité responsable à procéder à une évaluation environnementale d'éléments qui ne seraient pas inclus dans la portée du projet déterminée au titre du paragraphe 15(1). Selon l'interprétation juste du paragraphe 15(3), l'évaluation environnementale requise porte sur la durée de l'ouvrage tel que défini dans le projet, ou sur un accessoire à cet ouvrage.
     3)      L'autorité responsable peut utiliser son pouvoir discrétionnaire pour ranger sous le paragraphe 15(3) des ouvrages non définis dans le projet, lorsqu'elle est d'avis que ces ouvrages seront probablement réalisés dans le cadre de l'ouvrage défini dans le projet.

[108]      Le rapport d'examen préalable préparé par le MPO contient la description suivante du projet :

[traduction]
La construction d'une usine hydro-électrique produisant 4,9 mégawatts sur la rive nord de la rivière Kagiano, à la crête de Twin Falls. Une brèche déversante sera construite au sommet des chutes dans le chenal sud, afin d'amener l'eau à une prise, ce qui résultera en une diminution du débit des chutes avec une incidence sur la production potentielle des invertébrés et sur certaines zones isolées de l'habitat du poisson. Une galerie de fuite de 350 mètres sera construite sous les chutes en minant à la dynamite. De plus, un point de restitution sera construit dans le chenal nord-est à l'arrivée de Twin Falls. Un mécanisme de contrôle existant en aval de la fuite des eaux sera ajusté pour augmenter le niveau de l'eau jusqu'à 499,6 mètres au-dessus du niveau de la mer. Des explosifs seront utilisés pour enlever ou briser la pierre durant la construction de la centrale hydro-électrique de Twin Falls.

[109]      Dans le même rapport d'examen préalable, le MPO définit la portée du projet comme suit :

[traduction]
La portée de ce projet hydro-électrique comprend la construction et l'exploitation d'une centrale hydro-électrique, les effets environnementaux de toute défaillance ou des stratégies de compensation ayant rapport au projet, les incidences environnementales cumulatives qui peuvent découler de ce projet combinées avec d'autres projets ou activités qui seront réalisées dans l'avenir ou qui existent déjà, les commentaires du public, ainsi que toutes les mesures envisageables sur le plan technique et financier qui viendraient atténuer les effets environnementaux négatifs importants du projet.

[110]      Les rapports d'examen préalables décrivent la portée de l'évaluation environnementale comme suit :

[traduction]
La portée de l'évaluation environnementale comprend : les incidences environnementales prévues à l'alinéa 16(1)a) et à l'article 2 de la LCÉE; les incidences environnementales liées à la construction et à l'exploitation de la centrale hydro-électrique de 4,9 mégawatts située sur la rive nord de la rivière Kagiano, à la crête de Twin Falls à Manitouwadge. La portée comprend aussi tous les travaux visant à améliorer l'habitat du poisson qui sont proposés dans la rivière Kagiano, les routes d'accès secondaires et les installations pour traverser les cours d'eau qui seront construites en améliorant les routes d'accès actuelles en forêt, les lignes de transport d'électricité, la centrale elle-même et les travaux de minage à la dynamite associés à la construction de la centrale hydro-électrique.

[111]      La portée du projet ne comprenait donc pas la régulation du niveau d'eau dans le lac Kagiano, non plus que le débit d'eau de la rivière Kagiano à partir du lac Kagiano jusqu'à Twin Falls. Ma lecture de l'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans Friends of West Country, précité, m'indique que le paragraphe 15(3) n'exigeait pas que le MPO et le MAINC se livrent à une évaluation environnementale portant sur ces cours d'eau, puisqu'ils ne sont pas partie des zones précisées dans la portée du projet.

[112]      Le MPO et le MAINC avaient le pouvoir discrétionnaire de mener une évaluation environnementale de ces cours d'eau, s'ils étaient d'avis que la régulation de ces eaux serait entreprise en vue de l'exploitation de la centrale hydro-électrique de Twin Falls.

[113]      Je n'accepte pas l'argument de l'avocate du demandeur qui veut que la décision des autorités responsables de ne pas procéder à une évaluation environnementale du niveau et du débit d'eau dans ces zones était déraisonnable.

[114]      La preuve au dossier me convainc que les faits permettaient aux autorités responsables d'adopter raisonnablement cette conclusion.

