Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

        



Date : 20000815


Dossier : T-434-99

ENTRE:

     JEAN-MAURICE BELLAVANCE

     Demandeur

     - et -



     DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES DU CANADA

     Défenderesse



     MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE



LE JUGE BLAIS


[1]      Il s"agit d"une demande de contrôle judiciaire de la décision du commissaire Guy Giguère, en date du 5 février 1999 donnant droit au grief du demandeur mais refusant sa réintégration dans son ancien poste.

FAITS

[2]      Le demandeur était employé par la Commission de l"emploi et de l"immigration du Canada (CEIC) en février 1974.

[3]      En 1980, il commence à exploiter une épicerie-dépanneur et en 1984, il démarre un second dépanneur qui fait partie de la même compagnie, soit Les Entreprises J.M. Bellavance Ltée.

[4]      En 1984, il présente une déclaration de conflit d"intérêts à son employeur. Il fut informé en septembre 1984, que ses activités à titre de propriétaire des Entreprises J.M. Bellavance Ltée ne le placent pas en conflit d"intérêts.

[5]      En 1986, le demandeur signe une attestation comme quoi il a pris connaissance du Code de conduite de la Fonction publique et indique qu"il possède des biens mais qu"ils ne comportent aucun risque réel ou potentiel de conflit d"intérêts relatif à ses fonctions officielles.

[6]      En 1989, le demandeur décide de faire un changement dans la façon d"exploiter ses dépanneurs, en modifiant l"horaire de travail des employés et en adoptant la méthode du 7/7. Selon cette méthode, une fois que les employés se qualifiaient pour les fins de l"assurance-chômage, ils connaissaient un arrêt de travail de sept jours consécutifs pour pouvoir bénéficier de prestations d"assurance-chômage, i.e. une semaine travaillée et rémunérée, suivie d"une mise à pieds de sept jours couverte par l"assurance-chômage.

[7]      Le 6 janvier 1996, en entrant dans le CEIC, le demandeur aperçoit Madame Line Charette, une ancienne employée. Bien que Madame Blouin, un agent I, soit responsable du dossier de Madame Charette, le demandeur a décidé de s"en occuper lui-même. Il a pris les informations que la carte de Madame Charette contenait et les a inscrites au système. Quelques jours plus tard, l"ordinateur rejette ces inscriptions, en tant qu"erreur de traitement. C"est alors que Madame Blouin s"en aperçoit et informe leur superviseur, Monsieur Christian Fournier. Ce dernier demande alors des explications et reçoit comme réponse: "Fais donc ce que tu as à faire". Il importe de noter que le dossier de Madame Charette était inactif depuis une période de trois mois et il était contraire aux directives de le réactiver.

[8]      Monsieur Fournier est allé voir le directeur du CEIC, Monsieur Fortin qui lui a demandé de faire des vérifications plus approfondies.

[9]      Le demandeur n"a pas été sanctionné pour cet incident mais l"annexe au rapport d"évaluation du rendement mentionnait le dossier de Madame Charette.

[10]      Une enquête eut lieu ayant pour objet le demandeur à titre d"employeur en juillet 1996. Ayant découvert la méthode de 7/7 alors qu"il n"y avait pas un manque de travail, contrairement à ce qui figure sur les relevés d"emploi, le demandeur fut convoqué à une réunion à laquelle assistaient aussi Monsieur Fortin et Monsieur Sirois, l"enquêteur. Après avoir entendu les accusations contre lui, le demandeur a refusé d"en discuter. Monsieur Sirois aurait suggéré au demandeur de démissionner, ce que ce dernier a refusé de faire.

[11]      Monsieur Sirois a alors consulté une spécialiste en relations de travail au bureau de Montréal, Madame Legault, puis il a discuté avec Monsieur Gladu, sous-ministre adjoint, région du Québec, DRHC, de sa recommandation de suspendre le demandeur.

[12]      Le demandeur fut avisé de sa suspension par lettre en date du 24 juillet 1996 pour la période du 16 juillet au 26 août 1996. La lettre indiquait que le demandeur avait fait l"objet d"une enquête à titre d"employeur et que suffisamment de faits permettaient de conclure que son comportement allait à l"encontre du Code de conduite de DRHC et du Code de conduite régissant les conflits d"intérêts et l"après-mandat s"appliquant aux employés de la fonction publique.

