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                                                                                                                                 Date : 20050217

                                                                                                                    Dossier : IMM-4385-04

Référence : 2005 CF 241

ENTRE :

                                                                     ZHI QI NI

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD :

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue le 23 avril 2004 par la Section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la SAI), par laquelle celle­-ci a rejeté l'appel interjeté par le demandeur d'une décision rendue par un agent des visas. L'agent des visas avait décidé que le demandeur n'était pas admissible au parrainage de la demande de statut de résident permanent présentée par son épouse, Mme Liu, et sa fille au motif que son épouse n'était pas un parent en vertu de l'article 4 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement).

                                                                * * * * * * * * * *


[2]         Zhi Qi Ni (le demandeur) est arrivé au Canada en provenance de la République populaire de Chine (la RPC) en octobre 1989. Il est devenu résident permanent en 1998 et il a obtenu la citoyenneté en 2001. Il a divorcé de sa première épouse avec laquelle il a eu une fille en Chine en novembre 1995.

[3]         Mme Suyan Liu est née en RPC le 23 juillet 1960. Elle a épousé son premier mari, Yongquan Jiao, le 25 décembre 1983. Ils ont une fille qui se nomme Jie Jiao, laquelle est née le 12 octobre 1984. Mme Liu et M. Jiao ont divorcé le 5 janvier 2002.

[4]         Le demandeur a rencontré Mme Liu à l'hôtel Tai Dau à Anshan (Chine) en novembre 2001 alors qu'il s'était rendu à cet endroit pour recevoir des traitements quant à des maux de tête résultant d'un accident d'automobile et pour voir la plus grande statue de jade de Bouddha. Mme Liu était la gérante de l'hôtel.

[5]         Le demandeur et Mme Liu se sont mariés le 22 mars 2002. Le 10 juin 2002, le demandeur a présenté une demande de parrainage de la demande de résidence permanente de Mme Liu. Le 26 mai 2003, Mme Liu a été reçue en entrevue par un agent des visas à Beijing. L'agent des visas a refusé la demande de résidence permanente de Mme Liu au motif qu'elle n'était pas un « époux » au sens de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) et donc n'était pas un parent étant donné que son mariage n'était pas authentique.


[6]         La SAI a conclu que Mme Liu n'était pas un « parent » étant donné que le demandeur n'a pas établi selon la prépondérance des probabilités que son mariage était authentique, ni qu'il n'a pas été conclu pour une fin autre que l'acquisition d'un statut ou d'un privilège aux termes de la Loi. En rendant sa décision, la SAI a tenu compte du fait que le demandeur et Mme Liu n'ont pas donné une version crédible de l'origine de leur relation. En effet, il y avait des contradictions quant à la résidence du demandeur et quant à la date de la demande en mariage. Ils n'ont pas non plus fait mention du désir de Mme Liu de venir au Canada , tel que le prouvent ses deux demandes de visa antérieures.

                                                                * * * * * * * * * *

[7]         Les dispositions pertinentes du Règlement sont les suivantes :


   2. Les définitions qui suivent s'appliquent au présent règlement.

   2. The definitions in this section apply in these Regulations.

« mariage » S'agissant d'un mariage contracté à l'extérieur du Canada, mariage valide à la fois en vertu des lois du lieu où il a été contracté et des lois canadiennes.

"marriage", in respect of a marriage that took place outside Canada, means a marriage that is valid both under the laws of the jurisdiction where it took place and under Canadian law.

   4. Pour l'application du présent règlement, l'étranger n'est pas considéré comme étant l'époux, le conjoint de fait, le partenaire conjugal ou l'enfant adoptif d'une personne si le mariage, la relation des conjoints de fait ou des partenaires conjugaux ou l'adoption n'est pas authentique et vise principalement l'acquisition d'un statut ou d'un privilège aux termes de la Loi.

   4. For the purposes of these Regulations, no foreign national shall be considered a spouse, a common-law partner, a conjugal partner or an adopted child of a person if the marriage, common-law partnership, conjugal partnership or adoption is not genuine or was entered into primarily for the purpose of acquiring any status or privilege under the Act.


                                                                * * * * * * * * * *

[8]         La SAI a rejeté l'appel du demandeur parce que le mariage n'était pas authentique et qu'il a été principalement conclu dans le but de procurer un avantage à Mme Liu et sa fille quant à l'immigration. Les motifs qui suivent étayent la décision de la SAI :

-           Mme Liu avait fait part qu'elle était intéressée à venir au Canada juste avant de rencontrer le demandeur, ce qui prouve dans une certaine mesure qu'elle a pu être motivée, en partie du moins, par un désir de donner suite à son projet de venir au Canada grâce à une relation avec le demandeur.


-           Mme Liu ne possédait pas de renseignements généraux sur la situation du demandeur, alors qu'on s'attendrait du contraire de la part d'un époux dans le cadre d'une relation authentique. Il y avait également des contradictions entre les renseignements fournis par Mme Liu et ceux fournis par le demandeur quant à sa situation et quant au temps qu'ils sont censés avoir passé ensemble.

-           À l'audience, Mme Liu a continué à démontrer qu'elle savait que, vers novembre 2002, le demandeur avait emménagé dans une habitation louée sur la rue Balmoral. Si le demandeur et Mme Liu avaient régulièrement communiqué entre eux comme ils l'ont affirmé, le demandeur aurait informé Mme Liu qu'il déménageait ou qu'il avait déménagé dans un nouvel endroit.