[115]      Premièrement, alors que KPC avait étudié la possibilité de réguler le débit du lac Kagiano au profit de la centrale hydro-électrique de Twin Falls, il n'y a eu aucun suivi. Le 2 mars 1998, le directeur-gérant de KPC, David G. DeMontmorency, a écrit à ses conseillers en environnement pour les informer que Kagiano Power avait avisé officiellement le MRNO que son projet de Twin Falls n'impliquait aucune activité visant le lac Kagiano. KPC est arrivé à cette décision parce que le MPO, qu'on avait informé de cette possibilité, avait fait savoir au MRNO et à KPC qu'une telle extension du projet exigerait que l'on redéfinisse la portée de l'évaluation pour y inclure le niveau de l'eau dans le lac Kagiano et le débit de la rivière Kagiano entre le lac et Twin Falls.

[116]      Deuxièmement, le MRNO a écrit à Dan Fairservice le 27 février 1998, au sujet de la possibilité que le barrage du lac Kagiano soit une partie importante du projet. Le MRNO déclarait qu'il n'était pas question que la propriété de l'emplacement du barrage Kagiano soit cédée, le barrage étant présentement contrôlé et entretenu par une autre société, situation qui devait rester stable. Le MRNO a donc conclu que le barrage ne faisait pas partie du projet qu'on lui avait présenté.

[117]      Troisièmement, le directeur-gérant de KPC a souscrit un affidavit en l'instance où il déclare sans équivoque que KPC n'a aucune intention de développer le barrage du lac Kagiano.

[118]      Quatrièmement, le témoin du MPO en l'instance, Edwin Debruyn, a déclaré que l'approbation du MPO portait sur une installation hydro-électrique au fil de l'eau, ce qui voulait dire qu'aucune accumulation d'eau n'était prévue au lac Kagiano.

[119]      Dans ses prétentions écrites, le demandeur fait état d'une erreur dans le rapport d'examen préalable au sujet de l'emplacement de la brèche déversante, qu'on dit devoir être située dans le chenal sud. Le demandeur soutient que la brèche déversante couvrira le chenal nord et le chenal sud de Twin Falls. Après étude du dossier, je considère que cette erreur est sans importance lorsqu'il s'agit du fond de l'évaluation environnementale entreprise par le MPO et le MAINC à Twin Falls.

     6)      La violation de l'alinéa 16(1)a)

[120]      L'alinéa 16(1)a) de la LCÉE porte notamment que tout examen préalable d'un projet doit inclure les effets environnementaux du projet, y compris ceux causés par les accidents ou défaillances pouvant en résulter, et les effets cumulatifs que sa réalisation, combinés à l'existence d'autres ouvrages ou à la réalisation d'autres projets ou activités, est susceptible de causer à l'environnement.

[121]      L'avocate du demandeur soutient que cette disposition exige que le MPO évalue les effets cumulatifs de l'exploitation du barrage du lac Kagiano dans le cadre de son évaluation du projet hydro-électrique de Twin Falls. L'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans Friends of West Country, précité, nous éclaire sur ce point.

[122]      L'analyse de M. le juge Rothstein quant à l'interprétation correcte de l'article 16 de la LCÉE est semblable à celle qu'il a faite en interprétant l'article 15. Il en va de même de sa conclusion. Il a notamment conclu que la portée des facteurs dont il y a lieu de tenir compte aux termes de l'alinéa 16(1)a) doit être déterminée par l'autorité responsable. Or, selon le paragraphe 16(3), cette détermination de la portée d'un projet constitue une décision relevant du pouvoir discrétionnaire de l'autorité responsable.

[123]      M. le juge Rothstein déclare que le processus d'interprétation de cet article comporte deux volets. D'abord, l'autorité responsable est tenue d'examiner l'application au projet faisant l'objet de l'évaluation de tout facteur prévu aux alinéas 16(1)a) à e). Chaque facteur doit être examiné. Il conclut que l'alinéa 16(1)a) oblige l'autorité responsable à tenir compte des effets susceptibles d'être causés à l'environnement par le projet défini conformément au paragraphe 15(1), combinés à l'existence d'autres ouvrages ou à la réalisation d'autres projets ou activités. Il définit le second volet comme impliquant l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui, en vertu du paragraphe 15(3), permet de déterminer la portée du facteur prévu à l'alinéa 16(1)a), c'est-à-dire les effets environnementaux cumulatifs qui doivent être étudiés. Il a conclu que logiquement, avant de décider des effets environnementaux qu'il convient d'étudier, il fallait déterminer quels étaient les autres projets ou activités qui devaient entrer en ligne de compte. Il termine en disant que la décision relative aux autres projets ou activités devant être inclus dans l'évaluation environnementale et à ceux devant en être exclus aux fins de l'évaluation des effets environnementaux cumulatifs prévus à l'alinéa 16(1)a) relève du pouvoir discrétionnaire conféré à l'autorité responsable.