[13]      Une enquête administrative fut entreprise par Monsieur Gagné, dont l"objet était le demandeur à titre d"employé. Cette enquête visait à déterminer si les allégations en matière de fraude, de conflit d"intérêts et de toutes autres infractions pouvant être découvertes durant l"enquête. Les dossiers de Rimouski ont révélé plusieurs anomalies dans les dossiers des ex-employés des Entreprises J.M. Bellavance Ltée. Il a été découvert que le demandeur était intervenu dans les dossiers d"ex-employés, se plaçant ainsi en situation de conflit d"intérêts.

[14]      En août 1996, des agents de CEIC, se présentèrent au domicile du demandeur, demandant de voir les livres de comptable des Entreprises J.M. Bellavance Ltée. Après une consultation téléphonique avec son avocat, le demandeur a refusé d"acquiescer à la demande puisque la Loi sur l"assurance-chômage prévoit que l"employeur doit remettre ces documents à sa place d"affaires et non à sa résidence. Les agents de la CEIC ont accepté cet argument, mais comme le demandeur n"exploite plus ses dépanneurs, ils ne pouvaient plus avoir accès aux livres à la place d"affaires. Les agents sont revenus en novembre 1996 avec un mandat de perquisition, mais n"ont pas trouvé les livres de paye. Le demandeur témoignera que les livres étaient sur la table, mais que les agents ne les ont pas vus. Le demandeur détruira ses livres en 1997 lors de son déménagement.

[15]      La suspension fut prolongée à plusieurs reprises et finalement le 27 novembre 1996, le sous-ministre adjoint, Monsieur Gladu, informait le demandeur qu"il approuvait son licenciement.

[16]      Le demandeur a déposé deux griefs suivant cette décision. Il contesta en premier lieu sa suspension sans solde durant l"enquête initiale et il réclame sa réintégration immédiate et le remboursement de son salaire perdu pendant la période initiale de suspension. Il contesta en deuxième lieu son congédiement en demandant également sa réintégration avec remboursement des salaires perdus et tous ses avantages sociaux.

LA DÉCISION DU COMMISSAIRE

[17]      Le commissaire était convaincu que l"article 6 du Code de conduite inclut la situation où un employé de la CEIC a une entreprise et a lui-même des employés. De plus, bien que les cas d"ex-conjoints, d"ex-amis, d"ex-associés, d"ex-locataires, d"ex-employés n"y soient pas mentionnés spécifiquement, ils n"en sont pas moins visés par ces exemples. Le commissaire note que le demandeur a admis qu"il n"aurait pas traité des dossiers de ses ex-employés pour donner suite à une demande de prestation. Il a également admis qu"il voyait le système 7/7 comme une largesse du système, un trou qu"il avait exploité.

[18]      Le commissaire conclut que le demandeur, en traitant des dossiers de ses anciens employés, s"est placé dans une situation où il pourrait préférer leurs intérêts ou même le sien plutôt que l"intérêt public.

[19]      Le commissaire a souligné que le demandeur s"est aussi placé en conflit d"intérêts en utilisant, pour son bénéfice, des renseignements obtenus dans l"exercice de ses fonctions et qui de façon générale, ne sont pas accessibles au public.

[20]      Le commissaire a fait remarquer que vu la gravité des gestes reprochés, le lien de confiance avec l"employeur a été gravement atteint. Le fait que le demandeur ne se soit pas expliqué à aucun moment avant le dernier palier de grief et à l"audience sur son grief n"a certes pas rétabli ce lien de confiance. De plus, le commissaire n"a pas trouvé crédible l"explication du demandeur, indiquant qu"il attendait d"être en appel pour s"expliquer et qu"il aurait détruit avant l"audience les livres de paye qui auraient pu étayer ses dires et montrer sa bonne foi à son employeur.

[21]      Le commissaire conclut que le congédiement n"était pas approprié. Il était toutefois convaincu qu"il serait contre-indiqué d"ordonner la réintégration du demandeur dans son ancien poste suite à une suspension importante dépassant les quinze mois, étant donné la gravité des fautes de conduite et que l"employeur a perdu toute confiance dans le fonctionnaire s"estimant lésé. Le climat de travail qui en résulterait serait malsain pour les deux.

[22]      Le commissaire a ordonné à l"employeur de verser au demandeur une indemnisation équivalant à dix mois de rémunération.

