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Date : 20210125


Dossier : IMM‑4540‑19

Référence : 2021 CF 83

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 25 janvier 2021

En présence de madame la juge Fuhrer

ENTRE :

OGUZ GURSES

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le demandeur, Oguz Gurses, est un citoyen de la Turquie. Il est arrivé au Canada en 2017, sans sa famille, et il a demandé l’asile. M. Gurses affirme avoir une crainte d’être persécuté en Turquie, notamment d’être arrêté par le gouvernement turc, interrogé et battu pour ses opinions politiques gauchistes et en tant que partisan ou membre perçu de l’organisation terroriste fethullahiste [FETO]. M. Gurses affirme que cette perception du gouvernement vient du fait qu’il traitait avec « Ismail » dans l’industrie du textile, ce dernier étant soupçonné d’entretenir des liens avec la FETO.

[2] M. Gurses dit également craindre le Parti de la justice et du développement [AKP], qui le percevait comme un partisan de la FETO et l’aurait menacé pour cette raison. Il soutient par ailleurs que l’AKP le perçoit ainsi parce qu’il avait notamment placardé des affiches de campagne dans les fenêtres de son lieu de travail. Il dit n’être membre d’aucun groupe ou parti, même s’il appuie la coalition kurde de gauche.

[3] Le 24 juin 2019, la Section d’appel des réfugiés [SAR] a confirmé la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés [SPR], le 7 mars 2018, à l’effet de rejeter la demande d’asile de M. Gurses au motif qu’il n’était pas crédible et, par conséquent, qu’il ne courait aucun risque de préjudice de la part du gouvernement turc ou de partisans de l’AKP en Turquie. Par conséquent, la SAR a confirmé la décision de la SPR selon laquelle M. Gurses n’est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger. M. Gurses demande maintenant le contrôle judiciaire de la décision de la SAR. Après avoir examiné les questions soulevées par M. Gurses, je conclus que la seule question à trancher est celle du caractère raisonnable de la décision de la SAR.

[4] La norme de contrôle présumée est celle de la décision raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 10. Pour éviter l’intervention de la cour, la décision doit posséder les caractéristiques d'une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l'intelligibilité : Vavilov, au para 99. Une décision peut être déraisonnable si le décideur s'est mépris sur la preuve qui lui a été soumise : Vavilov, précité, aux para 125-126. Il incombe à la partie qui conteste la décision d'en démontrer le caractère déraisonnable : Vavilov, au para 100.

[5] Après avoir examiné le dossier et tenu compte des observations écrites et orales des parties, je conclus que l’évaluation de la crédibilité par la SAR est insoutenable, la SAR ayant écarté de façon déraisonnable la preuve psychiatrique liée aux troubles de mémoire dont souffre le demandeur par suite de ses expériences traumatisantes, et ayant traité de manière déraisonnable certaines factures. Par ailleurs, je juge que la SAR n’a pas analysé la preuve directe corroborant les détentions de M. Gurses. Par conséquent, j’accueille la demande de contrôle judiciaire pour les motifs exposés plus en détail ci‑dessous.

II. Analyse

A. (i) Évaluation psychiatrique

[6] J’estime que la SAR a très mal apprécié l’évaluation psychiatrique, ce qui rend la décision déraisonnable : Vavilov, précité, aux para 125-126; voir également Isangulov c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 1197 au para 13. La prudence est de mise lorsqu’un lien peut être établi entre les incohérences ou les omissions relevées par le décideur et les problèmes cognitifs d’une personne signalés dans un rapport médical ou psychiatrique : Joseph c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 393 au para 33. Je conclus que la SAR a déraisonnablement omis de faire preuve d’une telle prudence en l’espèce.

[7] M. Gurses soutient qu’il concluait cinquante pour cent de ses affaires avec Ismail et qu’il s’entretenait avec lui ou un de ses employés périodiquement, y compris pour le lunch et le souper. Toutefois, durant l’audience devant la SPR, le demandeur ne pouvait pas se souvenir du nom de l’entreprise d’Ismail et a expliqué qu’il avait du mal à « se rappeler » certaines choses. Sur la base de ce fait, et de l’attente selon laquelle M. Gurses devrait savoir instinctivement le nom de l’entreprise avec laquelle il faisait apparemment beaucoup affaire plutôt qu’en faisant appel à sa mémoire, la SAR a jugé que l’incapacité de M. Gurses à se souvenir du nom de l’entreprise d’Ismail minait sa crédibilité.

[8] La SAR a accepté le rapport psychiatrique ainsi que le diagnostic de trouble de stress post-traumatique [TSPT] grave et chronique assorti d’une variété de symptômes tels que des problèmes de mémoire et de concentration ainsi que des souvenirs désorganisés occasionnant une incapacité à se rappeler de dates ou de la chronologie d’événements passés. La psychiatre y explique que M. Gurses a de la difficulté à se rappeler la date de son arrivée au Canada et le nom du somnifère qu’il prenait en Turquie, et que les troubles de mémoire sont fréquents chez les personnes traumatisées. Elle est d’avis que le témoignage de M. Gurses à l’audience doit être évalué sous l’angle du traumatisme et recommande plusieurs mesures d’accommodement à prendre durant celle‑ci.