[124]      Dans Friends of West Country, M. le juge Rothstein a conclu que la Garde côtière avait commis une erreur en ne se penchant pas sur des questions qui étaient à la fois hors de la portée des projets définis et hors du périmètre de la compétence fédérale. Selon lui, ce faisant la Garde côtière avait interprété les limites de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de façon plus étroite que n'autorisent les dispositions de l'article 16 et, par conséquent, elle avait refusé d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui était conféré.

[125]      En l'instance, le demandeur ne peut avoir gain de cause sur ce point. Un examen du dossier m'amène à conclure que l'approche adoptée par les autorités responsables est alignée sur l'approche définie par M. le juge Rothstein dans Friends of West Country, précité. Le facteur prévu à l'alinéa 16(1)a) a été pris en compte et les autorités responsables, dans l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 16(3), ont agi de façon raisonnable en concluant qu'il n'y aurait pas d'effets environnementaux cumulatifs de l'exploitation du barrage du lac Kagiano, puisque ce barrage n'était pas exploité depuis plusieurs années et qu'aucun changement à ce sujet n'était prévu.

[126]      Le demandeur soulève un autre point en s'appuyant sur l'article 16. Son avocate soutient que la jurisprudence établit le principe que les autorités responsables de délivrer une autorisation en vertu de l'article 20 doivent recueillir l'information nécessaire pour examiner toutes les implications environnementales liées à la délivrance de l'autorisation. Le demandeur déclare que le MPO et le MAINC ne se sont pas déchargés de cette responsabilité de deux façons : premièrement, ils n'auraient pas quantifié l'habitat du poisson qui sera détruit à Twin Falls en amont de ce qu'on a décrit comme la barrière infranchissable, y compris les aires de migration et d'alevinage, non plus que l'effet sur la capacité de production de la pêche suite à la mortalité entraînée par le passage du poisson dans la centrale. Le demandeur critique le fait que le MPO n'a pas entrepris sa propre enquête ou exigé que KPC lui fournisse de la documentation additionnelle à ce sujet.

[127]      En déclarant ceci, le défendeur s'attaque selon moi à la substance et à la qualité de l'évaluation conduite par les autorités responsables. Pour utiliser l'expression retenue par M. le juge MacKay dans Union of Nova Scotia Indians c. Canada (Procureur général), [1997] 1 C.F. 325, à la page 345 :

... ils n'ont pas procédé à une évaluation scientifique sérieuse et raisonnable du projet...

Selon M. le juge MacKay, un tel argument devait satisfaire à la norme de contrôle de la décision manifestement déraisonnable.

[128]      Dans Union of Nova Scotia Indians, précité, les demandeurs soutenaient que tous les détails des mesures d'atténuation devaient être examinés et réglés avant qu'on puisse accepter le rapport d'examen préalable. De plus, on prétendait que des informations essentielles, portant notamment sur la migration des poissons et l'habitat du poisson, n'avaient pas été recueillies. Quant aux divergences de vue des scientifiques, M. le juge MacKay déclare, à la page 348, que :

Il serait inusité qu'ils n'aient pas de vues divergentes, comme le révèle en l'espèce le dossier écrit.

[129]      Le juge MacKay a cité en l'approuvant l'extrait suivant de l'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans Alberta Wilderness Association c. Express Pipelines Ltd., [1996] A.C.F. no 1016, où la Cour décrit le processus que prévoit la LCÉE comme suit, au paragraphe 10 :

Aucun élément d'information portant sur les effets futurs probables d'un projet ne saurait jamais être complet ou exclure toutes les conséquences possibles . . . le principal critère établi par la loi est l' « importance » des effets environnementaux du projet. Il ne s'agit pas là d'un critère entièrement fixe ou objectif; il fait largement appel au jugement et à l'opinion de la commission. Des personnes raisonnables peuvent ne pas être du même avis--et ne le sont effectivement pas--sur la question de savoir si des éléments de preuve qui prévoient certaines répercussions à venir sont suffisants et exhaustifs et sur l'importance de ces répercussions sans soulever par le fait même des questions de droit.