[23]      Le commissaire a donné droit au grief mais a refusé la réintégration.

LES PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR

[24]      Le demandeur argumente que les conclusions étaient tirées sur la base de faits erronés puisque la preuve de première instance n"a pas permis de démontrer le comportement fautif du demandeur.

[25]      Le demandeur soumet que le commissaire a agi de façon contraire à la loi puisque aucune preuve n"a permis d"établir que le demandeur avait contrevenu, d"une façon ou d"une autre, aux différentes règles ou directives de son employeur ou avait agi de façon illégale.

[26]      Le demandeur base essentiellement son argumentation sur la décision de la Cour fédérale dans Chalifoux c. Première nation de Driftpile, (1999), 169 F.T.R. 143.

[27]      Dans cette décision, l"honorable juge Campbell annule une décision arbitrale concernant la réintégration pour le motif que l"arbitre s"était abstenu de faire l"analyse requise.

[28]      Le demandeur suggère que l"arbitre a commis une erreur de droit en ne faisant pas l"analyse requise quant aux considérations liées à la réintégration et que la décision doit être annulée.

LES PRÉTENTIONS DE LA DÉFENDERESSE

[29]      La défenderesse prétend que les questions-clés dans cette affaire (c"est à dire la gravité des fautes de conduite du demandeur, l"état du lien de confiance entre l"employeur et l"employé, ainsi que l"impact d"une réintégration sur le climat de travail chez l"employeur) sont au coeur de l"expertise spécialisée de la Commission. Dans cette situation, la retenue judiciaire est de mise.

[30]      La défenderesse soumet que la décision du commissaire ne peut être décrite comme irrationnelle ou de toute évidence non conforme à la raison.

[31]      La défenderesse allègue que le commissaire conclut en pesant les éléments essentiels de la preuve devant lui. Ces éléments incluent d"une part, les longs états de service du demandeur, son bon dossier disciplinaire, un "laxisme" de la part de la défenderesse et, d"autre part, la gravité des gestes posés par le demandeur, le bris dans le lien de confiance et l"impact malsain d"une réintégration sur le climat de travail, et pour le demandeur et pour la défenderesse.

[32]      La défenderesse soumet que dans les circonstances, cette décision analyse de façon équilibrée les éléments de preuve parfois contradictoires pour tirer une conclusion non seulement raisonnable, mais correcte.

[33]      La défenderesse argumente que même s"il acceptait la suggestion du demandeur à l"effet que le commissaire a conclu que le licenciement n"était pas approprié dans les circonstances, le commissaire est entièrement dans son droit de déterminer que la réintégration du demandeur n"est pas appropriée dans les circonstances.

[34]      La défenderesse soumet que le commissaire se base sur une preuve suffisante vis-à-vis la gravité du comportement du demandeur et le bris du lien de confiance pour arriver à sa décision.

[35]      La défenderesse soumet que le refus du demandeur de s"expliquer dès la première fois qu"une irrégularité a été détectée, le fait que le demandeur n"ait jamais produit ses livres de paye, ainsi que le manque de crédibilité du demandeur dans ses explications devant le commissaire, minent de façon essentielle le lien de confiance entre le demandeur et la défenderesse.

[36]      La défenderesse soumet que l"indemnité accordée au demandeur est raisonnable, même généreuse, et ne devrait pas être qualifiée comme manifestement déraisonnable.

LA QUESTION EN LITIGE

[37]      Le commissaire a-t-il erré en droit et en faits en accordant les griefs du demandeur mais en rejetant sa réintégration, ainsi rendait-il une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il disposait?

ANALYSE

[38]      La norme de contrôle judiciaire d"une décision de la Commission des relations de travail a été soulevé dans l"arrêt Fraser c. Canada (Commission des relations de travail dans la Fonction publique), [1985] 2 R.C.S. 455, où le juge en chef a déclaré à la page 464:

     Il est essentiel que les tribunaux adoptent une attitude modérée à l"égard de la modification des décisions des tribunaux administratifs spécialisés, particulièrement dans le contexte des relations de travail, s"ils doivent respecter les intentions et les politiques du Parlement et des assemblées législatives des provinces qui les ont amenés à créer ces tribunaux.