[9] Toutefois, la SAR a jugé que le rapport psychiatrique ne démontrait pas clairement ce à quoi il fallait s’attendre quant au témoignage de M. Gurses. En effet, ce dernier s’est souvenu de nombreux événements de son passé durant l’audience. Selon la SAR, le rapport ne rendait pas compte adéquatement de l’incapacité de M. Gurses à se souvenir de certaines informations, comme le nom de l’entreprise de son principal client et le nombre de fois où il a été arrêté, ou encore des incohérences dans son témoignage quant à la manière dont son épouse a été traitée par la police après qu’il a fui la Turquie. Par conséquent, la SAR a accordé peu d’importance au rapport, précisant que ce genre de document ne servait pas à prouver la persécution dont M. Gurses aurait été victime, non plus qu’il ne démontrait que ses allégations avaient été vérifiées de manière indépendante.

[10] Il est difficile de comprendre que la SAR accepte le diagnostic de TSPT grave et chronique posé par la psychiatre et les symptômes qui en découlent, soit les pertes de mémoire, la difficulté à se concentrer, et la désorganisation mémorielle occasionnant une incapacité à se souvenir de dates ou de la chronologie d’événements passés, mais qu’elle rejette essentiellement la demande de la psychiatre d’évaluer le témoignage de M. Gurses sous l’angle du traumatisme. En particulier, je juge déraisonnable que la SAR semble s’attendre à ce que la psychiatre, en plus de fournir des indications dans son rapport, anticipe la trajectoire de l’audience, y compris le moment et la manière dont le TSPT teinterait le témoignage de M. Gurses.

[11] En outre, le rapport n’avait pas pour objet de prouver les allégations de persécution ni de vérifier les affirmations de M. Gurses, mais plutôt d’expliquer pourquoi il risquait d’avoir de la difficulté à se rappeler certaines informations durant l’audience : Mico c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 964 au para 49. Le fait que M. Gurses puisse se souvenir d’une grande quantité d’informations n’empêche pas que sa mémoire puisse lui faire défaut à l’égard d’autres détails, et ce, quelle que soit leur importance. Dans son évaluation, la psychiatre a fourni des exemples d’oublis importants (date d’arrivée au Canada) et non importants (nom du somnifère prescrit en Turquie) constatés chez M. Gurses.

[12] Selon moi, puisque la SAR n’a pas tenu compte du rapport de la psychiatre, et ce, malgré l’acceptation du diagnostic de TSPT, il était déraisonnable pour elle de ne pas se demander si le TSPT grave et chronique, plutôt que le rapport, pourrait expliquer les lacunes et les incohérences décelées dans la preuve de M. Gurses, y compris son témoignage. Autrement dit, il est déraisonnable de s’attendre à ce que le rapport réponde à toutes les lacunes et incohérences susceptibles de survenir. Ayant accepté le diagnostic, la SAR devait donc tenir compte du TSPT dans son évaluation des lacunes et des incohérences de M. Gurses dans son témoignage, comme le nom de l’entreprise d’Ismail et le nombre d’arrestations dont il a fait l’objet ainsi que le moment où celles‑ci ont eu lieu. Elle ne l’a pas fait.

B. (ii) Factures

[13] Des factures de l’entreprise de M. Gurses destinées à l’entreprise d’Ismail font partie de la preuve documentaire. Je trouve incompréhensible que la SAR ait interprété l’inexactitude perçue des factures comme un manque d’authenticité. Je conviens avec le défendeur que l’équité procédurale n’est pas en cause en ce qui concerne les factures. Néanmoins, je conviens avec M. Gurses que l’analyse de la SAR est erronée parce qu’elle se fonde sur le point de vue spéculatif ou non étayé de ce à quoi devrait ressembler une facture.

[14] La SAR a constaté que certaines parties des factures, comme l’échéance des paiements et les intérêts à imputer aux montants en souffrance, n’étaient pas remplies, et qu’il n’y avait ni description ni précision sur la couleur ou sur l’imprimé du tissu acheté. Toutefois, la SAR a pris acte du témoignage de M. Gurses à l’audience selon lequel il rencontrait Ismail ou un de ses employés, que l’entreprise d’Ismail commandait des échantillons de tous les nouveaux tissus chaque saison, que les commandes étaient passées à partir des échantillons, et qu’il y avait une confirmation des tissus sélectionnés.