[130]      Dans Union of Nova Scotia Indians c. Canada, précité, M. le juge MacKay déclare ceci à la page 349 :

La nature même de la décision signifie que, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, la Cour doit forcément s'en remettre au décisionnaire habilité par la loi, à moins d'être convaincue que la décision est manifestement déraisonnable, c'est-à-dire qu'elle ne peut se justifier logiquement au vu de l'ensemble des renseignements dont disposait le décisionnaire au moment où il a pris sa décision. Tant qu'il existe des renseignements sur lesquels la décision pouvait être logiquement fondée, la Cour n'interviendra pas.

[131]      Je suis convaincu que la documentation en possession des autorités responsables était telle qu'elles ont fait une évaluation valable des deux questions soulevées par le demandeur (l'habitat du poisson en amont de la barrière infranchissable et le passage du poisson dans les turbines).

[132]      Premièrement, le MPO était au courant de la présence du poisson, ainsi que de l'étendue de l'habitat du poisson et de l'habitat pour la production alimentaire en amont de la barrière infranchissable. Il en a tenu compte. Ces questions ont fait l'objet d'études environnementales en 1991 et 1993 et elles ont été examinées par le MPO, comme on peut le voir très clairement dans la longue lettre du 20 avril 1998 envoyée au demandeur par Karen Gray (pièce « N » à l'affidavit de Edwin Debruyn). Deuxièmement, le consultant en environnement de KPC, Andreas Stenzel, a souscrit un affidavit en l'instance. Ses conclusions sont énoncées aux pages 77 à 80 du dossier de la défenderesse Kagiano Power Corporation. Comme je l'ai déjà dit, M. Debruyn a aussi souscrit un affidavit sur ces questions pour le compte des ministres défendeurs. M. Debruyn et M. Stenzel ont tous deux été contre-interrogés sur leurs affidavits.

[133]      Ma lecture de ces contre-interrogatoires, ainsi que de l'affidavit et du contre-interrogatoire de l'expert du demandeur, Donald Speller, m'indique que les experts ont examiné la présence du poisson, l'habitat du poisson et l'habitat pour la production alimentaire dans la zone située entre la fuite des eaux et la brèche déversante. Les experts des défendeurs ont exprimé l'avis qu'au mieux cette zone était une aire marginale pour l'habitat et le poisson. Le point de vue M. Speller était différent, mais pas complètement. M. Speller a plusieurs fois déclaré que ses divergences de vue avec les experts des défendeurs étaient essentiellement des questions d'opinion et de jugement.

[134]      Comme M. le juge MacKay l'a fait dans Union of Nova Scotia Indians, précité, je conclus que la décision prise par les autorités responsables n'était pas déraisonnable et certainement pas manifestement déraisonnable.

     7)      La violation de l'article l'article 55 de la LCÉE

[135]      Le demandeur soutient qu'il y a eu violation de l'article 55 de la LCÉE pour deux motifs : premièrement, le MPO ne lui a pas fourni un accès facile comme l'exige la Loi et, deuxièmement, le MPO l'a obligé à faire une utilisation inappropriée de la Loi sur l'accès à l'information.

[136]      Au sujet de l'accès facile, le demandeur souligne les faits suivants : une première demande de documents présentée en février 1998; le fait que le demandeur n'a reçu la liste des documents au registre public qu'en mai 1998; et, finalement, le fait que les documents ne lui ont été livrés qu'en août 1998.

[137]      Dans Friends of West Country, précité, M. le juge Gibson a traité de la violation prétendue de l'article 55 de la LCÉE dans une affaire où un rapport d'examen préalable avait été préparé et des consultations publiques prévues par l'autorité responsable.