-           Le demandeur a effectué de nombreux voyages en Chine depuis qu'il a rencontré et depuis qu'il a épousé Mme Liu. Toutefois la SAI n'a pas pu conclure que le but de ces voyages était qu'il voulait être avec Mme Liu, ni que, le cas échéant, il a forcément passé beaucoup de temps avec elle durant ses voyages.

-           En raison de l'emploi qu'elle occupait, il était difficile de croire que Mme Liu puisse s'absenter pendant de longues périodes de temps.

                                                                * * * * * * * * * *

[9]         Le demandeur croit que la SAI n'a pas tenu de nouvelle audience. Je ne souscris pas à cette opinion. Je crois que la SAI a tenu une nouvelle audience selon les règles, comme il a été établi dans l'arrêt Kahlon c. Canada (M.E.I) (1989), 7 Imm.L.R. (2d) 91 (C.A.F.). Il est clair que la SAI s'est fiée aux conclusions de l'agent des visas, toutefois, elle est arrivée à sa décision en se fiant également aux autres éléments de preuve dont elle a été saisie, notamment les éléments de preuve présentés par le demandeur.


[10]       De plus, la SAI est un tribunal spécialisé qui est mesure d'apprécier les faits et sa décision ne devrait pas être modifiée par la Cour à moins qu'elle ne soit manifestement déraisonnable (voir Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247). LA SAI a justifié clairement sa décision et il y a des éléments de preuve importants qui étayent d'une manière générale ses conclusions.

[11]       Il incombe au demandeur de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa femme peut être considérée comme étant son épouse parce que son mariage est authentique ou qu'il a été principalement conclu pour un motif autre que l'obtention d'un statut ou d'un privilège en vertu de la Loi. Il n'est pas déraisonnable de conclure que le demandeur ne s'est pas acquitté de ce fardeau. Par exemple, malgré de nombreux voyages en Chine, comme le révèle son passeport, le reste de la preuve indique l'existence d'une relation dans laquelle les parties ne sont pas parfaitement au courant de leurs affaires réciproques, alors que ce devrait être normalement le cas lorsque l'on parle d'un couple marié. L'épouse du demandeur ne savait pas que le demandeur avait déménagé, mais elle a malgré tout affirmé qu'ils étaient en communication constante. De plus, il n'était pas déraisonnable que la SAI conclut qu'une personne qui, comme l'épouse du demandeur, gère un hôtel en vertu d'un contrat ne puisse s'absenter pendant de longues périodes de temps et, par conséquent, la conclusion qu'il n'est pas crédible qu'elle ait pu s'absenter pendant deux longues périodes de temps en un an est raisonnable.


[12]       Le demandeur fait également valoir que la SAI a commis une erreur de droit en imposant l'exigence de la preuve qu'un mariage authentique se « poursuit toujours » . L'expression « se poursuit » ne figure pas dans l'article 4 du Règlement et le demandeur prétend que la signification du mot « authentique » qui figure à l'article 4 du Règlement pourrait signifier « légal » , ce qui est le cas de leur mariage. La légalité du mariage du demandeur n'est pas contestée, c'est son « authenticité » qui est mise en doute. Je crois que l'argument du défendeur quant à l'interprétation de la signification du mot « authentique » est plus convaincant. Le critère mentionné à l'article 4 du Règlement ne peut être appliqué qu'à un mariage dont la définition figure à l'article 2 du Règlement. Par conséquent, le critère mentionné à l'article 4 ne s'applique qu'à ce qui a déjà été jugé comme étant un mariage légitime en vertu de l'article 2 et l'interprétation du mot « authentique » comme signifiant « légal » rendrait redondant l'article 4 du Règlement. La SAI a bien examiné l'authenticité du mariage en se fondant sur les éléments de preuve de la relation existant entre le demandeur et Mme Liu et elle a conclu que le mariage n'était pas authentique.

[13]       Les conclusions de la SAI n'étaient pas irrationnelles compte tenu des éléments de preuve dont elle était saisie et, pour les motifs susmentionnés, je rejette la demande de contrôle judiciaire.

                                                                                                                                   _ Yvon Pinard _                      

                                                                                                                                                     Juge                               

OTTAWA (ONTARIO)

Le 17 février 2005

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-4385-04

INTITULÉ :                                                    ZHI QI NI

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                              VANCOUVER (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 18 JANVIER 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                                   LE 17 FÉVRIER 2005

COMPARUTIONS :

Dennis G. McCrea                                            POUR LE DEMANDEUR

Benton J. Mischuk                                             POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McCrea & Associates                                       POUR LE DEMANDEUR

Vancouver (C.-B.)

John H. Sims, c.r,                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


Date : 20050217

Dossier : IMM-4385-04

Ottawa (Ontario), le 17 février 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PINARD

ENTRE :

                                                                     ZHI QI NI

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                                ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue le 23 avril 2004 par la Section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la SAI), par laquelle celle-ci a rejeté l'appel interjeté par le demandeur d'une décision rendue par un agent des visas qui avait décidé que le demandeur n'était pas admissible au parrainage de la demande de statut de résident permanent présentée par son épouse, Mme Suyan Liu, et sa fille, au motif que son épouse n'était pas un parent en vertu de l'article 4 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 est rejetée.

                                                                                                                                   _ Yvon Pinard _                      

                                                                                                                                                     Juge                              

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.

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