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     Date: 20000605

     Dossier: T-38-99

ENTRE :


THE ROYAL BANK OF SCOTLAND plc.

     demanderesse


et


LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES

AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « KIMISIS III »

ET MADONNA NAVIGATION (MALTA) LIMITED

     défendeurs


MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE

[1]      Le délai dans lequel peuvent être déposés les affidavits à l'appui d'une réclamation en l'espèce est expiré depuis quatorze mois. Le délai de production des documents relatifs aux réclamations qui ont été demandés par les autres parties et par les créanciers, tel qu'il a été prorogé, a expiré il y a près de six mois. La créancière Proios Maritime S.A. sollicite maintenant l'autorisation de déposer un document attestant la livraison au navire des approvisionnements nécessaires qu'elle a fournis, document que la demanderesse a expressément demandé il y a un an.

[2]      Dans l'affidavit présenté à l'appui de la requête visant à l'obtention de l'autorisation d'effectuer un dépôt tardif que l'avocat a fait sous serment, il est déclaré que l'avocat avait demandé à la créancière Proios, le 12 juillet 1999, des documents additionnels, dont le document en question, et que, le 13 juillet 1999, Proios a répondu qu'elle n'avait pas d'autres documents en sa possession. Puis, le 29 mai 2000, l'avocat a de nouveau demandé à Proios le document en question, un document qui pourrait bien avoir pour elle une importance cruciale; le lendemain, l'avocat a reçu par télécopie le document en question. Aucune explication n'a été donnée au sujet de la raison pour laquelle un document important n'aurait pas pu être découvert et fourni en temps opportun, comme un autre créancier l'avait demandé, de façon que tous les autres créanciers puissent dès le début apprécier la position qu'ils prenaient.

[3]      Dans la décision Bank of Scotland c. le Nel, [1999] 2 C.F. 417, j'ai refusé d'accorder à la Bank of Scotland l'autorisation de déposer un affidavit supplémentaire de réclamation, visant à faire augmenter le montant de la réclamation de la banque, pour le motif que la règle 492(2) dispose expressément que les réclamations doivent être déposées en temps opportun, comme il en est fait mention dans la décision rendue le 14 avril 1986 par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Banque nationale de Grèce S.A. c. Le Polar Paraguay, A-39-86. Dans l'arrêt Polar Paraguay, Monsieur le juge Mahoney a conclu que le juge de première instance avait commis une erreur en permettant à un créancier d'intervenir bien après l'expiration du délai imparti par la Cour dans une ordonnance rendue en vertu de la règle 1008(2) aux fins du dépôt des réclamations. Ces motifs sont brefs puisqu'ils sont simplement composés de deux paragraphes.

[4]      Dans la décision Nel, j'ai mentionné l'arrêt Feoso Oil Ltd. c. Le Sarla [1995] 3 C.F. 68 (C.A.), page 82, à l'appui de la thèse selon laquelle, dans une procédure sommaire, une partie doit présenter sa cause sous son meilleur jour en fournissant les éléments de preuve dont elle dispose. Dans l'affaire du Sarla, la procédure sommaire était analogue à une audience sommaire portant sur l'ordre de priorité établi dans le cadre de la vente d'un navire.

[5]      Dans la décision Nel, je me suis également demandé s'il y avait des circonstances particulières, conformément à la règle 55, qui dispenseraient de l'application de la règle 492(2), celle-ci faisant obstacle aux réclamations sur le produit de la vente d'un navire qui ne sont pas déposées en temps opportun :

     492.(2) Fin de non-recevoir -- Une fin de non-recevoir est opposée à toute réclamation qui n'est pas déposée dans un délai et de la manière prévus dans l'ordonnance rendue en vertu du paragraphe (1), et la Cour peut statuer sur les autres réclamations et répartir le produit de la vente entre les parties qui y ont droit sans tenir compte de la réclamation à laquelle une fin de non-recevoir a été opposée.