[138]      Dans l'affaire qui lui était soumise, le juge Gibson a noté que le registre public avait été établi à Sarnia (Ontario), alors que la demanderesse et ses membres résidaient au pied des montagnes Rocheuses, en Alberta. Un des représentants de la demanderesse a requis des copies de l'ensemble des documents se trouvant au registre. Le juge Gibson a constaté que des copies de certains documents ont été fournies, alors qu'on avait informé la demanderesse que les autres ne pouvaient l'être pour des motifs liés au coût et à la quantité de travail qu'aurait entraîné la photocopie de ces derniers. Il a alors été suggéré au représentant de la demanderesse de présenter une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir les documents. À la page 372 du Recueil, M. le juge Gibson conclut ceci :

Étant donné que les documents étaient demandés aux fins de la consultation publique prévue au paragraphe 18(3) de la LCEE et que la période allouée à cette fin était assez courte, la recommandation d'utiliser la procédure prévue par la Loi sur l'accès à l'information était totalement inappropriée et, plus important encore, non conforme à l'obligation existante en vertu de l'article 55 de la LCEE et aux engagements énoncés dans son préambule.

[139]      En appel, M. le juge Rothstein a confirmé l'avis de M. le juge Gibson sur ce point au nom de la Cour d'appel fédérale. Il a conclu que l'établissement et la tenue d'un registre public relevait du pouvoir discrétionnaire de l'autorité responsable, ajoutant que s'il convient effectivement de se préoccuper des coûts et que si aucun texte n'impose à ce registre public des conditions de proximité, le paragraphe 55(1) exige néanmoins que l'accès facile du public soit garanti. Il a conclu que si un registre public n'est pas établi et tenu à proximité de la zone géographique faisant l'objet de l'évaluation environnementale, il fallait prendre d'autres mesures raisonnables, tel que le recours au courrier électronique ou à la télécopie, ou encore faciliter l'accès du public à la documentation déposée au registre en en confiant en temps utile copie à un agent se trouvant à proximité des projets afin de satisfaire aux exigences d'accès du public prévues au paragraphe 55(1). À la page 290, il ajoute qu'il est tout à fait contraire au paragraphe 55(1) d'obliger le public à invoquer les procédures prévues par la Loi sur l'accès à l'information.

[140]      L'approche prise par les ministres face à cette question était assez défensive. Ils se sont appuyés sur l'article 57 de la LCÉE, intitulé « Contrôle judiciaire » , qui est rédigé comme suit :


57. An application for judicial review in connection with any matter under this Act shall be refused where the sole ground for relief established on the application is a defect in form or a technical irregularity.

57. Il n'est admis aucune demande de contrôle judiciaire liée à la présente loi et fondée uniquement sur un vice de forme ou une irrégularité technique.

Les ministres ont aussi renvoyé au paragraphe 18.1(5) de la Loi sur la Cour fédérale, qui est rédigé comme suit :



(5) Where the sole ground for relief established on an application for judicial review is a defect in form or a technical irregularity, the Trial Division may

(a) refuse the relief if it finds that no substantial wrong or miscarriage of justice has occurred; and

(b) in the case of a defect in form or a technical irregularity in a decision or order, make an order validating the decision or order, to have effect from such time and on such terms as it considers appropriate.

(5) La Section de première instance peut rejeter toute demande de contrôle judiciaire fondée uniquement sur un vice de forme si elle estime qu'en l'occurrence le vice n'entraîne aucun dommage important ni déni de justice et, le cas échéant, valider la décision ou l'ordonnance entachée du vice et donner effet à celle-ci selon les modalités de temps et autres qu'elle estime indiquées.

[141]      L'avocate des ministres soutient que même si notre Cour arrivait à la conclusion qu'il y a eu des irrégularités techniques dans le maintien du registre public, ces irrégularités n'ont causé aucun préjudice à M. Lavoie. L'avocate des ministres soutient qu'il y a eu un programme complet de consultations publiques sur ce projet depuis 1992; que M. Lavoie est impliqué dans ce processus de façon importante puisqu'il était un des premiers membres du Comité consultatif public; que le MPO a agi de façon raisonnable en décidant qu'il y avait eu assez de consultations publiques sur le projet et que toute autre consultation publique serait inutile et qu'elle constituerait un double emploi et un gaspillage.

