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Date : 20001101


Dossier : IMM-1483-00

Entre :

     RAJU SINGH SETHI

     Partie demanderesse

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     Partie défenderesse



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE



LE JUGE TREMBLAY-LAMER:


[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision de la section du statut du réfugié de la Commission de l'immigration et du statut du réfugié ("Section du statut"), selon laquelle le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention.

[2]      Le demandeur est de citoyenneté indienne. Au soutien de sa revendication, il allègue avoir une crainte raisonnable de persécution en raison de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques.

[3]      Le demandeur allègue avoir été détenu illégalement, torturé et menacé de mort par la police pour sa participation présumée au groupe AISSF.

[4]      La Section du statut a rejeté la revendication au motif que celui-ci n'était pas crédible.

[5]      Il est certain que le tribunal a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage et de tirer les inférences qui s'imposent1. De plus, comme le souligne le procureur du défendeur, il ne fait aucun doute que le tribunal n'a pas à commenter toute la preuve produite au dossier.

[6]      Toutefois, lorsqu'un document est particulier au demandeur et qu'il appuie l'élément central de sa revendication, le tribunal ne peut l'écarter sans en donner les motifs.

[7]      En l'espèce, le tribunal ne fait aucune mention du rapport médical déposé en preuve. Comme dans l'affaire Kouassi2, je suis d'avis que le tribunal devait expliquer pourquoi il ne donnait aucun poids à un rapport médical détaillé qui corroborait, du moins en partie, les faits au coeur de la revendication du demandeur, plus particulièrement les multiples cicatrices qui peuvent être compatibles avec ses allégations de torture:

De plus, dans ses motifs le tribunal ne fait aucune référence au rapport médical déposé en preuve. Ce rapport est daté du 16 juillet 1996 et fut préparé par le docteur Pierre Dongier qui a examiné le requérant ici au Canada. Le rapport corrobore jusqu'à un certain point les allégations du requérant. En effet, le docteur Dongier déclare que le requérant « présente les marques physiques, ainsi que des symptômes psychologiques compatibles avec sa description des violences qu'il aurait subies » .
Bien que le tribunal n'avait pas à commenter toute la preuve au dossier il devait à mon avis traiter de ce rapport et expliquer pourquoi il ne lui attribuait pas de poids. Comme l'affirmait le juge Gibson dans Atwal c. Canada (Secretary of State):
     It is trite to say that a Tribunal is not obliged to refer in its reasons for decision to all of the evidence that was before it. The fact that a Tribunal fails to do so does not, in ordinary circumstances give rise to a conclusion that the Tribunal has failed to take into account all of the evidence that is before it. But I conclude that that principle does not apply to a failure to make reference to a case-specific document that is evidence directly relevant to the central issue addressed in the Tribunal's decision.3

[8]      De même, dans Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'immigration)4 le juge Evans précise la nature de cette obligation du tribunal: « l'obligation de fournir une explication augmente en fonction de la pertinence de la preuve en question au regard des faits contestés. » 5

[9]      Cette erreur est suffisamment sérieuse pour vicier la décision du tribunal. En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision du tribunal est annulée et le dossier est retourné à un autre panel pour qu'il procède à un nouvel examen.


     « Danièle Tremblay-Lamer »

                                     JUGE


OTTAWA (ONTARIO)

Le 1er novembre 2000

__________________

1      Aguebor c. M.E.I. (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.).

2      Kouassi c. M.C.I. (le 24 août 1998), IMM-3871-97 (C.F. 1ère inst.).

3      Ibid. aux para. 13-14.

4      (Le 6 octobre 1998) IMM-596-98 (C.F. 1ère inst.).

5      Ibid. au para 17.

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