[39]      La Cour suprême a également maintenu dans l"arrêt Canada (P.G.) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1991] 1 R.C.S. 614 aux pages 661 et 662:

     Il ressort que la Commission a pour raison d"être de résoudre les différends ouvriers-patronaux qui peuvent survenir entre le gouvernement fédéral et ses employés. Le domaine d"expertise de la Commission est dans le domaine des relations de travail entre le gouvernement fédéral et ses employés.

[...]

     La Commission a obtenu des pouvoirs étendus ainsi que la protection d"une clause privative. Ses membres sont expérimentés et compétents dans le domaine des relations de travail. Le législateur a établi clairement que les conflits de travail, comme ceux qui se présentent en l"espèce, devaient être réglés par la Commission. La Cour ne devrait pas s"empresser d"intervenir.

[40]      En expliquant la raison d"être d"une telle norme, la Cour suprême a indiqué dans l"arrêt Canada (P.G.) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941, aux pages 961 et 962:

     Il existe plusieurs raisons pour lesquelles les cours de justice devraient faire preuve de retenue à l"égard des décisions rendues par la Commission dans les limites de sa compétence. En premier lieu, le législateur a, au moyen de la clause privative contenue dans la loi constitutive de la Commission, indiqué que la décision de celle-ci est définitive. En second lieu, il faut reconnaître que la Commission est composée d"experts parmi lesquels se trouvent représentés et les employés et le patronat. Ceux-ci sont conscients de la complexité des relations du travail et de la nécessité de maintenir entre les parties un équilibre délicat au bénéfice de la société. Dans bien des cas, le mérite de ces experts leur aura valu la confiance des parties. Or, chaque fois qu"une cour de justice modifie une décision d"un tribunal administratif, il y a perte de confiance de la part non seulement des parties qui doivent comparaître devant la Commission, mais aussi de la part de la collectivité en général. Par ailleurs, l"un des plus grands avantages qu"offre la Commission est la rapidité avec laquelle elle peut tenir une audience et rendre une décision. Si les cours de justice se mettaient à intervenir régulièrement dans les décisions de la Commission, la partie victorieuse serait toujours celle qui était le mieux en mesure d"attendre et de supporter le coût d"un litige à n"en plus finir. Le système judiciaire lui-même connaîtrait des retards inacceptables en raison de l"augmentation de la charge de travail qu"amènerait toute tentative de contrôle systématique.
     [...]
     Il ne suffit pas que la décision de la Commission soit erronée aux yeux de la cour de justice; pour qu"elle soit manifestement déraisonnable, cette cour doit la juger clairement irrationnelle.

[41]      Il importe d"examiner dans ce contexte si le commissaire a rendu une décision manifestement déraisonnable.

[42]      La Cour d"appel fédérale a récemment expliqué dans Green c. Canada (Treasury Board) (27 mars 2000), A-542-97 (C.A.F.) :

     A decision may be patently unreasonable if, for example, it is unsupported by evidence or if it is based on unsound reasoning. However, a decision is not patently unreasonable merely because it is based on evidence that is weighed one way when it might have been weighed another way, or because the reasons given for the decision do not discuss every point that might be argued.

[43]      Je ne peux accepter l"argument que la décision serait manifestement déraisonnable puisque le commissaire n"aurait pas assez de preuve pour conclure au comportement fautif. Le commissaire est la personne la mieux placée en l"instance pour faire des conclusions de faits après avoir entendu la preuve. Dans son analyse détaillée, chaque élément est minutieusement examiné.

[44]      Après avoir examiné l"article 6 du Code de conduite, écouté les témoignages et consulté la jurisprudence, le commissaire était d"avis que le demandeur s"est placé dans une situation de conflit d"intérêts en traitant des dossiers de ses anciens employés. Le demandeur était dans une situation où il pouvait préférer leurs intérêts ou les siens plutôt que l"intérêt public. D"autant plus que le demandeur a même admis qu"il n"aurait pas traité des demandes de prestations.

[45]      Quant au système 7/7, il n"était pas un programme établi ni accessible au public. Le demandeur a profité de sa position contrairement au paragraphe 6(g) du Code de conduite de la Fonction publique qui précise:

     6.      Chaque employé doit se conformer aux principes suivants:
         g)      Il lui est interdit d"utiliser à son propre avantage ou bénéfice des renseignements obtenus dans l"exercice de ses fonctions officielles et qui, de façon générale, ne sont pas accessibles au public;


[46]      Le commissaire après avoir conclu à la faute du demandeur, a examiné les circonstances atténuantes. Il a noté le dossier disciplinaire vierge du demandeur, ses vingt-quatre années de services, le fait que le demandeur n"ait pas respecté ses obligations en omettant de mettre en place un programme de formation du Code de conduite de la Fonction publique, le fait que l"employeur n"ait pas fait de suivi auprès du demandeur, alors que ce dernier a fait une déclaration en 1984.

