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Date : 20050222

Dossier : IMM-1810-04

Référence : 2005 CF 269

Ottawa (Ontario), le 22 février 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MOSLEY                            

ENTRE :

MOHAMMEDSAIED LAVASANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                M. Lavasani est un citoyen iranien qui prétend craindre avec raison d'être persécuté en raison de ses opinions politiques antigouvernementaux. Il demande le contrôle judiciaire de la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié par laquelle celle-ci a conclu que sa demande n'était pas crédible. Pour les motifs qui suivent, je ne peux trouver aucune erreur pouvant faire l'objet d'un contrôle judiciaire dans cette décision et je rejetterai la demande.


[2]                La question qui m'est soumise consiste à savoir si la Commission a omis d'examiner l'ensemble des éléments de preuve.

[3]                En 1990, M. Lavasani a été arrêté pour avoir donné une fête au cours de laquelle des boissons alcooliques ont été servies. Il a été libéré en échange de la promesse de ne plus recommencer. En 1998, il a été détenu et interrogé pour avoir acheté des journaux antigouvernementaux à un kiosque de voie publique pour ses collègues de travail. Une fois de plus, il a été libéré après avoir s'être engagé par écrit à ne plus participer à des activités antigouvernementales et à faire rapport lorsqu'on lui demanderait. Aucun de ces événements n'a été mis en doute par la Commission.

[4]                M. Lavasani affirme que, le 13 juin 2003, il a accepté d'aller reconduire en voiture ses deux filles à une manifestation qui avait lieu à l'université. Il prétend qu'il a été pris dans un embouteillage causé par la manifestation à environ trois kilomètres du lieu de celle­-ci. Il est demeuré là pendant environ trois heures, puis il s'est résigné et il est retourné à la maison. Il a vu des Gardiens de la révolution en train de photographier des personnes ainsi que des plaques d'immatriculation.


[5]                Avant cet événement, M. Lavasani avait présenté une demande de visa pour venir visiter son frère au Canada. Il a quitté l'Iran deux semaines après la manifestation. Il était déjà venu en visite au Canada en 2001 et était retourné en Iran au bout de 45 jours. Il affirme qu'il a appris le 10 juillet, alors qu'il se trouvait au Canada, que les gardiens de la révolution s'étaient rendus chez lui car ils étaient à sa recherche. Il prétend qu'un certain nombre de ses amis qui avaient également déjà reçu deux avertissements n'avaient pas encore été libérés à la suite de leurs arrestations pour avoir participé à la manifestation. Il a présenté une demande d'asile le jour suivant.

[6]                La Commission a relevé des contradictions entre le Formulaire de renseignements personnels (FRP) de M. Lavasani et son témoignage à l'audience quant à la description qu'il a faite de la manifestation. La Commission a conclu que, dans son FRP, le demandeur laissait entendre qu'il avait assisté à la manifestation et qu'il avait modifié son récit lorsqu'il a réalisé qu'il ne pouvait pas donner de réponses crédibles quant à ce qui s'était passé lors de la manifestation.

[7]                La Commission a conclu que le demandeur n'avait pas donné d'explications satisfaisantes quant à la différence, entre son témoignage et son récit, quant à son degré de participation à la manifestation. M. Lavasani prétend que les motifs de la Commission quant à cette conclusion sont insuffisants car ils n'étaient pas clairs et non équivoques : Hilo c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 15 Imm. L.R. (2d) 199 (C.A.F.).

[8]                Le défendeur prétend que, dans ses motifs, la Commission avait clairement précisé pourquoi elle avait rejeté son témoignage quant à la manifestation. Elle n'a pas cru ses explications et il ne fait aucun doute quant à la raison pour laquelle elle a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité : Hilo, précité; Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.). De plus, le demandeur ne démontre pas en quoi la Commission a mal interprété sa preuve quant à la date à laquelle il a présenté sa demande de visa. La Commission n'était pas tenue d'accepter l'explication quant à l'incohérence : Huang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 213 F.T.R. 14 (1re inst.).

[9]                Deuxièmement, la Commission a conclu qu'il est « invraisemblable que les autorités iraient jusqu'à repérer les voitures, parmi des centaines, sinon des milliers, de voitures bloquées dans un embouteillage de trois kilomètres de long. Ce serait un motif bien faible pour relier des personnes dans un embouteillage à la manifestation des étudiants » .

[10]            M. Lavasani prétend que son compte rendu du comportement des gardiens de la révolution est compatible avec la preuve documentaire à laquelle la Commission n'a pas renvoyé et dans laquelle il est fait mention de l'existence de mesures de sécurité accablantes en Iran et de jusqu'à quel point les autorités peuvent aller afin d'éliminer la dissidence. Le défendeur présume que la preuve documentaire a été examinée et que la Commission n'était pas tenue d'y faire renvoi dans ses motifs.

[11]            Troisièmement, la Commission a tiré une inférence négative du fait que M. Lavasani a mentionné dans son récit du FRP qu'il avait quitté l'Iran dans la peur alors qu'il a mentionné à l'audience, alors qu'il est devenu apparent qu'il avait présenté la demande de visa bien avant la tenue de la manifestation, qu'il s'était mis à craindre de retourner en Iran qu'après son arrivée au Canada. À l'audience, M. Lavasani a prétendu qu'il y avait dû y avoir une erreur dans la traduction du FRP bien qu'on lui ait lu la traduction avant qu'il ne signe et qu'il atteste de son exactitude au début de l'audience. Il prétend que cette explication était raisonnable et aurait dû être acceptée par la Commission. Le défendeur prétend que la Commission pouvait conclure comme elle l'a fait, compte tenu de la preuve qui lui a été soumise.

[12]            Enfin, la Commission a relevé une légère contradiction entre le récit du FRP, les notes prises au point d'entrée et l'audience. M. Lavasani n'a pas été clair quant à savoir s'il avait appris de sa femme ou de ses filles, qu'il était en danger. La Commission a conclu qu'il n'avait pas vraiment décrit ce qu'il avait vécu et que c'était pour cette raison qu'il avait donné des versions différentes des événements dans les notes du PDE et dans le récit.

[13]            Les conclusions de fait tirées par la Commission ne peuvent faire l'objet d'un contrôle judiciaire que si elles sont erronées et que si elles ont été tirées de façon abusive et arbitraire ou sans que l'on tienne compte des éléments de preuve, c'est-à-dire selon la norme de la décision manifestement déraisonnable : Liang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 1904.


[14]            Selon moi, la Commission était fondée de conclure comme elle l'a fait compte tenu des éléments de preuve dont elle était saisie et sa conclusion n'était pas manifestement déraisonnable.

[15]            Aucune question de portée générale n'a été proposée pour la certification et aucune ne sera certifiée.

                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n'est certifiée.

« Richard G. Mosley »

   Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                        IMM-1810-04

INTITULÉ :                                                       MOHAMMEDSAIED LAVASANI

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                             

LIEU DE L'AUDIENCE :                                 TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                               LE 16 FÉVRIER 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                       LE JUGE MOSLEY

DATE DES MOTIFS :                                      LE 22 FÉVRIER 2005

COMPARUTIONS :

Christina Gural                                                      POUR LE DEMANDEUR    

Matina Karvellas                                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Christina Gural                                                      POUR LE DEMANDEUR

Gertler & Associates

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)


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