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Date : 20041007

Dossier : IMM-5277-03

Référence : 2004 CF 1378

Ottawa (Ontario), le 7 octobre 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE von FINCKENSTEIN

ENTRE :

                                                  POPOL MAYOMBO MAYOMBO

                                                                                                                                           demandeur

                                                                             et

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

(Prononcés à l'audience, puis mis par écrit pour plus de précision et de clarté.)

[1]                Le demandeur est un citoyen de la République démocratique du Congo (le Congo) âgé de 20 ans. Il prétend craindre avec raison d'être persécuté en raison de ses opinions politiques. Il prétend également que son renvoi au Congo l'expose au risque d'être soumis à la torture ou à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités.


[2]                Le demandeur maintient que sa famille et lui ont [traduction] « eu des problèmes » parce que sa mère est d'origine tutsie. Il prétend que des soldats de Laurent Kabila, qui dirigeait alors le Congo, l'ont kidnappé à Kitona et l'ont obligé à servir comme enfant-soldat. En septembre 1998, les soldats l'ont amené à Kisangani, où ils se sont joints aux rebelles. Le demandeur affirme que l'armée de Kabila l'a libéré parce qu'il lui [traduction] « était inutile » .

[3]                Le 14 mai 2002, les soldats ont pris le contrôle de la station de radio nationale à Kisangani et ont incité la population à la révolte. Le demandeur soutient que c'est à ce moment qu'il a entrepris ses démarches en vue de fuir son pays, ce qui l'a finalement amené au Canada.

[4]                La Commission a rejeté sa demande d'asile, concluant qu'il n'avait pas établi son identité et que son témoignage n'était pas crédible.

[5]                Les deux parties conviennent que la norme de contrôle applicable est la décision manifestement déraisonnable. Voir Conkova c. Canada (M.C.I.), [2000] A.C.F. no 300; Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.).

[6]                Le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en ne tenant pas compte des motifs de la race et de l'appartenance à un groupe social. Cet argument ne peut être retenu. Vu que la Commission n'était pas convaincue de l'identité du demandeur, il s'ensuit logiquement qu'elle ne pouvait statuer sur ses allégations de persécution du fait de sa race ou de son appartenance à un groupe social.

[7]                Le demandeur soutient également que la Commission n'a pas donné de motifs suffisants à l'appui de sa décision de rejeter le certificat de naissance qu'on avait obtenu pour lui. Le demandeur affirme que la Commission aurait dû être plus précise dans les motifs qu'elle a fournis à l'appui de sa conclusion suivant laquelle cette partie du récit du demandeur était non plausible. Les conclusions de la Commission sont les suivantes :

Invité à expliquer comment il avait obtenu l'acte de naissance qui aurait également été émis à l'origine en 1994, il répond que les pères lui ont remis cette attestation à Kisangani. Cependant, il allègue ne pas avoir songé leur demander comment ils l'avaient obtenu, ce que le tribunal considère invraisemblable.

Le demandeur n'a pu expliquer comment il avait voyagé avec deux documents d'identité sous deux noms différents (passeport et acte de naissance) ni pourquoi l'acte de naissance avait été émis le 7 mai 2002 soit une semaine avant la décision du demandeur de quitter le pays [...] [Non souligné dans l'original.]

[8]                Le raisonnement aurait pu être exprimé plus clairement, mais il ressort nettement de ce passage que la Commission n'a pas reconnu l'authenticité du certificat en raison de la date de son authentification et du fait qu'un nom différent figurait sur le passeport.


[9]                La preuve documentaire dont était saisie la Commission indiquait qu'on avait pris le contrôle de la station de radio à 6 h, mais que le gouvernement en avait repris le contrôle à 8 h. Dans sa décision, la Commission affirme que le demandeur a écrit dans son Formulaire de renseignements personnels (le FRP) que, tôt dans l'après-midi, il avait appris que les soldats avaient pris le contrôle de la station de radio et que c'était à ce moment qu'il s'était enfui. Cette conclusion mine la crédibilité du demandeur parce que la situation était revenue à la normale dans l'après-midi. Le demandeur affirme qu'il n'a pas précisé le moment où on avait pris le contrôle de la station de radio dans son FRP et que la Commission a commis une erreur lorsqu'elle a tiré cette conclusion. La Commission a bel et bien commis une erreur, mais il s'agit d'une erreur quant à la source et non au contenu. Le dossier du tribunal, à la page 398, montre que le demandeur a témoigné avoir appris la nouvelle de la prise de contrôle (mais non pas celle de la reprise de contrôle par le gouvernement) dans l'après-midi. Cette erreur, quant à la source et non au contenu, ne constitue pas une erreur justifiant l'annulation de la décision.

[10]            Enfin, le demandeur soutient que la Commission n'était saisie d'aucun élément de preuve lui permettant de conclure qu'il était non plausible que les soldats l'aient libéré parce qu'il leur [traduction] « était inutile » . La preuve documentaire au dossier est truffée de récits de recrutements forcés et de recrutements d'enfants et de jeunes adultes tant par les rebelles que par l'armée congolaise. La Commission, bien qu'elle n'ait pas fait référence à ces éléments de preuve, avait des motifs de tirer les conclusions qu'elle a tirées relativement à la plausibilité.

[11]            Pour ces motifs, la présente demande ne peut être accueillie.

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente demande soit rejetée.

« K. von Finckenstein »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


                                     COUR FÉDÉRALE

                     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                    IMM-5277-03

INTITULÉ :                                                     POPOL MAYOMBO MAYOMBO

c.

M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                             OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 6 OCTOBRE 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LE JUGE von FINCKENSTEIN

DATE DES MOTIFS :                                  LE 7 OCTOBRE 2004

COMPARUTIONS :

Rezaur Rahman                                             POUR LE DEMANDEUR

Derek Rasmussen                                         POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rezaur Rahman                                             POUR LE DEMANDEUR

Ottawa (Ontario)

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada                                                            

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