[47]      Le commissaire conclut à la page 34 de sa décision:

     J"arrive à la conclusion que les gestes posés par M. Bellavance lui auraient valu un licenciement n"eut été du laxisme de l"employeur et aussi des longs états de service du fonctionnaire sans un dossier disciplinaire. Même si le licenciement n"est pas approprié, étant donné la part du blâme que doit assumer l"employeur, il n"en demeure pas moins que M. Bellavance a commis de graves fautes.

[48]      Il est clair que le commissaire a conclu que le demandeur a commis des fautes graves, mais qu"elles ne justifiaient pas un licenciement. Cependant, vu la relation tendue entre les parties, le commissaire était convaincu que la réintégration du demandeur n"était pas appropriée. Cette conclusion était-elle manifestement déraisonnable?

[49]      La Cour d"appel fédérale a conclu dans l"arrêt Atomic Energy of Canada c. Sheikholeslami, [1998] 3 F.C. 349:

     It is clear to me that the conviction expressed by the Adjudicator to the effect that there had been a breakdown of the employment relationship was rooted in his expertise and I do not see how, in the absence of any possibility that it be improperly formed, such conviction could be seen as being irrational.
     [...]
     It is undisputable, however, on a mere reading of subsection 242(4) of the Code, that an adjudicator is given full discretion to order compensation in lieu of reinstatement, if, in his opinion, the relationship of trust between the parties could not be restored.

[50]      Le juge Létourneau a ajouté:

     It is true that reinstatement is not a right even after a finding of unjust dismissal, but, as I. Christie et al. properly point out, the exception to reinstatement should be applied very cautiously otherwise the risk exists that an unjustly dismissed employee will be penalized by losing his job. [...] Indeed, a finding of unjust dismissal is a finding that the work relationship should not have been severed in the first place. In such cases, the presumption is, in my view, clearly in favour of reinstatement unless there is clear evidence to the contrary.
     [...]
     Where an adjudicator's decision not to reinstate an employee wrongfully dismissed from his work is based solely on the attitude and conduct of the parties at the hearing, proper specifications ought to be given of these elements of the attitude and conduct of the parties which are the basis for such a far reaching decision. Otherwise, it is not only unfair, but it is an invitation to potential abuses as extraneous and irrelevant considerations can be taken into account and be the determinative factor in the decision, proper justification for the employee's attitude can be ignored, important considerations and circumstances can be ignored with impunity, not to mention the possibility for an employer so minded to put up an act in order to reap the benefits of an unjust or unlawful dismissal. An adjudicator has discretion not to order reinstatement of an employee, but he must exercise and be seen to exercise such discretion judicially.

[51]      À la lecture de la décision, il est évident que le commissaire a examiné les fautes reprochées, les lacunes de l"employeur, l"impact sur la relation de travail, mais surtout la conduite du demandeur lors des enquêtes. Le fait que le demandeur ne s"est expliqué qu"au dernier palier a lourdement affecté le lien de confiance entre les parties. D"autant plus que la crédibilité du demandeur en ce qui concerne les livres de paye était en jeu.

[52]      Dans le dossier Chalifoux, auquel le demandeur réfère, il semble que l"arbitre n"a pas fait l"analyse requise quant aux conséquences d"une possible réintégration et c"est sur cette base, que la décision a été renversée par l"honorable juge Campbell qui a considéré qu"il s"agissait d"une erreur de droit manifestement déraisonnable.

[53]      Dans le présent cas, il est clair que l"arbitre a fait l"analyse requise quant aux conséquences d"une possible réintégration et que le commissaire était convaincu que la réintégration n"était pas appropriée dans les circonstances. Il a alors utilisé sa discrétion en refusant la réintégration bien qu"en donnant droit à une indemnisation. Cette conclusion relevait de son expertise et le demandeur n"a pas démontré que cette conclusion du commissaire était manifestement déraisonnable.

[54]      La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée avec dépens.

                         Pierre Blais

                         Juge

MONTRÉAL, QUÉBEC

Le 15 août 2000

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.