[15] Toutefois, la SAR a trouvé « anormal » que la description, la couleur et l’imprimé du tissu acheté ne figurent pas sur la facture; selon elle, le tissu commandé devrait être inscrit sur la facture. Je juge cela déraisonnable au vu de l’acceptation, par la SAR, de la conclusion selon laquelle « il y avait une confirmation des tissus sélectionnés » ou commandés. Autrement dit, la SAR a omis d’expliquer pourquoi la confirmation de la commande ne suffisait pas à compenser l’absence de certaines informations sur les factures. Il est donc inconcevable, à mon avis, que l’authenticité des factures ait été remise en question du fait de l’absence de telles informations, sans autre élément de preuve à l’appui, ce qui a grandement nui à la crédibilité de M. Gurses. Par ailleurs, l’attention portée par la SAR au nom de l’entreprise inscrit sur la facture (Taha Clothing Industry) par rapport au nom mentionné par M. Gurses (Taha Textiles) tient de l’examen « à la loupe » des éléments présentés : Lubana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 116 au para 11. De plus, la SAR n’a pas tenu compte du fait que le TSPT pouvait être en cause en ce qui concerne l’incohérence du nom, celle-ci étant pour le moins mineure.

C. (iii) Preuve directe corroborant les détentions

[16] La SPR n’était pas du tout convaincue que M. Gurses avait été arrêté. J’estime que la décision par laquelle la SAR a confirmé la conclusion de la SPR sur cette question était déraisonnable parce qu’elle n’était pas fondée sur les éléments de preuve dont la SAR disposait : Vavilov, précité, au para 126. La preuve documentaire de M. Gurses comprend une lettre de son avocat en Turquie, qui explique avoir obtenu la remise en liberté de M. Gurses à deux reprises. La SAR mentionne n’y avoir accordé que peu d’importance, voire aucune, puisqu’elle a jugé que la crédibilité de M. Gurses était gravement entachée du fait qu’il ne se souvenait pas du nom de l’entreprise d’Ismail et que les factures produites n’étaient pas authentiques. La SAR n’a donc pas tenu compte de la lettre de l’avocat dans son analyse des arrestations alléguées, et a simplement conclu que le rapport psychiatrique ne tenait pas compte adéquatement des incohérences de M. Gurses quant au nombre et au moment de ses arrestations. J’ai déjà expliqué pourquoi je considère que cette conclusion au sujet du rapport de la psychiatre est erronée. Puisque la SAR a reconnu que les arrestations de M. Gurses sont un élément central de sa plainte, je conclus par ailleurs qu’il n’était pas justifié dans les circonstances d’écarter la lettre de l’avocat.

III. Conclusion

[17] Pour tous les motifs qui ont été exposés, j’accueille la présente demande de contrôle judiciaire. La décision de la SAR est donc annulée et l’affaire doit être renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle décision. Les deux parties, en plus de moi-même, conviennent que l’affaire ne soulève aucune question grave de portée générale à certifier.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-4540-19

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

  2. La décision de la Section d’appel des réfugiés du 24 juin 2019 est annulée et la présente affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle décision.

  3. Il n’y a aucune question à certifier.

  4. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Janet M. Fuhrer »

Juge

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.


DISPOSITIONS APPLICABLES

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27

Immigration and Refugee Protection Act, SC 2001, c 27

Définition de réfugié

Convention refugee

96 A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96 A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

Personne à protéger

Person in need of protection

97 (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97 (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

[…]

[…]

Éléments de preuve admissibles

Evidence that may be presented

[…]

[…]

110 (4) Dans le cadre de l’appel, la personne en cause ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet de sa demande ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’elle n’aurait pas normalement présentés, dans les circonstances, au moment du rejet.

110 (4) On appeal, the person who is the subject of the appeal may present only evidence that arose after the rejection of their claim or that was not reasonably available, or that the person could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection.

[…]

[…]

Audience

Hearing

(6) La section peut tenir une audience si elle estime qu’il existe des éléments de preuve documentaire visés au paragraphe (3) qui, à la fois :

(6) The Refugee Appeal Division may hold a hearing if, in its opinion, there is documentary evidence referred to in subsection (3)

a) soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité de la personne en cause;

(a) that raises a serious issue with respect to the credibility of the person who is the subject of the appeal;

b) sont essentiels pour la prise de la décision relative à la demande d’asile;

(b) that is central to the decision with respect to the refugee protection claim; and

c) à supposer qu’ils soient admis, justifieraient que la demande d’asile soit accordée ou refusée, selon le cas.

(c) that, if accepted, would justify allowing or rejecting the refugee protection claim.


 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4540-19

 

INTITULÉ :

OGUZ GURSES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (Ontario) (par vidéoconférence)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 10 août 2020

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

la juge FUHRER

 

DATE DES MOTIFS :

le 25 janvier 2021

 

COMPARUTIONS :

Marcia Pritzker Schmitt

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Veronica Cham

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Marcia Pritzker Schmitt

Pritzker Schmitt

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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