[142]      Les ministres arrivent à la conclusion qu'une fois cette décision prise, savoir qu'il n'y avait pas lieu de continuer la consultation publique, la participation du demandeur, qu'il ait eu ou non accès aux documents contenus au registre public, n'était plus mandatée par la LCÉE et que le défaut prétendu consistant à ne pas lui avoir accordé un accès facile à ces documents ne colorait en aucune façon le processus de consultation publique tenue en vertu de la LCÉE.

[143]      L'avocate des ministres ajoute qu'après avoir reçu les documents demandés et consulté son avocate, M. Lavoie n'a toujours présenté aucune preuve démontrant qu'un examen des documents lui aurait permis de soulever des questions additionnelles quant à l'évaluation du projet. Elle souligne un extrait du contre-interrogatoire de M. Lavoie, où ce dernier admet ne pouvoir se souvenir si son accès aux documents qu'il avait demandés avait suscité de nouvelles inquiétudes.

[144]      Les circonstances de l'affaire dont je suis saisi diffèrent de celles qu'on trouve dans Friends of West Country, précité. Dans cette dernière affaire, on avait jugé qu'il y avait lieu de continuer la participation publique alors qu'ici on a décidé qu'il n'y avait pas lieu de continuer le processus étant donné le degré de participation du public qui avait eu lieu jusqu'alors. Contrairement à ce qu'on trouve dans Friends of West Country, on n'a pas soulevé ici de question sérieuse au sujet de l'emplacement du registre public ou de l'accès aux documents, ce qui semble avoir été au coeur des commentaires de M. le juge Rothstein dans Friends of West Country, précité. De plus, dans l'affaire dont je suis saisi, le MPO n'a pas obligé M. Lavoie à utiliser la voie de la Loi sur l'accès à l'information, contrairement à ce qui s'était produit dans Friends of West Country. En fait, c'est le MPO qui a cherché à obtenir le concours de l'AIPR avant la divulgation.

[145]      Dans un tel contexte, la plainte du demandeur se fonde surtout sur l'accès en temps utile plutôt que sur l'accès facile. Je constate que le Parlement a traité cet aspect au paragraphe 18(3). Si le MPO et le MAINC avaient jugé qu'il y avait lieu de continuer la consultation publique, le projet de Twin Falls n'aurait pu être approuvé avant qu'on ait donné un avis public, que le demandeur ait pu examiner les documents au registre public et présenté ses observations à leur égard, le tout avant que l'autorisation soit accordée. En d'autres mots, toute lacune dans la tenue du registre public aurait eu un impact sur le promoteur du projet et sur l'autorité responsable, mais aucune sur le demandeur. Toutefois, selon moi le lien qui doit exister entre le paragraphe 18(3) et l'article 55 n'est pas présent en l'instance.

[146]      Je prends note du point de vue du demandeur au sujet du paragraphe 55(4) de la LCÉE. Cette disposition prévoit que le registre public doit contenir tout document qui, de l'avis de l'autorité responsable, serait communiqué au public conformément à la Loi sur l'accès à l'information si une demande en ce sens était faite aux termes de celle-ci au moment où l'autorité responsable prend le contrôle du document. Le paragraphe 55(2) exige aussi que le registre public soit tenu par l'autorité responsable dès le début de l'évaluation environnementale et jusqu'à ce que le programme de suivi du projet soit terminé.

[147]      Le bon fonctionnement du registre public semble envisager la participation du coordonnateur de l'accès à l'information du Ministère avant qu'un document soit versé au registre public. Il s'agit toutefois ici d'une déduction, plutôt que d'une exigence précisée dans la loi. Même si le demandeur avait raison à ce sujet, il ne peut rien obtenir en conséquence puisque la procédure utilisée n'a fait que causer un retard dans la communication au moment où la participation du public avait été jugée ne plus être nécessaire.

[148]      Je veux ajouter autre chose. Tout manquement aux dispositions portant sur le registre public allégué en l'instance doit être pertinent dans le cadre de la procédure de la demande de contrôle judiciaire initiée par le demandeur. Si l'objectif de sa demande d'accès aux documents était de pouvoir les commenter en public, la violation de l'article 55 n'aurait aucun impact sur la demande de contrôle judiciaire. Si l'objectif visé par le demandeur était d'améliorer sa capacité, ou celle du CCP, de contrôler l'efficacité des mesures de suivi et d'indemnisation prévues par le MPO, il a eu un accès facile à tous les documents qu'il a demandés en vertu de l'article 55 à cette fin.