[6]      On m'a référé à une seconde décision rendue par Monsieur le juge Mahoney dans l'affaire Macoil Inc. c. Polar Paraguay, décision inédite rendue le 26 avril 1988 dans le dossier A-303-86. Monsieur le juge Mahoney avait changé d'idée depuis la première décision rendue deux ans plus tôt; en effet, il dit que, de l'avis de la Cour d'appel, « [...] le juge de première instance a commis une erreur en concluant qu'il n'était pas compétent pour proroger le délai fixé pour déposer les demandes à l'égard du produit de la vente d'un navire aux termes de la règle 1008(2) » , en faisant remarquer que la règle 3(1)c), soit la règle qui permettait alors à la Cour de proroger ou d'abréger un délai, s'appliquait également à la règle 1008(2). Je tiens à faire remarquer que les règles 8 et 492(2) actuelles correspondent aux anciennes règles 3(1)c) et 1008(2).

[7]      Dans l'arrêt Macoil c. Polar Paraguay, Monsieur le juge Mahoney a ajouté que des explications satisfaisantes doivent être données au sujet du retard :

     [...] Nous n'avons pas été convaincu qu'il serait convenable dans les circonstances de faire droit à la demande des appelantes en accordant une telle prorogation, et en rétablissant ainsi des demandes auxquelles une fin de non recevoir a été opposée. Leur report n'a tout simplement pas été justifié d'une manière satisfaisante. Elles connaissaient la directive et ne s'y sont pas conformées. Ce défaut n'a pas été expliqué.

Ce changement d'orientation, dans l'arrêt Macoil Inc. c. Polar Paraguay, est certes plus équitable que la règle stricte énoncée dans la décision Banque nationale de Grèce c. Polar Paraguay. Pourtant, en l'espèce, cette décision n'aide pas particulièrement Proios Maritime S.A., qui n'a pas expliqué pourquoi il n'avait pas été tenu compte du document, non seulement lorsque la réclamation initiale avait été préparée, mais aussi lors de recherches hâtives qui ont duré une nuit au mois de juillet 1999, alors que lors d'une recherche similaire ayant elle aussi duré une nuit, au mois de mai 2000, le document a été trouvé.

[8]      Étant donné que les parties cherchent depuis un certain temps à démêler leurs réclamations et les réclamations des autres personnes en vue de la tenue d'une audience sur l'ordre de priorité des réclamations, je ne suis pas convaincu qu'il serait convenable dans les circonstances de faire droit à la demande de Proios Maritime S.A., qui se rend maintenant compte que le document a pour elle de l'importance et qui découvre soudainement qu'elle a toujours eu le document en sa possession. Cela est injuste pour les autre parties. Cela va à l'encontre de l'idée selon laquelle la règle 492(2) vise à mener à bonne fin la présentation des réclamations, de façon que le produit de la vente du navire puisse être réparti dans un délai raisonnable et que l'on en arrive à un règlement juste, plus rapide et mois coûteux. Permettre tardivement la production de documents additionnels empêcherait d'en arriver à pareille fin.

[9]      Cela ne veut pas pour autant dire que l'on ne devrait jamais présenter de demande en vue de l'obtention de documents additionnels dans une procédure portant sur l'ordre de priorité des créanciers lors de la vente d'un navire, mais plutôt qu'il doit exister des circonstances spéciales à l'égard desquelles des explications complètes doivent être données.

ORDONNANCE :

     La requête visant au dépôt d'un affidavit complémentaire à l'appui de la réclamation est rejetée.

                             « John A. Hargrave »

                                 Protonotaire

le 5 juin 2000

Vancouver (Colombie-Britannique)

Traductioncertifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :      T-38-99

    

INTITULÉ DE LA CAUSE :      THE ROYAL BANK OF SCOTLAND plc.
     c.
     LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « KIMISIS III » ET MADONNA NAVIGATION (MALTA) LIMITED

LIEU DE L'AUDIENCE :      VANCOUVER (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :      le 5 juin 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du protonotaire John A. Hargrave en date du 5 juin 2000

ONT COMPARU :

Pauline Gardikiotis              POUR LA DEMANDERESSE

Chris Giaschi              POUR PROIOS MARITIME S.A., DÉFENDERESSE
Glenn Morgan              POUR TRAMP OIL & MARITIME LTD., DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Campney & Murphy

Vancouver (C.-B.)              POUR LA DEMANDERESSE

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