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     IMM-4839-93

ENTRE

     PAUL KOFI OSEI et DORA JUBIN,

     requérants,

     et

     LE SECRÉTAIRE D'ÉTAT DU CANADA,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE REED

     La présente demande de contrôle judiciaire a été entendue le 30 juin 1994. Les motifs ont été prononcés le 14 juillet 1994 ainsi qu'une ordonnance décrétant l'ajournement de la décision définitive relative à cette demande en attendant que la Cour d'appel se soit prononcée sur une question de droit qui n'était pas réglée à l'époque.

     La nature du critère à utiliser pour évaluer les changements survenus dans la situation d'un pays dans le contexte d'une revendication de statut de réfugié n'était pas clairement établie à l'époque. Si le critère approprié était l'analyse des trois éléments énumérés dans l'ouvrage du professeur Hathaway et qu'il fallait que l'organisme se prononce sur chacun de ces trois éléments, il aurait fallu alors annuler la décision de la Commission parce qu'elle n'avait pas procédé à cette analyse. Par contre, si selon le critère applicable, la Commission était uniquement tenue d'apprécier si les changements justifiaient dans les faits la conclusion qu'un des fondements objectifs de la revendication du requérant avait disparu, il aurait fallu adopter une autre méthode pour l'examen de la décision de la Commission. La Cour d'appel a, le 28 avril 1997, rendu une décision dans le dossier IMM-2057-93 (A-267-94), que j'avais mentionné dans mon ordonnance du 14 juillet 1994. En fait, la question avait été déjà réglée par la décision prononcée dans l'affaire Yusuf c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1995), 179 N.R. 11 (C.A.F.). La deuxième solution décrite précédemment a été adoptée comme le critère approprié.

     J'examine donc la décision de la Commission en fonction de ce critère. L'avocat des requérants soutient que les éléments de preuve présentés à la Commission ne pouvaient justifier la conclusion à laquelle celle-ci est arrivée. Ils soutiennent que s'il existait des éléments indiquant que le système des tribunaux publics (Public Tribunals) devait être aboli, cela n'avait pas encore été fait et que l'amnistie générale qui avait été déclarée était une amnistie partielle qui ne s'appliquait pas aux requérants. Pour ce qui est des éléments de preuve présentés à la Commission, je n'estime pas qu'ils ne peuvent justifier la décision de la Commission. Le système des tribunaux publics n'avait certes pas encore été aboli mais son abolition devait prendre effet à une date précise calculée à partir de la date de l'adoption de la nouvelle constitution, constitution qui avait été adoptée.

     L'argument du requérant concernant la nature partielle de l'amnistie est relié à un mandat d'arrestation le concernant qui se trouve au dossier. Son avocat soutient que la Commission n'en a pas tenu compte. La Commission n'en fait pas mention dans ses motifs. Le document en question énonce que le requérant est recherché dans le cadre d'enquêtes sur des activités séditieuses. Il ressort des documents que les opposants politiques ont bénéficié d'une amnistie mais pas les personnes déclarées coupables de subversion ou de complot en vue de renverser le gouvernement. Le requérant a témoigné qu'il était persécuté parce qu'il avait été le secrétaire financier régional intérimaire du Movement of Freedom and Justice ("MFJ") et qu'il avait été arrêté parce qu'il distribuait des tracts antigouvernementaux. La Commission a noté que le MFJ était maintenant un organisme légal dont étaient issus de nombreux partis politiques, qu'on avait pris des mesures pour aménager la liberté de la presse, qu'on avait mis sur pied un organisme de surveillance des droits de la personne, que des mesures avaient été prises pour empêcher les détentions arbitraires d'une durée supérieure à 14 jours.

     Je ne suis pas d'avis que l'omission de mentionner le document qui semble indiquer que le requérant a exercé des activités séditieuses constitue une erreur. Les commissions ne sont pas tenues de mentionner tous les éléments de preuve qui leur sont présentés. La Commission savait fort bien que le régime démocratique du Ghana était encore fragile mais elle était absolument certaine que les changements qui s'étaient produits avaient fait disparaître l'élément objectif de la crainte de persécution des requérants. La Commission a apprécié les motifs pour lesquels le requérant déclarait craindre d'être persécuté dans le contexte de la situation actuelle et future du Ghana. Elle a conclu : "nous ne pensons pas que le gouvernement du Ghana serait le moindrement tenté de prendre des mesures contre ce demandeur de statut". Cette conclusion s'appuie sur les éléments de preuve présentés.

     L'avocat soutient que dans le cas de la requérante, la Commission a lié l'issue de sa réclamation à celle de son époux et qu'elle ne l'a pas évaluée de façon indépendante. Selon moi, ni le dossier, ni la décision de la Commission ne justifient cet argument. La Commission a évalué la revendication de la requérante sous deux aspects : dans la mesure où elle s'appuyait sur la revendication de son époux, elle n'était pas fondée parce que celle de son époux ne l'était pas; dans la mesure où elle s'appuyait sur des faits la concernant personnellement ainsi que sa participation, ou plutôt son absence de participation, au Women's Movement du 31 décembre, il manquait l'élément objectif.

     Pour les présents motifs, la demande est rejetée.

     (Signé) "B. Reed"

     Juge

Le 13 juin 1997

Vancouver (Colombie-Britannique)

Traduction certifiée conforme :     
                     F. Blais, LL.L.

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

INTITULÉ DE LA CAUSE :      PAUL KOFI OSEI et DORA JUBIN

                     et

                     LE SECRÉTAIRE D'ÉTAT DU CANADA

No DU GREFFE :              IMM-4839-93

REQUÊTE TRAITÉE PAR ÉCRIT SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE Madame le juge Reed en date du 13 juin 1997

OBSERVATIONS ÉCRITES PRÉSENTÉES PAR :

Marc J. Herman                          pour les requérants

Diane Dagenais                          pour l'intimé

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Marc J. Herman

Weston (Ontario)                          pour les requérants

George Thomson

Sous-procureur général du Canada                  pour l'intimé

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