     8)      Le MAINC a-t-il enfreint l'alinéa 5(1)b) et l'article 11

[149]      L'alinéa 5(1)b) porte qu'une évaluation environnementale doit être effectuée avant qu'une autorité fédérale « accorde à un promoteur en vue de l'aider à mettre en oeuvre le projet en tout ou en partie un financement... » .

[150]      Le demandeur soutient que le 15 juillet 1998, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a informé le chef de la Première nation des Ojibways de Pic River que son ministère fournirait une subvention de 300 000 $ dans le cadre du projet de Twin Falls et que, le 15 août 1998, le ministre a émis un communiqué de presse annonçant cette décision. Le demandeur soutient que c'est seulement après que son avocate ait écrit au ministre pour l'informer que cette décision de financement aurait dû comprendre une évaluation environnementale que le projet a été inscrit au site web de l'index fédéral des évaluations environnementales. Quatre jours plus tard, savoir le 21 septembre 1998, l'examen préalable à la décision de financement prévue à la LCÉE était terminé.

[151]      À ce sujet, l'avocate des ministres admet que la Première nation de Pic River a été informée en juillet 1998 que le MAINC était disposé à fournir 300 000 $ dans le cadre du projet de Twin Falls, mais il ajoute qu'à ce moment-là toutes les parties savaient que le paiement était conditionnel à la tenue d'une évaluation environnementale, qui a été terminée le 21 septembre 1998. Ce n'est qu'en avril 1999 que les fonds ont été remis à la Première nation.

[152]      Roy Smallion a souscrit un affidavit au nom du MAINC. Il déclare que le ministre a communiqué par lettre au chef de la Première nation de Pic River le 15 juillet 1998, pour l'informer que le ministère [traduction] « était disposé à fournir 300 000 $ pour la réalisation du projet de Twin Falls » . Dans son affidavit, il souligne qu'avant qu'un tel financement soit effectivement remis à la Première nation, une évaluation environnementale des incidences du projet sur l'environnement local doit être faite par le MAINC. Son affidavit vient appuyer le point de vue qui veut que l'engagement du ministre ait été conditionnel à la tenue d'une évaluation environnementale. Même si le ministre n'avait pas posé la tenue d'une évaluation environnementale comme condition, celle-ci s'impose parce qu'elle est prévue par la loi. En d'autres mots, il s'agit d'une condition préalable prévue par la loi avant qu'on puisse faire un versement. En l'instance, l'évaluation a été faite avant que la somme soit versée.

[153]      Pour ces motifs, je conclus que le MAINC n'a pas enfreint les dispositions de la LCÉE.

DISPOSITIF

[154]      Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens.

     François Lemieux

    

     J U G E

OTTAWA (ONTARIO)

LE 31 JUILLET 2000

Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER




No DU GREFFE :              T-1586-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :      John R. Lavoie c. Le ministre de l'Environnement, le ministre des Pêches et des Océans, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Kagiano Power Corporation et la Première nation des Ojibways de Pic River

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATES DE L'AUDIENCE :      les 23 et 24 août 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE M. le juge Lemieux

EN DATE DU :              31 juillet 2000



ONT COMPARU

Mme Julie Abouchar                      POUR LE DEMANDEUR

Mme Tracy McManus                      POUR LES DÉFENDEURS (MINISTRES DE L'ENVIRONNEMENT, DES PÊCHES ET DES OCÉANS ET DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN)
M. John McGowan                      POUR LA DÉFENDERESSE (KAGIANO POWER CORPORATION)
M. Robert Edwards                      POUR LA DÉFENDERESSE (LA PREMIÈRE NATION DES OJIBWAYS DE PIC RIVER)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Birchall Northey                      POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)


M. Morris Rosenberg                      POUR LES DÉFENDEURS

Sous-procureur général du Canada              (MINISTRES DE

Ottawa (Ontario)                      L'ENVIRONNEMENT,

                             DES PÊCHES ET DES OCÉANS ET DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN)

Cassels, Brook & Blackwell                  POUR LA DÉFENDERESSE

Toronto (Ontario)                      (KAGIANO POWER CORPORATION)

Edwards, Carfagnini                      POUR LA DÉFENDERESSE

Thunder Bay (Ontario)                  (LA PREMIÈRE NATION DES OJIBWAYS DE PIC RIVER)
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