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     Date : 19990106

     Dossier : T-996-98

Ottawa (Ontario), le 6 janvier 1999

En présence de monsieur le juge Pinard

Entre :

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     appelant,

     - et -

     CHEN DAI,

     intimé.

     ORDONNANCE

     L'appel est accueilli. La décision que la juge de la citoyenneté Marguerite Ford a rendue le 18 mars 1998 est annulée parce que l'intimé ne satisfaisait pas aux conditions de résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29.

                                     YVON PINARD

                                                                  JUGE

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

     Date : 19990106

     Dossier : T-996-98

Entre :

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     appelant,

     - et -

     CHEN DAI,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]      Il s'agit d'un appel interjeté par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration en application du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29 (la Loi), contre la décision de la juge de la citoyenneté, Marguerite Ford, rendue le 18 mars 1998 et communiquée par lettre à l'intimé à la même date. L'appelant prétend que l'intimé n'a pas accumulé le nombre de jours de résidence prescrit par l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

[2]      L'intimé, un citoyen de Taïwan, est né en République populaire de Chine le 13 juillet 1946. Le 13 mars 1994, il a obtenu le statut de résident permanent au Canada. Pendant les quatre ans qui ont précédé sa demande de citoyenneté canadienne présentée le 25 juillet 1997, l'intimé a été physiquement présent au Canada pendant seulement 191 jours; il lui manquait donc 904 jours pour atteindre le minimum requis de 1 095 jours (trois ans de résidence sur quatre).

[3]      L'alinéa 5(1)c) de la Loi prévoit les conditions de résidence énoncées ci-dessous :

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

[...]

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

     (i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and
     (ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

     [Emphasis added.]


5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

[...]

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante:

     (i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent;
     (ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent.

     [Non souligné dans l'original.]

[4]      Dans Re Pourghasemi (1993), 19 Imm.L.R. (2d) 259, à la page 260, mon collègue le juge Muldoon énonce les objectifs sous-jacents à cette disposition :

         [...] vise à garantir que quiconque aspire au don précieux de la citoyenneté canadienne ait acquis, ou se soit vu obligé d'acquérir, au préalable la possibilité quotidienne de " se canadianiser ". Il le fait en côtoyant les Canadiens au centre commercial, au magasin d'alimentation du coin, à la bibliothèque, à la salle de concert, au garage de réparation d'automobiles, dans les buvettes, les cabarets, dans l'ascenseur, à l'église, à la synagogue, à la mosquée ou au temple - en un mot là où l'on peut rencontrer des Canadiens et parler avec eux - durant les trois années requises. Pendant cette période, le candidat à la citoyenneté peut observer la société canadienne telle qu'elle est, avec ses vertus, ses défauts, ses valeurs, ses dangers et ses libertés. Si le candidat ne passe pas par cet apprentissage, cela signifiera que la citoyenneté peut être accordée à quelqu'un qui est encore un étranger pour ce qui est de son vécu, de son degré d'adaptation sociale, et souvent de sa pensée et de sa conception des choses. Si donc le critère s'applique à l'égard de certains candidats à la citoyenneté, il doit s'appliquer à l'égard de tous. Et c'est ainsi qu'il a été appliqué par Mme le juge Reed dans Re Koo , T-20-92, 3 décembre 1992 [publié à (1992), 59 F.T.R. 27, 19 Imm. L.R. (2d) 1], encore que les faits de la cause ne fussent pas les mêmes.                 

(Voir aussi Re Chan (1998), 144 F.T.R. 117, et M.C.I. c. Kam Biu Ho (24 novembre 1998), T-19-98 (C.F. 1re inst.).)

[5]      En supposant que, suivant une interprétation appropriée de l'alinéa 5(1)c) de la Loi, il ne soit pas nécessaire que le demandeur de citoyenneté ait été physiquement présent au Canada pendant toute la durée des 1 095 jours de résidence requis lorsqu'il existe des circonstances spéciales et exceptionnelles, j'estime, cependant, que la présence réelle au Canada demeure le plus pertinent et le plus important facteur dont il faille tenir compte pour déterminer si une personne " réside " au Canada au sens de cette disposition. Comme je l'ai mentionné à de nombreuses reprises, une absence prolongée du Canada, quoique temporaire, au cours de cette période minimale de temps, comme c'est le cas en l'espèce, va à l'encontre de l'esprit de la Loi, qui permet déjà à une personne qui a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent de ne pas résider au Canada pendant une des quatre années qui précèdent la date de sa demande de citoyenneté.

[6]      En conséquence, en l'espèce, vu les absences prolongées de l'intimé du Canada, j'estime que la décision de la juge de la citoyenneté suivant laquelle l'intimé satisfaisait aux conditions de résidence prévues par la Loi est entièrement déraisonnable et qu'elle résulte d'une application erronée de l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

[7]      L'appel est donc accueilli et la décision que la juge de la citoyenneté Marguerite Ford a rendue le 18 mars 1998 est annulée parce qu'au moment où l'intimé a présenté sa demande de citoyenneté canadienne, il ne satisfaisait pas à la condition de résidence prévue à l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

                                     YVON PINARD
                                                              JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 6 janvier 1999

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-996-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :      Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
                     c. Chen Dai
LIEU DE L'AUDIENCE :          Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE :      Le 17 décembre 1998

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE

     MONSIEUR LE JUGE PINARD

     EN DATE DU 6 JANVIER 1999

ONT COMPARU :

Sandra E. Weafer                          pour le demandeur
Kathleen J. MacDonald                      pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général

du Canada

Ottawa (Ontario)                          pour le demandeur

Loh & Company

Vancouver (C.-B.)                          pour le défendeur
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